Voilà la deuxième partie, bonne lecture
Partie 2 : Clara
Lya s’éloigne vers ce garçon qui malgré son apparence me laisse une étrange impression. Comme un arrière-goût sur la langue. Il est trop soudainement proche de ma sœur.
C’est peut-être parce que je refuse de la voir grandir. Elle déteste le surnom que je lui donne mais je crois que je ne peux juste pas m’en empêcher.
Je la regarde s’approcher du garçon et sourire quand il lui dit quelque chose. Il se lève et pose une main sur son dos pour l’entraîner dans l’eau. Un frisson me parcourt. De colère. De quel droit se permet-il de la toucher ? Je me retiens de réagir. Lya n’apprécierait pas. J’oublie souvent qu’elle a dix-huit ans et qu’elle est capable de se débrouiller seule.
Un coup d’œil à ma mère m’indique qu’elle ne se sent pas concernée le moins du monde par le flirt de sa fille avec un inconnu. Elle a toujours été comme ça.
Quant à mon père, n’en parlons pas. Il est devenu aveugle à toute relation amoureuse depuis qu’il a découvert sa femme dans les bras d’un autre. Entre eux, il n’y a plus rien mais ils restent ensemble pour « faire bonne figure ». Cela fait de la peine de voir qu’après tout ce temps il ne lui parle toujours pas.
Je me souviens d’une fois, Lya avait onze ans et était au collège.
Les cours s’étaient terminés plus tôt pour moi, j’en avais profité pour traîner dans les boutiques.
« Le vent me sifflait aux oreilles. Je serrais ma fine veste autour de moi afin de me donner un semblant de chaleur. Le ciel était gris, il allait sûrement pleuvoir dans la soirée. A cette période de l’année, la mer était particulièrement agitée.
Les vagues s’écrasaient sur la plage et le temps semblait se suspendre lorsque l’écume volait de tous les côtés. Je m’étais arrêtée quelques minutes, fascinée par ce spectacle auquel j’étais pourtant habituée.
J’avais traîné entre les différentes boutiques où s’exposaient en vitrine des mannequins en plastique blanc recouvert de vêtement. Jusqu’à ce que je j’entende la voix de ma mère. Surprise, je m’étais avancée vers une boutique de chapeaux où elle allait souvent.
L’intérieur était recouvert de chapeaux. Je me souviens particulièrement d’un chapeau noir à rayure accroché de travers sur la caisse enregistreuse. Il était tout sauf attirant.
Ma mère était assise derrière le comptoir et gloussait. Derrière la porte qui avait été fermée à clé, je la fixais, une main sur la vitre.
À côté d’elle, le vendeur, une mèche devant le visage, embrassait l’épaule, de -je dois l’admettre- son amante.
Elle avait posé une main sur l’entrejambe de l’homme et j’avoue que cela m’avait mis très mal à l’aise. Elle avait laissé tomber sa tête en arrière et il l’avait embrassé à pleine bouche. J’en eu la nausée. Voir ma mère avec cet homme… Je me détournais.
J’étais rentrée à la maison d’un pas chancelant, renonçant à faire les magasins. Je m’étais enfermée dans ma chambre, prétextant du travail.
Je ne pus malheureusement pas éviter le repas de famille. Ma mère était d’excellente humeur et servait les raviolis vivement en sifflotant.
Elle interrogea Lya sur sa journée qui lui raconta quelques broutilles sur ses amies. Une dispute, quelques ragots dans un sourire malicieux. Quand ma mère se tourna vers moi, je n’osais pas la regarder en face. Je baissais donc les yeux vers le fond de mon assiette à fleurs bleues tachées de sauce tomate et continuais de manger.
-Ta journée s’est bien passée ?
Silence. Elle ne se découragea pas pour autant.
-Tu as fini plus tôt, apparemment, aujourd’hui, c’est bien ça ? Qu’est-ce que tu as fait de ton temps libre ?
Grand sourire éclatant de sa part.
J’ai levé mes yeux bleus sur elle. Glacials. Je tentais de tordre mes lèvres en un sourire mais le résultat ne fut pas convainquant : je n’obtiens qu’une grimace.
-Il me semble que je pourrais te retourner la question, non ?
Je la regardais dans les yeux, et elle comprit.
Je lâchais bruyamment ma fourchette dans mon assiette et quittais la table en laissant les pieds de la chaise racler le sol.
Laissant le regard interrogatif de mon père sur ses bras qui enlaçaient quelques heures plus tôt, un autre homme. »
Je m’allonge sur ma serviette. Le rire de ma sœur résonne, suivit d’un bruit d’éclaboussure. Je ferme les yeux derrière mes lunettes de soleil.
Les dernières paroles de Lya m’avaient blessée. Elle pense peut-être que je suis idiote. Suffisamment niaise pour ne pas voir les regards des garçons sur moi, pour ignorer ce qu’ils veulent.
Contrairement à ce qu’elle croit, j’ai déjà eu un copain. Un imbécile du nom de Joann. Roux, couvert de bouton et de taches de rousseur, le regard vide, mort presque. Mes amies m’avaient poussé à accepter sa demande et j’avais fini par céder.
Au bout de quelques jours, je m’aperçus qu’il ne sortait avec moi que dans l’unique but que de m’ajouter à son tableau de chasse. Quel idiot.
C’était lors de ma première année de Fac. Depuis, je suis méfiante envers ces garçons qui me lorgnent du coin de l’œil. Comme des toutous devant une friandise.
Je suis surement trop méfiante. Sous mes cils, je regarde une dernière fois ma sœur. Elle essaye de le noyer mais il l’attrape par les jambes et bascule en l’entrainant dans l’eau. Ses cheveux blonds ont été détachés et forment une auréole dorée au-dessus d’elle.
Sa tête ressort de l’eau et elle éclate de rire.
Oui, je suis sûrement beaucoup trop méfiante. Je ferme les yeux sous la douce caresse du soleil, presque rassurée.
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du coup tant mieux si ça te plait 