Je vous présente ici mes deux One-Shot sur Hunger Games, que j'ai écrits pour des concours qui n'ont pas eu lieu. Le premier s'intitule "Le souffle de la vie" et le second, "Les derniers Jeux de la Faim".
J'espère que vous aimerez, laissez un commentaire, merci.
Sujet du concours 1: Et si c'était Prim qui était partie aux Hunger Games ...
Le souffle de la vie.
Effie pioche la petite feuille qui décide de mon avenir. Comment deux mots peuvent-ils être aussi cruels ? Il suffit de deux mots pour que ma vie change pour toujours.
- Primerose Everdeen !
Le ton est enjoué, pourtant, personne ne songe à rire. Les hommes, femmes, enfants, me regardent avec pitié, soulagement, peur, tristesse. Je rabats ma “queue de canard”, comme dit Katniss, dans ma jupe. Je m’avance sans peine jusqu’à l’estrade, dans la foule qui s’ouvre devant moi. Les Pacificateurs m’encadrent. Arrivée à la droite d’Effie, je me tiens raide, droite. Je glisse un regard vers ma soeur, qui cache ses larmes. Je ne vois même pas Effie piocher le second nom. Je ne fais que l’entendre. L’amour secret de ma soeurette, Peeta Mellark.
Nous nous serrons la main, et il me lance un regard triste, mais encourageant. Je lui rends un petit sourire. Très mince.
Dans la mairie, ma mère et Kat me serrent dans leurs bras. Nous n’échangeons pas de mots. C’est un adieu silencieux. A quoi bon parler, en fin de compte ? Nous savons toutes trois que je n’ai aucune chance.
Dans le train, je reste silencieuse. Je m’émerveille certes devant la richesse du Capitole, mais je ne dis rien d’autre que ce qui est nécessaire.
Les heures de torture passées avec mon équipe de préparation sont … des heures de torture. Je m’éveille enfin de ma transe lorsque je rencontre mon styliste.
Cinna n’est pas comme les autres. Il est très sobre dans sa façon de s’habiller (noir, noir et noir), ne porte qu’une touche d’eye-liner doré en guise de maquillage, et semble bien plus agréable que tous les autres habitants de ce “district” réunis. Il est franc, direct, et très souriant, ce qui me met à l’aise dès le début. Il me montre mon costume, une tenue noire, pas très attirante au premier regard, mais qui s’enflamme sur pression d’un bouton. Je ne peux m’empêcher de retenir une exclamation admirative. Je ne sais pas encore que je serai désignée comme “l’enfant du feu”.
Le reste de mon séjour au Capitole se passe comme dans un rêve. Je ne vois pas le temps filer, que déjà, on m’implante mon mouchard, et je me retrouve sur ma plateforme. J’hésite sur la marche à suivre. Il faut dire qu’Haymitch n’a pas donné de surplus d’informations et de conseils, bien au contraire. Je décide finalement de tenter au moins quelque chose. A la fin du décompte, je prends mon élan, et je file vers la Corne. Je m’arrête à mi-chemin pour prendre un sac à dos, et je repars à fond de train vers la plaine. Je ne suis pas une bonne coureuse, mais la peur me donne des ailes. Je bifurque vers la forêt pour trouver un abri. Je sais que je ne tiendrai pas longtemps. Autant en profiter.
J’escalade un grand chêne, et me perche à mi hauteur de son tronc, soit à une dizaine de mètres du sol. Je pense à Katniss. Qu’est-ce qu’elle aurait fait à ma place ? Faire l’inventaire de ses possessions. Son souvenir me hante, mais je le chasse d’un revers de main pour me concentrer sur ma survie. Elle est source d’inspiration, cette grande soeur, mais il est temps que je me débrouille seule.
Un sac de couchage, deux flasques vides, un flacon d’iode, des lambeaux de viande séchée, des biscuits aux fruits secs, une toile imperméable, une pommade médicinale et des allumettes. Le sac en lui-même a une couleur affreuse. Un rose bonbon digne des cheveux d’Effie. Le contenu par contre est encourageant. Je pourrai tenir au moins deux jours, si je ne croise personne.
Bon, et maintenant ?
Je me creuse la tête en vain, puis je remballe mon matériel. En prenant l’une des gourdes vides, je réalise que j’ai soif. Très soif.
Un petit froissement dans le feuillage me fait sursauter. Je n’ai pas l’oreille de Katniss, ni son talent dans les bois, mais je peux au moins entendre ça. Il provient d’un arbre juste à côté. Je remarque une tache noire qui ne devrait pas s’y trouver. Je sifflotte légèrement, juste de quoi attirer l’attention de quelqu’un aux aguets, et assez pour ne pas se faire repérer. Une gamine de mon âge descend de son perchoir et vient vers moi. Je fais appel à ma mémoire. District 11, Rue, tribut féminin avec Thresh.
Elle se perche sur ma branche, me fait signe de rester silencieuse, et observe les environs. Puis, elle hoche la tête, en montrant ainsi qu’il n’y a personne autour de nous. J’entame:
- On se débrouillera mieux à deux, non ?
- Oui, sans doute. Je pense que …
Elle n’a pas le temps de finir. Un pieu siffle, surgissant de nulle part, se plante en travers de son ventre. Elle tombe. Les dix mètres, plus le fait qu’elle doit être assommée par la douleur, font qu’elle ne peut pas se réceptionner correctement. Sa tête précède légèrement son dos à l’impact, et un craquement sinistre retentit. Je retiens un cri, horrifiée. Je tente de faire face à l’acte, pragmatique. Elle n’a pas dû souffrir longtemps. C’est positif pour elle. J’entends le tueur qui récupère son arme, puis qui s’éloigne, en silence, sans prise de conscience visiblement. C’est un carrière, je ne sais plus lequel. Je décide de rendre un dernier hommage à la filette du onze. Je descends doucement de l’arbre, sans faire de bruit. Je retire avec dégoût la branche de chêne taillée qui fait une grosse tache rouge sur son sternum. Je remets son corps dans une position décente, qui ressemble à celle du sommeil. J’arrange ses cheveux en une auréole autour de sa tête.
Un autre sifflement se fait entendre, dans mon dos. Je me retrouve plaquée au sol par un filet lesté de plomb. Je hurle en me débattant, totalement impuissante. Un garçon au pas alerte s’approche, et ricane, moqueur.
- J’ai cru que tu ne descendrais jamais de cet arbre.
C’est celui du deux, Cato. Enfin je crois.
Il se penche vers moi, caresse presque ma joue.
- Pauvre petite chose … Tu n’aurais jamais dû quitter ton petit district perdu …
J’arrive à lui mordre la main jusqu’au sang. La réplique ne se fait pas attendre.
La douleur de mon ventre me fait crier. Les larmes débordent, tellement ça fait mal. Cato tourne l’épée, la remue, me faisant souffrir bien plus que nécessaire. Il s’amuse à explorer les différentes parties de mon corps, cherchant l’endroit où ça fera le plus mal. Il enlève enfin son arme, me délaissant dans un état d’hébétude proche de l’évanouissement, qui me rend les idées plus claires, étrangement.
Je n’ai jamais eu de chance.
Au grand jamais.
Même si j’avais espéré.
Il n’y a aucune façon de remédier à son destin.
Je sens la liberté m’envahir. Je me prends à penser à la chanson de la vallée.
Allonge toi, ferme tes yeux fatigués
Quand tu les ouvriras, le soleil sera levé
Je ferme les yeux. Cela dit, je ne les rouvre plus. Le soleil s’est levé, dans le fond de mon esprit. Mon âme s’envole, alors que mon corps tombe. Le dernier souffle de la vie me quitte, ma résistance fond. Je vois mon corps, étendu au sol, cloué sous le filet.
Je le vois, et puis, plus rien.
Katniss, ne me pleure pas.
Sujet du concours 2: Racontez les Hunger Games d'un district quelconque.
Les Derniers Jeux de la Faim.
Lorsque les Districts ont gagné, lorsque le Capitole a perdu, une dernière arène a été conçue. Pour les enfants du Capitole cette fois ci.
Je fais partie des vingt-quatre concurents choisis. Je n’ai jamais touché à une arme autre qu’un couteau, et encore, il n’était guère dangeureux. Je suis une novice, et je risque de me faire tuer d’ici quelques jours à peine.
Mon nom vien d’être tiré, le dernier de la catégorie des filles. Je suis sur l’estrade, avec les vingt-deux autres. Nous nous dévisageons déjà en chiens de faïence. Je retiens mes larmes, en pensant à ma mère, morte dans une explosion. Mes cheveux violets s’agitent dans le vent frais de la matinée. Le dernier garçon vient d’être tiré. Je le connais, il s’appelle Jasper, et il a le même âge que moi, c’est à dire quatorze ans. Devant moi, l’héroïne de la victoire, le Geai Moqueur, Katniss Everdeen, nous demande de nous mettre deux par deux et de nous serrer la main, comme elle l’a fait lors de la parade des tributs, il y a presque trois ans, avec Peeta Mellark. On nous conduit en voiture dans le centre d’entraînement. Je me suis mise avec Jasper, mais nous ne parlons pas. Chacun rumine ses pensées. Le silence est pesant, mais personne n’ose le rompre.
A notre arrivée, on nous mène au dernier étage, où se situent nos chambres. Je m’installe sur le lit sans grand enthousiasme. Une rebelle aux cheveux blonds vient nous chercher pour le dîner. Elle se présente comme notre responsable pendant la durée des Jeux. Un autre arrive, presque ausstôt après elle. Ce sera notre mentor. C’est un grand brun, comme Jaz (Jasper), aux yeux noirs ébène. La responsable parle vivement, mais je l’écoute à peine. Lorsqu’il est question d’une durée d’entraînement prolongée de deux jours pour que nous puissions nous habituer au maniement des armes, je redresse la tête. Je compte apprendre à me servir d’un arc, comme Katniss, mon héroïne.
Le lendemain, une équipe de préparation du Capitole vient s’occupper de nous. La parade, le soir même, est moyennement réussie. Mon styliste a décidé de me faire ressembler à Katniss. Il m’a donc habillée comme telle. Mes cheveux tressés, une robe noire avec des ailes de même couleur sur le dos, je ne pense pas avoir convaincu grand monde. A la sortie, je comprends que je vais devoir, si je veux avoir un sponsor, me concentrer sur les évaluations lors de l’entraînement. Totalement absorbée par cette idée, je ne vois pas le temps passer. Je m’endors d’un sommeil sans rêve sans savoir quand et comment je suis arrivée dans mon lit.
Le jour suivant, je prends un petit déjeuner rapide, avant de m’habiller d’une combinaison moulante grise, et je descends, avec Jasper, dans la salle d’entraînement. J’aperçois tout de suite les Hauts Juges, sur une plateforme surélevée. Contrairement à ceux du Capitole, ils nous observent déjà attentivement. Leurs regards ne nous lâchent pas pendant toute la journée. Je me dirige automatiquement vers le stand de tir à l’arc. Sous le regard attentif de l’instructeur, je prends l’une des armes, qui me semble adaptée à ma taille, et un carquois. Je me place sur la ligne de tir. J’encoche ma flèche. J’arrête de penser, pour me souvenir. Je me souviens des vidéos que j’ai vues sur Katniss. Comment elle bande son arc, comment elle vise, comment elle tire. Une totale détermination et un calme souverain m’envahissent. J’amène la corde contre ma joue, je place ma flèche, et je lâche la corde. J’entends la flèche siffler, je la vois s’enfoncer dans la cible avec un bruit mat, à environ un centimètre du centre. Les autres enfants du Capitole m’observent avec des yeux ronds. Katniss se redresse, parmi les juges, avec son arc à elle, que je vois dépasser sous la table.
Je recommence à réfléchir. J’anayse ce qui vient de se passer. Est-ce la chance du débutant ? Je tiens à le vérifier.
Je prends une autre flèche. Je l’encoche, comme la précédente. De nouveau, les images m’assaillent. Je me laisse dominer. Je ferme les yeux. Je bande l’arc. Je le tends au maximum. Je rouvre les yeux. Vise. Lâche. Tire.
Au centre. La flèche traverse la cible, totalement, exactement au milieu. Un bruit sec retentit, lorsqu’elle tombe sur le sol de pierre.
Les autres tributs se détournent. Je m’appuie contre un mur, la tête me tourne. Que m’arrive-t-il ? Je n’ai jamais tenu une arme de ma vie, et j’arrive à viser ainsi …
Lorsque j’arrive à me reprendre, dix minutes ont passé. Je délaisse le stand de tir, pour aller vers celui de la survie en milieu hostile. J’apprends à y reconnaître les baies toxiques des commestibles, à allumer un feu, à faire des harpons, des crochets, des pièges de toutes sortes. Ma mémoire photographique enregistre tout. Je passe en spectatrice au stand du lancer de couteaux, alors que l’après-midi est déjà bien avancé. J’observe et j’apprends, sans rien faire. Je laisserai la nuit imprimer les mouvements dans mon corps.
Le soir, pendant le dîner, je cache un couteau dans ma manche. Dans ma chambre, je me place en face du lit. J’oublie le monde extérieur, les caméras qui me filment, ma mort prochaine, et je laisse mon corps agir. Je n’ai qu’un seul couteau, et j’ai décidé de ne faire qu’un essai. Je vise, en pensée, le cadre photo au dessus du lit, qui montre Katniss dans sa robe de Geai Moqueur.
Je me ravise au dernier moment. Cette image est un peu trop précieuse pour moi. Mutiler mon idole serait un crime. Je finis par choisir la porte de l’armoire, plus précisément la poignée. Je redeviens aveugle, je tournoie sur moi-même, me déplace latéralement, me baisse, me fends, et finalement, je réouvre les yeux une seconde, lance mon poignet avec un mouvement sec, rapide et précis. J’entends la lame vibrer au moment de l’impact. Je compte dix secondes d’attente, et je regarde mon oeuvre. Le couteau s’est planté jusqu’à la garde au milieu de la poignée. Je souris, satisfaite, me change, et m’endors en quelques secondes.
Les jours suivants, tous les stands se multiplient devant mes yeux. Je ne touche plus à rien, me contente d’observer. Les autres tributs essaient le lancer de javelot, le maniement de l’épée, de la hache, … Moi, je regarde. Je mémorise leurs points forts et faibles. J’apprends. Et le soir, dans la mesure du possible, je révise.
Une dernière décision s’impose à moi, un matin, cinq jours avant le début des jeux. Il me reste deux jours d’entraînement, un jour d’évaluation, un d’interview, et le suivant, le gong retentira pour moi, comme je l’ai entendu retentir pour tant d’autres tributs avant.
C’est ainsi que ce matin, au lieu d’aller à l’entraînement, comme je le devrais, je monte sur la terrasse, dans ma combinaison habituelle, en baskets. Je commence à faire des tours. Les premières foulées sont difficiles, après tant d’années d’inactivité. Puis, elles se rallongent, s’accélèrent, sans me fatiguer. Je tourne en rond sans m’arrêter pendant plus de deux heures, puis je prends un peu d’eau dans la bouteille que j’ai emportée, sans toutefois ressentir la faim. Je reprends au rythme où j’en étais, pendant plusieurs heures d’affilée. Je saute le déjeuner, pour m’habituer à la faim, et je ne rentre qu’après le dîner.
Le lendemain, notre responsable nous informe que nous pouvons soit nous rendre à l’entraînement (avec un regard appuyé vers moi), soit aller voir leurs stylistes. Je choisis la deuxième option. Mon styliste, Darren, est un novice, cela dit, il a emprunté quelques idées au feu Cinna. Mais au lieu de jouer avec le feu, il joue avec l’eau, pour mon interview. C’est ainsi que je me retrouve dans une robe bleue eau à dos échancré, froufrous et volants de toutes sortes. Pendant toute la matinée, mon équipe arrange mon corps, me coiffe, me lave, me pomponne, jusqu’à ce que ça en devienne douloureux, mais je me laisse faire, connaissant l’importance de ce moment. Au moins, je pourrai me lever plus tard après-demain !
L’évaluation se passe bien, enfin, d’après moi. Le nouveau système d’hologrammes me permet de me mesurer à trois adversaires au niveau maximum. Je délaisse le premier au sol avec une flèche plantée dans le coeur, le second avec un couteau lancé dans la gorge, et le troisième une épée figée dans l’abdomen. Les juges ne commentent pas, mais m’observent d’un regard apréciateur, et je sors assez contente. Dans l’ascenseur, les autres regardent mon grand sourire avec des visages ébahis, mais je ne fais pas attention, et reviens à mon étage.
Le soir approrte une grande nouvelle. J’ai reçu un onze à l’entraînement, et Jasper un neuf. Au lieu de le fêter, je monte sur la terrasse pour faire un peu de sprint, consciente que mes capacités physiques encore jamais exploitées au paravent me permettront de faire une différence fondamentale.
Je suis totalement concentrée sur la victoire, lorsque je pénètre sur le plateau, face à Caesar, le soir suivant.
Après une brève discussion sur mes origines, il passe à mon score. Je regarde Katniss, interrogative, et elle secoue légèrement la tête de gauche à droite. Je réponds donc par une esquive:
- On va dire que j’ai utilisé le nouveau système d’hologrammes …
Caesar me complimente, sans s’expandre. Juste avant que le buzzer ne retentisse, je glisse:
- Je crois que mon styliste s’est inspiré des idées de Cinna. Est-ce que je pourrais faire un essai ?
Il acquiesce, et je me lève, pour tourner sur moi-même. Mes décorations futiles, froufrous et compagnie s’évaporent, m’entourant d’une brume bleutée. Lorsqu’elle se disperse enfin, je suis vêtue d’une robe de soirée d’un bleu profond, comme mon maquillage, parée de saphirs qui mirotent sous l’éclairage, me mettant dans un contexte aquatique. Je souris au public, et je salue bien bas, décidée à jouer la comédie jusqu’au bout, et, lorsque l’heure est venue, je rejoins sagement ma place.
Jaz a décidé de faire un “remake” des 74° Hunger Games. Il m’avoue sa flamme, et, sans mettre de lien, ajoute que s’il le faut, il me tuera, avec tristesse, mais il le fera. Je hoche la tête, et ma voix passe sans mal par dessus les rires du public qui attend ma réaction, pour dire que c’est la même chose pour moi. Le public se tait, légèrement étonné. Je souris, sadique, et je me tais pour le reste de la soirée.
La matinée suivante se passe dans le calme. Je reste stoïque. J’ai totalement oublié ma mère. Mon père a divorcé juste après ma naissance, je ne l’ai donc jamais connu. Je n’en éprouve rien.
La plateforme sur laquelle je me tiens n’est pas très grande. J’ai soixante secondes pour analyser mon environnement. Le mouchard dans mon bras gauche me démange.
Je suis en face de la Corne d’Abondance, dans une prairie verdoyante. A ma droite, une zone montagneuse. Devant, après la Corne, un désert plat et aride. A gauche, une forêt luxuriante. J’y vois aussitôt ma survie. Cela dit, autour de la plateforme, une bande d’eau d’environ cinq mètres de large bloque totalement l’accès aux différents environnements. Je soupire légèrement. Il n’y avait pas d’entraînement à l’escalade, ni à la nage, au Centre …
Dix secondes. Je vide ma tête. Je cesse de réfléchir. Autour de moi, les autres semblent totalement destabilisés par leur entrée dans l’arène. Cinq secondes. Je décale mes pieds, j’inspire et expire profondément. Trois. Deux. Un. Le gong retentit. Les paris doivent se faire, là haut, dans la ville. J’oublie le monde connu, et me rue à longues foulées souples en avant. Je suis rapide, bien plus que les autres, dont les muscles sont rouillés. Mes pas me portent à la Corne. J’agis rapidement. Je saisis un arc et les flèches qui vont avec, un paquet de coutaux que je fourre dans un sac à dos déjà rempli, et je prends un deuxième sac, plus petit, pour la route. Je charge le tout sur mon dos, et je repars au pas de course vers la forêt. Les plus rapides des autres sont aux trois quarts du chemin vers la corne, je n’ai aucun mal à passer, tous m’évitent. Je marque un temps d’arrêt dans ma course à l’approche de l’eau, puis j’accélère, et je saute. Je passe à l’autre berge sans trop de mal, et je me faufile dans les buissons. Sachant qu’une meute devrait se former rapidement, je préfère rester en bordure du centre, cachée, pour observer la suite des évènements. Le canon retentit cinq fois, puis les tributs se dispersent. Ceux qui entrent dans la forêt empruntent des chemins détournés pour ne pas me croiser, d’autres se lancent à l’ascension de la montagne, et la plus part filent vers la prairie. Cinq seulement restent à la Corne. La meute. Je m’autorise un sourire, satisfaite du résultat, et m’enfonce dans les frondaisons. J’avance à un rythme rapide, sans courir. Environ une heure de marche après, je tombe sur un petit étang. Je goûte l’eau du doigt; elle est pure. J’inspecte rapidement mon environnement, à la recherche d’un danger. Je ne vois rien, je me hisse donc dans un chêne au feuillage épais, à huit mètres du sol je pense. Je fais l’inventaire de mes possessions. Un arc, un carquois, cinq coutaux comme armes. Dans le plus petit des sacs, je trouve un sac de couchage, léger et chaud; dans le plus grand, deux gourdes, un flacon d’iode et un fil de fer. Bon. Point positif, j’ai des armes. Point négatif, je n’ai pas de nourriture. J’inspecte aussi mes vêtements. Une veste de cuir noir (yeurk ! pauvre animal !), un pantalon noir en toile inconnue, comfortable, des baskets noires et un t-shirt de même couleur. La panoplie black. Même les sacs ont cette couleur … bon, c’est pas que je me plaigne, ça m’avantagera dans la nuit. Je redescends, et je remplis mes gourdes de l’eau du lac. J’y verse quelques gouttes d’iode au préalable, avant de poser un ou deux pièges, et de remonter. Rapidement, en cas de présence humaine. Je fais bien. Une vingtaine de secondes après, des craquements se font entendre. Je me glisse sans bruit dans le feuillage, et je passe la tête pour voir ce qui se passe. La meute a décidé de faire une visite avant la nuit, visiblement. Trois garçons et deux filles. Pas très équitable, mais c’est à voir. J’observe les visages, et les associe à mes conaissances. Permier, un brun aux yeux bleus. Fort à l’épée, pas terrible en armes de jet. Second, blond aux yeux verts, assez habitué au maniement de l’épieu, ne voit pas très bien à longue distance cependant. Troisième, brun aux yeux noirs. Jasper. Fort, mais mauvais viseur. Quatrième, fille aux cheveux noirs et aux yeux bleus. A peu près habituée à tous types d’armes. Cinquième, brune aux yeux gris, rapide, intelligente, mais nulle avec des armes. Un groupe assez équilibré en fin de compte … Ils passent sans me voir, et discutent à voix basse. Je me redresse un peu, sans un son, mais fais tomber une branche involontairement. Je me remets aussitôt à plat ventre sur ma branche, alors qu’ils se retournent.
- Qu’est-ce que c’était ?
Jasper n’obtient pas de réponse. La brune lui tapote l’épaule, et dit:
- Viens, sans doute un oiseau.
Il acquiesce, pas convaincu, mais la suit. Je souffle légèrement, soulagée.
Quelques heures plus tard, un hurlement bref se fait entendre, suivi d’un coup de canon, à environ un kilomètre de mon arbre. Je descends vérifier mes pièges, et vois que j’ai attrapé un campagnol et un oiseau bizarre. Je les retends, bois un peu d’eau, et me retrouve confrontée à un problème de taille. Comment manger ça sans atrapper de maladie et sans le faire cuire ? Les pierres brûlantes près de l’étang, ainsi que le souvenir de Katniss me donnent la solution. Je pose une aile et une cuisse de l’oiseau, gardant le reste pour après. Je reste en bas, et pendant que mon repas grille, je déniche quelques racines commestibles, ainsi qu’une grotte, à la base d’un rocher, cachée par un rideau de lichen. J’y déplace mes affaires, les entasse, et récupère mon dîner. Jamais une nourriture ne m’a semblé aussi bonne que celle-ci.
Pendant la nuit, trois coups me réveillent. Ils sont dix à mourir dans la première journée. Je pointe le nez hors de ma grotte pour suivre l’affichage. Six filles, et quatre garçons. Je me rendors d’un sommeil agité, à moitié éveillée, un couteau à portée de main.
Le lendemain, alors que je compte sortir ma tête, un bruit d’éclaboussures m’incite à ne pas bouger. J’écarte un pan de ma “porte”, et je regarde qui est là. Un garçon, d’une quinzaine d’années, comme moi. Il boit, totalement vulnérable, la tête plongée dans l’eau. J’hésite à tirer. Finalement, je choisis une alternative. Je sors à découvert, arc à la main, totalement silencieuse. Lorsqu’il se relève enfin, je décide de lui accorder une chance. Je bande mon arme, encoche une flèche, mais ne bouge pas.
- S’il-te-plaît, il supplie. Ne tire pas.
- Ce n’est pas un jeu, c’est une lutte.
C’est du temps que je lui offre. Mais il ne court pas. Je relève un peu mon arc.
- On peut être alliés …
- Il n’y aura qu’un seul gagnant.
Je suis implacable, mais réaliste. J’amène la corde à ma joue. Il réalise qu’il aurait du fuir. Trop tard. Il pivote. J’ajuste. Lâche. La flèche file. S’enfonce. Il tombe. Ce n’est qu’une succession d’actions. Pourtant, je réalise. Le canon retentit. Je suis une tueuse.
Je ne manque de rien pendant ces jeux, mais ne reçois pas de sponsors non plus. Le produit de ma chasse me suffit, je ne bouge pas de mon étang. Je n’ai besoin de rien, ma grotte me premet de rester cachée, sans être en danger. Ma santé reste bonne, à part quelques blessures béniges, qui seront rapidement soignées si je survis. Je me suis aussi démis le poignet gauche, mais je pense pouvoir survivre. Je l’ai placé dans une attele de fortune, et j’arrive encore à tirer, bien que mes coups ne soient plus aussi précis, et à tendre des pièges. Il arrive que j’aie faim, mais je n’ai pas froid, je me contente de ce que j’ai, et j’en suis heureuse.
Une semaine passe. Nous ne sommes plus que trois, rassemblés dans la forêt, une fille, et deux garçons. Les autres sont morts de faim, de froid, de déshydratation, d’intoxication, au combat, qu’est-ce que j’en sais ? Je me charge d’éliminer le premier de mes deux adversaires lorsqu’il passe devant ma grotte. Cette fois-ci, je ne donne pas de chance. Je me suis rendue compte que c’était moi, ou l’un d’eux, que eux n’auront pas de disposition pour me laisser la vie sauve encore un peu. Une flèche dans la gorge, et l’affaire est bouclée, pour moi, comme l’indique le canon. Je n’ai plus d’états d’âme. Si je gagne, je ne ferai plus partie du Capitole. Je serai une tueuse, une meurtrière. Je ferai plus partie des rebelles. Si je perds … le souvenir de moi partira, envolé. Peu se rapelleront de moi.
Ce jeu me sépare de mes origines, de façon brutale. Je sais que je serai différente à partir de maintenant, quoi que je fasse.
Pendant que je paresse tranquillement près de l’étang en ruminant mes pensées, des petits élancements dans la main gauche, le canon retentit encore une fois. Je relève la tête, étonnée. J’ai totalement oublié mon dernier concurrent, je ne sais même plus qui il est, et voilà qu’il meurt soudainement … Ça me semble totalement illogique. J’atrappe mécaniquement l’échelle électrifiée lorsque l’hovercraft descend pour me récupérer. Des médecins tournent autour de moi, rectifient et soignent les quelques écorchures citées plus haut, et, après m’avoir mise sous somnifères, me remettent en place mon poignet. Je me réveille, environ une heure plus tard, dans ma chambre. Une muette vient me voir, me conduit à la salle de préparation, où je revois mon styliste. Ses créations avec ma robe l’ont hissé assez haut dans la société, et il est heureux de me voir en vie. Je me retrouve habillée d’une robe de coctail, rouge cette fois-ci, parée de rubis écarlates, les cheveux légèrement retaillés pour qu’ils soient uniformes, les ongles coupés et manucurés, enfin bref, comme une habitante du Capitole normale dans une journée classique.
Pendant l’interview, je remercie les Juges, qui m’ont offert la possibilité d’avoir des armes, les entraîneurs qui m’ont beaucoup appris, mon équipe, tous les gens qui m’ont entourée et aidée. J’apprends que le dernier à mourir a été Jasper, qui s’est empoisonné, involontairement ou pas, avec des baies de sureau. L’idiot !
La robe se dissout, lorsque je tourne sur moi-même, dans des couleurs et des odeurs douceâtres que je reconnais comme celles du sang et des roses, et j’apparais dans une autre, totalement blanche, immaculée, ornée de diamants transparents. La transformation est saluée par des applaudissements.
Le lendemain, la cérémonie du vainqueur est une réussite. Je suis applaudie, saluée, on se presse autour de moi, de mon équipe, de mon mentor, de ma responsable, de mon styliste … Katniss me remet ma couronne de gagnante des premiers et derniers Jeux du Capitole. Je me retourne pour saluer la foule de rebelles en face de moi.
Voilà, une fin triste et une fin heureuse. J'espère que vous avez aimé, n'hésitez pas à laisser des commentaires.