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Ce voyage devrait être une libération, un rajeunissement, un grand nettoyage de votre corps et de votre tête; ne devriez-vous pas en ressentir déjà les bienfaits et l'exaltation?
Mais n'est-ce pas justement pour parer à ce risque dont vous n'aviez que trop conscience que vous avez entrepris cette aventure, n'est-ce pas vers la guérison de toutes ces premières craquelures avant-coureuses du vieillissement que vous achemine cette machine vers Rome où vous attendent quel repos et quelle réparation ?
Afficher en entierTout d'un coup la lumière s'éteint: c'est l'obscurité complète, sauf le point rouge d'une cigarette dans le corridor avec son reflet presque imperceptible, et le silence sur cette base de respirations très fortes comme dans le sommeil et du bourdonnement des roues répercuté par l'invisible voûte. Vous regardez les points, les aiguilles verdâtres de votre montre; il n'est que cinq heures quatorze, et ce qui risque de vous perdre, soudain cette crainte s'impose à vous, ce qui risque de la perdre, cette belle décision que vous aviez enfin prise, c'est que vous en avez encore pour plus de douze heures à demeurer, à part de minimes intervalles, à cette place désormais hantée, à ce pilori de vous-même, douze heures de supplice intérieur avant votre arrivée à Rome.
Afficher en entier...impossible de ne pas tenter de lui expliquer pour quelles raisons s'est produite cette modification, afin qu'elle quitte tout espoir dans cette direction là, ...
Afficher en entierTout se déroulait auparavant si calmement, et maintenant, non, cela ne pourrait plus suffire, et vous saviez que c’était ce qu’elle pensait elle aussi, que cette possibilité allait la hanter elle aussi, qu’elle ferait tout, avec un art consommé, pour parvenir à ce que cela dure non point toujours, mais aussi longtemps, aussi souvent que les exigences du métier, de la position sociale, le permettraient, cette possibilité de s’imposer à vous toute seule enfin, d’atteindre enfin et de vous faire atteindre à cet amour magnifique et pur, à cette liberté nouvelle dont votre aventure jusqu’à présent n’avait pu offrir qu’une bien piètre image, toujours brisée, toujours par bribes, toujours n’atteignant qu’une partie de vous.
Afficher en entierSi vous avez hésité si longtemps devant votre amour pour Cécile, c’était à cause d’eux bien sûr, mais la solution n’est évidemment pas de laisser les choses se pourrir ainsi lentement ; ce qu’il faut, au contraire, c’est leur montrer bien franchement que ce qu’ils pressentent est la vérité, opération chirurgicale qui les fera souffrir peut-être un peu, mais qui les délivrera de cette infection mentale commençant à les enfiévrer, c’est leur donner l’exemple d’un homme ayant hautement le courage de ses sentiments, ce dont à la longue ils vous sauront gré ; c’est donc à cause qu’il ne vous faut plus hésiter, qu’il ne faut plus vous cacher.
Afficher en entierVous dites : il faudrait montrer dans ce livre le rôle que peut jouer Rome dans la vie d'un homme à Paris ; on pourrait imaginer ces deux villes superposées l'une à l'autre, l'une souterraine pas rapport à l'autre, avec des trappes de communication que certains seulement connaîtraient sans qu'aucun sans doute parvînt à les connaître toutes, de telle sorte que pour aller d'un lieu à un autre il pourrait y avoir certains raccourcis ou détours inattendus, de telle sorte que la distance d'un point à un autre, le trajet d'un point à un autre, serait modifié selon la connaissance , la familiarité que l'on aurait de cette autre ville, de telle sorte que toute localisation serait douteuse, l'espace romain déformant plus ou moins pour chacun l'espace parisien, autorisant rencontres ou induisant en pièges.
Afficher en entierOr ce n'est point la faute de Cécile si la lumière romaine qu'elle réfléchit et concentre s'éteint dès qu'elle se trouve à Paris ; c'est la faute du mythe romain lui-même qui, dès que vous vous efforcez de l'incarner d'une façon décisive, si timide qu'elle demeure malgré tout, révèle ses ambiguïtés et vous condamne.
Afficher en entierah cette asphyxie menaçante, il fallait la fuir au plus tôt, respirer au plus tôt un immense coup de cet air futur, de ce bonheur proche…
Afficher en entierD'abord, je ne lui dirai rien, je ne lui parlerai pas de ce voyage. Elle ne comprendra pas pourquoi il y aura une telle tristesse dans mes embrassements. Elle sentira peu à peu ce qu'elle avait d'ailleurs toujours senti, que notre amour n'est pas un chemin menant quelque part, mais qu'il est destiné à se perdre dans les sables de notre vieillissement à tous deux.
Afficher en entierVous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant.
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