Les héritières de l'Olympe, tome 2 : Le regard la Panthère

— Gladys a raison, lui fit écho Zach.

Leya sursauta : si la protestation de Gladys était prévisible, l’intervention de Zach en sa faveur était une nouveauté absolue.

— Tu prends parti parce que ta copie est identique à celle de Gladys et de Nairi, sans doute ? ironisa Mme Steel.

À présent tout était clair. Leya avait appris à ses dépens que Zach ne s’intéressait à personne d’autre qu’à lui-même.

— Les questions étaient les mêmes pour tout le monde, il est normal que les réponses le soient aussi…, se défendit maladroitement le garçon.

Étant donné l’expression de la prof de sciences, Leya soupçonna ses camarades d’être sur le point de tomber tout droit dans un piège.

— Tu penses donc avoir répondu juste à toutes les questions, Zach ? demanda Mme Steel, le sourire impassible et le regard menaçant.

Zach haussa les épaules.

— Qu’est-ce que j’en sais ? C’est vous, la prof !

— Alors, il vaut mieux que nous vérifiions cela tous ensemble, décréta l’enseignante. Gladys Waterspoon, Zach Roberts et Nairi Zinnerman, debout ! Interrogation orale !

— Mais vous ne pouvez pas…, cria Gladys.

— Si, je peux, la coupa Mme Steel.

Leya regarda ses camarades se diriger vers le bureau au milieu des protestations de Gladys. Nairi lui faisait de la peine : elle avait l’air de marcher vers l’échafaud. Des trois, c’était la seule sympa. Gladys était une casse-pieds interplanétaire, et Leya la détestait. Quant à Zach… Celui qui avait été son grand amour pendant des années s’était révélé n’être qu’un odieux personnage.

Après leur voyage, Leya avait décidé de l’effacer de son existence. Pourtant, ce n’était pas si simple. Pas parce qu’elle avait été amoureuse aussi longtemps, ni parce qu’elle continuait à éprouver quelque chose pour lui. Le problème, c’est que Zach était toujours son voisin de classe. À présent, l’ambiance était super tendue entre eux. Ils se parlaient à peine.

L’interrogation se déroula comme prévu : bouches cousues pour Zach et Gladys, tandis que Nairi, malgré son stress, répondait à toutes les questions.

Leya cessa d’écouter pour employer son temps à quelque chose de plus utile. Elle fit ce que lui avait suggéré Kaliko : essayer d’évoquer ses visions dans le but de retrouver l’Haruda. Peine perdue.

Déçue, elle appuya son coude sur la table, le visage dans la main. Soudain, son regard fut attiré par le dessin suspendu au mur derrière Mme Steel. C’était Dikran Moreau, l’artiste de la classe, qui l’avait fait. Il l’avait accroché le matin même. La peinture représentait le museau d’un cerf aux yeux d’or. Réputé doux, l’animal donnait pourtant le frisson. En l’observant mieux, elle s’aperçut que ses yeux étaient différents. L’un avait une expression tendre, l’autre presque haineuse.

Leya continua de le fixer… et soudain, elle vit l’île. Atras rugissait, tournée vers les arbres brûlés par les flammes de Kaliko. La vision avait quelque chose de bizarre… Elle semblait manquer de stabilité. Leya se concentra sur Atras, et cette sensation diminua. Elle comprit que le problème venait des troncs noircis, dont la surface vibrait légèrement.

Soudain, une ombre apparut entre les arbres : Atras n’était pas seule !

Leya sentit son cœur s’accélérer, et elle dut faire un grand effort de concentration pour ne pas perdre la vision. De derrière les branches calcinées surgit une horrible créature au corps recouvert d’écailles : une tête de dragon, des yeux rouges de reptile. Sa grosse queue répugnante, semblable à celles des scorpions, se balançait lentement. Atras secoua la tête, et la créature s’éloigna. Tant qu’elle fut visible, la chimère la tint à l’œil. Puis elle sembla se détendre, replia ses ailes et alla se coucher au pied d’un arbre brûlé, les pattes antérieures croisées. En voyant le tronc de près, Leya comprit ce qui causait l’étrange vibration qu’elle avait remarquée au début.

De l’écorce neuve poussait sous celle brûlée par les flammes… Les arbres étaient en train de renaître !

L’île les soignait, comme elle avait soigné Atras.

— J’ai dit « Retournez à vos places ! » tonna la voix de Mme Steel à cet instant.

La vision se dissipa.

— Je conteste cette note, trépignait Gladys en rejoignant sa table.

Nairi, elle, semblait à peine sortie d’un corps-à-corps avec un tyrannosaure. Zach revint s’asseoir près de Leya et lui jeta un regard plein de haine.

— Ça te fait plaisir que j’ai eu quatre, hein ? siffla-t-il, rageur.