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– Donc, la déco du resto… changé-je subitement de sujet. On part sur du noir ?
– On ne part sur rien du tout ! Pour l’instant, on est en phase de réflexion ! m’explique-t-elle en venant me coller un Post-it sur le front.
Je la rattrape au vol et l’oblige à s’asseoir sur mes genoux. Je décolle le petit papier rose pour lire les annotations. « Fluo ? » est écrit au milieu. Puis « Chez Adèle » dans un coin en haut… et Damon imbriqué dans son prénom à elle, à la verticale en partant du D.
– Tu fais des mots croisés au lieu de bosser ?
– C’est un brainstorming ! précise-t-elle. Je jette mes idées sur le papier.
– Si je peux avoir un droit de veto : tout sauf du fluo !
– Veto accepté… Je sais que je dois choisir toute seule, se reprend-elle, faire table rase du passé pour repartir à zéro. Mais je n’arrive pas à ne pas t’impliquer. C’est grâce à toi si… Et j’aime bien le mot « Nomad »… Non, non, je vais garder « Chez Adèle ». Il faut que ce soit moi, rien que moi !
– Tu vois, tu peux faire les questions et les réponses, me moqué-je de sa nouvelle envolée existentielle.
– Mais tu m’aideras, quand je serai devenue complètement folle ? Quand je n’aurai pas dormi depuis six mois et que je n’aurai toujours pas pris la moindre décision ?
– Non. Mais je peux t’aider à trouver une fonction à cette robe… Elle serait aussi bien en t-shirt, non ? proposé-je en relevant lentement le tissu sur ses cuisses, puis sur ses hanches.
– C’est une nuisette, me chuchote-t-elle avant d’attraper ma main pour la glisser entre ses jambes… sur sa nudité.
– Je le savais… grogné-je, le souffle coupé.
– Tu ne savais rien du tout, me défie-t-elle en se cambrant pour m’agiter ses seins sous le nez.
– Ce que je sais, c’est que cette séance de travail est terminée ! lancé-je en la soulevant pour l’emmener à l’intérieur de la villa.
Avant qu’Adèle m’interrompe avec cette maudite nuisette, je n’étais pas en train de bosser. Je ne faisais même pas semblant. J’étais sur un site immobilier à la recherche d’une nouvelle villa, face à l’océan.
Une villa pour Adèle et moi. Je ne lui ai pas demandé si elle voulait qu’on vive ensemble, de toute façon, c’est un peu déjà le cas. Et puis ça fait moins peur quand on ne formule pas à haute voix cette question solennelle. Je ne lui ai pas demandé non plus parce je pense qu’elle dira non : « c’est trop cher », « c’est une folie », « cette maison suffit », « je ne veux pas que tu dépenses ton argent pour moi ».
Je la connais par cœur.
Et puis elle aura peur, elle aussi, de franchir le pas. Comme si ça nous engageait à quelque chose d’autre que ce que l’on vit déjà. Et je crois qu’elle aura peur pour moi, plus que pour elle : peur que je regrette, que ça ne me ressemble pas, que je lui file entre les doigts.
Et elle se trompera.
Mais ne pas lui demander officiellement d’habiter avec moi, ça me rapproche dangereusement de Melville Cooper. Le type qui décide tout seul. Le type qui impose, sans laisser le choix. Le type qui pensait qu’Adèle aurait forcément le même avis que lui. Et que si elle en avait un différent, c’est qu’elle avait forcément tort. Je ne veux pas être ce genre de type. Et je ne veux pas lui faire revivre ça.
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