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Thil - 23 Octobre
La petite église à moitié éventrée, l'intérieur mis à sac. Au milieu des plâtres et des pierres effondrées, une chaise est redressée. On est venu prier dans ce chaos, le livre est encore ouvert sur le dossier. Les arbres sont déchiquetés, les racines tordues gémissent vers le ciel, une tombe d'un soldat français, quelques pelletées de terre sur le mort de qui on aperçoit les deux bouts de soulier sont autant d'éloquentes choses qui réclameraient bien davantage urgence que les articles haineux des journaux de Paris! Saint-Saëns contre Wagner. Quelle bêtise! Parce que des brutes ont assassiné, vouloir à toute force s'attaquer aux génies de l'autre race pour les renverser sinon les amoindrir! Toutes ces querelles passeront, heureusement, et les œuvres vraiment dignes de vivre resteront, malgré les crimes, malgré la méchanceté, malgré les criailleries des journalistes en mal de patriotisme!
Maurice Maréchal
Afficher en entier"La guerre est comme la fièvre typhoïde; il faut fuir, mais si on l'attrape, il faut lutter"
Etienne Tanty
Afficher en entierVous ne devineriez jamais , oh ! non , je vous le donne dans le mille , où nous somme abrités ! Il vaut donc mieux vous le dire /
Eh bien , dans un caveau , auquel un obus a fait une petite ouverture et dans lequel nous sommes en compagnie de deux squelettes .Comme abri c'est assez solide , mais aussi assez macabre .
Afficher en entier23 septembre 1914
Des classes 12 et 13, nous sommes une quarantaine au maximum sur cent cinquante - tout le reste est mort, blessé ou prisonnier. Un matin de septembre aussi clair se lève sur les vignes et les coteaux de la Marne ; le clocher du village émerge au-dessus des vapeurs du matin que dissipe le soleil, les dernières roses de l'automne fleurissent encore dans les jardins, et les vers de Ronsard me chantent douloureusement un souvenir.
Etienne Tanty
Afficher en entierQuand nous sommes arrivés par ici au mois de novembre, cette plaine était alors magnifique avec ses champs à perte de vue, pleins de betteraves, parsemés de riches fermes et jalonnés de meules de blé. Maintenant c'est le pays de la mort, tous ses champs sont bouleversés, piétinés, les fermes sont brulées ou en ruine et une autre végétation est née: ce sont les petits monticules surmontés d'une croix ou simplement d'une bouteille renversée dans laquelle on a placé les papiers de celui qui dort là.
Afficher en entierVoilà six mois bientôt qu'on traîne cette misérable existence qui n'a plus rien d'humain
Afficher en entierJe fais partie d'une famille israélite, naturalisée française il y a un siècle à peine. Mes aïeux, en acceptant l'hospitalité de la France, ont contracté envers elle une dette sévère; j'ai donc un double devoir à accomplir : celui de Français d'abord; celui de nouveau Français ensuite [...]
Je veux, si je meurs, que ma famille puisse se réclamer de moi et que jamais qui que ce soit ne puisse lui reprocher ses origines ou ses parentés étrangères.
Afficher en entierAlphonse.
Neuf jours après avoir écrit cette lettres,Alphonse X a été tué par un obus.
2 aoît 1914
J'ai embrassé mes camarades et le sergent tout à l'heure au départ.Combien reviendront ?Je suis écoeuré par ce que je vois.Un commandant absolument abruti: il perd ses gants et son carnet en cinq minutes et m'explique vaguement qu'il est très fatigué du voyage, pendant que je le conduis chez le tailleurchanger d'écusson.Quel commandant ! On peut trembler en voyant cela et aussi tous ces rréservistes,saouls, qui se vautrent sur le trottoit en bas.Et pourtant: En avant ! Si je ne me battais pas, je souillerais à jamais toutes mes heures futures.Plus de joies pures,plus d'enthousiasme, plus d'exaltation pour le Beau.Car je rougirais d'avoir tremblé pour ma vie ! Pour oser regarder le soleil mourir sur la mer, il faut avoir osé soi-même regarder la mort en face.
Maurice Maréchal.
Afficher en entierPour regarder le soleil mourir sur la mer, il faut avoir osé soi-même regarder la mort en face.
Page 36 - Paroles de poilus- Maurice
Afficher en entierEt alors , subitement , comme si un rideau de théâtre s'était levé devant nous le champs de batailles nous est apparu dans toute son horreur .
Des cadavres allemands , ici , sur le bord de la route , là dans les ravins et les champs , des cadavres noirâtres , verdâtres , décomposés , autour desquels sous le soleil de septembre , bourdonnent des essaims de mouches ; des cadavres d'hommes qui ont gardé des pauses étranges , les genoux pliés en l'air ou le bras appuyé au talus de la tranchée ; des cadavres de chevaux , plus douloureux encore que des cadavres d'hommes .
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