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Il s’était douché et habillé après avoir bu et mangé, et avait suivi Reece dans l’air venteux de San Francisco. Il faisait plus frais dans la région de la baie qu’à Portland et le vent le fit frissonner.
— Tu as froid ? demanda Reece.
C’était incroyable de voir avec quelle rapidité il remarquait tout chez Angus. Bien sûr, la plupart du temps, Angus remarquait lui aussi tout chez Reece. Ils avaient toujours été comme ça. Ces derniers temps, eh bien, de toute évidence, non. Mais il l’avait cherché, alors il ne pouvait pas s’en plaindre. Mais il avait… froid. Tout était froid.
— Un peu, je crois.
— Tiens. Prends ça. Moi ça va.
Reece défit son énorme sweat et le tendit à Angus. Ce truc ressemblerait à une robe sur lui, mais c’était en quelque sorte réconfortant. Il prit donc le sweat de Reece et le mit. Il sentait la vanille, le thé et le parfum de Reece. L’odeur ne changeait pas au fil des années. Quelque chose dans celle-ci rappelait la maison à Angus, et il se sentit tout à coup mieux quand elle l’entoura. Pas bien, mais mieux.
— Merci, murmura-t-il avant de respirer profondément.
Afficher en entierReece était là, comme il l’avait toujours été et comme il l’avait promis. Reece, qui l’avait tenu toute la nuit et l’avait laissé pleurer, pleurer encore, crier et jeter des objets. Reece, qui l’avait finalement porté au lit et tenu dans ses bras comme s’il n'y avait rien de plus important au monde qu’eux deux. Et Angus adorait la sensation d’être collé à lui. Il était beau, parfait, juste là, et il faisait battre le cœur d’Angus à toute allure, et il était recroquevillé contre lui comme un amant, et ça aurait peut-être dû être trop. Mais étrangement, ça ne l’était pas.
Afficher en entierReece avait du mal à ne pas dévisager Angus, ce qu’il savait être inutile. Le regarder constamment n’arrangerait pas les choses. Angus semblait aller un peu mieux que ces deux derniers jours, mais Reece n’y croyait pas entièrement. Il connaissait son meilleur ami. Quelque chose n’allait toujours pas.
Bien sûr que quelque chose ne va pas, crétin. Les gens ne passaient pas de bourrés et couchés au lit à silencieux mais parfaitement normaux en deux jours. Reece était assez intelligent pour le savoir, même s’il espérait que ce soit le cas.
Malgré tout, il se sentait mal.
Quelque part à l’extérieur de LA, des heures après avoir quitté leur charmant petit motel près de la mer, il craqua finalement. Angus regardait par la vitre, observait la circulation de plus en plus dense de Los Angeles depuis une heure. Reece ne pouvait plus supporter ce silence.
— Hé, est-ce que tu essaies de, genre, aller bien pour moi ? demanda-t-il.
En rétrospective, ce n’était probablement pas la meilleure chose à dire. Tant pis. Il n’était pas psy.
— Non. Je veux dire, enfin… Que veux-tu dire ?
— Je crois…
Reece regrettait déjà d’avoir évoqué le sujet. Laisser passer les choses n’avait jamais été un de ses talents. Il avait toujours aimé que les choses, et les gens, soient clairs.
— Je crois que je veux dire qu’il y a deux jours, tu étais furieux, triste et bourré, et maintenant tu as presque l’air d’être toi-même. Mais tu ne l’es pas. Il y a quelque chose. J’essaie juste de comprendre si tu joues la comédie.
Angus soupira et ferma les yeux. Il laissa sa tête retomber contre l’appui-tête.
— Qu’est-ce que tu attends de moi ?
Il était trop tard pour reculer et retirer la question, alors il le poussa un peu plus.
— La vérité, je pense. C’est parce que tu n’as pas dit la vérité sur ce qui se passait qu’on en est là, non ?
La voiture resta longuement plongée dans le silence après ça. Merde. Il en avait probablement trop dit. Angus avait toujours été sensible et Reece sensé. Parfois, il ne savait pas que ce qu’il disait blessait son ami. Parfois… eh bien, parfois, il souhaitait pouvoir revenir en arrière et recommencer. C’était une de ces fois.
— Oui, j’imagine que je joue la comédie à un certain degré. Pour toi comme pour moi.
Angus n’ouvrit pas les yeux.
— Qu’est-ce que je suis censé faire d’autre ? Je ne me sens vraiment pas bien. Je suis censé ne pas être triste ?
Tu es censé avoir oublié ce salaud. Il était minable de toute façon.
— Non, tu es censé être toi. Je voulais juste aider.
— Je pense…
Il se frotta les yeux.
— Je pense que ça aide un peu. Je veux dire, j’essaie d’agir de façon normale et ce n’est pas facile, mais je peux faire semblant jusqu’à ce que ce soit vrai, non ?
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