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Jusqu’à cet instant, jusqu’à ce mercredi quinze avril aux alentours de dix-huit heures, lors de la tournée promotionnelle de mon premier livre, je ne m’étais jamais demandé si je préférerais mourir d’un coup de couteau ou d’une balle dans la tête. Mais évidemment, c’était avant de voir John Baldwin se ruer sur moi alors que je sors des toilettes après une séance de dédicaces particulièrement éprouvante, quoique gratifiante. Un John Baldwin rendu méconnaissable par la chirurgie esthétique, et qui devrait s’être retranché à huit ou dix mille kilomètres de là, quelque part en Amérique du Sud. Mais qui, pourtant, est venu me retrouver ici, dans cette bonne ville de New York, pour assouvir sa soif de vengeance. J’ai le temps de penser à Roman et Nils, restés au stand, à moins de vingt mètres de l’endroit où je vais mourir, seule, sous le regard bienveillant de Snoopy qui n’a pas l’air de se rendre compte du sordide de la situation, et reste placidement couché de tout son long dans le couloir. Après l’avoir enjambé, Baldwin se plante face à moi, un demi-sourire accroché sur son visage, sa main droite toujours dans son dos, comme s’il s’apprêtait à me proposer une partie de pierre-feuille-ciseaux.
Alors ? Couteau ou pistolet ?
Mais c’est finalement un livre qu’il me tend, d’une façon si brusque que je sursaute, persuadée que ma dernière heure est venue. Mon livre.
– Mademoiselle Lenoir, balbutie-t-il, décontenancé par mon violent mouvement de recul. Mademoiselle Lenoir… je… je suis désolé. Je m’appelle Terry Merchant. Je ne voulais pas vous effrayer. Je… Voyez, j’ai adoré votre livre, mademoiselle Lenoir. Il est fantastique ! Et cette nouvelle, « Le prix d’une heure au Paradis », elle est si belle, si poignante. Je l’ai relue plusieurs fois ; elle m’a tiré des larmes. Je voulais vous remercier pour le bonheur que vous m’avez apporté.
Tandis qu’il se répand maladroitement en un flot d’excuses, compliments et explications, mon cerveau mouline à toute allure pour traiter l’information : ce n’est pas Baldwin ! Je ne vais pas mourir !
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