A nos vingt ans

Souvent je ne me lève pas le matin parce que j’ai maté le foot à la télé jusqu’à tard dans la nuit. Ces programmes commencent à vingt-trois heures. Les matchs de la Ligue des Champions sont retransmis en direct à deux heures du matin. Je suis accro. Mes équipes préférées sont le Real Madrid et Manchester United. Un vrai sport de riches, le foot. Même dans mes rêves les plus fous, je ne vois pas notre pays prospérer dans ce jeu-là.

À cinq heures du matin, ma mère me réveille avec une question débile : « Tu veux manger quoi au petit déjeuner, du pho ou des bánh cuôn11 ? » Cela pourrait être du riz gluant, du riz cantonnais ou n’importe quelle cochonnerie qu’on se fout dans le ventre. Déjeuner le matin, pour moi, est une corvée ; mais à partir d’un moment ça devient carrément un calvaire, une forme très perverse de supplice. Rien que d’imaginer ma mère se levant de bonne heure et s’excitant sur ses fourneaux pour son fils, j’en ai la gorge serrée. Avec moi, c’est simple : que je mange ou non, c’est kif-kif, alors je me demande bien ce qu’elle a à me bassiner comme ça ! J’ai tellement les nerfs que je jeûne direct. Souvent je ne bouffe rien et ce malgré une mère qui enchaîne les exploits culinaires.