AATEA

Aatea est l'histoire du navigateur du même nom, dans un monde très particulier, la Nuée, où l'attraction d'un Corps Noir entraine une lévitation d'une bonne partie de la mer. Celle-ci est constituée de bras, de diverses largeurs et de niveaux plus ou moins profonds, de la surface où le soleil réchauffe les eaux jusqu'au fond de la Nuée où naissent les îles.

C'est dans cet univers chaotique, où la mer ne reste jamais identique bien longtemps, que Aatea navigue et onçoit la Nuée. Ce terme étrange se réfère à sa perception des ondes et des courants. Aatea, comme les autres navigateurs, peu ainsi percevoir les êtres parcourant l'eau, mais aussi les changements de marée et de courants pouvant devenir dangereux pour son monocoque. Cette capacité, unique aux navigateurs, est ce qui s'apparente de plus près à la magie dans cet univers, avec, bien sûr, ces fameuses îles de la Nuée.

Fonctionnant comme un radar, avec des subtilités en plus, ce don n'est cependant pas sans faille, et Aatea affrontera de nombreux dangers lors de ses traversées de la Nuée.

Cet univers, d'une grande poésie, m'a énormément plu. L'idée de l'onception et plus généralement des niveaux de la Nuée demande un certain effort d'imagination, mais quelle ambiance maritime dans ce roman ! La plume d'Anouck Faure magnifie cet univers, avec une description des courants et des flux marins très vivace. Ses dessins qui parsèment les fins de chapitres sont tout aussi beaux, et une vrai aide à la représentation de la Nuée.

La construction du roman est bien maitrisée, même si le rythme global reste lent (un peu comme un courant d'eau peut l'être :)). Le personnage principal est très attachant, et Paikea aussi. Cette petite fille farouche, dont les blessures profondes s'expriment aisément à travers la plume de l'autrice, est extrêmement émouvante. Elle s'est fait une place dans mon coeur de maman, comme dans celui d'Aatea.

Car au delà de la Nuée et de l'impressionnant worlbuilding réalisé par Anouck Faure, Aatea n'est pas qu'un roman d'aventure, où un homme défie la nature de la Nuée. C'est avant tout une quête de liberté de la part d'un homme malmené par la vie, et écrasé par la société dans laquelle il vit.

C'est une société de caste qui régit tout sur les îles, et aucun insulaire ne peut y échapper. Les nobles régissent tout, s'arrogeant les services des navigateurs pour leurs propres intérêts, tandis que le reste de la population insulaire n'a pas grand choix de décision, devant simplement servir les autres castes par leur travail.

Pour accentuer le contrôle sur les navigateurs, la plupart de ces derniers sont des eunuques, ou n'ont pas le choix du mariage, pour donner des lignées les plus pures possible. Le roi ou la reine de chaque île est cependant un maitre navigateur, une personne capable de communiquer avec les îles.

Dans cette société très régentée par les règles de castes, Aatea est encore plus exclu à cause de son absence de filament. Cet organe permet aux humains de se tenir sur les îles sans subir leur poison mortel. En son absence, Aatea ne peut pas poser le pied sur une île sans en mourir. Difficile, dans ces conditions, de se sentir pleinement épanoui sur les abords de l'île en question.

Cette envie de liberté sans conflit est la quête principale d'Aatea, mais il trouvera beaucoup plus en chemin. Une raison supplémentaire de vivre, pour Paikea, mais aussi des secrets bien cachés qu'il n'a même pas cherché à apercevoir.

Ce roman est une grande réussite pour moi, de part la poésie qui se dégage de la plume de l'autrice, de ses thématiques puissantes et de ses personnages attachants. J'avais beaucoup aimé La Cité Diaphane de la même autrice. Aatea est plusieurs crans au dessus, et l'évolution est fulgurante.

Anouck Faure confirme par ce second roman qu'elle est une autrice à suivre.

Après avoir découvert la plume d'Anouck Faure dans La Cité diaphane, c'est avec plaisir que je l'ai retrouvée sur Aatea. La patte de l'autrice est clairement identifiable, toujours dans cet imaginaire onirique qui la caractérise.

Dans un monde aquatique où les îles naissent de la profondeur des eaux, Aatea part à la recherche de son identité autant que de ces îles qu'il poursuit dans une nouvelle odyssée. Lui qui n'a de place nulle part dans sa société découvre la liberté et les dangers de la mer et des mondes à (re)naître. Sur son chemin, il rencontrera des étrangers, hostiles d'abord puis de moins en moins, il trouvera un but à son existence et, surtout, il y aura Paikea.

J'ai eu un peu de mal à rentrer dans le texte au début. La lecture est plaisante dès la première ligne mais la structure de la société présentée n'est pas clairement définie, puisqu'on suit le point de vue du personnage principal qui est immergé dedans depuis sa naissance. Normal donc qu'on ait pas de description précise de comment fonctionnent les différentes castes les unes par rapport au autres mais il m'a manqué un peu de distance pour appréhender tout ça. Ce n'est que l'opinion de mon esprit rationnel cela dit, je pense que ça aurait été à l'opposé du style de l'autrice que de faire cette description claire et précise.

J'ai beaucoup aimé la relation qui se noue entre Paikea et Aatea, tout en douceur et en même temps d'une force spectaculaire, alors qu'il n'échangent que très peu de mots, finalement. C'est une grande force du texte.

Comme pour La Cité diaphane, les illustrations renforcent encore cet univers onirique. J'aime bien, ça contribue vraiment à créer un univers reconnaissable pour l'autrice. Si je ne suis pas forcément fan du style des dessins en ce qui concerne les personnages humains, certaines planches représentant des animaux marins sont vraiment splendides.

Ce n'est pas un coup de cœur pour moi au niveau de l'histoire (j'aime les rythmes plus enflammés !) mais c'est indéniablement une super expérience de lecture, comme souvent chez Argyll.

J'y suis allée en toute confiance car j'avais adoré La Cité Diaphane et je voulais me laisser tout le plaisir de la découverte, pour se faiee je n'ai lu que les premières lignes du résumé.

Je vous recommande d'en faire autant, car à mon sens c'est le genre d'histoire dans laquelle il faut se lancer sans trop en savoir pour en profiter comme il se doit!

Le prologue annonce tout de suite un style onirique et travaillé, au vocabulaire riche, notamment concernant les termes nautiques et je suis bien contente d'avoir grandi en bord de côte et fait de la voile plus jeune, pour comprendre et vivre cette aventure.

Cependant, si ces premières pages peuvent sembler exigeantes et planter le décor d'un univers riche et particulier, ne vous découragez pas, la suite se révèle plus fluide, d'autant plus qu'Aatea, dont on suit le point de vue, est un protagoniste auquel il est impossible de ne pas s'attacher.

On ne peut qu'entrer en résonance avec lui, au vu du monde dans lequel il évolue, ce système de caste qui le malmène et l'exploite.

La plume nous balade dans un univers qui fait vivre l'imagination, la mettant souvent au défi de se figurer certains décors et concepts, mais c'est aussi en ça que j'ai adoré ma lecture.

J'ai adoré retrouver la thématique des profondeurs, le côté organique, la symbiose avec ces îles vivante et cette océan atypique qu'est la Nuée.

Les mondes aquatiques sont des univers qui me captivent depuis toujours (coucou Waterworld), de par leur côté impitoyable, mais aussi comme source de vie, et l'autrice fait parfaitement ressortir cette dualité.

A aucun moment on nous prend par la main, les choses s'éclairent et la compréhension se fait au fil de la lecture.

Les relations se tissent dans le blanc des pages, dans les moments de silence et de pudeur, brutes ou tout en délicatesse, et c'est ce qui à mon sens, rend le texte beau et fort.

Ce roman est ode au sauvage et à la poésie de l'océan, qui peut nous malmener comme nous porter au loin, là ou l'inconnu règne, mais surtout la liberté, celle de vivre et de choisir.

Lisez Aatea!

https://tempsdemots.wordpress.com/2025/01/18/aatea-a-faure/

Après ma découverte de la plume d’Anouck Faure dans la cité diaphane, j’étais impatience de découvrir Aatea.

En la compagnie d’Aatea justement, de sa naissance un poil trop tard jusqu’à sa quarantaine, nous allons parcourir un long chemin. Sur terre, sur mer surtout mais également un chemin réflexif. Avec sa plume poétique, Anouck Faure nous dépeint un monde dur, où chacun a une place bien décidée et où tout ce qui ne rentre pas dans une case sera entré de force dans une autre. A coups de fouet s’il le faut.

Aatea, c’est ce jeune homme qui aurait dû être au sommet, qui aurait dû être prince mais qui, en étant né quelques heures trop tôt, est devenu esclave. Avec tout ce que cela implique comme machinations, comme soumissions et comme obligations. Mais Aatea, c’est aussi ce jeune homme que l’ailleurs appelle et qui entend son chant, celui qui est épris de justice et d’équité, celui dont le cœur est tendre et la volonté inflexible.

Anouck Faure nous plonge dans un monde différent, où les îles naissent des flots appelées par des régents auxquels elles sont ensuite intrinsèquement liées, où les termes de navigation sont légions et où tout finalement est un peu différent tout en étant similaire à ce que nous connaissons… Nous faisons avec Aatea un pas de côté. Un pas que j’ai adoré faire pour me laisser porter par les flots avec Aatea, où j’ai eu le cœur serré et où j’ai espéré. Avec lui et pour lui. Alors qu’il se lance à corps et à cœur perdu pour trouver sa liberté, tout en n’hésitant pas à l’abandonner pour ce qu’il croit juste.

Ce roman, c’est une lueur d’espoir dans un monde où tout est régit par le pouvoir. C’est l’envie d’une autre vie, la difficulté de partir mais le bonheur d’être soi. C’est les rencontres et ce qu’elles apportent comme ce qu’elles peuvent prendre. C’est la douceur de la mer et son impétuosité. C’est la vie et la mort finalement entremêlées.

C’est une plongée dans la nuée que je ne peux que vous encourager à tenter.