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Depuis longtemps, ils savait que le Lothan Aklun volait la force vitale d'enfants du Quota sélectionnés grâce à un système de capture des âmes, pour ensuite transférer cette force dans d'autres corps.

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PROLOGUE

Luana, pendant la neuvième année du règne d’Hanish Mein

Ce n’aurait dû être que lui. Lui seul. Ravi le cria encore et encore, sautant en l’air pour attirer l’attention. Il se fraya un chemin parmi les autres enfants et agrippa toutes les capes rouges à sa portée. Les soldats l’ignorèrent ou le bousculèrent, certains le rouèrent de coups de cravache. Ravi hurlait de plus belle. Ils commettaient une erreur ! Il irait avec eux, où qu’ils veuillent l’emmener. Il leur obéirait, ferait tout ce qu’ils exigeraient de lui, mais Mór ne devait pas connaître le même sort ! Elle était le seul autre enfant de leurs parents. Ils avaient besoin d’elle. Sans elle, leur mère ne survivrait pas. Il l’avait entendue le dire plus d’une fois.

— Je vous en prie ! cria-t-il. Relâchez-la ! Laissez-la rentrer à la maison !

Un soldat au corps massif se tourna vers lui. Il était plus petit que la moyenne, avec un torse épais, la peau tannée et les cheveux aussi rêches que les piquants d’un porc-épic. Sa chemise écarlate était tendue à craquer sur son ventre. Il saisit le menton de Ravi et se pencha vers lui. Son souffle empestant l’oignon balaya le visage de l’enfant.

— Vous appartenez tous les deux au Quota, dit-il avec un accent inconnu de Ravi. Tu comprends ? Vous êtes du lot. Deux pois de la même cosse, deux chiots de la même portée. C’est comme ça, gamin. Accepte-le et ta vie ne sera pas si mauvaise.

Puis l’homme le repoussa. Quand Ravi s’accrocha à son bras, le soldat grommela qu’il avait été assez patient. Il serra le poing et frappa le garçon sur le nez. Pour Ravi, tout devint noir un instant et quand il reprit ses esprits, il resta là, toussotant, à moitié assommé, les lèvres et le menton barbouillés de sang.

— Ravi…

La voix de sa sœur finit par l’atteindre. C’était en partie à cause d’elle qu’il avait crié. Il redoutait de l’entendre. Il voulut se diriger vers une autre cape rouge, mais Mór le prit dans le piège de ses bras et refusa de le lâcher.

— Je t’en prie, arrête ! Ça ne sert à rien. Tu vas seulement les mettre encore plus en colère.

Plus en colère ? songea-t-il. Plus en colère ? Quelle importance ? Il faillit se retourner contre sa sœur, mais elle le tenait fermement embrassé, et tout compte fait il ne souhaitait pas vraiment se libérer. Elle avait raison, il le savait. Elle montrait toujours plus de sang-froid que lui. Elle ne se dispersait jamais, comme lui le faisait trop souvent. À la ferme, chaque jour, elle travaillait sans arrêt, et sans hâte. Elle se comportait comme une vieille femme, pensait-il parfois. Mais s’il était plus rapide et plus fort que sa sœur, elle terminait toujours ses tâches la première. En ce moment même, elle montrait plus d’assurance que lui. Cette constatation eut pour effet de le calmer, plus que son étreinte, la lassitude ou les coups reçus.

— Viens, dit-elle en tentant de le ramener au milieu des enfants. Il vaut mieux qu’ils ne te voient pas. Ils ne me libéreront pas, tu le sais bien. Et ils risquent de nous séparer si tu continues d’attirer l’attention. Je ne veux pas me retrouver seule, Ravi. Il ne le souhaitait pas non plus. Il se laissa guider, et ils se glissèrent dans la foule jusqu’à n’être plus que deux têtes parmi tant d’autres. Maintenant qu’il avait cessé son esclandre, sa sœur et lui n’étaient pas différents de ceux qui les entouraient. Il identifia quelques habitants du village voisin. Les autres lui étaient inconnus mais, à en juger d’après leurs vêtements, leur comportement et leurs regards apeurés, ils étaient très semblables aux jumeaux. C’étaient eux aussi des enfants de fermiers venus du territoire fertile et isolé situé au nord de la Région des Lacs. Ils avaient été rassemblés près d’une ville. Ils étaient pareils à des moutons parqués dans un enclos et surveillés par des loups en cape rouge.

Combien étaient-ils ? Des centaines, se dit-il. Les plus jeunes avaient sept ou huit ans, les plus âgés treize, comme lui et sa sœur. Tous affichaient ce même air hagard et beaucoup chuchotaient avec leurs voisins pour tenter de comprendre ce qui leur arrivait. Les visages étaient crasseux, les joues striées par les larmes. La plupart d’entre eux étaient blonds, avaient une peau douce et claire, de petits yeux enfoncés, et parfois les étrangers se moquaient d’eux car ils les croyaient passifs et peu éveillés. Ce qui n’était pas le cas. Ils vivaient assez au nord pour être négligés par le Monde Connu. Tout avait changé brutalement, Ravi s’en rendait compte, et ce changement semblait déjà irréversible.

Les jumeaux s’assirent côte à côte, parmi les autres. Mór demanda à son frère de relever la tête pour lui essuyer la figure avec sa manche. Il obéit à contrecœur et se laissa faire sans parvenir à la regarder franchement. Il n’avait pas encore pleuré, et il craignait de céder aux larmes s’il voyait son visage : les traits de sa sœur étaient un rappel trop douloureux de ce qu’ils avaient perdu.

Quelques jours plus tôt, le monde de Ravi se mesurait en vastes terres cultivées et en landes autour de son village, au nord de Luana. La petite maison familiale était posée sur une colline entourée de champs de pommes de terre rouges à la chair douceâtre – une des principales productions locales. Les demeures de leurs voisins les plus proches ponctuaient l’horizon, séparées les unes des autres d’environ un kilomètre. Un paysage isolé, humide chaque matin et généralement frais pendant la journée, quelle que soit la saison. Le quotidien de Ravi consistait à assumer sa part des tâches qui aidaient à faire vivre modestement une famille de quatre personnes.

Son père était un homme placide, aux grandes mains, qui claudiquait à la suite de quelque blessure d’enfance. Sa mère avait les dents de travers et ne les cachait pas, car elle riait autant qu’elle parlait. Elle avait perdu deux enfants en couches avant de donner naissance aux jumeaux. La chose n’était pas rare. Si elle était triste malgré tous ses sourires, elle prenait soin de n’en rien laisser paraître.

Il avait rêvé de s’échapper pour une existence plus excitante, peut-être en embarquant sur un navire marchand, à moins qu’il rejoigne les gardes qui patrouillaient parfois dans la province, ou qu’il vole un cheval et parte à l’aventure. Mais rien ne s’était passé comme il se l’était imaginé.

Les hommes en cape rouge étaient arrivés aux heures les plus sombres de la nuit. Le garçon entendit frapper à la porte. Un moment plus tard, son père grommela quelques mots, la porte grinça et des murmures s’élevèrent. Ravi crut qu’un des voisins venait demander de l’aide. La ferme près des marais avait récemment connu des problèmes avec des voleurs de moutons. Peut-être voulaient-ils organiser une traque.

— Ravi, chuchota Mór depuis sa couche, de l’autre côté de la pièce, qui est-ce ?

Il lui fit signe de se taire. Il repoussa son drap, avec l’intention d’aller sur la pointe des pieds jusqu’à la porte, avant de se figer, les doigts crispés sur le tissu.

Un cri avait retenti dans la pièce principale, puis il y eut le bruit d’un objet – une chaise, lui semblat- il – que l’on renverse, des pas sur le sol en terre battue. Une autre exclamation furieuse, suivie de jurons et de sons qu’il identifia comme des coups de poing. Il fit basculer ses jambes hors du lit et posa les pieds sur le sol. La lumière qui filtrait autour de la porte dansa et devint plus vive. Il la regarda fixement, tandis que Mór retenait son souffle.

La porte de leur chambre s’ouvrit brusquement, à la suite d’un coup de pied botté. Les torches illuminèrent la pièce avec une intensité cruelle, et dans cet éclat émergèrent les corps massifs d’homme vêtus d’écarlate. Le premier traversa la chambre et abattit une main sur le cou de Ravi. Il se pencha pour dévisager le garçon, la torche si près de sa tête que ses traits étaient un mélange d’ombres et de rehauts. Un deuxième se dirigea vers Mór. Il était moins brusque. Il plaça un doigt sous le menton de la jeune fille et tourna son visage pour que son acolyte puisse le voir.

— Oui, vous êtes les deux faces d’une même pièce. Vous ne faites qu’un, ensemble dans le ventre de la mère, ensemble dans le destin. Les membres de votre conseil nous ont dit vrai. Allez, debout tous les deux. Nous ne vous ferons pas de mal si vous venez bien sagement.

Il était à la fois brusque et déterminé. Il faisait preuve d’une telle autorité naturelle que Ravi se leva sans même y penser. Mór et lui furent poussés dans la pièce principale. Ce que le garçon vit alors ne devait rester que par fragments dans sa mémoire – des images incohérentes saisies pendant qu’il trébuchait sous les bourrades. Il vit le visage de sa mère, bouche ouverte, les dents pareilles aux crocs d’un loup ou d’un ours. Du regard il chercha son père. Il ne put le trouver. Un groupe d’hommes se tenait près du poêle ; leurs bras et leurs jambes s’agitaient comme ceux d’un monstre improbable. Il ne put l’apercevoir dans cette confusion, mais il eut la certitude que son père était au centre.

On le mena sans ménagement vers la porte. Son pied accrocha le seuil et il s’écroula de tout son long à l’extérieur, dans la nuit. Il roula sur le sol et eut un moment de lucidité quand il vit les hommes qui sortaient derrière lui. Des capes rouges. Ils portaient des capes rouges ! Cela signifiait que Mór et lui allaient être livrés aux Dévoreurs ! Des garçons plus âgés le lui avaient affirmé : de temps à autre, le roi du Sud envoyait ses chasseurs à travers la Candovie à la recherche d’enfants dont son dieu aimait à se repaître. Ravi n’y avait jamais cru. Cela ne s’était jamais produit de son vivant, et il savait que les garçons plus âgés étaient cruels, et surtout menteurs. Mais à présent, il était à terre, son père était roué de coups, sa mère avait le masque d’une louve, sa sœur poussait des cris de protestation…

Sa colère fut instantanée, et totale. Il donna un coup de pied à l’homme penché vers lui et l’atteignit de biais au menton. Sa fureur en fut redoublée et il décocha coup sur coup, ses jambes se repliant et se détendant comme des pistons tandis qu’il se tortillait sur le sol. Étouffant un juron, l’homme recula précipitamment, pour revenir aussitôt à la charge. Cette fois, il mit toute la puissance de son corps dans la pointe de sa botte. Ravi essaya de la saisir et de déséquilibrer son assaillant, mais celui-ci se dégagea et frappa de nouveau. D’autres se joignirent à lui.

Ravi perdit connaissance. Il ne garda donc aucun souvenir de la façon dont on les jeta dans un chariot qui attendait au bord de la route. Il n’entendit pas davantage les gémissements de sa mère, ne la vit pas apparaître sur le seuil de la maison, retenue par un soldat à la poigne de fer. Et Mór ne lui en dit rien. Pourtant il le sut. Aussi sûrement que si sa sœur lui avait prêté ses oreilles et ses yeux, il sut.

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