Amazones, Tome 1 : Le serment des coeurs

Lothar s'était levé à l'aube, taraudé par un malaise étrange qu'il ne parvenait pas à identifier. Ses pensées n'avaient cessé de glisser vers la belle Amazone tandis qu'il se tournait et se retournait dans son lit une bonne partie de la nuit, n'arrivant pas à trouver le sommeil.

Dans la cour, la terre était encore détrempée. Les poules étaient sorties de leur cachette et se plaisaient à tirer de leurs becs acérés les vers remontés en surface. Elle s'écartèrent d'un battement d'ailes, piaillant, au passage de Lothar. Comme chaque matin à la belle saison, il commença la journée par une baignade dans l'étang ; l'eau fraîche le revigora et acheva de le réveiller. Une fois vêtu, il prépara une bouillie d'orge et de miel pour l'Amazone, repoussant cependant, par toutes sortes de petites activités, le moment de lui faire de nouveau face.

Lorsqu'il poussa la porte de la bergerie, le bol de bouillie à la main, son coeur battait furieusement dans sa poitrine. Il crocha le battant; laissant entrer la lumière de cette radieuse matinée. Les moutons bêlèrent de plaisir et il s'écarta pour les laisser sortir et paître dans la clairière. Aelis reposait recroquevillée sur le sol, manifestement endormie et encore trempée des orages de la nuit. Il distinguait à peine le lent mouvement de sa respiration.

Du bout du pied, il la poussa doucement afin qu'elle se réveille. Elle ne bougea pas. Il s'accroupit alors à côté d'elle posa le bol sur le sol et la secoua plus fermement, mais elle ne bougea toujours pas. Les mains tremblantes, il la prit sous les aisselles et la souleva pour l'asseoir contre le mur. Sa tête retomba mollement sur son épaule, son tronc s'avachit. La peur s'empara alors de Lothar. Est-ce qu'elle allait mourir ? Il sentit les battements de son coeur s'accélérer et la sueur dégouliner le long de son échine. Saisissant son petit menton entre ses mains épaisses, il lui asséna une gifle, puis une autre. Aelis s'affaissa sur le sol, les yeux ouverts, vides. Pris de panique, il posa la main sur sa poitrine glacée ; son coeur battait lentement, elle vivait encore. Il la souleva alors dans ses bras et la ramena en hâte dans la maison. Il lui enleva ses haillons, l'enroula dans une peau de bête et la coucha près de la cheminée, dans laquelle il alluma quelques bûches sèches. Puis il lui frictionna les pieds, les mains, essayant de faire revenir la vie en elle. Elle devait vivre !