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Extrait ajouté par doudouedition 2022-09-08T09:43:09+02:00

Le groupe

Patricia pousse timidement la lourde porte en bois qui se dresse devant elle sans trop savoir ce qu’elle va trouver derrière.

Elle passe anxieusement la tête dans l’entrebâillement avant de pénétrer dans cette grande salle avec angoisse. Des femmes sont assises en cercle. La plupart ne la voit pas arriver. Seules deux femmes remarquent sa présence et se retournent vers elle. Elles lui sourient poliment en lui indiquant qu’une place est libre auprès d’elles. Patricia hésite. Elle balaie du regard la salle toute entière.

Les murs sont couverts de publicités, d’affiches, d’horaires pour des réunions en tout genre et d’une grande banderole : « ici la pa- role est libre ». Au sol, des tomettes rouges sont propres et bril- lantes malgré les centaines de pieds qui les foulent chaque jour. Des pas lourds comme les cœurs de ceux et celles qui viennent ici par- tager un quotidien pesant. Patricia rassemble tout son courage pour avancer, face à ces inconnues, avec l’impression de déambuler nue, vulnérable. Nue comme face à son miroir. Ces femmes qui la re- gardent, savent-elles que chaque matin elle redoute cet instant quand elle sort de sa douche. Celui du reflet dans lequel elle espère voir un changement physique majeur. Ressentir une envie de vomir au simple effluve de l’odeur du café qui est en train de couler dans la cuisine. Espérer apercevoir des veines colorées sur sa poitrine, un ventre un peu plus rebondi que la veille. Parfois elle parvient à les voir ces transformations corporelles. Son cerveau se met alors à

bouillonner de rêves, d’espoirs et de projections futures diverses et variées. Et puis, son image la ramène dans la réalité. Aussi dure et terrible soit-elle. Après tout le corps change tout au long de notre vie, surtout le corps féminin, rythmé comme une montre suisse.

8 Amnésie criminelle

Seul le temps qui s’écoule, semaines après semaines, témoigne d’un changement profond et durable que l’on peut voir évoluer jour après jour seulement quand on en a connaissance.

Patricia se dirige lentement vers cette chaise qui lui a été indi- quée précédemment. Il y en a bien une autre de libre, mais elle est

à l’autre bout de la pièce et elle ne se sent pas la force d’avancer davantage. Elle sourit poliment à ses voisines et s’assied en pre- nant soin de serrer son sac tout contre elle, posé sur ses cuisses, collé à son ventre. La partie de son corps qu’elle déteste le plus, même si beaucoup de femmes le lui envient. Ce ventre si plat, si musclé, si parfait. Ce ventre qui ne fait que lui rappeler chaque jour qu’il est désespérément vide et sans aucune utilité. Elle dé- noue son foulard fétiche, celui offert par son mari Melvin pour leur première Saint-Valentin fêtée dix ans auparavant, et se met à le tournicoter entre ses doigts comme chaque fois qu’une émotion la submerge, qu’un stress vient casser le calme intérieur qu’elle s’efforce d’atteindre à chacune de ses séances de méditation quoti- dienne. Les oiseaux qui décorent son étoffe lui redonnent souvent une bouffée d’oxygène et les fleurs colorées la projettent immédia- tement dans une clairière par un bel après-midi de printemps. Si elle ferme les yeux, elle entend chanter les volatiles et frémit au souvenir de la bise légère qui souffle dans le champ de coquelicots qui accotait la ferme de sa grand-mère. Elle se détend un peu, lâche les extrémités de son étole et prend le temps de les placer convenablement sur le col de sa veste. Le moment qu’elle redou- tait arrive. Tous les yeux se braquent sur elle. La nouvelle. Celle dont on ne connait pas l’histoire. Celle qui doit prendre la parole pour se présenter à tout prix. Celle qui va devenir leur sujet de conversation pour la soirée. Un silence lourd et pesant s’installe.

Plus le moindre bruit de talons qui claquent sur le sol, plus de froissements de vêtements, plus de chuchotements, plus de soupirs même plus un souffle de respiration. Patricia a chaud. Elle sent ses joues se roser et une goutte de sueur qui perle sur sa nuque vient humidifier une de ses longues boucles rousses. Elle rassemble tout son courage et dit d’un ton timide :

Le groupe 9

« – Bonjour, je m’appelle Patricia. »

« – Bienvenue Patricia » répondent en chœur les femmes de cette assemblée spéciale.

Patricia fait silence et se rassoit, espérant qu’une autre per- sonne prenne la parole et vienne briser cette atmosphère intimi- dante. Une femme se lève pour indiquer qu’elle va prendre la parole. Patricia se décrispe un peu et écoute attentivement celle qui vient de la sauver d’un embarras intense. Un « Bonjour Violette »

prononcé collectivement ne forme pourtant qu’une seule voix.

Timidement, Patricia le prononce à son tour et se sent de nouveau désemparée quelques secondes.

« – Patricia, je m’adresse à toi au nom de nous toutes. Nous sommes ravies de t’accueillir dans cet atelier de parole libre. Ici, personne ne te jugera, personne ne parlera en même temps que toi.

Tu auras l’attention et le soutien que tu mérites dans l’absolue neu- tralité. Ce qui se dit entre ses murs reste emprisonné dans le béton.

Nous toutes sommes dans une situation similaire à la tienne.

Aucune de tes confidences ne sera sujet à moqueries, aucun mot ne sera choquant, aucune larme ne sera solitaire, aucun sanglot ne sera de trop. Tu es libre de dire tout ce que tu as envie de dire, ton

émotion du moment sera toujours juste puisque c’est celle qui te submerge à l’instant précis où tu la partages avec nous ! Voilà, je suis Violette Prévot, je suis psychologue et infertile. J’anime cet atelier depuis trois ans maintenant. Même si le chagrin ne disparait pas, il peut être apaisé quand il est compris et partagé avec d’autres. C’est ma conviction première et c’est elle qui me donne le courage chaque semaine de venir partager ma vie personnelle et mon expertise professionnelle avec vous. La parole est maintenant

à celle qui se lèvera pour la prendre. Merci. »

Violette reprend place sur sa chaise. Jambes croisées, les bras nonchalants, décontractés, pendant le long de son corps, tout son

être dégage calme et assurance.

Patricia l’observe quelques instants. « Une belle femme » se dit-elle. Un teint de porcelaine rehaussé par un rouge à lèvres

10 Amnésie criminelle bordeaux intense et juste un peu de mascara. Une coupe de che- veux courte et ébouriffés faite de mèches d’une palette de couleurs allant du brun foncé à l’auburn chatoyant automnal, du rouge cui- vré au châtain profond, du blond cendré au roux carotte, ce mé- lange de couleurs lui donne bonne mine. Des yeux verts pétillants et un petit nez retroussé. Un petit tailleur noir classique mais par- faitement ajusté sur une paire d’escarpins rouge vernis à la hauteur vertigineuse font d’elle une vraie Working-Girl moderne !

Soudain, la voisine de Patricia se lève et annonce le plus sim- plement du monde :

« – Eh bien bonjour à toutes. Je suis Laure. Ma nouvelle tenta- tive a encore échoué. Me voilà de nouveau au fond d’un trou émo- tionnel sans fin. Un trou noir béant. Voilà des semaines que je pleure sans pouvoir m’arrêter. Et comme si ce n’était pas assez difficile de vivre ce nouvel échec, mon compagnon de vie, Joé, a décidé qu’il n’en pouvait plus. Que si nous n’arrêtions pas notre combat pour devenir parents, la procréation médicalement assistée aurait raison de notre couple. Je suis folle de rage ! Non pas à cause de son ras-le-bol que je comprends bien plus qu’il ne le pense, mais par le fait que devenir père n’est pas un désir assez important pour lui. Ou pire, qu’il ne m’aime pas suffisamment pour supporter cela avec moi ! Peut-être qu’il ne m’aime pas autant que je le croyais.

Cela me fend le cœur... » Laure se laisse tomber sur sa chaise comme si elle n’était plus qu’un poids mort. Des larmes coulent sur de nombreuses joues. L’empathie est respirable, la compassion palpable, la tristesse écrasante. Patricia, en essayant de ne pas faire de bruit comme pour respecter cette minute de silence presque ma- cabre, attrape un mouchoir dans la poche de son trench. Une autre femme se lève et prend la parole à son tour.

« – Babeth. C’est mon nom, mais ce n’est pas moi. La Babeth que je suis dans mes rêves a trois enfants qui s’appellent Tom, Line et Julian. Pour avoir accès à ma vraie vie, je dois dormir. Pour dor- mir il me faut prendre des substances. De plus en plus de subs- tances. Celles en vente libre ou sous prescription médicale ne font

Le groupe 11 plus le moindre effet, alors je me rabats sur celles qu’on trouve dans une ruelle sombre à la nuit tombée, celles qu’on cache à tout le monde y compris à soi-même. Je rencontre ce grand mec longi- ligne, la capuche d’un sweat-shirt noir surplombant une casquette, des baskets blanches qui prennent presque le rôle de la seule source lumineuse disponible avant le coin de la rue adjacente. Un mec sans identité, sans visage, sans nom, sans face. Je repars avec mon petit sachet que je serre dans ma main. Je le serre si fort que j’ai peur de le craquer. La sueur qui se forme ma paume de main me fait douter de trouver mon produit en bon état quand je serai enfin rentrée chez moi. La peur au ventre de me faire arrêter par la police me fait sentir que j’ai des entrailles et qu’elles servent à quelque chose malgré tout. Ma vie idéale reprend dès que je quitte votre compagnie mesdames. Et je la préfère de loin. » Dit-elle désolée.

Elle se pose comme une plume sur son siège. Un silence res- pectueux s’installe immédiatement. Ses mots résonnent en chacune comme un coup de poignard. Ce même coup que les femmes res- sentent chaque mois. Ces profonds tiraillements, ce désespoir vide de sens.

Babeth est une petite femme. Blue Jeans délavé, grand pull de laine noire avec un col roulé si large qu’elle peut recouvrir sa tête entière avec, une paire de mocassins simple et sans chichis. Pas de bijoux, pas de maquillage. Des cheveux longs brun foncé qui ont renoncé eux aussi à la brillance. Pas la moindre distinction pour ne pas attirer le regard des autres. Un teint terne et blafard, des yeux marron sans étincelles assombris par des cernes bleutés et creusés, des lèvres minces et pincées qui laissent apparaître quelques ri- dules naissantes donnent une indication sur son âge réel, entre trente-cinq et quarante ans vraisemblablement. Elle est devenue experte pour se rendre invisible et déambuler dans la foule sans que personne ne la voit jamais. Elle se faufile incognito, tel un serpent, elle glisse entre les gens sans attirer l’attention. En les croisant, elle baisse la tête, leur montrer son visage est bien trop dur. Elle qui n’est plus qu’une ombre, un corps sans âme dont le cœur ne veut pas s’arrêter de battre malgré ses nombreuses

12 Amnésie criminelle tentatives pour faire cesser cette machine infernale. Malgré tous les poisons qu’elle ingurgite et sniffe jour après jour. Alors quand elle doit se rendre chez un médecin, aller faire des courses, se rendre au marché, acheter des chaussures ou tout autres futilités qui n’ont aucune importance dans sa vie, elle se hâte. En essayant de refouler toutes ses pensées qui la font chavirer en un instant, celles qui lui rappellent ce qu’elle a fait quelques jours auparavant.

Celles qui lui rappellent que son ventre est douloureux et tuméfié

par les coups qu’elle s’est auto-infligés. Tout ce qui compte est de faire ce qu’elle doit le plus rapidement possible pour vite rentrer chez elle, dans son cocon. Retrouver la boîte en bois de son grand- père qui trône sur la table basse du salon. Cet objet qui renferme les substances qui lui permettent d’échapper à la réalité. Cette même boîte qui attire les yeux de tous ceux qui posent un regard sur elle tellement les sculptures qui l’ornent sont fines et magni- fiques. Une petite œuvre d’art dans un intérieur quelconque dont personne n’en soupçonne le contenu.

Chacune plongée dans leurs pensées après ce témoignage bouleversant, aucune n’a remarqué qu’une autre femme s’est le- vée. Elle reste muette. Son regard vide de toute émotion semble fixer un point noir imaginaire sur le mur blanc qui lui fait face. Le silence est pesant. Ses larmes sillonnent les traits tirés de son vi- sage et viennent s’écraser sur ses cuissardes de cuir noir dans un léger bruissement à peine audible. Comme des gouttes de pluie venant mourir sur une vitre. Une atmosphère lourde envahit alors toute la pièce. Personne ne rompt le pacte. Le pacte qu’elles ont toutes signé tacitement en intégrant ce groupe, celui de ne jamais parler quand quelqu’un se lève pour partager son histoire, évacuer son désespoir et ses idées noires.

Ces mêmes idées sombres qui font irruption à la nuit tombée, quand Amanda est bien au chaud dans notre lit. Quand ses yeux se ferment pour forcer son cerveau à s’endormir, à ne plus penser. Ce sommeil après lequel elle court quand ses vieux démons font sur- face dans la pénombre de son esprit et tentent de l’emmener dans une vision de l’enfer qui est le sien. Son image mentale de l’enfer

Le groupe 13 finit toujours par la hanter. Les abîmes morbides effrayants et infi- nis. Représentation de toutes ses peurs inavouables, ses secrets les plus sombres, ses rêves désespérés inatteignables et ses projets de vie inachevés. Cette noirceur mentale qui occupe soudain tout l’espace de sa boîte crânienne à un point tel que toutes ses connais- sances sont inexistantes et inaccessibles pendant un court instant qui lui paraît interminable. Moment pendant lequel elle chute men- talement dans un puits sans fond ni lumière. Puis le sursaut de ses muscles la sort de cet état second, elle revient alors dans la réalité, la même qu’elle a essayé quelques minutes auparavant de fuir en fermant ses paupières lourdes et fatiguées. En ouvrant les yeux, elle scrute sa chambre à la recherche d’une infime source lumineuse. Le réveil affiche d’un rouge écarlate trois heures trente-trois...

Cette femme se rassoit sans dire un mot. Il est trop difficile pour elle de parler. Patricia ne sait pas que cette femme n’arrive jamais à prononcer la moindre phrase, comme si elle n’était pas digne de se confier et encore moins de se plaindre. Un mystère complexe entoure cette personnalité tourmentée.

« – Merci Amanda » dit Violette, suivi de toute l’assemblée qui chuchote un « merci » collectif à peine audible comme si le silence de ce moment solennel ne devait pas être rompu. Elle relève la tête en tentant d’esquisser un sourire de remerciement, mais sans y par- venir, elle se contente de cligner des yeux et baisse la tête de nou- veau. A présent, un petit morceau de papier jonché sur le sol aspire son attention. La voilà de nouveau emprisonnée dans ses pensées, sa prison psychologique. Son cerveau lui laissant à peine un peu d’attention pour rester consciente de l’endroit où elle se trouve.

La simple vibration du téléphone de Violette ramène tout le monde dans le présent. La séance est terminée. L’heure est déjà

achevée. Une heure si intense qu’elles en sont toutes bouleversées.

Elles relèvent la tête en une fraction de seconde, comme si la sirène des pompiers les avait sorties d’un de leurs effroyables cauchemars.

Ces maudits songes desquels elles se réveillent assises comme si elles avaient reçu une décharge électrique pour les réanimer.

14 Amnésie criminelle

Sentant leur échine dorsale trempée de sueur et la peau de leurs visages tiraillée par le sel des larmes qui ont coulé le long de leurs tempes pour venir s’échouer à la naissance de leur chevelure avant de mourir sur leur oreiller. Les talons claquent de nouveau sur le sol. Elles sont toutes debout, hissées sur les quelques centimètres qui définissent la féminité. Le froissement des lanières des sacs à

main sur les vêtements vient compléter l’ouverture de la symphonie suivi de quelques échanges verbaux. La vie reprend son cours.

Comme si cette heure n’avait jamais eu lieu, qu’elle était restée suspendue dans une réalité parallèle. Violette s’approche de

Patricia pour faire un peu plus connaissance.

« – Comment vas-tu Patricia après cette première séance avec nous ? »

« – Plutôt bien merci. C’est très intense ici. Comme dans ma tête en fait. Moi qui me pensais différente, enfin folle pour être précise, je m’aperçois que ce que je ressens est très banal dans la réalité qui est la nôtre. »

« – Personne n’est fou ici. Chacun vit son malheur comme il le peut. Nous avons toutes des échappatoires, même imaginaires, pour rester connectées à la vie que nous devons subir et vivre malgré

tout. Aurions-nous le plaisir de te revoir la semaine prochaine ? »

« – Oui je pense que je reviendrai. Je ne peux pas vous dire si je serai présente chaque jeudi mais je reviendrai. Je m’excuse de n’avoir pas pris la parole. C’était trop tôt pour me confier. »

« – Ne t’excuse de rien. Venir ici ne t’oblige pas à parler.

Amanda en est la preuve. Malheureusement, cela fait plusieurs mois qu’elle vient à nos réunions, mais elle n’a pas encore trouvé les res- sources nécessaires pour partager son histoire avec nous. Mais ce n’est pas grave. Le fait qu’elle vienne chaque semaine nous prouve que nous lui apportons un peu de bien-être dans son quotidien diffi- cile et c’est déjà une petite victoire en soi. Nous sommes ici pour nous entraider, nous permettre de souffler un peu en sortant de notre cadre monotone et répétitif quotidien, de nous confier, de nous ras- surer, de nous redonner la force d’affronter une autre semaine. »

Le groupe 15

« – Merci pour ta bienveillance. Ce que tu viens de me dire me donnera certainement l’envie de sortir de chez moi jeudi prochain. Il me faut rentrer à présent. Bonne soirée et à très bientôt Violette. »

« – Merci. Belle soirée et à très vite. Prends soin de toi. Au revoir Patricia. »

Patricia s’éloigne doucement en faisant un signe de la main à

celles qui ont formé un petit cercle pour discuter plus intimement.

Violette les a rejointes en agitant entre ses doigts son trousseau de clés. Elle doit, à regret, presser les retardataires à quitter la salle de réunion. Alors qu’elle ferme la porte, elle se rend compte qu’une femme l’attend dans le couloir qui conduit au parking. Elle n’aime pas devoir bâcler une discussion avec une patiente, c’est donc le cœur gros qu’elle doit annoncer à Laure qu’elle ne peut pas lui consacrer de temps pour l’instant. Cette pauvre Laure qui vit un nouveau drame avec une double peine, celle d’avoir perdu un bébé

pour la quatrième fois et celle de faire un choix entre son désir de maternité et son couple, bien qu’ayant vraiment besoin de parler, comprend tout à fait les obligations professionnelles de Violette.

En essuyant ses dernières larmes, elle lui dit au revoir et s’éloigne.

Violette la rattrape pour lui donner sa carte de visite en apposant au dos son numéro de téléphone personnel.

« – Tu peux m’appeler le soir après vingt-et-une heures si tu en as besoin Laure. Saches que tu n’es pas toute seule et même si je ne peux pas prendre les décisions à ta place, je peux t’écouter. Je suis désolée, il faut vraiment que j’y aille, mais n’hésites surtout pas à m’appeler Laure. Prends soin de toi ! »

Un sourire timide se dessine sur le visage de Laure. Le simple fait d’avoir cette carte lui donne le courage d’affronter le monde extérieur dans lequel elle est à présent en immersion. Violette est attendue à l’autre bout de la ville dans le cabinet médical qu’elle partage avec son associé le Docteur Thomas Puget. Eminent psy- chiatre reconnu par toute la profession et écrivain de talent qui jongle entre ses patients, pour qui il est toujours disponible ...

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