Extraits

Ariane et moi voulions rester seules et, pendant deux ans, les deux années passées au collège du Saint-Sauveur avant que je sois amenée à le quitter, nous le fûmes. Toutes seules toutes les deux et toutes-puissantes de cette ostracisation choisie. Les autres étaient des intrus, ils diluaient nos pouvoirs par leur seule apparition furtive dans le décor.

À mes yeux, grandir à Nivelles, c’était s’assurer un horizon étroit comme un chas d’aiguille, opter pour des études chiantes choisies pour leurs débouchés, exercer ensuite un métier somnifère mais rémunérateur : juriste dans les assurances, conseiller en crédits, responsable qualité dans une boîte pharmaceutique. Aucune star n’était jamais née à Nivelles ; ses plus illustres citoyens étaient ses élus locaux chauves à lunettes et gros pifs, fiers de se dire de droite « par idéal et conviction », charismatiques comme des dentistes. Portrait-robot de l’individu dupliqué à l’infini sur le territoire de la commune.