Au nom de la bête

Mardi 11 juillet, Broignat

On n’était qu’en milieu de matinée, pourtant le soleil tapait déjà fort. Tout aurait pu être au mieux dans le meilleur des mondes, si la bise n’accompagnait pas la température. «C’est une année à vent du nord! Une année de pas grand-chose !» disaient les anciens, en secouant la tête d’un air entendu. Comme si chacun était à même de comprendre l’inéluctabilité et la concomitance de la chose!

Ce vent venu des confins de la Bresse du Nord avait la particularité de croûter les sols, buvant l’humidité des couches supérieures des terrains, les rendant durs et quasi imperméables. Les jardins souffraient, comme les grandes cultures fourragères. Si ce temps-là continuait, on allait droit à la catastrophe. Alors même que le sous-sol était humide, à une vingtaine de centimètres sous la couche sèche !

Marius Ordinot soupirait au beau milieu de son potager, constatant les dégâts que cette fichue bise occasionnait parmi ses légumes. Tout se desséchait à vue d’œil… à part les mauvaises herbes. Ravies de prendre le dessus au nez et à la barbe de tous les jardiniers, elles ne souffraient pas de ce temps trop sec, et envahissaient peu à peu toutes les parcelles, des salades aux plants de tomates, en passant par le carré de patates qui ne grossiraient pas beaucoup.