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Ayélé, fille de l'ombre



Description ajoutée par njfok 2012-11-16T14:56:10+01:00

Résumé

Auguste Durand, mon grand-père, déteste les Noirs et les artistes.

Adèle Durand, ma grand-mère, déteste les Noirs mais aime les scientifiques.

Marie-Eléonore, ma mère, aime ses parents, devient scientifique et épouse un chercheur français.

Et pourtant, je suis métisse et mon père est Noir et artiste…

***

Un ton,

Un éclairage,

De l'acuité dans l'analyse,

Un sujet douloureux et complexe mais traité dans l'élégance, grâce d'ailleurs à un humour incisif, présent ou sous-jacent.

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Classement en biblio - 1 lecteurs

extrait

Extrait ajouté par Magitto 2013-01-26T19:24:49+01:00

En cet après-midi de juillet, les fidèles, et surtout les non fidèles, prennent d’assaut la cathédrale pour m’exprimer une dernière fois leur compassion. Les badauds, les lépreux, les handicapés, tous les exclus de Dieu, sont agglutinés sur le parvis et attendent, en discutant, que ma dépouille rejoigne le corbillard afin d’être inhumée, et contre ma volonté, au cimetière catholique de Bel Air.

Je suis morte sur la route de Kaolack. Il y a huit jours, un vieux camion Berliet lesté de plusieurs milliers de sacs d’arachides a percuté mon véhicule pour éviter un mouton qui, de toute évidence, aurait terminé en méchoui, pour la fête de Tabaski. Quelle malchance ! J’aurais dû croiser une chèvre. L’ovin, sauvé par la foi et la gourmandise du conducteur, s’éloigne en trottinant, la tête basse et laisse derrière lui, dans la cacophonie générale, une femme mi-blanche mi-noire, identifiable uniquement par sa carte d’immatriculation délivrée par l’ambassade de France.

Après avoir attendu en vain le chauffeur du camion qui s’est évaporé pour ne pas devoir présenter un permis de conduire qu’il n’a jamais passé, les autorités décident de transporter mon corps à Dakar. À peine suis-je à la morgue que le gardien subtilise tous mes bijoux. En effet, il pense, en toute logique de gorgorlou , qu’une morte n’en a plus besoin. En revanche, Pape Aliou, lui, bien vivant, pourra rembourser d’un coup ses dettes chez le boutiquier et s’offrir en troisième épouse, la petite Ndèye Bintou, à peine plus âgée que sa fille cadette et qu’il reluque depuis longtemps. Il remettra à sa future belle-mère mon collier en or, à sa promise mes bracelets et à tante Fatou, ma bague à la pierre bleue. Elle brille. Elle sera contente. Il n’a jamais vu un saphir de sa vie. Après avoir rempli la poche de son kaftan défraîchi, il fait ses ablutions, sort son tapis de prière et remercie Allah pour son infinie bonté. Alhamdoulillah , les morts ne parlent pas. Il a vraiment un bon métier.

Vêtue d’une longue robe de soie blanche, maquillée, un chapelet glissé entre mes doigts, me voilà prête pour mon enterrement. Je ne veux rien. Enfin, si. Je veux être incinérée, repartir en poussière, voir mes cendres disséminées dans l’immensité de l’océan, moi qui ai toujours détesté l’eau. Je veux rejoindre, au plus tôt, les personnes que j’ai aimées : père Eugène et Ludovic. Mais, contre mon gré, on m’a maintenue au froid pendant une semaine avant de m’allonger dans cette caisse de bois, doublée de satin mauve – j’ai toujours détesté le mauve – et exposée au regard des voyeurs.

J’abhorre les enterrements, sauf ceux d’Harold et Maud. Le grotesque des situations et l’hypocrisie ambiante m’agacent. Mais aujourd’hui, je vis mes obsèques avec le sourire. De ma position d’âme flottante, j’observe mes amis musulmans, en grand boubou blanc, qui prient Allah et récitent devant un Christ perplexe une litanie de janâza . Tout près, mes amis chrétiens, en costume sombre, plus assidus dans les maisons de passe qu’à l’église, chantent avec ferveur les cantiques, tout en enchaînant les fausses notes. Et Bertha, oui, Bertha la pleureuse cap-verdienne, ponctue chaque phrase du prêtre avec des sanglots de plus en plus déchirants pour ne pas faillir à sa réputation.

Mes deux familles se sont installées, comme au temps de l’apartheid, de part et d’autre de l’allée centrale. Côté lever du soleil, l’Afrique conduite par mon père et mon oncle Henri, un octogénaire à l’œil pétillant et à la répartie vive et, côté nuit, ma mère, Marie-Éléonore, dissimulée sous un immense chapeau et flanquée, comme à l’accoutumée, d’Adèle, ma grand-mère, une centenaire qui se cramponne de toutes ses inusables forces à la vie et à sa fille. Friedrich, mon compagnon, mon amour, sent ma présence et lève les yeux. Il connaît l’animosité que je voue à ce vieux dindon. Je cherche Dieu. Je veux comprendre. Pourquoi me rappelle-t-il alors qu’Adèle a tellement vécu qu’elle confond désormais l’aube et le crépuscule ?

L’office se déroule dans la ferveur et le recueillement. La quête, en ces temps de récession, a été miraculeuse. Les bigotes et les bigots qui ont acheté leur bonne conscience, s’avancent en rang d’oignons, les mains jointes, lavés de tous péchés, pour recevoir la communion. Le prêtre qui souffre de la chaleur dans la cathédrale bondée, invite une dernière fois l’assistance à prier pour moi, la regrettée disparue, enveloppe d’un nuage d’encens mon cercueil, se signe et se retire, suivi par les enfants de chœur. Quatre hommes, de noir vêtus, s’approchent et saisissent mon cercueil, avec une parfaite synchronisation. Les battements de tam-tam et les chants entonnés par la chorale de Julien Jouga emplissent la cathédrale. Cette beauté me couperait presque le souffle. Les fidèles se lèvent et quittent lentement la cathédrale pour se rendre au cimetière. Le cortège s’ébranle. Les voitures suivent le corbillard recouvert de couronnes de roses et de glaïeuls. J’aurais préféré du lilas blanc et des violettes. Ma dépouille sera bientôt inhumée avec quelques larmes. C’est la coutume. Je ne l’accompagne pas. Mon âme libérée de son corps continue de vivre et avant de rejoindre les cieux, je retrace une dernière fois, dans une sérénité toute nouvelle, ma vie de métisse et de fille de l’ombre en quête permanente d’amour et de reconnaissance.

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Ayélé, fille de l'ombre

  • France : 2012-12-05 - Poche (Français)

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