Commentaires de livres faits par Benjamin_Faucon
Extraits de livres par Benjamin_Faucon
Commentaires de livres appréciés par Benjamin_Faucon
Extraits de livres appréciés par Benjamin_Faucon
La vieille berline s’immobilisa sur la calle Paraguay, devant un petit bâtiment blanchâtre. De l’extérieur, l’hôtel était propre et présentait ce je-ne-sais-quoi typique des ouvrages inspirés par l’œuvre de Le Corbusier, alliant austérité et magnétisme.
Ewen ne fut pas déçu par l’intérieur de la petite chambre qu’on lui avait assignée. Des murs aux draps rayés, toutes les couleurs reprenaient le camaïeu de bleu d’une élégante nature morte accrochée au-dessus de la tête de lit.
Il déposa son sac à dos et s’étendit sur le matelas en soupirant. Depuis l’armée, c’était la première fois qu’il quittait le Canada, et ce nouvel air lui faisait le plus grand bien, comme si d’un simple coup de vent, tous ses travers et maux l’avaient quitté…
Un dernier coup de peigne et l’une de ses mains boursouflées vint cogner contre la porte de la maison victorienne.
Le visage étonné de Pamela Gartford-Rabbit accueillit le visiteur tandis que la progéniture de la dame s’émerveillait devant ce colosse de la nature. Albert Moufette eut également une réaction de surprise lorsqu’il fit face aux gros bras qui lui rendaient visite. Sa patte disparut dans celle de son invité lorsque celui-ci le salua.
L’entrevue prit rapidement une tournure loufoque lorsque le futur employeur commença à parler de littérature. Étonné, Gros-Pierre écouta en silence cet être extravagant qui tenait entre ses mains une pipe à savon et qui, tous les trois mots, relâchait dans les airs une bulle.
Une demi-heure plus tard, Albert se leva subitement et dévoila sa décision.
- Vous êtes engagé !
Tendr’Ours ne s’attendait pas à une telle rapidité dans le choix du candidat, mais trop content de s’être trouvé un emploi dans la grande ville de la province, il se tut et sourit.
Ainsi, sa nouvelle vie commençait. Il devait découvrir un nouveau monde, une autre façon de vivre cependant, il n’était qu’au début de ses surprises.
Toutefois, le dernier étage d’une maison victorienne dégageait une faible lumière alors qu’un adulte s’adonnait à l’une de ses passions. À la lueur d’une chandelle, Albert Moufette feuilletait un de ces livres anciens tombés dans l’oubli de ses concitoyens trop occupés qu’ils étaient à s’arracher l’une des dernières nouveautés à la saveur si insipide.
Né sous une bonne étoile, cet amoureux des Lettres n’éprouvait aucunement le besoin de travailler. Peu avant sa majorité, il avait hérité d’une fortune colossale lui permettant ainsi de passer ses journées à lire, jardiner et contempler des peintures de renom. Monsieur Moufette comptait parmi ces gens qui préféraient sauter des repas afin de terminer un roman plutôt que de perdre du temps à se mettre à table.
Dans le silence de son bureau, Albert referma le livre et le déposa sur une petite table ronde en bois d’acajou. Il enfila ses pantoufles cotonnées puis s’avança sur le plancher de bois franc avec précaution, de peur que celui-ci n’entonne une symphonie de craquements. Bien que ce mâle d’une quarantaine d’années soit correctement pourvu par la vie, cet esthète vivait en vieux garçon bichonné par Madame Gartford-Rabbit et son mari. Ce couple élevait leurs dix enfants tout en veillant au bon fonctionnement de l’habitation. Mario, le mari, s’attelait au bricolage de la maisonnée tandis que son épouse s’occupait de nourrir toutes les panses.
Il se redressa avant de lutter contre une douleur insupportable. Il plaqua ses mains sur ses oreilles et se retint de crier tant les maux qui l'affligeaient le faisaient souffrir. Une minute s'écoula avant que les premiers sons ne parviennent jusqu'à son cerveau. Le tout ne formait qu'un ensemble confus.
Marcus balada son regard tout autour de lui tel une biche effrayée. Que faisait-il ici ? Que lui était-il arrivé ? Mais sa plus grande interrogation demeurait sans aucune réponse…
Qui était-il ?
Il attendit que le dernier policier dépasse le coin de mur et disparaisse dans l'autre partie du couloir pour se rendre vers l'escalier. La grande porte de verre ouvrait sur une longue succession de marches en marbre.
D'un geste habile, il actionna la poignée dans un silence parfait avant de glisser dans l'ouverture. Pas un seul instant il ne lui vint à l'esprit que les lieux étaient truffés de caméras. Il referma délicatement la porte et dévala les marches en courant. Au mieux, les policiers prendraient une bonne minute avant de remarquer sa fuite, au pire… il n'en avait aucune idée !
Les volutes de fumée du havane s'élevèrent délicatement jusqu'au plafond de la pièce avant de se faire aspirer par le système d'évacuation d'air.
Il savoura une bouffée du cigare, puis expulsa lentement la fumée.
Tel un véritable amateur de cet art épicurien, il regardait avec admiration la pièce de tabac, déposant respectueusement dans le plat de cristal les cendres qui étaient sur le point de se détacher du double corona.
Le bruit impromptu de l'interphone le tira de ses rêveries.
« Oui ?
Matt serra Kelly contre lui, mais elle demeurait encore inconsciente. Oubliant ce qui se passait autour de lui, il prit le temps de la regarder. Malgré les traces de sang séché, son visage lui semblait magnifique. Lentement, ses paupières s'agitèrent, puis ses yeux bleus apparurent.
Il n'en avait plus la moindre idée…
- Hey, Éden le plouc, veux-tu voir encore de plus près le sol ! lui cria Tommy, un garçon dont la carrure trahissait les premières années d’adolescence.
Les jambes d’Éden se raidirent subitement et il se mit à courir aussi vite qu’il put. Tommy et ses deux amis enfourchèrent leurs bicyclettes et partirent aux trousses de la petite tignasse châtain qui fuyait devant eux. À cet instant, Éden commença à regretter de ne pas s’être davantage concentré à faire du sport au lieu de passer ses journées entières à contempler la vie microscopique qui agitait notre monde. En deux-trois mouvements, les trois vélos avalèrent l’espace qui les séparait du fuyard. Les premiers coups s’abattirent sur Éden, le forçant à s’effondrer sur le sol. Sanglotant, alors que les rires de ses bourreaux résonnaient au milieu du terrain de jeux du lotissement de ses parents, l’enfant attendit que les trois idiots décident d’aller assouvir ailleurs leur besoin de puissance.
Sa décision de revenir sur le site archéologique lui avait coûté cher : l’achat de vêtements et d’équipement avait fait gonfler sa carte de crédit. Nul doute que de l’autre côté de l’équateur, une meute de banquiers se frottait les mains en pensant que leur client ne serait peut-être pas en mesure de rembourser ses dettes avant la date d’échéance…
Un bref coup d’œil à son équipement lui confirma qu’il était fin prêt à passer à l’action.
Se tenir ainsi de façon illégale sur un site archéologique le ramenait quelques années en arrière. Fort des contrats qu’il recevait de la part de riches collectionneurs, il n’avait pas hésité à braver les lois pour arriver à ses fins. Il s’agissait parfois de simples fouilles sauvages sur les sites gérés par le professeur Dufort, parfois de réelles expéditions durant lesquelles il partait de longues semaines à la recherche d’un mystérieux objet.
Si le salaire avait été la principale raison pour accepter ces contrats, les sensations fortes que lui procuraient ces escapades l’avaient grandement motivé. Rapidement, son nom avait circulé dans les milieux prospères et il était devenu, en quelque sorte, une référence pour ce genre d’exploration privée. L’argent avait coulé à flots, et il avait pu gâter sa fiancée, jusqu’au jour où celle-ci avait découvert le pot aux roses après avoir intercepté une lettre venant de l’un de ses clients.
Un craquement de brindille le fit sursauter. Ewen observa autour de lui, le regard inquiet et la chair de poule envahissant tous ses membres. Ce n’était sûrement qu’un oiseau, rien de bien méchant. Que croyait-il ? Pensait-il qu’un ours à lunettes allait jaillir de derrière un buisson pour le détrousser ?
Il soupira. Décidément, plus les secondes passaient, plus la situation le rendait nerveux. Il devait bouger maintenant s’il ne voulait pas être dévoré par les démons de son passé.
Telle une ombre, il glissa furtivement sur le sol et parvint sans un bruit au musée.