Bienvenue à Los Angeles

Je regarde de temps en temps par la baie vitrée du salon, s’il n’est pas arrivé.

Non, toujours pas. Il ne devrait plus tarder maintenant. À ma montre, il est presque 19h30.

— Arrête de marcher ainsi de long en large devant cette baie, tu me donnes le vertige ! Viens t’asseoir, Marie, il finira bien par arriver, me lance Roselyne du canapé, d’où elle feuillette un magazine.

— Oui je sais, tu as raison, mais ce genre de situation me stresse à un point inimaginable.

Je soupire profondément et continue de le guetter.

— Je ne vois pas en quoi ! s’exclame-t-elle tout en refermant le magazine. Tu as deux options : la première, il te plaît vraiment et vous vous revoyez, la seconde, il ne te plaît pas et next ! À t’entendre, on pourrait croire que tu es une grande timide !

— Mais je suis une grande timide ! Quand comprendras-tu ça Roselyne ?

Seulement, je me soigne, c’est tout !

Pour une obscure raison, le soleil s’entête aujourd’hui à bouder derrière de gros nuages d’orage. C’est sous un vilain ciel de plomb que la journée sur Biarritz s’achève. Dehors, quelques feuilles tourbillonnent doucement, se posent et s’envolent sur un dernier souffle de vent. Mes amaryllis sortent timidement de terre, tout étonnées de se sentir si peu réchauffées par ce soleil printanier. Pour une fin mai, il fait frais et humide. Cette année, l’hiver n’en finit plus d’empiéter sur le printemps. Pas moyen de se débarrasser des lainages et des parapluies, d’ailleurs il ne devrait pas tarder à pleuvoir. « Bonjour tristesse ! » Je n’aime pas le printemps, trop versatile et capricieux. Je voudrais que ce soit déjà l’été. De toute façon, je n’aime pas les demi-saisons. Je ne sais jamais comment m’habiller. Soit je me couvre trop et l’après-midi je crève de chaud, soit je suis trop légèrement vêtue et je frissonne dès qu’un client met un pied dans le hall de l’hôtel. J’aime encore moins l’hiver, primo parce que je déteste le froid, et secundo parce que j’ai horreur d’empiler des vêtements sur moi, j’ai l’impression d’être un bibendum. Et ne parlons pas des accessoires de mode, ou je les égare avec une facilité confondante, ou je les « craque ».