Ajouter un extrait
Liste des extraits
J'ignore ce que tu me feras découvrir de moi-même, et ce n'est que de cela dont j'ai peur. Quant à toi, l'impatience de te rencontrer me réveille chaque matin. Libère-toi de moi. Ce sera de toute façon ta seule manière d'exister.
Afficher en entierJ'ignore comment la vie peut progresser à l'intérieur de mon corps.
Porter un enfant, le mien, que je ne connais pas, l'aimer déjà, en aveugle, s'interroger sur cet amour imprudent, dont l'objet est un projet, une vie qui se développe en moi et indépendamment de moi, parfois douter de cet amour, puis souffrir de ce doute, et se rendre compte qu'il est difficile d'aimer un être dont on ignore tout, sinon la part de soi-même, qui n'est sans doute pas la plus aimable, puisque c'est de l'absolue nouveauté que j'attends la rencontre.
Afficher en entierJe ne peux pas être chronologique. Mais tu verras, une vie ne l'est jamais.
Afficher en entierLa mémoire, ce sont les livres qui l'ont. Il (mon père) collectionnait les éditions anciennes ou originales pour y sentir la présence des premiers lecteurs, des premières émotions, des premières lectures - peut-être même le toucher de l'auteur. Il me suffit d'y voir la marque de papa, de sentir sous la caresse du papier ce qu'il avait pu éprouver, en son temps.
Afficher en entierLe rythme des jours peut aussi se mesurer aux allées et venues d'un homme qu'on aime.
Afficher en entierCertains ont peur de moi, mon secret les repousse, ils ne le connaissent pas, ont seulement quelques doutes, mais un secret se voit , il a un visage triste, une moue fermée, un regard éteint. Un secret porte le noir, émet des ondes radioactives, sans doute parce qu'on ne l'approche pas, même si on en brûle.
Afficher en entierViennent les apostrophes glorieuses quand on sert le dessert : "Elle est belle ma fille", "Elle a une une bonne note" [...] : tout le monde obligé d'acquiescer. Moi, insolente, "Arrête, on ne va pas dire le contraire si c'est toi qui le dit"...
Afficher en entierAvec le temps, même la mort s'en va
Afficher en entierElle y raconte sa mère un peu, son père beaucoup. C’est le livre d’une fille qui va être mère et tient à remettre son histoire à plat. Et quelle histoire.
Pendant 58 ans, son père n’a pas été son père : elle n’était pas née. Puis il a été un père présent absent. Tiraillé entre deux familles : la légitime qu’il allait rejoindre le dimanche soir pour le dîner, et l’autre : comment l’appeler ?
Mazarine ne sait pas trop. Comme durant longtemps elle n’a pas trop su comment s’écrivait le nom de son père qui n’était pas le sien. Mais qu’elle retrouvait dans l’histoire de France. Comment apprendre la IV ème république sans tomber face à face avec lui ? Les soixante dernières années de la France bruissent de son nom, de ce visage qu’elle voit parfois à la télé. Comme le 10 mai 1981. Elle était avec sa mère ce soir là, devant le poste, mais elle ne faisait pas partie de la fête. La liesse, c’etait pour la famille officielle, la France officielle. Elle a été vingt ans durant dans l’ombre. Elle connaissait les amis de son père qui ne savaient pas toujours qui elle était. Entourée de gardes du corps, dans un appartement qu’elle n’aimait pas avec ces drôles de parents qui s’aimaient mais qu’on ne voyait pas beaucoup ensemble, même s’ils l’étaient souvent.
Bouche cousue est l’histoire d’une étrange famille, mais une histoire qui finit bien. Ses personnages si on enlève le père ne peuvent que forcer l’admiration. Non pas qu’on manque d’ idées sur lui, flatteuses ou pas mais il fait trop d’ombre. Donc on l’écarte pour retenir la mère et la fille. Admirable la mère. Cette jeune bourgeoise qui en 1974, aime un homme politique marié, a un enfant et le garde en sachant pertinemment ce qui l’attend : l’opprobre et la vie dans l’ombre du grand-homme. Droite la mère, conservatrice de musée qui inculque à sa fille les valeurs du service public.
La fille enfin, admirable elle aussi, qui avec une telle enfance aurait eu toutes les excuses pour devenir schizophrénique ou délinquante. Mais non, elle réussit son agrégation de philosophie pour qu’on ne puisse pas l’accuser d’être pistonnée. Ce qui ne change rien, elle est suspecte tout de même. Elle ne s’y attarde pas plus que cela. Elle écrit des romans. D’autres qu’elle, on aurait parlé de « romans de jeunesse ». Elle, elle se fait descendre comme les canards à la chasse. On ne la rate pas et elle s’en remet encore. Suffisamment bien pour livrer « Bouche cousue », un beau texte intuitif et sensible.
Afficher en entier
contrainte de me taire, de ne pas exister aux yeux des autres, de n'avoir pas de nom, de n'avoir pas de père, et pas même de père imaginaire puisque le vrai existe bel et bien
Afficher en entier