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La grande énigme...
Aucun chiffre, aucune statistique ne permettra jamais de mettre en équation ce qui fait, un certain jour, à une certaine heure, d'un individu ordinaire un meurtrier. Un crime, c'est parfois - rarement - le mystère de la chambre jaune, c'est - toujours - le mystère de la «ligne jaune», celle qui sépare la vie de l'assassin de la mort de sa victime ; l'inexplicable, l'inexprimable passage à l'acte... Une équation subtile qui comporte tellement d'inconnues qu'elle reste à jamais insoluble !
Enfance, histoire familiale, personnalité du meurtrier, lien avec sa victime, pulsions et fantasmes qui plongent leurs racines si loin parfois, qu'il est impossible à celui ou celle qui les éprouve d'échapper à leur emprise... Face à ces multiples paramètres, on peut consulter d'innombrables thèses savantes, signées de sociologues, de criminologues, de psychiatres ou de profilers... Chacun de ces experts s'attache à nous dire finalement ce qu'il faut penser.
Leur lecture nous fait gagner du temps et nous donne l'illusion de la compréhension du phénomène criminel. C'est, en général, bien écrit, bien réfléchi, bien démontré. Ça nous évite surtout de penser par nous-mêmes ! Comme l'écrivait Georges Arnaud, l'auteur du Salaire de la peur, on peut «vouloir accéder à ce luxe suprême de l'homme pensant, qui consiste à constater que, tout bien pesé, on ne sait vraiment quoi penser de tout ça...». Et il concluait : «La littérature de thèse, d'analyse et de prospective après coup, se fait actuellement si envahissante, elle revendique un tel monopole de fait et de droit, qu'une réhabilitation de l'anecdote s'impose.»
Les histoires qui suivent nous invitent simplement à ressentir une ambiance, le parfum d'une époque parfois oubliée, à revivre par procuration ces scénarios du malheur qui emportent des gens ordinaires dans des situations extraordinaires. Elles ne se veulent pas morales. Elles n'ont pas valeur d'exemples. Elles n'ont pas de messages à délivrer. Elles témoignent simplement de l'extrême diversité des situations ou des événements criminels qui surgissent sans préalable dans nos vies, un peu comme des tremblements de terre, résultat du choc des plaques tectoniques qui anéantit en quelques secondes un paysage familier.
La tectonique de nos émotions et la dérive de nos sentiments, c'est bien la grande énigme que les jurés populaires doivent tenter de résoudre au cours de chaque procès d'assises où l'on juge toujours, rappelons-le ici, un homme ou une femme et non pas simplement des agissements criminels. C'est la raison pour laquelle le prix du crime n'est jamais le même
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