Extraits

Son expression était tourmentée, et le voir accablé me rendit mon calme. Le grand général immortel venait de s’abaisser à demander pardon au petit humain fragile que j’étais. Et c’était exactement pour ça que je les aimais, Alastair et lui, parce que pour eux je n’étais pas un inférieur, je n’étais pas méprisable ou insignifiant. J’étais un calice, j’étais fait pour être soumis, pour assouvir leur plaisir, pour supporter tout ce qu’ils voudraient me faire éprouver, mais ma condition ne changeait rien au respect qu’ils me portaient. Il y avait une forme très étrange de dignité dans la soumission, il fallait du courage pour s’offrir, de la force pour s’abandonner entièrement. Et mes maîtres en avaient pleinement conscience et connaissaient la valeur de ce que je leur offrais.

Alastair sentit que j’abandonnais mes dernières réserves parce qu’il caressa l’intérieur de mes cuisses en signe de satisfaction et amplifia encore ses mouvements. Cette fois sa violence ne me fit pas mal du tout, j’étais parfaitement préparé et détendu, et ses assauts ne firent que déclencher de délicieux frissons. Il me frappa à plusieurs points, comme s’il cherchait quelque chose de précis au fond de moi, son membre me fouillait et ses attaques étaient farouches. Le premier éclair de plaisir blanc m’arracha un cri incontrôlable et je me cambrai violemment. Il y eut un bruissement réjoui dans l’assemblée et Alastair, dont je cherchai le regard, me sourit de contentement.

Je compris qu’il venait de trouver cette petite zone magique qui me faisait perdre pied et après ça, absolument chaque coup toucha sa cible. Il me tortura de plaisir, me remplit de sensations au-delà du supportable, il épouvanta mes sens d’un débordement qui me faisait crier et venir à lui sans que je ne maîtrise plus rien. Je perdis le souffle et la raison. Peu à peu, mes perceptions se restreignirent et je ne fus plus capable que de percevoir chaque formidable pic de plaisir.

Et puis je finis par atteindre ma limite et le monde bascula. Le plaisir, au lieu de m’atteindre par vagues, enfla en moi et devint diffus et continu, l’orgasme fut dévastateur et il se répandit sur mon ventre en jets brûlants alors que je criais jusqu’à l’asphyxie. Au fond de moi, il me sembla que le membre d’Alastair pulsait plus fort et m’emplissait encore. J’aurais voulu voir son expression mais un voile flou était tombé sur mes yeux.

Et puis tout cessa et ce fut le calme à l’intérieur de moi. Seul mon cœur affolé battait toujours à un rythme enfiévré. Mes oreilles bourdonnaient en continu,

Sous ses gestes délicats, il cachait une brutalité implacable, semblable à celle qui habitait toujours les hommes puissants à l’autorité naturelle.

J’avais longtemps rêvé d’obtenir enfin ma place, et d’entrer véritablement au service d’un vampire dont je serais le calice officiel, mais je ne m’étais pas attendu à ce qu’on puisse désirer autre chose que mon sang.

— Est-ce que vous allez… me…

Je devais être écarlate. Je formulais cette hypothèse-là sous forme de question, parce que mon expérience en matière de sexe était inexistante et que j’avais peut-être seulement mal interprété… Mais je ne trouvais pas de formule qui ne sonnait pas ridicule alors j’abandonnai et je le dis le plus simplement possible.

— Est-ce que vous allez me pénétrer ?

Il cessa de sourire et me regarda avec beaucoup de sérieux.

— Oui. Je vais te prendre. Souvent.

Quatre tentures d’un rouge sang profond portaient les symboles dorés des principaux aspects du pouvoir : une balance pour la justice, un denier stylisé pour les finances, une épée pour la guerre, et un calice pour l’alliance avec les humains.

— Ne réfléchis pas, Alcuin. Quand je te donne un ordre, obéis. Tu n’as pas le choix, alors ne te pose pas de question. Allonge-toi.

Une terreur sourde vint de se glisser dans mes veines. Son aura était écrasante et implacable, je ne m’étais jamais senti aussi petit ni autant incapable de résister à la volonté d’un autre.

Le pouvoir des vampires était fermement assis, il était exercé d’une main de maître par les anciens, et cette salle semblait rappeler que ce n’était pas une tentative d’empoisonnement qui ferait vaciller l’autorité des Seigneurs du Nord.

Mon nom est Alcuin, Calice de Vultueuse. Ce n’est pas du tout un titre de noblesse. Être calice d’un seigneur signifie être son esclave de sang, rattaché à son domaine. Je suis le deuxième fils d’une famille de serfs. Et comme le veut la coutume, mes parents m’ont offert à quinze ans au seigneur local, le Seigneur Richard de Vultueuse, un des vampires les plus puissants de la région. Être esclave d’un vampire n’est pas une chose tragique en soi. Les calices reçoivent le sang de leur maître et peuvent vivre aussi longtemps que lui. Mais il y a bien sûr quelques désagréments…