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Le reste de l’ouvrage est consacré à ancrer cette approche dans le champ philosophique via notamment une comparaison d’avec des approches plus traditionnelles (par le PIB, l’approche utilitariste, et les approches ressourcistes entre autres), et à ouvrir des pistes pour un approfondissement de la notion de capabilités, notamment autour de l’application de cette théorie aux animaux, mais aussi aux questions de genres, ou encore au handicap et à la vieillesse. Une autre piste ouverte est celle d’un possible élargissement de la question des capabilités aux rapports entre Etats-Nations. Cette piste nous permet d’aborder avec un regard un peu critique l’œuvre de Nussbaum. En effet il y aurait pour Nussbaum un certain devoir des pays riches de promouvoir les capabilités des pays pauvres. Or l’approche des capabilités a cela d’original et, je pense, de puissant, qu’elle s’attache très fortement à la notion d’individu (il ne s’agit pas d’aider un quartier, un territoire, mais bien un être humain, et la notion centrale de dignité humaine, pour problématique qu’elle est, n’est pas neutre à ce titre), mais force est de constater que, quand on envisage les capabilités à un niveau inter-étatique, cette approche de l’individu est moins directement opérante. D’autre part, Nussbaum réduit bien rapidement, dans son chapitre sur ce sujet, cette idée néanmoins intéressante (celle de redistribution entre pays) à une contribution à hauteur de 2 % du PIB (des pays développés vers les pays en voie de développement), sans même envisager que l’échange puisse également avoir lieu dans l’autre sens et (surtout) ne pas être de type monétaire.
Afficher en entierL’approche des capabilités est en effet une contre-théorie qui s’appuie d’abord sur une critique de l’omniprésence de la richesse comme mesure de la qualité de vie notamment dans les sociétés occidentales. L’approche des capabilités s’oppose au culte du PIB, élément de mesure de la richesse des pays qui focalise les attentions, est l’opérateur de toutes les comparaisons et est trop souvent considéré comme un juste reflet de la qualité de vie d’un pays.
3Au-delà de cette définition en négatif, qu’est-ce alors que cette théorie des capabilités ? Pour Nussbaum, il s’agit « (d) es réponses à la question : ‘’Qu’est-ce que cette personne est capable de faire et d’être ?’’. » (p. 39) c’est-à-dire un ensemble de possibilités, de libertés de choisir et d’agir : « il ne s’agit donc pas simplement des capacités dont une personne est dotée, mais des libertés ou des possibilités créées par une combinaison de capacités personnelles et d’un environnement politique, social et économique. » (p. 39). Pour éclairer cette définition, Nussbaum distingue les capabilités internes (les caractéristiques d’une personne, qui ont trait à sa personnalité, ses capacités tant motrices que perceptives ou intellectuelles - qu’il ne faut pas confondre avec les caractères innés d’une personne), des capabilités combinées (c’est-à-dire des capabilités internes « auxquelles s’ajoutent les conditions sociales, politiques et économiques dont le fonctionnement correspondant peut effectivement être choisi » p. 43). Cette distinction souligne le rôle-clé joué par les politiques publiques pour mettre en place une approche par les capabilités.
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