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"Sur mon corps pourrissant pousseront des fleurs. Je serai dans ces fleurs et connaîtrai ainsi l'éternité."
Afficher en entier"Certains êtres manifestent leur bonté avec une certaine gaucherie. Mais ils sont beaucoup plus sincères dans leur gaucherie que tous ces hommes distingués dont il est question dans les livres. [...]
Il y a parfois quelque chose de très beau dans la gaucherie. L'émotion, le sentiment amoureux qui cherchent désespérément à s'exprimer mais qui, en fin de compte, n'aboutissent qu'à la maladresse."
P.195-196
Afficher en entierj'entendis une voix de femme pousser des cris perçants:
- Comment avez vous pu faire une chose pareille?
Avez vous perdu la tête ?
Je me redressait, plissant les yeux dans l'espoir de distinguer ce qui se passait. Mlle Grybas tournicotait autour de Jonas et d'Andrius. J'essayait de m'approcher.
- Et c'est de Dickens qu'il s'agit! Comment avez-vous osez? Ils nous traitent comme des animaux, mais vous êtes précisément en train de devenir ces animaux!
- Que se passe-t-il ? m'enquis-je
- Votre frère et Andrius fument! beugla-t-elle
- Ma mère est au courant, répondis-je.
- Des livres! rugit elle en me jetant à la figure un volume relié.
- Nous étions à court de cigarette , expliqua doucement Jonas, mais Andrius avait du tabac.
- Mademoiselle Grybas, intervint Mère, je vais arranger ça.
- Les Soviétiques nous ont arrêtés parce que nous sommes des gens cultivés, instruit, des intellectuels. Fumer les pages d'un livre est... est... Qu'en pensez-vous? demanda Mlle Grybas. Ou avez-vous trouvé ce livre?
Dickens. J'avais dans ma valise un exemplaire des "Aventures de M. Pickwick". Grand-mère me l'avait offert pour Noël - le dernier Noël avant sa mort.
- Jonas! m'insurgeai-je. Tu as pris mon livre! Toi, faire une chose pareil! Comment est-ce possible?
- Lina..., commença Mère.
- C'est moi qui ai pris ton livre, dit Andrius, et c'est donc moi qui mérite tes reproches.
- Et vous les méritez amplement, dit Mlle Grybas. Corrompre ainsi ce jeune garçon! Vous devriez avoir honte!
Mme Arvydas dormait à l'autre bout du wagon, complètement inconsciente de l'affaire qui venait d'éclater.
- Tu n'es qu'un idiot! criai-je à Andrius.
- Je te trouverais un nouveau livre, répondit-il calmement.
- Non, tu n'en trouvera pas, on ne peux pas remplacer un cadeaux, rétorquai-je avant d'ajouter: Jonas, c'est Grand-mère qui m'avait offert ce livre.
- Je suis désolé, fit Jonas e baissant les yeux.
- Tu devrais l'être en effet! hurlai-je
- Lina, c'était mon idée, répéta Andrius. Ce n'est pas la faute de Jonas.
Je l'écartai d'un geste. Pourquoi fallait-il que les garçons fussent d'aussi parfaits imbéciles?
Afficher en entier- Je ne vois pas ta mère travailler la terre...
- Non, répondit Andrius en se penchant vers moi. [...] Et sais-tu pourquoi ?[...]
Parce qu'ils l'ont menacée de me tuer si elle n'acceptait pas de coucher avec eux. Et le jour où ils seront fatigués d'elle, rien ne les empêchera de me tuer si ça leur chante. Dis-moi un peu, Lina, que ressentirais-tu si ta mère pensait qu'elle devait se prostituer pour te sauver la vie ? [...] A ton avis, que ressentirait mon père s'il savait ça ? Et que ressent ma mère quand elle doit coucher avec les gens qui ont assassiné son mari ?
Afficher en entierIl n'y avait que deux issues possibles en Sibérie: ou bien survivre, c'est à dire réussir, ou bien mourir, autrement dit échouer. J'avais choisi la vie. J'avais choisi de survivre.
Afficher en entier" Je regardai le petit visage rose qui émergeait du paquet. Un nouveau-né. Il n'était au monde que depuis quelques minutes mais il était déjà considéré comme un criminel par les Soviétiques. Je le serrai étroitement contre moi et déposai un baiser sur son front. Jonas s'appuya contre mon épaule. S'ils traitaient ansi un bébé, comment allaient-ils nous traiter, nous ? "
Afficher en entier" Je fermai la porte des toilettes et entrevis mon visage dans la glace. Je n'avais pas la moindre idée de la vitesse à laquelle il allait changer, se faner. Si je l'avais seulement pressenti, j'aurais fixé avec attention mon image, j'aurais essayé de la mémoriser. C'était la dernière fois que je pouvais me regarder dans un miroir; je n'en aurais plus l'occasion avant une décennie, et même plus. "
Afficher en entier"La guerre, en général, se caractérise par des opérations militaires. Mais pour les peuples baltes, cette guerre était essentiellement d'ordre idéologique. En 1991, après cinquante ans d'occupation, les trois pays Baltes ont retrouvé leur indépendance et, avec elle, la paix et la dignité. Ils ont préféré l'espoir à la haine et montré au monde qu'une lumière veille toujours au fond de la nuit la plus noire. S'il vous plaît, réfléchissez à cela. Parlez-en autour de vous. Ces trois minuscules nations ont appris au monde qu'il n'est pas de plus puissante arme que l'amour. Quelle que soit la nature de cet amour-qui peut aller jusqu'à pardonner à ses ennemis-, il nous révèle la force miraculeuse de l'esprit humain."
Afficher en entierAyant enfin touché ma ration de pain, je courus à travers la neige jusqu'à la hutte de M.Stalas. J'y trouvai une foule de gens serrés les uns contre les autres et formant un cercle. J'aperçus Jonas et le rejoignis tant bien que mal.
-Qu'est-ce que j'ai manqué? chuchotais-je.
-Seulement ça, répondit-il d'un air mystérieux.
La foule s'écarta, et je vis Mère.
-Bon anniversaire! se mirent-ils tous à crier.
Ma gorge se noua.
-Bon anniversaire ma chérie! s'écria Mère en me serrant dans ses bras.
-Bon anniversaire, Lina, dit Jonas. Est-ce que tu as pensé qu'on l'avait oublié?
-Honnêtement, oui.
-Eh bien, non, nous ne l'avons pas oublié, fit Mère en m'étreignant plus fort.
Je cherchais des yeux Andrius. Il n'était pas là.
Afficher en entier" Ce témoignage a été écrit pour laisser une trace ineffaçable et tenter l'impossible : parler dans un monde où nos voix ont été éteintes. "
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