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— Ne laissez pas sortir les chiens ! cria la femme dans son dos.
Prête à tout pour éviter l’inéluctable, Julia s’était élancée sous la pluie et, courant sur les pavés inégaux, avait tourné l’angle de la majestueuse demeure bordée de rhododendrons frissonnant dans le vent. Elle releva la capuche de son sweat-shirt, même si la pluie glacée était déjà en train de lui dégouliner dans le cou.
Afficher en entierL’inconnue était vêtue d’un pantalon noir et d’un élégant pull-over noué à la taille. Ses cheveux blond cendré, soigneusement coupés et permanentés, donnaient du volume à sa tête tout en masquant son âge. Son maquillage impeccable accentuait ses traits anguleux ; quant à sa peau lisse, elle accusait un récent lifting. Elle considéra Julia d’un regard mécontent, comme si on venait de l’interrompre au milieu de quelque chose de très important.
Afficher en entierNon seulement la radio n’aidait en rien à calmer ses nerfs, mais le mouvement des essuie-glaces chassant la pluie ne faisait que lui taper encore plus sur le système. Elle allait arriver trop tard. Shay partirait sans un au revoir, et personne n’y pourrait rien. Même Edie serait incapable d’arranger les choses. Un juge avait ordonné que Shay soit envoyée en rééducation.
Afficher en entierMalheureusement, l’autoroute avait pris des allures de parking, et les bulletins d’information routière serinés par l’autoradio ne faisaient rien pour la rassurer. A en croire les centaines de feux arrière qui s’étiraient en lignes rougeoyantes devant sa Volvo, tous les propriétaires de véhicule dans l’Etat de Washington étaient immobilisés sur l’autoroute I-5, sous une bruine glaciale. Julia, accablée, observait les voitures qui roulaient au pas en direction du nord. Luttant contre son mal de tête, elle tambourinait sur le volant. Si seulement elle avait connu un moyen plus rapide pour arriver au lac Washington !
Afficher en entierLa communication fut interrompue, laissant Julia rongée d’inquiétude, au milieu de sa chambre en désordre. Elle n’arrivait pas à croire que sa mère ait réellement décidé d’expédier Shaylee dans cette maudite école pour adolescents à problèmes, une école qui, par-dessus le marché, se trouvait au beau milieu de nulle part. Elle sortit en trombe de chez elle et adressa un petit signe de la main à Mme Dixon, sa voisine, qui regagnait sa maison, son journal tout mouillé à la main.
Afficher en entierA la place, elle s’aspergea le visage d’eau froide, enfourna deux comprimés d’aspirine extraforte dans sa bouche et les fit descendre avec une gorgée d’eau qu’elle but directement au robinet. Après avoir enfilé un jean et un sweat-shirt surdimensionné, elle coiffa sa vieille casquette des Trail Blazers, l’équipe de base-ball de Portland. Puis elle fouilla dans son sac et dans les poches de son blouson à la recherche de ses clés.
Afficher en entierLes lambeaux du rêve qui revenait régulièrement la hanter se replièrent dans les recoins obscurs de son esprit. Elle jeta un coup d’œil au cadran de la radio et poussa un gémissement lorsqu’elle se rendit compte, avec consternation, qu’elle avait oublié de remettre le réveil.
Afficher en entierLa voix de Michael Jackson chantait Billie Jean en sourdine.
Et par-dessus la mélodie : floc floc floc.
Assourdissant.
Comme des roulements de tonnerre dans son crâne douloureux.
Un liquide chaud éclaboussa ses pieds nus. Elle regarda par terre. Ses yeux s’arrondirent de frayeur en voyant du sang s’égoutter de la lame du couteau qu’elle tenait à la main, et une tache rouge se répandre pour former une flaque.
Afficher en entier— Au secours… Oh, mon Dieu, aidez-moi, quelqu’un !…
La voix vibrait d’une supplication désespérée, à peine audible par-dessus les accents d’une chanson populaire et le floc floc régulier d’un liquide coulant goutte à goutte sur le sol.
Le cœur battant la chamade, Julia Farentino, pieds nus et vêtue de sa seule chemise de nuit, se dirigea vers le bureau, d’où parvenait une lueur bleutée au travers des voilages des portes-fenêtres.
— Vite… il n’y a pas de temps à perdre…
Afficher en entierLe vent, dont le hurlement menaçant ressemblait au rire du diable, traversait en mugissant le canyon, avant de venir lécher les bords glacés du lac de la Superstition et soulever des vagues aux endroits où l'eau était trop profonde pour geler.
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