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J’étais dans un tel état de panique, d’incompréhension, que les éléments se mirent en place avec lenteur dans mon cerveau. Voilà pourquoi j’étais tombée en décrochant ma ceinture. Voilà pourquoi les sièges n’étaient pas à la bonne place.
Et j’avais tellement peur, je me sentais si mal !
Puis tout se mit à tourner autour de moi, brisant ma concentration et me faisant oublier ce que je voulais faire.
Il me fallait me concentrer… Je devais… sauver ma famille !
Tandis que je passais par une des fenêtres brisées, je n’aurais su dire de quel côté de la voiture, ma peau se déchirait sur les petits tessons de verre encore accrochés au montant.
C’est alors que le spectacle le plus ignoble qu’il m’ait été donné de voir me fit hurler à m’en déchirer les cordes vocales.
Afficher en entierBien sûr, le réveil fut beaucoup moins agréable.
La pièce pleine de torches était toujours souillée par les restes de la hyène qui avait implosé. Si, dans le monde des humains, cela se serait transformé en cendres, je n’avais pas ce plaisir à l’intérieur de ma prison magique.
Durant une seconde, mon dégoût et ma fatigue me rattrapèrent. Puis je les repoussai de côté pour me défendre.
Les deux cubes noirs avaient été ouverts et je découvris qu’ils avaient renfermé des sylphides. D’après ce que j’avais lu sur ces créatures, il s’agissait de génies de l’air à la beauté surnaturelle.
Et effectivement, les deux jeunes femmes face à moi étaient très belles. Minces, vêtues de robes vaporeuses bleutées, elles semblaient aussi fantomatiques que le spectre qui protégeait ma demeure. Mais elles étaient bel et bien réelles.
J’en savais quelque chose, puisque l’une de ces demoiselles était devant moi et m’empoignait déjà par les cheveux pour me relever.
Si certains se levaient du pied gauche, le matin, c’est qu’ils n’avaient jamais connu cet autre monde. Parce que rien n’était plus exaspérant que d’être réveillée par une femme faisant cette tête-là. Une tête qui voulait dire : je vais te faire la peau, te broyer tous les os, puis te dévorer toute crue.
Ses longs cheveux impeccables semblaient faits d’or et de velours, mais, dans ses yeux cruels, il n’y avait aucune douceur.
— Salut, les filles, lançai-je en sentant des ongles pointus s’enfoncer dans mon bras. Vous ne connaissez pas les radioréveils ? Parce que, franchement, ce serait beaucoup plus agréable que vos griffes tranchantes.
Les deux jeunes femmes étaient presque identiques ; elles portaient des bracelets en or qui tintaient à chacun de leurs mouvements. Leurs robes vaporeuses flottaient autour de leurs jambes fines, dévoilant leurs pieds nus salis par le sol dégoûtant. Leurs oreilles étaient pointues et, autour de leur tête, une couronne fine, tressée de branchages souples ponctués de fleurs blanches, illuminait leur visage.
Les deux paires d’yeux bleus qui se fixèrent sur moi auraient pu m’intimider, si je n’avais pas déjà eu affaire à des créatures plus féroces qu’elles.
Je venais d’avoir la moitié du visage arrachée par une hyène de la taille d’une voiture, je n’avais plus rien à craindre.
D’ailleurs, je passai une main tremblante sur ma mâchoire, pour m’assurer qu’elle était toujours en place.
Je ris un peu, en sentant mon menton sous mes doigts. Ce maudit monde surnaturel allait me rendre folle.
— Lâchez-moi, maintenant. On s’est suffisamment amusé, toutes les trois, leur ordonnai-je.
Pour toute réponse, la plus féroce des deux me grogna dessus et serra les poings, tirant davantage mes cheveux et me faisant pencher la tête sur le côté.
— Très bien, déclarai-je, abattue. Vous voulez jouer ? Ce sera à vos risques et périls, je vous préviens.
La seconde femme m’agrippa par le tee-shirt, me rapprochant d’elle par la même occasion. D’un coup de genou dans l’estomac, je la fis reculer, ce qui me débarrassa d’elle pour la plus précieuse des secondes. Je fermai alors les yeux, en pensant à ma petite bulle de protection. Elle apparut instantanément, mes pouvoirs étant de plus en plus puissants, et la créature qui était agrippée à mes cheveux vola en arrière sans me faire le moindre mal.
Aujourd’hui, je n’avais pas envie de me battre. Abbàn me manquait trop. J’étais inquiète pour lui. Ma magie et mon énergie étaient suffisamment élevées pour que je puisse rester dans ma bulle un long moment. Je serais tranquille pour les heures à venir.
Sauf que ces deux folles passèrent leur temps à se jeter sur moi, sans discontinuer, forçant ma magie à se réapprovisionner en permanence, pour renforcer ma sphère nacrée.
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