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- Martin ! murmurai-je d'une voix étouffée.

Avant que je puisse prononcer un autre mot, la palissade s'écroula et le monstre se précipita. Il avait une tête de loup, avec des babines retroussées sur de grandes dents blanches, et son corps ressemblait à celui d'un crabe géant. Lentement, il balança quatre immenses pinces griffues devant lui, et les fit clique- ter les unes contre les autres. Puis il ouvrit sa gueule en grand et laissa échapper un grognement guttural. -NOOONNNNN !

Martin hurla de terreur, et moi aussi. Nous essayâmes de nous enfuir.

Mais où aller ?

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J'ouvris la bouche pour hurler, mais seul un gémisse- ment plaintif sortit de ma gorge.

Horrifiée, j'entendis les gens rire autour de moi. Et comme dans un rêve, les immenses griffes glissèrent de ma taille et me lâchèrent. C'était des griffes en plastique !

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Le crabe-loup rampait vers nous sur ses pinces à moitié repliées. Une voix s'éleva dans l'obscurité : - Asseyez-vous, s'il vous plaît, les enfants ! Je ne vois pas l'écran.

Martin me jeta un regard surpris. Pour toute réponse, je haussai les épaules. Je me sentais idiote...

Nous retombâmes sur nos sièges sans rien dire.

Sur l'écran, le crabe-loup détala dans la rue à la poursuite d'un petit garçon sur son tricycle.

- Qu'est-ce que tu as, Irène ? chuchota Martin à mon oreille. Ce n'est qu'un film, tu sais. Pourquoi as-tu crié comme ça ?

- Toi aussi, tu as crié !

- Seulement parce que tu hurlais de terreur.

- Chut ! ordonna quelqu'un.

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On y voyait de mieux en mieux.

J'entendis des crissements. Quelqu'un toussa der- rière nous, mais ni Martin ni moi ne nous retour- nâmes. Nous attendions...

Soudain apparut une palissade. Une longue palissade en bois, à la peinture délavée et écaillée. Une pan- carte, peinte à la main, y était accrochée : D A N G E R . DÉFENSED'ENTRER.

Ensuite il y eut des grattements. Légers, tout d'abord, puis plus forts. Comme si des griffes géantes raclaient la clôture de l'autre côté. J'essayai de déglutir. Ma bouche était sèche. J'avais une furieuse envie de m'enfuir. Mais si je le faisais, Martin ne manquerait pas une occasion de me le rap- peler. Je restai donc près de lui, à écouter les grattements qui devenaient de véritables coups de butoir.

Quelqu'un essayait d'abattre la palissade !

Nous longeâmes la barrière. Vite, plus vite. Le bruit nous suivait. C'était devenu un bruit de pas géant. Nous étions déjà venus dans cette rue vide, Martin et moi. Ce soir, les flaques d'eau sur le trottoir brillaient comme du métal sous la lumière jaunâtre des réverbères. Martin m'attrapa la main. Les coups avaient redou- blé d'intensité et la palissade s'était mise à trembler. Toute la rue vibrait, d'ailleurs. Les pas retentirent plus fort. Plus près...

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- Irène ! Ça me donne la chair de poule ! gémit mon ami Martin en me tirant par la manche.

- Lâche-moi ! murmurai-je. Tu me fais mal.

Martin ne semblait pas avoir entendu. Le regard fixé droit devant, il me serra le bras très fort.

- Arrête ! chuchotai-je en me libérant d'un mouvement brusque.

J'avais peur, moi aussi, mais je ne voulais pas l'admettre. Il faisait si sombre... Je plissai les paupières pour essayer de deviner quelque chose et, soudain, je distinguai une lumière blafarde à l'horizon. Martin baissa brusquement la tête, mais j'eus le temps de voir une lueur d'effroi dans ses yeux. Il s'accrocha de nouveau à mon bras, et respira bruyamment en haletant.

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Devant la façade, d'immenses herbes folles s'agitaient sous la brise.Les volets de la maison étaient écaillés et disloqués. Seule une fenêtre était éclairée. Comme nous passions devant le porche au plancher défoncé, une balancelle toute rouillée se mit à bouger. Naturellement, elle était vide.

J'étais enchantée.

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