Extraits

— Alors ? On se la fait cette petite bagarre ?

Logan secoua la tête. Je fronçai les sourcils.

— Je sais que tu maîtrise à merveille l’art du combat. Alors nous allons compliquer la chose.

J’hochai la tête.

— Très bien. Quelles difficultés ajoutes-tu ?

— Un seul poignard.

— C’est tout ?

— Oui.

— Je ne trouve pas ça très compliqué.

Une lueur malicieuse éclaira le regard de mon partenaire, un début de sourire apparut sur son visage :

— Ne crie pas victoire trop vite petit chat.

Je me figeai. Il avait employé le surnom qu’utilisait Ryan à mon égard. Ce devait être une coïncidence. J’espérais que ce n’étais qu’une coïncidence. J’ôtai tous les poignards que j’avais emportés avec moi afin de n’en garder qu’un seul et attachai ma longue crinière noire en une queue de cheval serrée.

— Je suis prête.

— Moi aussi.

Je dévisageai mon adversaire, un sourcil haussé.

— Tu n’as pas d’arme.

Il me fit un clin d’œil.

— Qui te dit que j’ai besoin d’une arme ?

— Frimeur.

— Réaliste.

— Ryan n’était pas une erreur ! Ryan était tout sauf une erreur. Il m’a permis de construire une partie de mon passé heureux. Il m’a permis de pouvoir écrire mon histoire après la Grande Tempête, ma vie ! Ryan sera tout ce qu’il restera de moi quand je ne serai plus de ce monde. Ce sera le meilleur et le pire souvenir de mon existence. Parce qu’il est unique. C’est le seul mo-ment de ma vie d’avant d’assez heureux que je suis arrivée à garder en mémoire. Même si pour cela j’ai dû faire des sacrifices, j’ai dû violer des lois, risquer ma vie et celle des autres. Au final, ça en a valu la peine, parce que maintenant quand on me demandera « Et toi Siam, quel souvenir gardes-tu en mémoire ? » Je pourrai leur répondre dans les yeux et leur dire la vérité et je ferai alors partie des rares personnes à posséder une relique brumeuse de mon être. Souviens-toi Dimitri. On ne peut connaître le bonheur que si l’on a connu le malheur, ce sont tes souvenirs qui traceront ton avenir.

Le calme. Un silence protecteur m’entourait. Le sol me paraissait bien mou et bien confortable. Je voulus tendre le bras afin d’examiner l’endroit où je me trouvais.

Mais j’en fus incapable.

Un éclair de douleur me traversa tout le corps. Du bout de mes orteils meurtris jusqu’à mon crâne proche de l’explosion.

Je gémis doucement.

Un poids s’asseyant près de moi creusa un trou dans le matelas. Je supposais en tout cas que c’était un matelas, car c’était bien trop douillet pour être du béton. Je décidai d’ouvrir les yeux. Un visage parfaitement dessiné emplit alors mon champ de vision. Un sourire moqueur sur un faciès d’ange.

— Je t’avais bien dit que toute seule tu ne ferais que des bêtises.

Malgré le ton insouciant qu’avait employé Logan, l’inquiétude transparaissait clairement dans ses yeux émeraude. Je tentai un faible sourire.

— Non ne fais rien. Il t’a brisé la nuque, je ne sais même pas pourquoi il ne t’a pas achevé de suite. Tu devrais néanmoins guérir vite, après tout, tu es immortelle.

— Il voulait… jouer… dis-je dans un râle.

L’étincelle rubis dans son regard flamboya de plus belle, signe de sa fureur dissimulée. Sa voix tremblait néanmoins de rage.

— Je vais lui apprendre à jouer à ce fou ! Il n’a aucun droit de te toucher.

Il s’interrompit un instant, me dévisagea et termina, narquois :

— Après tout, c’est moi qui dois te tuer. Je ne laisserai personne d’autre le faire, ne t’inquiètes pas.

Je le sondai. Etait-il sérieux ? J’espérais que non, qu’il ne faisait que se moquer de moi, car je n’étais pas vraiment en état de me défendre.

Je demandai, réunissant des forces pour être comprise, car mes cordes vocales avaient dû être aussi très endommagées.

— Comment as-tu fait pour me retrouver ?

Sa réponse me déstabilisa quelque peu :

— Un espèce de sixième sens.

Il se pencha soudain vers moi. Je me figeai. Mon pouls s’accéléra distinctement. Logan du s’en rendre compte car il précisa.

— Je ne vais pas te faire de mal.

Je soufflai :

— Pas m’embrasser.

Il rit.

— Cela te dérangerait tant que ça ? demanda-t-il à quelques centimètres de mes lèvres.