Chemins d'ombre et de lumière

Extraits de : Un impossible coupable

Quant aux villageois, Blandin comprit qu’il était vraiment devenu un des leurs, le jour où Manon disparut. Il était environ vingt heures, en ce soir de novembre, quand le maire était venu frapper à sa porte. Son calme apparent dissimulait mal son inquiétude. Il raconta en peu de mots qu’il réunissait tous les habitants disponibles, afin d’organiser une battue, il fallait se munir d’une torche. Le maire expliquait, comme pour se convaincre lui-même, que Manon ne pouvait pas être bien loin, qu’il fallait la retrouver avant qu’elle ne prenne froid.

Comme presque chaque soir, après l’école, Manon était allé chez Petit Pierre. Elle en était repartie vers dix-huit heures, un voisin l’avait vu sur son vélo, elle se dirigeait vers la maison de ses parents, à la sortie du village. Elle n’y était pas arrivée. Les parents avaient fait le tour des copines, interrogé le voisinage, en vain. Personne n’avait revu la fillette.

Le maire fit des groupes de quatre et désigna à chacun une zone à explorer. Tous étaient reliés par un téléphone portable et ils espéraient bien avoir de bonnes nouvelles rapidement. Très vite, ils furent rejoints par une équipe de gendarmerie, accompagnée de chiens. Tard dans la nuit, les recherches furent interrompues. Blandin entendait encore résonner dans sa tête le hurlement que poussa la maman de Manon quand son mari revint sans la petite. Pour tous, la nuit, pluvieuse et glaciale comme peuvent l’être les nuits de novembre, fut un interminable cauchemar. Les recherches reprirent au petit jour. Chaque recoin de la commune fut exploré, de la mare à la carrière, des bois environnants au chantier de la nouvelle mairie. L’enfant resta introuvable.

Extraits de : On ne blesse pas les colombes

Je suis la voiture qui conduit Chloé au centre hospitalier, mes yeux se brouillent, une terreur m’envahit : celle d’avoir perdu à jamais la confiance de ma petite fille. En arrivant, une femme pompier l’a confiée au docteur Carla, psychologue. Je me sens exclu mais, en même temps, comme déchargé d’un poids trop lourd. Une infirmière me rassure, le docteur préfère, dans un premier temps, voir l’enfant seule ; ensuite, je pourrais, si tout se passe bien, rejoindre Chloé. Si tout se passe bien ? Cela veut dire quoi ? Que l’on peut m’interdire d’aller la retrouver ou qu’elle puisse refuser tout simplement de revenir vers moi ? J’ai peur, si peur !

Je m’écroule dans un des fauteuils de la salle d’accueil. Marie, ma femme, a surnommé notre enfant, notre petite colombe. Belle, libre, confiante, heureuse tout simplement Voilà comment hier soir, Marie a quitté sa petite fille. Un voyage d’affaires de 24 heures, rien d’extraordinaire, juste une petite organisation à mettre en place pour le papa poule que je suis. Souvent, Marie se moque gentiment de moi, elle m’aide à ne pas entraver les élans de Chloé, à la laisser doucement connaître et apprendre les réalités de la vie.