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Maggie referma la porte, s’y adossa et, pour la première fois depuis un moment, relâcha son souffle.

Elle aurait aimé ne plus jamais avoir affaire à lui, mais avait l’étrange sentiment que leurs chemins allaient se recroiser.

Maintenant qu’il était parti, elle sentait quelque chose se réveiller en elle. Vite, elle s’installa à sa table de fortune et écrivit quelques lignes. Puis l’inspiration retomba. Elle connaissait ce sentiment, le recherchait. Cette lueur de créativité et d’impatience fébrile. Elle essayait de briller mais le poids de l’attente, de l’espoir la gênait. Quelques instants plus tard, c’était terminé. La lueur s’était éteinte.

D’où était venue cette inspiration ? Où était-elle partie ?

Était-il possible que Marwood l’inspire, juste un peu ?

Avait-il allumé cette lueur en elle ? Seigneur, elle espérait que non. Elle ne pouvait pas se permettre que cet homme devienne sa muse.

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— Bonne journée, madame Delamere. Que votre muse prenne son envol promptement. Je reviendrai voir où vous en êtes. Maintenant que je sais que le destin d’Alina est en jeu, rien ne pourra me barrer votre porte.

— Et si la porte est murée ?

Il sourit et sortit. Le bruit sourd de ses bottes sur le plancher s’éloigna. Dans la réserve, la tension retomba d’un coup, comme si un corbeau avait fait irruption dans la pièce, s’était cogné contre les murs en battant frénétiquement de ses ailes d’un bel ébène brillant avant de trouver la sortie et de s’en aller.

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— Eh bien… c’est nouveau, ça. Je ne me rappelle pas avoir jamais été mis à la porte de la sorte. En tout cas, pas par…

— Par qui ? demanda-t-elle en plantant ses poings sur ses hanches. Par une femme ? Une personne de milieu modeste ?

— Par une artiste, dit-il.

Il attendit un instant avant de reprendre :

— Alors ? Pas de réplique cinglante ?

À dire vrai, elle ne savait que répondre. Personne ne l’avait traitée d’artiste, jusque-là. D’écrivaillon, souvent. D’auteure, oui, d’artiste… jamais.

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L’imagination de Maggie s’envola, pour s’épanouir comme des belles-de-jour au printemps. Il était presque trop facile d’imaginer Marwood en amant. La lueur d’une chandelle sur sa peau, la caresse de sa main sur sa nuque et entre ses omoplates, sa voix grave et chaude lui murmurant des encouragements érotiques… Son corps tout entier s’embrasa.

À quand remontait la dernière fois qu’elle avait pris un amant ? À beaucoup trop longtemps, si elle en jugeait par sa réaction. Elle avait toujours aimé l’amour physique, mais un homme en avait profité, par le passé. Aussi était-elle résolue à ne plus jamais se laisser enivrer par des paroles suggestives ou l’illusion du désir.

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— Je parle de votre imagination, bien sûr, l’interrompit-il avec un sourire malicieux. On dirait que vos personnages et leurs aventures jaillissent de votre esprit comme Athéna de la tête de Zeus.

Encore cet enthousiasme pour son travail. Elle trouvait ces mots-là bien plus charmants que n’importe quel truc de séducteur. S’il lui avait fait des compliments sur son apparence ou son physique, elle l’aurait aisément repoussé. Mais cela… cela ne correspondait en rien à ce qu’elle attendait et donnait l’impression qu’il voyait en elle un être humain plutôt qu’une conquête. Pourtant, il la regardait aussi comme la plus désirable des femmes. Le mélange des deux lui faisait tourner la tête.

— C’est trop de compliments, grommela-t-elle.

— Sans doute un peu, oui, dit-il en haussant les épaules.

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Elle sentit une onde de chaleur se répandre en elle, suivant la trajectoire même de ce regard. Une chaleur qui mêlait colère et réaction instinctive. N’importe quelle femme aurait réagi aux allusions aussi directes d’un jeune homme que la nature avait à ce point gâté – du moins fut-ce ce qu’elle se dit.

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— Eh bien, il est temps pour vous d’aller chercher d’autres champs à labourer. Vous ne trouverez que des cailloux et des mauvaises herbes, ici.

Son rire cascada comme le vin dans le goulot d’une bouteille.

— C’est là que vous vous trompez. Vous êtes tellement… fertile, dit-il en laissant glisser sur elle un regard suggestif.

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— Vous êtes bien facile à distraire, pour une femme aussi talentueuse.

Non mais quel toupet !

— Tout dépend de la distraction. Certaines sont plus faciles à ignorer que d’autres qui, pour attirer l’attention, braillent plus fort qu’un nourrisson pris de coliques.

— Je n’ai jamais eu de colique, dit-il avec un large sourire. J’ai une santé de paysan.

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