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Cœur de guerrier, Tome 3 : Le Sort d'un Irlandais



Description ajoutée par Ju_Books 2019-08-20T16:01:17+02:00

Résumé

1175, Irlande

Joan se sait maudite. Par trois fois elle a voulu prendre un époux et par trois fois ceux-ci ont trépassé avant l’échange des vœux sacrés. Aussi refuse-t-elle d’obéir à ses deux frères, Warrick et Rhys de Laurent, lorsqu’ils l’encouragent à accepter l’offre de Ronan O’Callaghan. Elle ne peut risquer la vie de cet homme, qu’elle connaît à peine, mais qui la trouble plus que de raison. Même si celui-ci la supplie de consentir pour le bien du clan O’Callaghan.

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Classement en biblio - 15 lecteurs

extrait

** Extrait offert par Michelle Willingham **

Chapitre 1

1175

Joan de Laurent était maudite.

La plupart des gens la trouvaient ridicule de penser cela, mais, au fond de son cœur, elle savait que c’était vrai. Elle avait déjà été fiancée deux fois, et les deux jeunes gens étaient morts avant de l’épouser. L’un avait péri dans une bataille, tandis que l’autre avait succombé à la peste.

Pour quelque obscure raison, Dieu ne voulait pas qu’elle se marie. Elle en était convaincue. Bien plus, elle était persuadée que tout homme qui oserait demander sa main exhalerait son dernier souffle avant la fin de la cérémonie nuptiale. Les gens de Montbrooke le croyaient aussi. Les hommes se signaient sur son passage. Les femmes l’évitaient, surtout celles qui se trouvaient enceintes. Certains enfants s’enfuyaient devant elle. Si elle n’avait pas été la fille d’un comte, peut-être même l’aurait-on accusée de sorcellerie !

Joan avait fait son possible pour leur prouver qu’ils se trompaient. Elle ne revêtait que des robes blanches, symbole de son innocence, et portait une croix de fer autour du cou pour éloigner les mauvais esprits. Un voile recouvrait constamment sa chevelure sombre, et elle allait tous les jours à la messe.

Elle n’en sentait pas moins leurs regards pesants sur sa nuque. Elle entendait leurs chuchotements et savait qu’ils s’étaient tous retournés contre elle sous l’effet de la peur. Aucun homme ne voulait d’elle, en dépit des tentatives de son père pour arranger de nouvelles fiançailles. Pourquoi auraient-ils brigué sa main, quand cela équivalait à une sentence de mort ?

Elle s’était donc résignée à une vie de prière, une vie où elle ne se marierait jamais, ni ne concevrait d’enfant. Et c’était bien là que gisait le problème. Elle aimait tant les bébés ! Quand Lianna, l’épouse de son frère, avait donné naissance à une fille, Joan s’était sentie inondée d’amour pour cette ravissante fillette. Elle éprouvait le besoin désespéré de devenir mère à son tour, c’était le secret qu’elle cachait dans son cœur. Ce fervent désir la consumait. Elle était seule depuis trop longtemps. Tout le monde l’évitait. Elle brûlait de combler ce désert en berçant contre sa poitrine un enfant adoré, dont elle aurait embrassé la petite tête avec amour.

Hélas, tu es trop vieille à présent.

À vingt-quatre ans, la plupart des femmes avaient déjà mis plusieurs enfants au monde, alors qu’elle-même était encore vierge. Il ne lui restait guère d’espoir de se marier un jour ou de porter un enfant.

Pourtant, son père n’avait aucune intention de la laisser servir l’Église. Au lieu de cela, il lui avait arrangé pour la troisième fois des fiançailles, avec un noble irlandais d’un certain âge. Ce Murdoch avait déjà engendré des héritiers et n’avait pas besoin d’avoir des enfants d’elle. Cela aurait pu représenter la solution idéale. Pourtant, ce mariage lui faisait peur. Elle ne voulait pas voir mourir un autre homme, même si, rationnellement, elle savait qu’il s’agissait là d’une crainte ridicule. Elle avait beau se répéter que la mort de ses précédents fiancés relevait d’une simple coïncidence, elle n’arrivait pas à se défaire de cette appréhension.

Après des semaines de voyage, ses frères et elle venaient d’arriver en Irlande. Son père, Edward de Laurent, avait chargé Warrick et Rhys de l’escorter chez son nouveau promis, et d’assister à son mariage en tant que témoins. Warrick possédait des terres à Killalough et avait emmené plusieurs douzaines de ses soldats pour protéger son épouse et ses enfants dans son domaine irlandais. Rhys, quant à lui, avait mis à contribution une demi-douzaine de ses hommes pour les défendre durant le voyage.

Il pleuvait. Joan s’abritait sous une cape de laine tandis que le chariot avançait en cahotant dans la boue. Elle avait beau scruter les alentours, elle n’apercevait de château nulle part – seulement des chaumières éparpillées sur le flanc de la montagne. Au fond d’elle-même, elle sentait monter la panique. Ses mains étaient glacées et elle luttait pour calmer sa nervosité croissante.

Tout va bien se passer, se raisonnait-elle.

Mais son cœur ne l’entendait pas ainsi.

Je ne veux pas épouser un vieil homme ! gémissait-il.

Allons,répondait la raison, il sera peut-être très gentil. Pourquoi ses enfants ne deviendraient-ils pas les tiens ?

Mais au fond de son âme, elle restait persuadée que Murdoch O’Connor allait mourir s’il l’épousait. Elle avait l’impression d’apporter la malédiction à un homme innocent, qui ne méritait pas ce sort. Comment aurait-elle pu croire un seul instant que ce mariage se déroulerait sans encombre ?

Conscient de son malaise, son frère Warrick tendit le bras et s’empara de sa main. Puis, sans un mot, il lui pressa les doigts. Cet encouragement silencieux n’apaisa cependant pas sa terreur. Elle se redressa, laissant le capuchon de son habit retomber sur ses épaules, sans souci de la pluie. Tant pis si elle mouillait son voile et ses nattes. Ce temps glacial s’accordait avec son humeur.

Rhys se retourna.

— Je ne sais pas si ce sera une bonne alliance pour Joan, en fin de compte, dit-il à Warrick. Murdoch est peut-être un chef, mais…

Il secoua la tête, embrassant du regard les misérables demeures.

Joan se sentait aussi sceptique que lui. Elle ne savait trop que penser de l’endroit. La forteresse semblait très mal entretenue. Le chaume pourrissait sur les toits, de même que les poutres. Pourquoi ce chef de clan laissait-il les maisons dans un tel état de délabrement ?

Quelques badauds les dévisageaient au passage, mais aucun ne leur adressa le moindre sourire de bienvenue. Les habitants semblaient plutôt déconcertés par leur arrivée. Certains chuchotèrent entre eux, en leur coulant des regards suspicieux.

— Croyez-vous qu’ils soient au courant des fiançailles ? demanda Joan dans un murmure.

Rhys se contenta de secouer la tête.

— Difficile à dire. Tout de même, j’aimerais mieux que tu restes avec Warrick pendant que je vais voir de quoi il retourne.

— Je peux envoyer l’un de mes hommes leur parler, proposa Warrick.

Un Irlandais de Killalough les avait accompagnés pour leur servir d’interprète.

— Non, non, chuchota Joan. C’est sans importance.

Elle se sentait accablée par l’inquiétude, certaine que ces fiançailles se termineraient aussi mal que les précédentes. Pourtant, elle tâcha de prendre sur elle tandis que le chariot faisait halte au portail. Rhys héla les sentinelles pour signaler leur présence, mais les deux gardes, Dieu savait pourquoi, semblaient mal à l’aise. Un silence étrange planait sur le fort, accentuant le malaise de Joan. Quelque chose n’allait pas, elle le sentait.

Son frère l’aida à descendre de l’attelage, et l’un des Irlandais s’avança vers eux pour les accueillir. Il ne parlait pas le normand, mais il leur indiqua par gestes de le suivre.

Ils pénétrèrent ensemble dans la vaste demeure, où régnait une atmosphère lugubre. La grande salle était plongée dans la pénombre. Joan recula, horrifiée, lorsqu’elle découvrit le corps allongé sur la table. Enfonçant les ongles dans le bras de Warrick, elle ferma les yeux, luttant contre la panique qui montait en elle.

Son promis était mort, exactement comme elle l’avait redouté. Mais loin d’éprouver du soulagement devant sa liberté recouvrée, elle sentait les larmes déborder de ses yeux. Murdoch n’était plus et, d’une certaine façon, elle se sentait coupable.

Trois fiançailles. Trois morts.

La seule pensée qui lui vint à l’esprit en cet instant, c’était que la malédiction était bel et bien réelle. Elle ne pourrait jamais épouser personne ! Un poids écrasant s’abattit alors sur sa poitrine, et tout ce qui l’entourait s’estompa dans un brouillard.

Confusément, elle vit une jeune fille s’approcher d’elle, les yeux rougis par les pleurs. Elle ne parlait que le gaélique, mais l’interprète de Warrick leur traduisit ses paroles. Son père, Murdoch O’Connor, était mort le matin même. Il n’y aurait pas de fiançailles, mais elle leur offrait l’hospitalité, s’ils souhaitaient passer la nuit sous leur toit.

— Nous vous remercions, déclara Rhys avec douceur, mais nous allons plutôt retourner chez mon père.

Il chargea l’interprète d’exprimer ses condoléances et sortit avec les siens.

Refoulant ses propres larmes, Joan se cramponnait à la main de Warrick qui l’entraîna, en lui frottant le dos pour la réconforter. Elle luttait pour garder son sang-froid, ne voulant pas montrer ses émotions, mais elle avait l’impression que Dieu se moquait d’elle.

Jamais elle n’aurait l’époux et la famille qu’elle désirait si ardemment. Jamais elle ne porterait d’enfant. Un énorme sentiment de frustration s’empara d’elle. Elle lâcha brusquement la main de son frère. Ce n’était pas juste ! Pourquoi fallait-il qu’elle soit différente des autres femmes ? Pourquoi ne pouvait-elle trouver un homme qu’elle puisse aimer ?

Sans un mot, ses frères l’aidèrent à remonter dans le chariot. Un silence pesant s’installa entre eux. Ils avaient déjà parcouru plusieurs kilomètres quand Rhys prit enfin la parole.

— Je suis désolé, Joan, mais c’est peut-être mieux ainsi. Tant pis pour notre père ! Je ne comprends pas pourquoi il a voulu ces fiançailles. Murdoch était bien trop âgé pour toi.

— J’aurais dû le savoir ! explosa-t-elle, la voix brisée par le chagrin et la colère. Tous ceux à qui on me fiance sont voués à la mort.

Warrick voulut lui reprendre la main, mais elle se dégagea d’un geste sec.

— Tu sais bien que c’est vrai !

— En matière de fiançailles, tu n’as pas eu de chance, mais…

Elle lui lança un regard flamboyant.

— Pas de chance ? se récria-t-elle.

Sa voix monta d’un ton :

— Ces hommes sont morts, Warrick ! C’est bien plus que de la malchance. C’est une malédiction.

Rhys haussa les épaules.

— Je ne crois pas aux malédictions, rétorqua-t-il.

Mais moi, j’y crois. Je n’ai pas le choix !

En sept ans, elle avait été fiancée à trois reprises, et chaque fois, le promis était mort. Une malédiction ! Il n’existait pas d’autre explication.

— Nous allons retourner à Killalough et réfléchir à ce que nous allons faire à présent, décida Warrick. Veux-tu retourner chez nous, en Angleterre ?

— Je ne sais pas, murmura Joan, le regard perdu sur les vertes et sinueuses collines d’Irlande.

Elle se sentait si incertaine, si perdue ! Si ses frères la ramenaient à la maison, il lui faudrait expliquer à son père qu’un autre fiancé venait de mourir. Et, bien que ce ne soit pas sa faute, elle ne souhaitait pas affronter sa déception.

— Si tu veux, tu peux rester quelque temps avec Rosamund, suggéra Warrick, dont l’épouse était une proche amie de Joan.

Joan réfléchit un instant. Pourquoi pas ? Rosamund pourrait au moins l’aider à trouver un moyen d’occuper ses journées.

— Nous pouvons aussi nous rendre à Laochre, afin de consulter le roi des Mac Egan, proposa Rhys. Il pourrait arranger d’autres fiançailles pour toi.

Joan fit la grimace. Se fiancer de nouveau ? C’était bien la dernière chose qu’elle souhaitait ! Elle en avait assez d’être un pion et de se voir offerte à des étrangers, pour ménager au clan de solides alliances.

Sans doute était-il temps pour elle de renoncer à des rêves qui ne se réaliseraient jamais. Quitte à tirer un trait sur eux, elle préférait choisir sa vie et prendre elle-même ses décisions.

* * *

Ronan O’Callaghan était un prince exilé de son royaume. En l’espace de quelques heures, il avait été dépouillé des droits que lui conférait sa naissance. Odhran, son frère par alliance, avait détrôné le roi légitime et massacré des innocents pour s’emparer du trône.

Et toi, tu n’as rien fait d’autre que t’enfuir, lui reprocha la voix de sa conscience. Tu n’es qu’un lâche !

Jamais il n’oublierait l’expression résignée de son père, Brodur, lorsque les mercenaires d’Odhran s’étaient emparés de lui. Leurs regards s’étaient croisés, et Ronan avait été témoin de toute la tristesse d’un homme qui s’était attendu à cet échec. Ce message muet lui avait transpercé le cœur plus profondément qu’un coup d’épée.

Le sentiment de sa propre culpabilité l’étouffait, même s’il savait pertinemment qu’Odhran l’aurait fait tuer s’il était resté à Clonagh. Il fallait bien que quelqu’un aille chercher de l’aide et s’assure des alliés pour reprendre la forteresse, non ? En quoi sa mort aurait-elle aidé son peuple ? Ils avaient besoin du secours de forces extérieures pour mater la rébellion.

La trahison était venue de l’intérieur même de Clonagh, c’était là une réalité à laquelle il ne pouvait se dérober, aussi douloureuse qu’elle soit. Cela faisait déjà cinq ans qu’Odhran et sa mère Eilis vivaient à Clonagh, mais ils avaient su tromper la vigilance de Brodur. Le vieux roi qu’était son père leur avait fait confiance, et il avait été trahi par sa propre épouse et son beau-fils.

Certains des membres du clan avaient pris le parti d’Odhran, tournant ainsi le dos à leur légitime souverain. Impossible de savoir qui était demeuré loyal et qui avait trahi !

Ronan sentait la colère bouillonner en lui, mêlée à un brûlant désir de vengeance. Il s’était enfui avec pour tout bagage les vêtements qu’il portait sur le dos, une épée et un cheval. À présent, après une chevauchée de deux jours, il arrivait en vue du château de Laochre, la forteresse des Mac Egan.

Le roi Patrick régnait sur la province du Sud, et le clan Mac Egan comptait parmi leurs alliés. Ronan était décidé à s’humilier s’il le fallait. Il quémanderait l’aide du roi pour récupérer ses terres de Clonagh – à n’importe quel prix !

Les tours carrées de Laochre étaient de pierre et de bois, le roi Patrick ayant reconstruit le château dans le style normand. Le territoire des Mac Egan s’étendait sur des miles et des miles, depuis le sommet de la colline d’Amadan jusqu’à la côte. Même l’île d’Ennisleigh se trouvait sous leur domination. S’il pouvait obtenir de l’aide, ce serait bien auprès des membres de ce clan.

Bien qu’épuisé, il se dirigea vers le portail. Il n’avait pas dormi depuis des jours et, s’il avait observé quelques haltes, c’était pour ménager sa monture et non pour lui-même. Avec son armure encore maculée de sang, il ne devait pas avoir meilleure allure qu’un mendiant. Mais il était bien décidé à rencontrer le roi Patrick et à solliciter son aide.

Les soldats le laissèrent entrer dans le fort, et Ronan confia son cheval à un garçon d’écurie. À peine eut-il mis pied à terre que sa vision se brouilla. Harassé, il dut lutter contre la fatigue qui menaçait de le submerger. Il y avait si longtemps qu’il n’avait pas mangé que l’odeur de la nourriture, dont le fumet flottait jusqu’à ses narines, le fit presque défaillir. Seules ses longues années d’entraînement et de discipline lui permirent de dissimuler sa faim et son épuisement.

Il se dirigeait vers l’escalier du donjon lorsqu’il aperçut une femme, de l’autre côté de la cour intérieure. Elle se détachait des autres, tel un rayon de soleil dans la pénombre. Elle était probablement de noble origine, à en juger par sa robe d’une blancheur neigeuse, taillée à la mode normande. Un voile lui recouvrait les cheveux, ne laissant apparaître qu’une boucle noire lovée sur l’épaule. Elle avait beau être d’une beauté discrète, son sourire retint son attention.

Qui pouvait-elle bien être ? Peut-être une parente de la reine Isabel, mais ce n’était pas certain.

Du coin de l’œil, il vit une petite fille d’environ trois ans s’élancer en courant vers elle. C’était donc pour cela qu’elle souriait ! La fillette se jeta dans les bras de la femme, qui éclata de rire en la soulevant vers elle pour lui embrasser la joue. Sans doute était-elle la mère de l’enfant.

Au même instant, la petite fille pointa le doigt vers lui et chuchota quelque chose à la jeune femme, qui le dévisagea, tandis que le sourire s’effaçait de ses lèvres. Elle fit taire la petite et lui prit la main, avant de l’entraîner plus loin.

Ronan sentit sa poitrine se serrer. Bien sûr, ce n’était là qu’innocente curiosité d’enfant, rien de plus, et il n’avait pas à en être blessé. Pourtant, il s’était senti rejeté – comme s’il avait été un monstre dont la seule apparition effrayait les fillettes !

Un frisson lui parcourut le dos. Il songea aux enfants qui s’étaient battus à Clonagh pour tenter de défendre leurs pères.

Et à celui dont il avait causé la mort…

Tu n’étais pas destiné à devenir leur prince, lui chuchota la voix sombre de sa conscience. C’était Ardan qui devait devenir le roi, pas toi…

La gorge nouée, il refoula l’oppressant sentiment de culpabilité qui déferlait de nouveau en lui. Il ne pouvait plus rien faire à présent, sinon essayer de réparer tant bien que mal les erreurs du passé. Il n’était venu ici que dans un seul but – trouver de l’aide pour Clonagh. Se laisser distraire par une femme était bien la dernière chose qu’il lui fallait en ce moment.

Parvenu au sommet des marches, il fut accueilli par Sir Anselm. Pendant toutes ces années, le chevalier normand s’était montré un vassal loyal, qui leur avait rendu visite à plusieurs reprises de la part des Mac Egan.

— Milord, quelle surprise ! s’exclama-t-il en posant un genou à terre en signe de respect.

Ronan avait beau être fils de roi, ce salut traditionnel ne fit que lui rappeler qu’il n’était plus désormais que le seigneur de Rien du Tout. Il s’était montré incapable de contrer l’attaque sur Clonagh, et plus d’un ne manquerait pas de l’en blâmer.

De plus en plus renfrogné, il suivit le chevalier à l’intérieur du donjon. Il lui était difficile de se montrer patient, étant donné l’urgence de la situation. Il avait besoin de soldats pour reprendre la forteresse, des hommes bien entraînés et aguerris, capables de reprendre le pouvoir à son demi-frère, sans faire de mal à son peuple.

Sir Anselm le guida à l’intérieur et Ronan traversa la grande salle. Des douzaines d’hommes et de femmes étaient rassemblés à l’une des extrémités, écoutant le frère du roi, Trahern Mac Egan, qui leur contait des histoires. Le roi Patrick et la reine Isabel étaient assis sur l’estrade avec leur jeune fils et deux hommes inconnus de Ronan – des Normands, à en juger par l’aspect de leur armure.

Sir Anselm le conduisit vers l’estrade et le roi tourna son attention vers lui. Une expression étonnée se peignit sur son visage. Ronan se rendit alors compte qu’il n’aurait jamais dû pénétrer céans dans cet état, les vêtements maculés du sang des ennemis.

La compassion se peignit sur le visage de la reine, qui appela une servante et se pencha vers elle pour lui chuchoter des ordres.

— Je ne m’attendais pas à votre visite, Ronan, déclara le roi Patrick avec gravité. Joignez-vous donc à nous pour le dîner, ajouta-t-il en l’invitant d’un geste à prendre place à table.

Une servante disposa de la nourriture devant lui et Ronan dut prendre sur lui pour ne pas se jeter sur le pain et le brouet. Il n’avait pratiquement rien mangé ces derniers jours, et il ne lui fallut que quelques minutes pour engloutir son repas. La domestique le resservit et, cette fois, il parvint à manger plus lentement.

Le roi lui présenta ses deux compagnons – Rhys et Warrick de Laurent – et poursuivit la conversation en normand, afin que ces derniers puissent comprendre. Ronan se félicita que son père l’ait obligé à apprendre plusieurs langues, bien qu’il ait détesté cela à l’époque. Même ainsi, il ne comprenait pas vraiment pourquoi le roi mêlait ces hommes à leur échange, mais ils semblaient être des guerriers. Et Ronan était prêt à accueillir de l’aide avec joie, qu’elle vienne du côté irlandais ou normand.

Le roi se tourna vers lui.

— J’ai entendu dire que Clonagh avait été attaqué il y a quelques nuits de cela et que votre père, le roi Brodur, est retenu en otage. Ce sont nos voisins de clan à Gall Tir qui nous en ont informés.

Ronan confirma d’un hochement de tête et passa lui-même au normand pour relater les événements.

— Odhran, mon frère par alliance, a réuni des troupes pour s’emparer de la forteresse, et a fait jeter mon père en prison.

Il continua son récit, tâchant de refouler l’émotion de sa voix tandis qu’il évoquait ceux qui avaient perdu la vie durant l’assaut. Une partie de lui continuait à penser qu’il aurait dû rester à Clonagh malgré le danger. Mais il savait aussi que leurs alliés Mac Egan représentaient leur meilleur espoir de reconquérir Clonagh.

Soudain, il vit la femme en blanc pénétrer dans la grande salle, et son attention dériva de nouveau vers elle. L’inconnue portait la petite fille sur la hanche. Elle la posa à terre et la fit asseoir parmi les autres enfants, qui écoutaient le barde. La petite se mit à gigoter, puis se releva pour trottiner autour des assistants, et la femme la suivit, gardant un œil vigilant sur elle.

Les deux Normands remarquèrent son inattention. Ronan les sentit se raidir sans comprendre pourquoi. Il se força à reporter le regard vers eux.

— Bref, je suis venu vous demander des soldats, acheva-t-il. Je ne peux pas laisser mon peuple souffrir sous la domination d’Odhran. La plupart des habitants de Clonagh étaient trop sidérés pour se battre contre leurs propres compagnons de clan. Je dois rétablir mon père sur le trône.

Le roi échangea un regard avec les deux Normands, comme s’il sollicitait leur avis.

Après un silence, Warrick de Laurent intervint pour demander :

— Combien vous faut-il d’hommes ?

— Deux douzaines. Trois seraient encore mieux, mais si ce sont de bons guerriers, cela devrait suffire.

— Lorsque vous aurez repris Clonagh, quels moyens aurez-vous de le garder ?

Ronan hésita.

— Une fois que j’aurai rétabli mon père sur son trône et chassé Odhran, nous devrions pouvoir maintenir l’ordre avec les hommes qu’il nous reste. Ceux qui nous sont restés fidèles, bien sûr.

Une furtive expression de doute se peignit sur le visage du roi Patrick.

— Et la reine Eilis ? Qu’est-il advenu d’elle pendant l’attaque ?

En entendant nommer sa belle-mère, Ronan sentit sa colère se raviver. Eilis, tout autant que son fils, avait trahi son père.

— Elle a soutenu la rébellion d’Odhran et n’a rien fait pour aider mon père.

Le roi s’assombrit à ces mots.

— Je sais ce que c’est que devoir affronter la trahison à l’intérieur de sa propre demeure. Mais vous ne pouvez pas exiler l’épouse de votre père, Ronan. C’est à Brodur d’en prendre la décision.

Dans le tourbillon des événements, Ronan n’avait pas réfléchi à cela. Il se pouvait que son père refuse d’éloigner sa femme et, si c’était le cas, Ronan ne pourrait pas se débarrasser de cette dernière, même s’il réussissait à reprendre Clonagh.

— Alors que suggérez-vous ? s’enquit-il.

Le roi échangea un nouveau regard avec les de Laurent.

— Vous devriez revendiquer vous-même le trône et prendre une épouse, déclara-t-il enfin. Une femme qui vous apportera une armée pour défendre Clonagh contre de nouvelles menaces, au cas où il en surviendrait. Si j’étais vous, je garderais des troupes d’appoint là-bas pendant au moins un an, le temps de savoir qui est vraiment loyal.

Ronan se raidit à ces mots. Après toutes les erreurs qu’il avait commises, il n’avait pas le moindre désir d’épouser qui que ce soit.

— Je ne vais pas me cacher derrière les jupes d’une femme ! Ou derrière ses soldats, en l’occurrence…

Sa négligence avait déjà coûté assez de vies. Mieux valait qu’il demeure célibataire !

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Commentaires récents

Argent

Un peu de déception comme pour le second tome… dans l’ensemble cela reste un bon livre: bonne écriture, bons personnages… l’intrigue aurait mérité d’être plus étoffée.

J’ai quand même passé un bon moment.

6,5/10

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Bronze

Peut être le tome le plus attractif de la trilogie pour moi. Même si l'héroïne peut paraître agaçante dans son entêtement, les croyances ont parfois la vie dure ! Une trame classique mais qui se lit sans prise de tête. Le final est plutôt different de ce qui est habituel, et il est réaliste. Une histoire intéressante mais qui aurait mérité d'être approfondie.

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Dates de sortie

Cœur de guerrier, Tome 3 : Le Sort d'un Irlandais

  • France : 2019-10-01 - Poche (Français)
  • USA : 2018-07-17 - Poche (English)

Activité récente

Titres alternatifs

  • Forbidden Night with the Prince - Anglais
  • Forbidden Night with the Prince (Warriors of the Night #3) - Anglais
  • Una notte di peccato - Italien

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