Comme un Baiser Brûlant

— J’ai posé tes affaires dans la chambre d’amis pour ce soir.

Gabriel posa les mains sur la rampe de la véranda, de chaque côté d’elle, la chaleur virile de son torse enveloppant son dos.

L’angoisse la saisit. Pourtant, elle savait très bien que Gabriel n’userait jamais de la force contre elle. Il avait beau être impitoyable, si elle lui disait non, il reculerait. Mais le projet de mariage s’arrêterait net, et Jess serait reconduite à la porte d’Angel Station avec la consigne de ne jamais y remettre les pieds.

— Seulement pour ce soir ? demanda-t-elle, le regard rivé sur les lointaines Alpes.

Situés dans le bassin de ces montagnes magnifiques, les paysages de Mackenzie Country étaient stupéfiants de beauté, même en cette fin d’hiver. Mais la splendeur vibrante de son pays ne suffisait pas à l’apaiser en cet instant.

— Nous allons nous marier, Jess.

— Je sais bien. Mais nous ne pouvons pas...

— J’ai été très clair sur le fait que je voulais des enfants.

Il lui fallut chaque once de son courage pour continuer à affronter sa détermination de fer.

— Je dis juste que nous avons besoin de temps pour nous habituer l’un à l’autre sur ce plan-là.

— Quel plan ?

Il souffla ces mots contre la peau sensible de son cou, comme une chaude caresse.

Une vague de désir la parcourut. Un choc qui menaçait de lui faire perdre tous ses repères.

— Tu sais ce que j’essaie de dire.

— Ça fait un an que je dors seul, assena-t-il. Si tu veux plus de temps, trouve-toi un autre homme.

— Je n’arrive pas à croire que tu aies dit ça, s’indigna-t-elle en tentant en vain de se retourner. Tu veux dire que tu annuleras le mariage si je refuse de coucher avec toi tout de suite ?

Le corps de Gabriel était un piège inéluctable.

— Réfléchis, Jess. Pourquoi nous marions-nous ? Tu veux garder les terres Randall dans ta famille, et moi, j’arrive à un stade de ma vie où je veux des enfants pour assurer l’avenir d’Angel Station. En substance, nous nous marions pour avoir des héritiers. Si tu ne veux pas faire ce qu’il faut pour en avoir, alors à quoi bon ? Soit nous commençons tout de suite, soit nous ne commençons pas du tout.

C’était une peinture brutalement terre à terre de leur marché, déchirante de vérité. Et cela rendait Jess furieuse. Pourquoi ne pouvait-il pas essayer d’adoucir les choses juste pour ce soir, quand elle en avait le plus besoin ?

— Je suis vierge, Gabe. Alors si je fais quelques erreurs demain, il faudra que tu m’excuses.

Il se figea.

— Qu’est-ce que tu as dit ?

Elle était fière de l’avoir désarçonné, pour une fois, quoiqu’un peu nerveuse après son aveu.

— Tu as très bien entendu.

— Tu veux dire que Damon n’a jamais rien tenté ?

De la part d’un autre homme, elle aurait pris cela pour une tentative délibérée de verser du sel sur des blessures encore vives. Mais les piques sournoises n’étaient pas du style de Gabriel — il attaquait de manière frontale.

— Non.

— Et tu n’as pas trouvé d’autre amant ?

Il répondit à sa propre question avant qu’elle puisse le faire.

— Non, bien sûr. Tu attendais que Damon tombe amoureux de toi.

Jess tressaillit. La cruelle déduction de Gabriel tombait bien trop près de la vérité.

— Nous savons tous deux que ça ne s’est pas produit, alors je suis moins expérimentée que ce à quoi tu pourrais être habitué.

Un doux euphémisme. Les conquêtes de Gabriel étaient toujours débordantes de sensualité.

— Bien. Je ferai ton éducation moi-même.

Stupéfiée, elle se tourna vivement dans ses bras.

— J’espère que tu plaisantes ?

Il pencha la tête jusqu’à ce que ses lèvres soient à un souffle des siennes.

— Je croyais que tu le savais, je n’ai aucun sens de l’humour.

Le baiser qu’il lui donna n’était ni doux ni délicat. Plein d’une pure arrogance mâle et de résolution, Gabriel lui fît ouvrir la bouche et quand elle céda, il prit possession d’elle.

Sans pitié. Sans mesure.

Comme à l’aéroport, Jess se figea. Mais cette fois, le baiser ne fut pas un bref éclair. Ce fut un incendie, et elle se retrouva agrippée à lui, son corps pressé contre le sien, son esprit noyé dans un désir brut. Quand enfin, il desserra son étreinte, elle put reprendre son souffle. Et puis, il la prit de nouveau.

Ses pensées s’éparpillèrent comme un million de grains de sable sous une vague déchaînée.

Gabriel prit son temps pour savourer Jess, savourer la douceur généreuse de sa bouche. Pas de doute, il faisait naître en elle un désir primaire. Exactement ce qu’il cherchait. Jess aimait peut-être un autre homme, mais c’était le nom de son mari qu’elle crierait dans son lit.

Ce à quoi il ne s’était pas du tout attendu, c’était le plaisir infini qu’elle lui donna en retour. Oh, il n’y avait pas de quoi se réjouir ! La passion physique pouvait saboter les plans les mieux préparés. En choisissant Jess, il avait pris la décision de rester loin du désir. Mais elle était là, entre ses bras, aussi brûlante qu’un feu sauvage.

Interrompant leur baiser, il l’observa tandis qu’elle essayait de se reprendre, le souffle court, ses seins frottant contre son torse. Ses lèvres étaient humides, ses yeux clos, et son corps alangui. Aussi tentant que cela soit d’initier un autre baiser, il n’avait aucune intention de céder du pouvoir dans cette arène. Ou aucune autre, d’ailleurs.

Enfin, elle ouvrit les yeux.

Frottant son pouce contre sa lèvre inférieure, il posa son autre main sur la courbe de sa hanche.

— Nous n’aurons aucun problème au lit.

La douce soumission féminine disparut en une seconde.

— Tu as montré que tu avais raison, alors laisse-moi partir.

La relâchant, il recula d’un pas et posa les yeux sur ses tétons durcis. Elle rougit sous son regard, mais ne chercha pas à masquer son trouble. Ainsi, elle était du genre têtu ? Eh bien, il prendrait beaucoup de plaisir à l’apprivoiser.

— Va dormir. Ça va être une journée chargée demain. Et, Jess, souviens-toi, je ne suis pas du genre à laisser filer ce qui m’appartient.