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Adèle a fait un enfant pour la même raison qu'elle s'est mariée. Pour appartenir au monde et se protéger de toute différence avec les autres. En devenant épouse et mère, elle s'est nimbée d'une aura de respectabilité que personne ne peut lui enlever. Elle s'est construit un refuge pour les soirs d'angoisse et un repli confortable pour les jours de débauche.
Afficher en entierQuand ils font l'amour, les hommes regardent leur sexe. Ils prennent appui sur leurs bras, penchent la tête et observent leur verge pénétrer la femme. Ils s'assurent que cela fonctionne. Ils restent quelques secondes à apprécier ce mouvement, à se réjouir peut-être de cette mécanique, si simple et si efficace. Adèle sait bien qu'il y a aussi une forme d'excitation dans cette auto-contemplation, dans ce retour vers soi. Et que ce n'est pas seulement leur sexe à eux, mais aussi le sien qu'ils contemplent.
Afficher en entierAdèle a déchiré le monde. Elle a scié les pieds des meubles, elle a rayé les miroirs. Elle a gâché le goût des choses. Les souvenirs, les promesses, tout cela ne vaut rien. Leur vie est une monnaie de singe. Il a pour lui-même, encore plus que pour elle, un profond dégoût. Il voit tout d'un oeil nouveau, d'un oeil triste et sale.
Afficher en entierAdèle s’en veut d’avoir été imprudente. Elle n’aurait jamais dû danser, se montrer si abordable. Elle n’aurait pas dû s’asseoir sur les genoux de Laurent et raconter, la voix chevrotante et complètement ivre, un sombre souvenir d’enfance. Ils l’ont vue tapiner derrière le bar avec le jeune garçon. Ils l’ont vue et ils ne la jugent pas. C’est bien pire. Ils vont croire à présent qu’une complicité est possible, que la familiarité est de mise. Ils vont vouloir en rire avec elle. Les hommes vont croire qu’elle est coquine, leste, facile. Les femmes la traiteront de prédatrice, les plus indulgentes diront d’elle qu’elle est fragile. Ils auront tous tort.
Afficher en entierCe soir Adèle n’a pas l’intention de se tromper de cible. Elle plaisante avec Bertrand, qui la soûle en lui détaillant pour la énième fois sa collection de mangas japonais. Il a les yeux rouges, il vient sans doute de fumer un joint et son haleine est encore plus sèche et acide que d’habitude. Adèle fait bonne figure. Elle feint de supporter la documentariste obèse qui ce soir se permet un sourire, elle dont la bouche n’exprime d’habitude que râles et soupirs. Adèle s’échauffe. Le champagne coule à flots grâce à un homme politique à qui Cyril a offert un portrait élogieux en Une du journal. Elle ne tient plus en place. Elle se sent belle et déteste l’idée que sa beauté soit inutile, que sa gaieté ne serve à rien.
Afficher en entierElle comprit très vite que le désir n’avait pas d’importance. Elle n’avait pas envie des hommes qu’elle approchait. Ce n’était pas à la chair qu’elle aspirait, mais à la situation. Être prise. Observer le masque des hommes qui jouissent. Se remplir. Goûter une salive. Mimer l’orgasme épileptique, la jouissance lascive, le plaisir animal.
Afficher en entierA côté de la collection d'allumettes de bars d'hôtels, Simone a installé l'urne funéraire en porcelaine blanc et rose. On dirait une grosse boîte à biscuits ou une vieille théière anglaise.
En une nuit, son père est passé du fauteuil noir à l'étagère du salon.
Afficher en entierElle ne comprend pas cet hédonisme de bon ton, cette obsession qui semble avoir gagné tout le monde du « bien boire » et du « bien manger ». Elle a toujours aimé avoir faim. Se sentir fléchir, chavirer, entendre son ventre se creuser et puis vaincre, ne plus avoir envie, être au-dessus de ça. Elle a cultivé la maigreur comme un art de vivre.
Afficher en entierÀ quoi servirait de se retenir ? La vie n'en serait pas plus belle. À présent, elle réfléchit en opiomane, en joueuse de cartes. Elle est si satisfaite d'avoir repoussé la tentation pendant quelques jours, qu'elle en a oublié le danger.
Afficher en entierJe lui disais : Adèle, il faut que tu te prennes en main, si tu veux te comporter comme une princesse, trouve-toi un prince parce qu'ici on n'a pas les moyens de t'entretenir à vie. (...) Non, heureusement qu'elle a trouvé un homme comme vous. Vraiment, on en a de la chance.
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