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Dans les Bras du Comte



Description ajoutée par witch31 2011-08-01T19:08:33+02:00

Résumé

Northumberland, 1813. Après le scandale provoqué par son fiancé, dont elle ignorait le passé dissolu, Diana Clare part oublier Londres sur les terres de sa famille, en Northumbrie. Dans cette campagne anglaise, aucun vil séducteur ne viendra bouleverser une deuxième fois son existence. Du moins, l’espère-t-elle de toutes ses forces. Cependant, quelques semaines à peine après son arrivée, elle est secourue par le comte de Coltonby alors que sa voiture s’est embourbée dans un champ. Lord Coltonby, le plus célèbre débauché de Londres qui était présent le soir où le scandale a éclaté… Troublée par les souvenirs que cette rencontre ravive en elle, effrayée à l’idée que le comte ne révèle son sulfureux secret, Diana décourage l’entreprenant libertin. Mais lord Coltonby n’est pas le genre d’homme à se laisser éconduire …

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Classement en biblio - 34 lecteurs

extrait

Extrait ajouté par Underworld 2020-01-09T17:17:51+01:00

** Extrait offert par Michelle Styles **

Chapitre 1

Septembre 1813, vallée de la Tyne, Northumberland.

Diana Clare lutta contre la tentation de proférer d’horribles jurons, des jurons incongrus dans la bouche d’une jeune femme respectable.

Un petit cri de frustration et un mot à peine susurré franchirent cependant ses lèvres. Jester, sa jument pie, l’observa d’un œil qui semblait réprobateur. Un peu confuse, Diana s’agita nerveusement sur le siège de son cabriolet. Jester avait raison. Elle avait cédé à la colère, brisant ainsi l’une des règles cardinales les plus sacrées : ne jamais laisser la passion prendre le pas sur la raison.

C’était indigne d’une lady.

Elle respira profondément, compta jusqu’à dix, puis leva les yeux sur le paysage serein qui l’entourait. Le miracle allait-il se produire ? Hélas, non. Sa voiture demeurait irrémédiablement embourbée. Perdant tout espoir, Diana sentit une douleur sourde battre derrière ses yeux.

Comme pour ajouter à l’irritation de sa maîtresse, Jester se mit alors à brouter l’herbe grasse de la prairie, indifférente au fâcheux incident qui mettait Diana dans tous ses états.

Excédée, Diana releva ses cheveux noirs, puis se pencha sur sa droite pour évaluer l’ampleur du désastre. Si elle était gravement embourbée, c’était bien sa faute, et uniquement sa faute, elle l’admettait volontiers. Mais reconnaître honnêtement son erreur et l’accepter étaient deux choses bien différentes.

Pourtant, elle savait bien qu’il était dangereux de lire d’une main et de tenir les rênes de l’autre. Mais aujourd’hui, elle avait une excuse : elle devait rendre visite à lady Bolt qui réunissait ce jour-là la congrégation des plus mauvaises langues du comté, celles-là même qui venaient de briser avec entrain la réputation de l’une de leurs semblables. Une épreuve que Diana appréhendait entre toutes.

Alors, pour tenter d’adoucir son calvaire, elle avait pris à la bibliothèque le troisième et dernier volume d’Orgueil et préjugés. D’ordinaire, elle méprisait les romans frivoles et ne daignait même pas les ouvrir. Mais Mme Sarsfield avait insisté pour qu’elle lise au moins la première page, et Diana avait été conquise au point de ne plus pouvoir interrompre sa lecture.

Elle observa son roman, cause de sa mésaventure, posé sur le siège de son cabriolet. Tentée par une touffe d’herbe grasse, sa jument avait traversé à l’endroit le plus bourbeux de la prairie au moment où Diana abordait une scène captivante entre miss Elizabeth Bennet et M. Darcy. C’est alors que les roues s’étaient immobilisées dans la boue, enfoncées jusqu’aux moyeux !

Diana plaisantait souvent avec son frère Simon à propos de Jester, affirmant que la jument était capable de la ramener à la maison les yeux fermés. En cet instant, le retour au bercail semblait gravement compromis. Le cabriolet ne bougeait pas d’un iota. La seule solution était de descendre de voiture en tentant de gagner dignement la terre ferme, telle une lady. En fait, il lui suffirait sans doute d’un grand pas pour se tirer d’affaire.

Comme elle mettait pied à terre, sa bottine plongea dans le sol détrempé et en demeura prisonnière. Elle ne put réprimer un cri et tenta de retenir son bonnet qui finit par lui échapper avant de tomber dans la fange.

— Triste spectacle qu’une beauté en détresse !

Cette voix teintée d’arrogance la fit sursauter. C’était une voix d’homme qui ne lui était pas familière.

Diana sentit sa gorge se serrer. Surprise dans cette fâcheuse posture, elle se trouva terriblement humiliée.

— En dépit des apparences, je ne suis pas en détresse, corrigea-t-elle sans se retourner.

Elle espérait ainsi décourager l’inconnu, priant pour qu’il ait le bon goût de passer son chemin. Elle se raccrochait à sa dignité, convaincue que seule cette attitude pourrait lui permettre de se tirer de cette situation difficile.

— Ma voiture s’est embourbée et je suis sur le point de résoudre le problème, ajouta-t-elle. C’est différent !

Elle fit en sorte de se concentrer sur la direction à prendre, cherchant du regard un îlot de terre ferme. Si elle feignait d’ignorer cet homme, il cesserait de l’importuner et finirait par s’éloigner. Ainsi son calvaire prendrait fin. Elle devait avant tout songer à se tirer honorablement de ce mauvais pas.

Mais alors qu’elle tentait de s’extraire du bourbier dans lequel elle se trouvait, Diana perdit l’équilibre et dût exécuter quelques moulinets avec ses bras pour le recouvrer.

— En grande détresse ! C’est bien ce que je disais, reprit la voix avec ironie.

— Il n’en est rien, se défendit-elle. Je suis sur le point de m’en sortir, au contraire. La boue est plus épaisse que je ne le pensais, voilà tout.

A ce moment précis, sa jambe s’enfonça plus profondément dans la boue, lui arrachant un cri. Une giclée souilla sa robe tandis qu’elle tentait de rétablir son équilibre avant que le sol ne finisse d’absorber sa jambe et ce qui lui restait de dignité.

Sa main rencontra alors un objet solide auquel elle s’agrippa de toutes ses forces. Ce n’était pas un piquet de clôture ou quelque branche, mais un bras robuste revêtu d’un tissu épais.

Désormais, Diana devait faire un choix : s’enliser définitivement dans cette boue noire en perdant la face, ou ne pas lâcher ce bras secourable au mépris des convenances et de son honneur.

Elle choisit la seconde solution.

— Il serait dommage de gâter une si jolie robe, belle inconnue.

Sans attendre sa réponse, le quidam charitable la prit par la taille et la souleva dans les airs.

La poitrine de Diana effleura le torse de l’inconnu et elle en fut troublée d’étrange façon. Reprenant bien vite ses esprits, elle pria pour qu’il la repose à terre mais il n’en fit rien et resserra au contraire son étreinte.

— Maintenant, vous pouvez me lâcher, suggéra-t-elle en fixant intensément les yeux gris-argent de l’homme.

Une étrange sensation la saisit : l’impression d’être tombée dans un piège dont elle ne pourrait plus sortir.

— Lâchez-moi, s’il vous plaît.

— Pas sans avoir obtenu ma récompense, répliqua-t-il.

— Votre récompense ?

Elle eut l’impression que le ciel s’obscurcissait tout à coup et que son escapade risquait fort de se transformer en cauchemar.

Assurément, cet homme n’était pas conscient d’être en présence d’une lady. Elle entendait bien le lui faire savoir. Finir dans la boue était déjà une humiliation suffisante, céder à ce séducteur, c’en était trop !

Pourquoi vous récompenserais-je ?

— Je vous ai secourue. Cette galanterie vaut bien une petite gratification.

Il osa effleurer ses lèvres, et Diana ressentit cette audace comme une brûlure. Saisie d’une indicible panique, elle martela de ses poings le large buste de l’insolent.

— Allez-vous me lâcher enfin ?

— Le souhaitez-vous vraiment ? questionna-t-il, un rien goguenard.

Diana s’efforça de rester digne. Dans une telle situation, c’était tout ce qui pouvait la sauver. Pour se rassurer, elle se dit qu’une femme respectable et bien élevée n’était jamais en danger. Jamais.

— C’est bien ce que je souhaite, en effet.

— Je ne refuse jamais rien à une jolie donzelle.

L’homme desserra enfin son étreinte et la déposa sans cérémonie sur l’herbe tendre. La jupe de Diana remonta légèrement sur ses jambes, découvrant ses chevilles. Elle la rabattit aussitôt, en priant pour qu’il n’ait rien remarqué.

Elle se jura en silence de ne plus jamais lire de romans en tenant les rênes et de ne plus proférer de jurons si le Ciel la délivrait de ce cauchemar. En fait, tout cela était sa faute. Elle avait transgressé les règles de la bienséance que toute lady se devait d’observer. Voilà ce qui arrivait à celles qui méprisaient ces lois.

Diana tenta de se reprendre. A aucun prix elle ne perdrait la face devant un inconnu. Laisser entrevoir son embarras ne ferait qu’aggraver la situation.

— Vous noterez que je vous ai obéi, fit-il remarquer avec un rien de suffisance. Ah, beauté, que ton nom est pervers !

— Vous m’avez secourue et je vous en suis reconnaissante. A présent, vous pouvez poursuivre votre route.

L’homme demeura immobile, bien campé sur ses jambes. Diana l’observa du coin de l’œil tout en priant pour qu’il se décide enfin à partir.

Le manteau de voyage de l’inconnu, qui révélait ses larges épaules, était très bien coupé et sa culotte de daim très ajustée disparaissait dans ses bottes noires à la Souvaroff. Une cravate de soie blanche à pois noirs indiquait qu’il appartenait au Four Hand Club, le club le plus réputé d’Angleterre où se réunissaient les meilleurs conducteurs de phaétons.

Elle remarqua aussi la cicatrice qui courait de son front à sa joue et, soudain, une révélation s’imposa à elle.

Cet homme était Brett Farnham. Elle en était sûre !

Elle porta la main à ses yeux comme pour chasser les images du passé.

— Quelque chose vous trouble, ma belle ? murmura-t-il d’une voix veloutée. Pardonnez-moi si je vous ai offensée, mais je vous assure que ma seule intention était de vous secourir.

— Ce… ce n’est rien, monsieur, dit-elle en esquissant un sourire forcé. Je ne vois pas ce qui pourrait me troubler. Dieu merci, rien n’est venu gâter cette journée.

— Si ce n’est que vous avez manqué disparaître dans un bourbier.

— Euh… en effet.

Diana surmonta la tentation d’enfouir son visage dans ses mains pour mieux cacher sa confusion. Elle venait de se laisser embrasser par l’un des plus redoutables libertins du royaume, le célèbre fondateur du Jehu Driving Club de l’université de Cambridge. Farnham parlait le jargon des grandes écoles, enseignait l’art de nouer les cravates, et il était le confident de Brummel et de Byron. Elle songea à son ancien fiancé qui le vénérait, une fascination qui avait conduit le malheureux à sa perte.

Cinq ans plus tôt, Diana s’était retirée dans sa solitude campagnarde pour tenter d’oublier ce drame survenu à Londres, et voilà que Brett Farnham resurgissait dans sa vie. Et avec lui tous ces événements tragiques.

Décidément, son destin était étroitement lié à ses propres actes. Mais si elle se conformait aux principes de l’éducation qu’elle avait reçue, elle ne risquait rien. Son séjour à Londres lui avait au moins appris cela.

— Je vous en prie, laissez-moi et oubliez cet incident, conclut-elle.

— Vous vous moquez donc que l’on vole à votre secours ? questionna Brett Farnham en la toisant de toute sa hauteur.

— Monsieur, il est d’usage qu’un gentilhomme attende qu’on le supplie de vous secourir.

— Un gentilhomme a le devoir d’agir dès qu’il voit une dame en détresse, corrigea-t-il. Son premier souci est d’éviter le pire.

Elle sentit alors son regard se poser sur elle avec insistance et se félicita de porter une robe sage à col haut.

— Dieu merci, votre ravissante toilette n’a pas trop souffert de la boue.

Diana détourna les yeux. Elle détestait ces propos galants, ceux dont ce dandy usait et abusait probablement chaque jour pour mieux séduire. Heureusement, ces méthodes n’avaient plus aucun pouvoir sur elle. A ses yeux, Londres et ses futilités appartenaient au passé. Ici, Diana se sentait chez elle et cela continuerait ainsi tant qu’elle saurait inspirer le respect.

— Je vous remercie de m’avoir secourue, conclut-elle posément.

Elle était maintenant délivrée de tout émoi, de toute crainte à l’égard de cet homme, et le considéra comme s’ils s’étaient rencontrés dans un salon de thé.

— Veuillez patienter un peu, belle inconnue, je vais essayer de sortir votre cabriolet de l’ornière.

Un sourire apparut au coin des lèvres de Brett Farnham comme il ajoutait :

— Ensuite, vous pourrez me remercier comme il convient.

— Ne vous souciez pas de mon cabriolet, monsieur. Je suis parfaitement capable de me débrouiller seule.

Mais alors qu’elle faisait un pas en direction de sa voiture, il lui barra le passage.

— Ecartez-vous, je vous prie, ordonna-t-elle, la lèvre tremblante. Je vous dispense de votre aide et ne veux rien vous devoir.

— Ah ! Vous préférez sans doute rentrer chez vous à pied, après tout ce que j’ai fait pour vous sortir de la fange ? Pas question ! Je ne peux laisser une beauté comme vous en détresse.

— Encore une fois, je n’ai que faire de votre assistance, répliqua-t-elle en relevant le menton.

Une beauté ! Vraiment ? Pour qui la prenait-il ? Pour une fille de ferme ou quelque bergère mûre pour la cueillette ? Nul doute que ses viles flatteries n’avaient qu’un but : lui voler un autre baiser. Un baiser plus insistant que le précédent, sans doute ?

A cette seule idée, Diana sentit son cœur s’affoler. Tout cela était sa faute après tout. Elle aurait mieux fait de regarder devant elle au lieu de mener sa voiture tout en lisant un roman à la mode. Voilà ce qui arrivait aux écervelées de son espèce !

— Je vous assure que vous risquez d’embourber plus gravement votre attelage, reprit-il, la main sur le cœur. Foi de gentilhomme : je ne puis abandonner une lady à un destin aussi tragique.

— Je ne suis pas une mijaurée qui sait à peine tenir les rênes, monsieur. Je suis tout à fait capable de sortir mon cabriolet de l’ornière.

Le dandy lança un regard vers la voiture, dont les roues disparaissaient à moitié dans la fange, et toussota.

Diana admit en secret qu’il lui faudrait un temps fou pour sortir son véhicule de là. A condition, bien sûr, que Jester accepte de quitter la prairie où l’herbe était visiblement tendre et savoureuse.

— Moi, je préfère ne rien laisser au hasard quand je prends la route, déclara Brett Farnham. En ce qui vous concerne, les choses auraient pu tourner plus mal, reconnaissez-le. Imaginez qu’au lieu de finir embourbée dans ce champ vous ayez heurté un obstacle. Cela aurait été beaucoup plus grave.

Cet arrogant personnage commençait à l’agacer sérieusement. Cependant, elle s’efforça de garder son calme. Déjà, son cœur battait moins vite. Pour elle, Brett Farnham et les gens de son acabit appartenaient désormais à un autre monde. Diana était définitivement immunisée contre eux car elle savait quel danger ils représentaient. Elle savait également que les hommes comme Brett connaissaient et observaient généralement les codes de la bonne société : une lady devait être respectée et secourue en toute circonstance.

— Moi, je ne me suis jamais embourbé, intentionnellement ou non, reprit-il avec un rien de cynisme.

M’accusez-vous de l’avoir fait volontairement ?

— Je ne vous connais pas assez pour l’affirmer, jeune fille. D’ailleurs, lire dans les pensées des femmes n’est pas mon premier talent. Je suis plus habile avec les chevaux.

Il se mit soudain en devoir de prouver ses dires.

Il contourna le cabriolet pour s’approcher de Jester et lui murmura quelques mots à l’oreille. Alors, comme par miracle, la jument cessa de brouter et se laissa mener docilement.

Il s’occupa ensuite de la voiture qui fut extraite de la boue en un clin d’œil avec un bruit de succion impressionnant. Médusée, Diana admit volontiers que son sauveur avait accompli là un véritable exploit. Hormis quelques éclaboussures sur ses bottes bien lustrées, l’homme s’en était tiré sans dommages.

Je vous remercie, monsieur. C’est du beau travail.

— Montez, nous partons, ordonna-t-il sans ambages. Je prends les rênes.

— Où allons-nous ? questionna Diana, surprise par tant d’empressement.

Elle parcourut d’un rapide coup d’œil la route déserte et prit soudain peur. Seule avec cet homme, elle s’estimait en danger.

Je n’irai nulle part avec vous.

— Je vous reconduis chez vous, tout simplement. Qu’allez-vous imaginer ? Votre promenade s’est achevée dans une mare de boue, dès lors il ne peut rien vous arriver de pire.

— Dans le comté, tout le monde loue mes qualités de conductrice.

— Je crains que nous n’ayons pas la même notion de la compétence, ma chère, remarqua-t-il en ricanant. Vous avez une chance : c’est que votre jument est un animal docile qui se laisse mener sans trop renâcler.

— Contrairement à ce que vous pensez, je suis capable de la maîtriser quand il le faut, répliqua Diana avec humeur.

— Voilà que maintenant vous interprétez mes pensées ! C’est fabuleux. J’ignorais que vous aviez ce talent.

Il la fixa de ses yeux gris et ajouta :

— Vous me livrerez un jour votre secret, j’espère ? Pour le moment, je ne vois que les conséquences de votre maladresse.

— J’avoue… que j’étais distraite quand cet incident s’est produit. Je… j’étais en train de lire.

— Vraiment ? C’est étrange, je n’ai pas trouvé de livre dans votre cabriolet.

— Pourtant, il doit y être, objecta Diana. C’est la dernière édition d’Orgueil et préjugés. Je l’ai posé sur le siège avant de sauter à terre. Comprenez-moi, j’avais envie de savoir comment s’achevait cette histoire. C’est si bien écrit que j’étais véritablement captivée. Il faut d’ailleurs que je trouve d’autres romans de cet auteur.

Je crois avoir compris que l’auteur était une femme.

— En fait, on dit que son identité est un secret jalousement gardé mais, si j’en crois Mme Sarsfield, il s’agit d’un homme.

— Voulez-vous parier ? questionna-t-il, l’œil brillant. Un simple pari avec une bonne récompense.

Comme il tendait la main vers elle pour sceller l’accord, Diana croisa les mains derrière son dos.

Pas de pari. Jamais. Tel était son principe.

— Je suppose que vous n’auriez pas proposé un pari si vous n’étiez pas sûr de votre affaire, suggéra-t-elle. Soit. L’auteur est une femme, je veux bien l’admettre si cela vous fait plaisir.

— J’ai la chance de connaître l’éditeur et ses habitudes, je l’avoue, lui confia-t-il avec un petit rire malicieux. La règle est de ne jamais parier quand on n’est pas sûr de ce que l’on avance, ou encore sans avoir vérifié. C’est un principe chez les gens honnêtes. Toutefois, je suis de votre avis sur un point : Orgueil et préjugés est écrit avec talent.

— J’avais cru comprendre que les membres du Jehu Club méprisaient la lecture et toute forme d’éducation, M. Farnham.

Comment savez-vous que j’appartiens au Jehu Club ?

Son expression avait changé. Il la fixait soudain d’un regard de glace.

Mon fiancé était l’un de vos admirateurs, monsieur.

Elle sentit sa gorge se serrer comme elle ajoutait :

Il se nommait Algernon.

Brett Farnham haussa les sourcils, visiblement perplexe.

Ce nom ne me dit rien.

— Il était pourtant votre cadet à Cambridge, et il parlait très souvent des activités du Jehu Club.

Diana enrageait devant tant de cynisme. L’homme qui était là, devant elle, avait conduit Algernon Finch à la folie et finalement à la mort. Et il prétendait ne pas le connaître !

— Il nous a même présentés l’un à l’autre voici cinq ans. Cela ne vous rappelle rien ?

— Cinq ans, c’est loin. Non, je regrette, mais je n’en ai gardé aucun souvenir.

Farnham lui parut soudain moins affirmatif. Il y avait même un rien d’hésitation dans sa voix. Diana s’en réjouit presque. Ce libertin cynique allait-il capituler et lui livrer son secret ?

— Néanmoins, je serais ravi de reprendre contact avec lui, dit-il avec un étrange sourire.

Algernon est mort voici cinq ans, M. Farnham.

Il observa un long silence.

— Mes condoléances, murmura-t-il, le regard fuyant. Vous savez, les gens parlent à tort et à travers et ils inventent volontiers des liens d’amitié. Il ne faut pas croire tout ce que l’on entend. Souvenez-vous-en. En outre, le Jehu Club est dissous depuis des années et il n’y a plus de M. Farnham. Je suis désormais le sixième comte de Coltonby, et cela depuis plus de six mois.

— Veuillez me pardonner mon ignorance, lord Coltonby.

Elle inclina légèrement la tête, puis reprit :

— Je déplore que la disparition de votre père soit à l’origine de votre nouvelle distinction, mais un titre de noblesse ne donne pas tous les privilèges. Et certainement pas celui de faire la cour à une jeune femme que l’on vient de secourir.

— Tout ce que je peux faire, c’est m’excuser pour la fatuité des hommes en général, ma chère. En tout cas, mon intention n’était pas de me prévaloir de mon titre dans le but de vous séduire.

Je suis ravie de vous l’entendre dire, milord.

Diana nota que le regard de lord Coltonby s’attardait sur sa gorge. Sa robe sage était loin de mettre en valeur sa féminité. Certes, elle convenait pour rendre visite aux Bolt et à ses autres voisins, mais elle aurait été déplacée dans les salons de Newcastle et plus encore dans ceux de Londres.

La tirant de ses pensées, lord Coltonby lui prit la main et la porta à ses lèvres tout en cherchant son regard.

— Permettez-moi d’insister, mais vous devriez prendre des leçons de conduite. Votre sécurité et celle de vos contemporains l’exigent.

— Rien ni personne ne l’exige, répliqua-t-elle en retirant brusquement sa main. D’ailleurs, je doute que nous nous rencontrions de nouveau.

Brett Farnham eut un mouvement de recul. Décidément, cet entretien n’allait pas s’achever en sa faveur. Pourtant il l’avait espéré après avoir aperçu la cheville de cette beauté lorsqu’il l’avait étendue sur l’herbe.

— Je vous assure que tout ce que l’on dit de moi est très exagéré, se défendit-il en descendant du véhicule.

— Ce n’est pas ce qui me fera changer d’avis, milord. Je gage que Londres est votre terrain de chasse favori et que vous n’êtes ici que pour les oiseaux de passage.

Brett observa avec délice la jeune femme. Ses lèvres rose pâle étaient d’une délicatesse exquise. Il se laissa aller à se demander quelle serait leur saveur s’il y goûtait encore une fois. Mais il se ravisa aussitôt. Ce serait une folie d’essayer d’embrasser de nouveau la belle sans connaître ses origines. Elle se réclamait de certaines relations, aussi il devait se montrer prudent. Il avait toujours pris soin de ne pas jouer avec les femmes qui ne songeaient qu’au mariage. Celles qui pratiquaient le badinage lui semblaient infiniment plus attrayantes.

— Mon séjour dans cette région pourrait être plus long que vous l’imaginez, reprit-il en détournant les yeux.

Tant qu’il ignorait la condition de cette jeune personne, il ne pouvait prendre aucun risque. Il pria en silence pour qu’elle soit libre et qu’il puisse la revoir.

— Je viens en effet d’acquérir une propriété très convoitée dans ce comté du Northumberland.

— Vraiment ? Après tout, cela vous ressemble, milord. Vous avez toujours visé très haut. Trop haut.

— Cuthbert Biddlestone, qui avait abusé de porto, a osé me défier dans une course de phaétons. Je ne suis pas du genre à me dérober, aussi j’ai tenu le pari, voyez-vous. Pour moi, c’était quitte ou double. Ainsi, depuis cette victoire, je possède la propriété de Ladywell Park qui lui appartenait.

— Vous n’avez pas eu grand mérite à vous mesurer à un ivrogne notoire. Ce n’est pas à votre honneur.

— C’est Biddlestone lui-même qui a insisté, affirma Brett tout en époussetant le revers de son manteau. Pourtant, je l’avais prévenu, mais il ne m’a pas écouté. Je préviens toujours mes adversaires des risques qu’ils prennent en me défiant. C’est plus loyal.

— Avez-vous l’intention de conserver cette propriété ou comptez-vous la remettre en jeu à l’occasion d’une nouvelle course ?

— J’évite de boire trop de porto et j’ai pour principe de conserver ce que je possède, miss… ?

Il tendit la main vers elle, mais Diana se déroba et répondit en esquissant un sourire :

— Ce n’est pas par de tels stratagèmes que vous apprendrez mon nom, lord Coltonby.

— Comme vous êtes cruelle avec moi. Allons, dites-moi qui vous êtes. Eclairez-moi, ô beauté des chemins creux, afin que je puisse vous adorer comme il convient.

— Pas avant que nous soyons présentés officiellement l’un à l’autre, répliqua-t-elle d’un ton glacial. Quand tout sera fait dans les règles, et si vous avez vraiment gagné Ladywell Park à la course comme vous le prétendez, nous verrons.

Brett réprima un sourire. Il était donc en présence d’une lady des environs, probablement célibataire. Pourtant, à en juger par la modestie de sa mise, il l’aurait prise pour quelque fille de fermier même si son vocabulaire, pour sûr, n’était pas celui d’une paysanne. Elle avait parlé d’un ancien fiancé, mais peut-être lui cachait-elle l’existence d’un mari ? Autre possibilité : elle était veuve. Brett sourit à cette idée. Quoi qu’il en soit, il tenterait sa chance. Une femme si vive et si charmante ne pouvait demeurer célibataire plus longtemps. Foi de Coltonby !

— Il semble bien que votre livre soit quelque peu endommagé, dit-il en lui montrant l’ouvrage qu’il venait de ramasser dans la boue.

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Commentaires récents

Lu aussi

J'ai bien aimé cette romance mais sans plus, elle était banale et sans piquant, un air d'orgueil et préjugés imprégnait les pages, tant dans l'écriture que dans la romance – courtoise et fort douce. Néanmoins c'était une lecture agréable et sans prise de tête comme on en a parfois besoin.

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Commentaire ajouté par chouquette14K 2019-09-13T13:35:21+02:00
Bronze

Belle lecture mais elle reste un peut plate a mon goût se qui est dommage il y aurait eu matière a faire pas mal de chose ,je dois dire que la fin ma fait descendre de mon nuage ,non mais c'est quoi cette fin ,attention je ne dis pas que la fin est mauvaise je trouve juste que cette fin est trop abrupte Spoiler(cliquez pour révéler)il lui dit qu'il l'aime qu'il veut l'épouser et c'est fini pas d'épilogue sur leur mariage ou la fameuse maison qu'il voulait construire sur la parcelle ou sur les réactions de Simon ou sur Robert et l'école rien nada c'est comme Miranda BOLT a partir d'un moment ont en entend plus parler ,je trouve sa dommage j'aurais imaginé qu'elle aurait essayé de séduire Brett ou de mettre des bâtons dans les roues Diana,et bien même pas.

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Dates de sortie

Dans les Bras du Comte

  • France : 2011-09-01 - Poche (Français)
  • France : 2019-09-01 (Français)

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