Darhan, Tome 5 : Les Métamorphoses

– Assez ! ! ! hurla Yoni.

Furieuse, elle se rua sur Ürgo et se mit à le frapper violemment. Le gros homme se couvrait la tête et le ventre tant bien que mal, se roulant par terre et chialant.

– Oh ! arrête ! Tu es folle ! Tu vas me tuer !

La jeune femme ne voyait plus rien. Tout autour d’elle était noir tant sa rage l’aveuglait, la précipitait dans un tunnel dont l’issue était bloquée par son frère mécréant qui se moquait d’elle. Elle frappa puissamment, avec la force du désespoir, avec l’énergie d’un animal qui voit disparaître son petit. Elle entendit ensuite une douce musique…

– Maman, fit une voix.

C’était une voix d’enfant. Une voix de petite fille rallumant dans son cœur blessé une petite flamme qui répandit instantanément une chaleur bienfaisante dans son corps refroidi. Yoni se retourna et vit, tout près d’elle, la petite Yol, son bébé, le dernier être au monde qu’il lui restait. Yoni repoussa les cheveux qui recouvraient son visage mouillé par des larmes de colère. Elle laissa tomber son bâton par terre, puis s’approcha de sa fille et caressa son petit visage aux traits si fins et aux yeux brun foncé, presque noirs, les yeux de son mari, Sargö.

– Pourquoi il pleure comme un bébé, oncle Ürgo ? demanda la petite. Il a de la peine ?

– Oui, dit Yoni qui se sentait maintenant tout à fait calme. Il a beaucoup de peine parce qu’il est un homme méchant dont l’âme est salie à jamais.

Quelques cavaliers s’étaient approchés. C’étaient des mercenaires tangut qui accompagnaient un soldat mongol à la stature imposante : le capitaine Souggïs. Celui-ci tenait la bride d’un cheval ; il la tendit à Yoni. La jeune mère fit monter sa fille sur l’animal, puis y grimpa à son tour. Le cheval piaffa et se cabra, mais elle le contint aisément.