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Sur la toundra, les fleurs forment de grands tapis jaunes, rouges et violets, qui commencent juste à roussir. Les baies foisonnent, j'en fais grande provision. C'était une délice, l'autre jour, que de pouvoir les tremper dans le sang de phoque encore chaud. Ça change des oiseaux à la chair fine et aux os craquants.
Afficher en entierLe Tripode, p. 128
« Ce n'est pas la première fois que j'entends des récits de grandes famines.
Moi, je n'en ai connu que de petites, au cœur desquelles les peaux de nos bottes, de nos kayaks et de nos “umiak” ont suffi.
Je sais qu'autrefois certains ont préféré mourir plutôt que de manger leurs proches — mais on ne peut pas juger les autres.
J'ai déjà mangé un de mes chiens et s'il avait fallu, j'aurais même mangé Ikasuk, qui m'a pourtant sauvé la vie. »
Afficher en entierLe Tripode, p. 108
« Tu es vieille, Sauniq. Un jour, tu seras laissée sur une île avec les chiens. »
Afficher en entierLe Tripode, p. 96
« [P]eu de temps après notre arrivée ce fameux hiver de faim, alors que je n'étais pas encore tout à fait remise de l'accouchement et de la nouvelle qui l'avait accompagné au sujet de mes parents, Sauniq a proposé de m'adopter.
J'ai maintenant une mère qui est également la fille de ma fille, et dont je suis ainsi la grand-mère : nous sommes un cycle de vie à nous trois, et les autres se trouvent naturellement reliés à nous par leurs liens à Sauniq. »
Afficher en entierLe Tripode, p. 61
« Ce matin, j'ai cueilli une grande quantité d'airelles. Je les mange par poignées, ça finit par me faire grincer les dents.
Je ne les aime qu'avec du sang de phoque, mais je n'ose pas revenir vers la côte pour chasser. J'ai peur de la mer depuis que j'ai touché le “tupilak”.
Je crains aussi de chasser sur la toundra, car toutes les armes que je possède — ma lance, mon couteau, mon harpon — ont servi récemment à tuer des animaux marins. Si je touche un animal terrestre avec ça, je vais mettre son esprit en colère. Je préfère encore mourrir de faim. »
Afficher en entierLe Tripode, p. 17
« Lorsque j'attends l'île, le noir est complet autour de moi.
Le bruit plus sourd de la glace sous mes pas m'indique que je suis enfin sur la terre ferme. Je me repose quelques instants dans ma peau d'ours. Et me dis que c'est la dernière fois : soit je trouve un abri pour le prochain repos, soit je meurs de froid ici, sur ce rivage.
Depuis trois ou quatre jours que je marche sur la banquise, mon corps n'est plus que douleurs et faim. J'ai trouvé l'énergie de venir jusqu'à cette île en m'efforçant de ne penser à rien, mais maintenant que j'y suis, je perçois à quel point je suis seule.
Ma survie ne tient plus à grand-chose. Je suis trop jeune pour avoir déjà rencontré un esprit capable de me sauver.
Couchée contre moi, Ikasuk est ma seule protection contre la mort — et ce n'est qu'un chien. »
Afficher en entierLe Tripode, p. 7
« Les Inuits sont les descendants d'un peuple de chasseurs nomades se déployant dans l'Arctique depuis un millier d'années.
Jusqu'à très récemment, ils n'avaient d'autres ressources à leur survie que les animaux qu'ils chassaient, les pierres laissées libres par la terre gelée, les plantes et les baies poussant au soleil de minuit. Ils partagent leur territoire immense avec nombre d'animaux plus ou moins migrateurs, mais aussi avec les esprits et les éléments.
L'eau sous toutes ses formes est leur univers constant, le vent entre dans leurs oreilles et ressort de leurs gorges en souffles rauques.
Pour toutes les occasions, ils ont des chants, qu'accompagnent parfois le battement des tambours chamaniques. »
Afficher en entierLa lune brille comme deux couteaux de femmes assemblés, tranchants sur les bords.
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