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Extrait de l'introduction
Tout le monde connaît L'Origine du monde, ce tableau peint en 1866 par Gustave Courbet qui représente, en gros plan, un sexe de femme à la dense toison brune. Le XIXe siècle l'accueillit comme une provocation. L'académicien Maxime du Camp évoqua à l'époque un tableau «donnant le dernier mot du réalisme». Un réalisme effectivement poussé dans ses retranchements les plus obscènes, qui marqua la fin de plusieurs siècles d'idéalisation désincarnée du nu dans la peinture.
Un siècle et demi plus tard, dans un monde saturé d'images pornographiques, L'Origine du monde retrouve curieusement toute sa force transgressive. Simplement, ce n'est plus l'idéalisation bienséante du nu que cette toile remet en cause, mais celle de la norme du sexe épilé, qui s'installe tranquillement dans le monde occidental en cette première décennie du nouveau millénaire. Face au tableau de Courbet, la femme de 2010 en visite au musée d'Orsay est confrontée à la différence d'apparence entre son propre sexe et celui des origines. Faut-il y voir le signe d'une évolution de l'identité féminine ?
Que ce soit dans les images de la publicité, de la mode, de la presse féminine, du cinéma pornographique comme traditionnel, la femme contemporaine est systématiquement épilée dans la région du pubis, et ne parlons même pas de celle des aisselles. L'homme commence à son tour à être touché par cette curieuse maladie. Pourquoi nos poils tombent-ils ainsi ? Qu'avons-nous à y gagner ? Et surtout : outre les poils, qu'avons-nous à y perdre ?
Le projet de ce livre n'est pas tant d'ériger une somme sur le poil, qui existe déjà grâce à Martin Monestier, que de réhabiliter l'érotisme du poil en analysant les raisons de son éradication, mais aussi en les critiquant sans craindre d'adopter un point de vue partisan. Il n'est pas non plus de raconter l'histoire de l'épilation dans le monde : elle existe déjà aussi dans le même livre et dans d'autres. On y trouvera nombre de passionnants récits d'épilation, dans le monde entier et jusqu'aux époques les plus lointaines de l'Histoire.
Source: Amazon.fr
Afficher en entierJ'explique ce tsunami dépilatoire par la conjugaison de trois forces, contemporaines de notre époque et complémentaires : 1. Pornographie. 2. Hygiénisme. 3. Mercantilisme. La démocratisation de l'Internet a entraîné celle de l'accès aux images pornographiques, gouvernées par la norme américaine du sexe sans poils. Cette norme du glabre, d'abord reprise à son compte par l'idéologie hygiéniste qui exerce une influence grandissante sur les rapportes qu'entretiennent les humains avec leur propre corps, l'est au final par les industriels et leurs boutiquiers qui, en croquant à leur tour dans le gâteau de l'épilation, le rendent perpétuellement plus gros. Telle est, résumée en quelques lignes, l'argumentation que je vais tâcher de développer dans les pages de ce modeste ouvrage.
Afficher en entierSi le poil est vulgaire, c'est parce qu'il contredit les codes de la pornographie.
Afficher en entierDepuis cinquante ans, les femmes se sont "masculinisés" en s'appropriant de plus en plus de rôle tenus jusqu'alors par des hommes. (...) Leur imposer l'épilation permet aux hommes de conjurer la peur profonde qu'ils éprouvent face à la puissance de la femme et de sa nature sauvage, incarnés par ses poils. Comme s’ils avaient peur d'être castrés par ces femmes.
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