Extraits

À l’époque, j’avais trente ans, aucun but dans la vie, le cœur brisé par une sirène et un penchant pour le « sky ». Adam était le fils de mes voisins. Un beau garçon à l’œil vif, il avait la plus jolie des mamans, on ne pouvait pas en dire autant de son père : ce connard ne bossait pas, buvait comme un trou (bien plus que moi) et faisait son sport en cognant sa femme et son gosse. Pendant de longues années, j’ai fait l’autruche, évitant de fourrer mon nez dans la merde des autres… jusqu’au jour du drame. Ce jour-là, j’ai cru que la douleur allait me tuer, elle s’était abattue sur moi avec une violence inouïe et m’avait brisé sous son poing, me faisant prendre conscience de ma gigantesque part de responsabilité dans la mort de cette femme que j’aurais pu… dû protéger. La culpabilité m’a cassé la gueule, broyé jusqu’à ce que je renaisse de mes cendres.

La jolie princesse est paisible, un sourire collé sur sa petite bouche en cœur rose. Nous venons de passer une soirée magnifique rien qu’elle et moi, pas quelque chose d’extravagant, non : un repas au fast-food et un dessin animé au cinéma, mais j’ai adoré ce moment de complicité avec elle.

Lorsque l’on choisit de s’impliquer avec des gamins qui ont connu plus de misère que le commun des mortels, on sait que l’on va être éclaboussé par leur douleur, on aura beau se fixer des règles, ne pas s’impliquer émotionnellement est impossible.

C’est ça, le truc avec la misère, elle ne cesse jamais, alors chaque année, nous sommes de plus en plus nombreux.