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— La plupart du temps, nous traversons la vie sans nous rendre compte à quel point nous sommes petits et insignifiants. Sans voir quel infime fragment de la vie sur Terre et de l’histoire nous représentons. À quel point notre corps humain est fragile, à quel point il se brise facilement.
Il tourna alors la tête vers lui.
— Je suis allé en Irlande en bateau il y a quelques années. Ce fut une horrible traversée. Il y a eu une tempête, et nous avons été sérieusement remués. J’ai cru que nous allions tous mourir. Cependant, quand j’en ai parlé au capitaine après coup, il a semblé trouver cela extrêmement drôle.
James eut un sourire triste à cette pensée avant de continuer.
— Je suis monté sur le pont quelques instants durant la tempête, et les vagues étaient immenses. Quand j’ai regardé l’océan au loin, je ne pouvais voir que l’eau, s’étirant vers l’horizon dans toutes les directions. Je me rappelle avoir levé la tête et vu une mouette tridactyle volant au-dessus de nous, et je me suis imaginé de quoi nous devions avoir l’air à ses yeux depuis là-haut. À quel minuscule et fragile petit panier de branches j’avais confié ma sécurité. C’était terrifiant.
— Et vous étiez heureux d’avoir vécu cela ? demanda Iain, haussant un sourcil.
James rit doucement.
— Oui, c’était étrangement libérateur. Oh, il y avait une sorte de tristesse, je suppose, à appréhender ainsi la fragilité de l’existence, mais à cet instant précis, j’ai compris comme jamais auparavant à quel point ma petite vie était précieuse. Que si je n’en profitais pas, si je ne choisissais pas de faire les choses qui m’excitaient, ne choisissais pas de prendre… le réconfort dont j’avais besoin, alors je n’aurais tout simplement jamais ces choses. Je mourrais sans avoir vécu.
Il sourit un peu tristement.
Afficher en entierIain n’eut pas le temps de s’écarter avant que James ne s’avançât, scellant sa bouche à la sienne.
Iain se figea.
Plusieurs choses lui vinrent à l’esprit en même temps, la première d’entre elles étant que James n’avait pas la moindre idée de ce qu’il faisait – ses lèvres étaient rigides et ne bougeaient pas, sa bouche appuyant si fort que les lèvres d’Iain étaient écrasées contre ses dents.
C’était un baiser affreux.
Et pourtant.
Et pourtant – et ce fut la deuxième chose –, le corps viril et chaud pressé contre le sien était si beau et lui était si cher. Il n’avait jamais ressenti une telle coïncidence de sentiments, magnifique et affreuse, pour un homme avec qui il avait été intime. Le mélange de désir et d’affection était entêtant et effrayant à la fois. Il était impossible de nier à quel point, à cet instant, il voulait apprendre à ce garçon – à cet homme – ce qu’un baiser pouvait être…
Afficher en entier« Iain regarda vers la rive opposée, au-delà de l’étendue d’eau… James se tenait là, le regardant.
Iain leva la main, l’agitant brièvement, et, un moment plus tard, James fit la même chose, l’imitant.
Une certitude et un bonheur soudains emplirent Iain. S’il voulait vivre – vraiment vivre, plutôt que seulement exister –, alors son chemin était évident, n’est-ce pas ?
Il avait besoin de James à ses côtés.
Fuir en Inde ne changerait rien. Cela ne ferait qu’étirer ce pauvre fil abusé entre James et lui jusqu’à son point de rupture. Et si ce fil se brisait ? Se brisait enfin, une bonne fois pour toutes ?
Il ne serait pas libre. Il serait perdu. Parce qu’il avait réalisé quelque chose de vrai et de vital aujourd’hui. Ce fil entre eux – l’amour entre eux – n’était pas une chaîne, ni une ancre.
C’était une ligne de vie. »
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