Extraits

— Qui es-tu ?

Sa question a un sens bien plus profond que ce qu’elle laisse paraître. Mon identité ne lui suffira pas, je le sais. Il plonge son regard noisette dans le mien, à la recherche de réponses. Les trouvera-t-il ? S’il y a bien une personne capable de me voir telle que je suis, c’est bien lui.

— Que contenait ton sac à main ?, finit-il par me demander, fixant le paysage qui défile.

— Rien d’important. Il n’y avait que mon porte-monnaie qui devait contenir au bas mot dix euros. Mes papiers, cartes de crédit et autres restent toujours à la maison quand je vais travailler. Mon passeport de transport en commun était dans mon blouson avec mon portable et mes clefs. Globalement, il est l’heureux propriétaire de produits féminins et d’un sac valant à peine trente euros. C’était une imitation.

— Alors pourquoi tu as riposté ? m’interroge Tony, surpris.

— Parce que ce sont mes affaires !

— Il n’y avait rien d’important, tu viens de le dire.

— Mon rouge à lèvres était un Chanel ! J’essaie une pointe d’humour.

— Tu t’es battue pour un gloss ?

— Un rouge à lèvres !

« Il faut être une victime avant d’être un bourreau », nous répétait l’instructeur. Connaître la douleur pour l’appliquer. Quel ramassis de conneries. Les instructeurs sont juste de gros pervers sadiques.

Ce mot dans sa bouche me fait l’effet d’une gifle. Tony ne jure pas. Du moins seulement en italien. Spoiler(cliquez pour révéler)Voilà ce qu’il pense de moi ? Une lame acérée n’aurait pas fait autant de dégâts. Mon cœur, déjà brisé, devient poussière. Je sais parfaitement ce que je suis. Seulement l’entendre de sa bouche me dévaste, me salit.

— Je n’aurais jamais dû de te laisser entrer dans ma vie, me confesse-t-il d’une voix mal assurée. À une époque, je t’aurais fait brûler vive sur un bûcher pour sorcellerie, Maya. Aucune femme, même pas ma mère, n’a réussi à avoir une telle emprise sur moi. Pas une. Tes yeux m’ont envoûté. Je t’ai fait confiance, révélé ma part la plus sombre. Tu connais tout de moi.