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Tous les parents du monde devraient rêver que leur enfant devienne un jour un navigateur solitaire, signe qu'ils ont tenu leur rôle, avec suffisamment de bienveillance et de distance pour l'aider à trouver le chemin de l'indépendance. Aimer son enfant, c'est l'aider à trouver l'estime de soi nécessaire pour qu'il nous quitte dès qu'il se sentira prêt.
Afficher en entierParce qu'il rend un peu de vie aux défunts, leur permet de survivre dans notre pensée, le souvenir soigne la perte. Il la colmate en empiétant un peu sur la béance de l'absence.
Afficher en entierLe travail de deuil.
La mort, qui interdit tout espoir de retour et de retrouvailles, est la seule séparation qui soit définitive. Après la perte d'un être cher, le monde paraît pauvre et vide, comme l'écrit Freud, et il va falloir du temps et de l'énergie pour que l'endeuillé puisse le réinvestir. Ce temps et cette énergie sont mobilisés par le travail de deuil, qui va permettre d'admettre peu à peu la réalité de la perte et d'intégrer le souvenir du disparu, grâce auquel le lien perdure, malgré l'absence.
Afficher en entierL'enfant, lui, subit leur séparation, qui l'oblige notamment à un remaniement psychique des images parentales et le force à renoncer à certains rêves. Parce qu'elle lui est imposée, cette séparation ne se fait jamais sans souffrance, une souffrance qui s'exprime parfois sous forme de symptômes, soulignant la difficulté à accepter la réalité. Pourtant, le plus délétère dans le divorce des parents n'est pas tant la souffrance que le risque de fusion compensatrice qu'il comporte.
Afficher en entierMais la culpabilité fige le lien ; elle est même le pire des liens, lourde comme une chaîne de forçat. Elle attache, emprisonne. On ne peut pas se séparer si l'on se sent coupable.
Afficher en entierC'est pourquoi, pour tenter de les protéger un peu de cette douleur, on dit parfois aux enfants abandonnés que leur mère est morte, la mort étant la seule raison acceptable de l'abandon. Car la mort est toujours un abandon. Quand nos parents meurent, quand on est quitté par une personne qu'on aime, nous sommes tous, enfants et adultes, en proie à ce sentiment d'abandon qui engendre un désarroi absolu.
Afficher en entierDes mois durant, j'ai continué à composer leur numéro de téléphone, laissant sonner un moment avant de raccrocher, comme si cela suffisait à me faire croire qu'ils s'étaient seulement absentés l'espace d'un après-midi, mais allaient revenir bientôt.
Afficher en entierToute notre vie, nous allons donc apprendre à naviguer entre ces deux nécessités vitales : se lier et se séparer, s'attacher et se détacher, partir et revenir, quitter et retrouver… […] Peut-on se séparer sans peine ? Non, tout au plus apprend-on à mettre en place des stratégies défensives pour souffrir le moins possible de la séparation qui est toujours difficile. C'est pourquoi il ne sert à rien d'ordonner à un enfant : "Sois autonome !", sans tenir compte de ses capacités. Le travail des parents consiste à repérer la moindre tentative d'autonomie de leur minots, non à la devancer. […] L'opposition, la contestation, la provocation, la rébellion ne sont pas des preuves de désamour, mais des signes d'évolution et de maturation, une façon pour l'enfant de demander :
- Détache-moi !
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