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On sait très peu de choses, même si on a beaucoup écrit à ce sujet, de la nature véritable des jinns, ces créatures faites de feu sans fumée. Sont-ils bons ou mauvais, diaboliques ou bienveillants, cela fait l’objet d’âpres discussions. Ce que l’on admet généralement, ce sont les caractéristiques suivantes : ils sont fantasques, capricieux, impudiques, ils se déplacent très vite, changent de taille et de forme et réalisent bon nombre de vœux des mortels, hommes et femmes, qu’ils en décident ainsi ou s’y trouvent contraints, et leur perception du temps est radicalement différente de celle des êtres humains. Il convient de ne pas les confondre avec les anges, même si certains récits anciens affirment à tort que le diable en personne, l’ange déchu Lucifer, fils du matin, fut le plus grand des jinns. L’endroit où ils vivent a aussi fait longtemps l’objet de controverses. Certains récits antiques prétendent, de manière calomnieuse, que les jinns vivent ici parmi nous, sur terre, ce prétendu “bas monde”, dans des bâtiments en ruine et de nombreuses zones insalubres, décharges, cimetières, latrines, égouts et, chaque fois que c’est possible, dans des tas de fumier. Si l’on en croit ces histoires diffamatoires, on ferait bien de se laver très soigneusement après le moindre contact avec un jinn. Ils sont malodorants et transmettent des maladies. Cependant, les exégètes les plus éminents affirment depuis longtemps ce qu’à présent nous tenons pour vrai : les jinns vivent dans leur propre monde, séparé du nôtre par un voile et ce monde supérieur, parfois appelé Peristan ou Monde Magique, est très vaste, même si sa nature demeure pour nous mystérieuse.

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La marque d’infamie fut effacée du front du vieux philosophe, son exil prit fin, il fut réhabilité, rentra en grâces et retrouva avec les honneurs son ancienne charge de médecin de la cour à Cordoue, deux ans huit mois et vingt-huit jours et autant de nuits depuis le début de son exil, c’est-à-dire mille jours mille nuits plus un jour et une nuit ; et comme Dunia était à nouveau enceinte, évidemment, qu’il ne l’épousa pas, évidemment, et ne donna jamais son nom aux enfants qu’il avait eus d’elle, évidemment, et qu’il ne l’emmena pas avec lui à la cour des Almohades, évidemment, elle disparut donc de l’histoire qu’il emporta avec lui en partant au même titre que ses habits, ses cornues bouillonnantes et ses manuscrits dont certains étaient reliés et d’autres en rouleaux ainsi que les manuscrits d’autres auteurs car les siens avaient été brûlés, même s’il en existait de nombreuses copies, lui confia-t-il, dans d’autres villes, dans les bibliothèques de ses amis et dans des endroits où il les avait cachés en prévision du jour de sa disgrâce car, toujours, certes, le sage se prépare à l’adversité mais, s’il fait preuve d’une modestie de bon aloi, la chance sait le prendre au dépourvu. Il s’en alla sans finir son petit-déjeuner et sans dire au revoir et elle ne le menaça pas, ne lui révéla pas sa véritable nature ni le pouvoir qu’elle recelait en elle, elle ne lui dit pas je sais bien ce que tu dis à haute voix dans tes rêves, quand tu supposes la chose qu’il serait stupide de supposer, quand tu cesses de vouloir réconcilier l’irréconciliable et que tu dis la terrible vérité, la vérité fatale. Elle laissa l’histoire l’abandonner sans tenter de s’y raccrocher, comme les enfants laissent passer un grand défilé en le gardant dans leur mémoire, le transformant en souvenir inoubliable, se l’appropriant ; et elle continua à l’aimer bien qu’il l’eût abandonnée de si cavalière façon. Tu étais tout pour moi, eut-elle envie de lui dire, tu étais mon soleil et ma lune et qui me tiendra la tête à présent, qui embrassera mes lèvres, qui sera un père pour nos enfants, mais il était un grand homme destiné aux palais de l’immortalité et ces morveux braillards n’étaient qu’épaves laissées dans son sillage.

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Il existait certain livre persan intitulé Hazar Afsaneh ou Mille histoires, qui avait été traduit en arabe. Dans la version arabe il y avait moins de mille histoires mais l’action se déroulait pendant un millier de nuits ou plutôt, parce que les chiffres ronds étaient considérés comme disgracieux, pendant mille nuits et une nuit supplémentaire. Il n’avait jamais vu ce livre mais plusieurs de ses histoires lui avaient été racontées à la cour. L’histoire du pêcheur et du jinn lui plaisait bien, non pas tant pour ses éléments fantastiques (le génie de la lampe, les poissons magiques doués de la parole, le prince ensorcelé mi-homme mi-statue de marbre), mais pour la beauté de son style, pour la façon dont les histoires s’enroulaient dans d’autres et tout en en contenant de nouvelles dans leurs propres replis de sorte que le récit devenait, se disait Ibn Rushd, un véritable miroir de l’existence dans laquelle nos propres histoires contiennent celles des autres et sont elles-mêmes incluses dans des récits plus vastes, plus amples, l’histoire de notre famille, de notre pays ou de nos croyances. Mais ce qu’il y avait d’encore plus beau que ces histoires contenues dans d’autres histoires, c’était l’histoire de la narratrice, une princesse du nom de Sharazad ou Schéhérazade qui, afin d’empêcher sa propre exécution, racontait des histoires à son meurtrier de mari. Des histoires contre la mort, des histoires pour civiliser un barbare. Et, au pied du lit conjugal, se tenait la sœur de Sharazad, son public idéal, qui ne cessait de réclamer encore une histoire, et encore une autre et encore une autre. C’est de ladite sœur qu’Ibn Rushd s’inspira pour trouver le nom qu’il attribua aux hordes d’enfants qui sortaient des reins de son amante Dunia, car il se trouvait que cette sœur s’appelait Duniazad “et ce que nous avons ici emplissant cette maison sans lumière et m’obligeant à imposer des honoraires prohibitifs à mes patients, les malades et les infirmes de Lucena, c’est l’arrivée de la Dunia-zat, autrement dit de la tribu de Dunia, la race des Dunians, le peuple Dunia que l’on pourrait traduire par « le peuple du monde »”.

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Il avait écrit son propre livre, Incohérence de l’incohérence, pour réfuter Ghazali un siècle plus tard et à près de mille lieues de distance, mais en dépit de son titre accrocheur, l’influence du Perse disparu n’en fut pas diminuée et ce fut finalement Ibn Rushd qui tomba en disgrâce et dont le livre fut jeté au feu, lequel en consuma les pages parce que c’était ce que Dieu avait décidé à ce moment-là, ce qu’il avait autorisé le feu à accomplir. Dans tous ses écrits il avait tenté de réconcilier les mots “raison”, “logique” et “science” avec les mots “Dieu”, “foi” et “Coran”, sans y parvenir même s’il avait recouru avec beaucoup de subtilité à l’argument de la bonté, démontrant à l’aide de citations du Coran que Dieu doit exister en raison du jardin des délices terrestres dont il a gratifié l’humanité, n’avons-nous pas fait descendre du ciel en abondance une eau grâce à laquelle vous faites croître du blé, des herbes et des jardins plantés de beaux arbres ? Aux yeux du fervent amateur de jardins qu’il était, l’argument de la bonté semblait en mesure de prouver tant l’existence de Dieu que sa nature généreuse et libérale, mais les tenants d’un Dieu plus sévère avaient eu raison de lui. Et à présent il était couché là, du moins le croyait-il, auprès d’une juive convertie qu’il avait sauvée du bordel et qui semblait avoir le pouvoir de lire dans ses rêves où il se disputait avec Ghazali dans la langue des irréconciliables, la langue de l’engagement total, de la volonté d’aller jusqu’au bout et qui l’aurait condamné au bourreau s’il en avait fait usage dans sa vie éveillée.

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Il découvrit que ses ardeurs physiques pouvaient être tempérées quand on lui racontait des histoires, et cela lui apporta quelque soulagement. “Raconte-moi une histoire”, disait-elle en se blottissant au creux de son bras, de sorte qu’il avait la main posée sur sa tête, et il se disait, bien, me voici tiré d’affaire pour cette nuit, et petit à petit déroulait pour elle l’histoire de son esprit. Il employait des mots que bon nombre de ses contemporains trouvaient choquants parmi lesquels “raison”, “logique” et “science” qui étaient les trois piliers de ses idées occultes les plus cachées, précisément celles qui avaient fait brûler ses livres. Ces mots effrayaient Dunia mais, excitée par sa peur même, elle se serrait plus fort contre lui en disant : “Tiens bien ma tête pendant que tu la remplis de tes mensonges.”

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Eût-il été un adepte des arcanes occultes qu’Ibn Rushd aurait compris que ses enfants étaient les rejetons d’une mère qui n’avait rien d’humain, mais il était trop préoccupé par lui-même pour s’en apercevoir (et il nous arrive de penser que ce fut une chance pour lui et pour toute cette histoire que Dunia l’ait aimé pour l’éclat de son esprit, car il était peut-être d’un naturel trop égoïste pour inspirer l’amour de lui-même). Le philosophe qui ne pouvait plus philosopher craignait qu’ils n’héritent de lui les tristes dons qui étaient à la fois ses trésors et sa malédiction. “Avoir la peau fine, la vue perçante et la langue bien pendue, disait-il, c’est ressentir trop vivement, voir trop clairement et parler trop librement. C’est être vulnérable au monde alors que le monde se croit invulnérable, c’est comprendre son aspect changeant alors qu’il se croit immuable, c’est sentir avant les autres ce qui va se produire, c’est comprendre que l’avenir barbare est en train d’arracher les portes du présent tandis que d’autres se cramponnent au passé vide et décadent. Si nos enfants ont de la chance, ils n’hériteront que de vos oreilles mais il est à craindre que, puisqu’ils sont incontestablement les miens, ils penseront probablement trop et trop vite, auront connaissance trop tôt de trop de choses, y compris de celles qu’il est défendu de penser ou d’entendre.”

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Le philosophe qui ne pouvait plus enseigner sa philosophie s’installa dans une modeste demeure aux petites fenêtres sise dans une ruelle dépourvue de pavés où il était terriblement oppressé par le manque de lumière. Il ouvrit une consultation médicale et son statut d’ancien médecin personnel du calife lui attira des patients ; de plus il employa les quelques ressources dont il disposait pour se consacrer à un modeste commerce de chevaux, tout en finançant par ailleurs la fabrication de grandes jarres, les tinajas, dans lesquelles les Juifs qui n’étaient plus juifs conservaient et vendaient de l’huile d’olive et du vin. Un jour, peu après le début de son exil, une jeune fille d’environ seize printemps fit son apparition devant sa porte, sans y frapper ni rien faire d’autre pour interrompre le cours de ses pensées, se contentant de sourire gentiment et de rester là à attendre patiemment qu’il s’aperçoive de sa présence et l’invite à entrer. Elle lui raconta qu’elle était récemment devenue orpheline, qu’elle n’avait aucune source de revenus mais qu’elle ne voulait pas travailler au bordel, qu’elle s’appelait Dunia, ce qui n’avait pas l’air d’un nom juif parce qu’elle n’avait pas le droit de donner son nom juif et qu’étant illettrée, elle ne pouvait l’écrire. Elle lui confia que c’était un voyageur qui lui avait donné ce nom, lequel venait du grec et signifiait “le monde”, l’idée lui avait plu. Ibn Rushd, le traducteur d’Aristote, ne voulut pas ergoter avec elle, sachant que ce nom signifiait “le monde” dans suffisamment de langues pour qu’il fût inutile de jouer les pédants. “Pourquoi avez-vous choisi de vous appeler d’un nom qui signifie le monde ?” Le regardant droit dans les yeux, elle répondit : “Parce qu’un monde s’écoulera de moi et ceux qui s’écouleront de moi se répandront à travers le monde entier.”

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Voici donc l’histoire d’une jinnia, une grande princesse du peuple des jinns, connue sous le nom de Princesse de la Foudre parce qu’elle maîtrisait le tonnerre, qui aima un mortel il y a bien longtemps, au XIIe siècle, comme nous allons le raconter, et de ses nombreux descendants, de son retour dans notre monde après une longue absence où elle tomba de nouveau amoureuse, du moins un certain temps, avant de partir en guerre. C’est aussi l’histoire de nombreux autres jinns, mâles et femelles, certains qui volaient et rampaient, des bons et des méchants et d’autres qui étaient étrangers à toute morale, et c’est enfin l’histoire de cette période de crise, de cette époque chaotique que nous appelons le temps des étrangetés, laquelle dura deux ans, huit mois et vingt-huit nuits, c’est-à-dire mille nuits plus une. Et s’il est vrai que nous avons vécu un autre millénaire depuis cette époque, nous sommes tous à jamais transformés par ces temps-là. Pour le meilleur ou pour le pire ? C’est à notre avenir d’en décider.

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Il y a des jinns qui volent, tandis que d’autres rampent au sol sous la forme de serpents ou bien courent çà et là en aboyant et en montrant les crocs sous l’apparence de chiens géants. Dans la mer et parfois aussi dans les airs, ils prennent l’aspect de dragons. Certains jinns inférieurs sont incapables lorsqu’ils se trouvent sur terre de conserver longtemps leur apparence. Ces créatures amorphes se glissent parfois à l’intérieur des humains par les oreilles, le nez ou les yeux et ils occupent leur corps pendant un moment avant de s’en débarrasser quand ils sont fatigués d’eux. Ce à quoi, malheureusement, les humains qui ont été occupés ne survivent pas.

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