Lorsque Sybille commença l'école, elle eut un peu de mal à changer de rythme. Vivre le jour, cela n'avait rien de normal pour elle. Néanmoins, elle finit par s'adapter et entra même au collège avec un an d'avance. Maria fut très fière.

Alerté par l'orbe qui trônait sur son bureau, Ninnos se leva, alla écarter le rideau dissimulant son grand miroir d'argent, et attendit. Il exultait. Après une trop longue absence, son cher Arvrylith profitait de l'équinoxe pour le visiter.

Tard cette nuit-là, une fois que le musée eut fermé ses portes, que tout fut verrouillé et que les bonds et les virevoltes de toutes les animations se furent arrêtés, la femme-pluie vint rendre visite à la diseuse de bonne aventure. "Pourquoi as-tu choisi celle-là ?" interrogea la femme-pluie.
La bohémienne laissa tomber une carte. "Settertop a eu affaire à elle, lut en silence la femme-pluie en silence. Je l'ai perçu en elle. Elle est liée à nous, d'une façon ou d'une autre. Et elle a perdu son mari, donc nous avons un élément pour traiter. Nous offrirons de rendre la vie à son mari."

- En réalité, Orcus en a tué deux. Et amoché un autre qui ne passera sans doute pas le nuit, avec ses côtes brisées et son foie éclaté. Mais tu n'as rien à craindre : il n'en reste rien. Orcus les a emmenés avec lui. Il a effacé les traces.
- Vous n'êtes pas seulement fêlés. Vous êtes des tueurs. De vrais tarés !

- Ces ailes ne t'ont jamais appartenu", répliqua Corm.
Elle serra les ailes ; elle ne dit rien.
"Si tu l'as cru, cette folie était de ton fait, enchaîna Corm. Réfléchis : si l'on transmet les ailes d'une personne à une autre comme un manteau, si on ne les conserve qu'un an ou deux, quelle fierté auront leurs possesseurs ? Elles seront...un emprunt...et non une propriété, et tout le monde sait qu'un aérien doit posséder ses propres ailes, sinon il n'est pas un aérien.

Elle défit les liens d'un autre panier plus gros que le premier et se mit à siffler.
- Si Pépitis avait vu celui-ci, elle serait déjà morte !
Un énorme cobra lové sur lui-même se déroula lentement, la tête relevée.

Grand roi, nobles jarls, femmes et hommes libres, le temps est venu de vous raconter une nouvelle histoire. Repoussez vos bancs, allongez vos jambes, prenez la main de la personne aimée et ne la lâchez surtout plus car je vous emmène maintenant dans un lieu où règne la peur sourde. Vous êtes prêts ? Allons-y...

Bien avant qu'Estelle ne gravisse les marches du perron, elle l'entendit approcher. Son parfum était reconnaissable entre tous. Par contre, chose inhabituelle, elle courait... La vieille femme descendit de son vélo et s'épongea doucement les lèvres, même s'il n'y avait aucune trace de sueur. Lorsqu'Estelle entra sans cérémonie dans la pièce, elle lui versait déjà à boire.

Une masse nuageuse passa devant le soleil et obscurcit soudain la carrière, comme un voile de cendres. Morgane s'avança doucement vers l'arche végétale. Son magnétisme était de plus en plus fort. Les deux arbres jumeaux s'imbriquaient l'un dans l'autre, liés par une multitude de lianes et de ronces enchevêtrées.

Le chronomancien m'avait assuré que "j'atterrirais au bon endroit". Je nourrissais quelques doutes quant à ma mission : je devais retrouver le philosophe Emmanuel Kant, mon supposé arrière-arrière-grand-oncle, avant que son temps ne soit arbitrairement écourté.

Lorsqu'elle ouvrit le paquet, elle ne put se retenir de hurler. Dans un joli papier cadeau doré, bien ciselé par des rubans brillants, trônait fièrement un magnifique ouvrage relié à l'ancienne. Sa joie était telle qu'elle ne pouvait s'empêcher de sauter partout.

Xénéphandre surgit à son tour : les Automatons encerclaient le palais et un sieur marchait derrière eux. Un sieur ? Oui, un sieur ! Il s'avançait armé de sa faucheuse pour mener enquête et le soumettre à la question !

Elle laissa son regard se perdre dans le vague, quelque part entre la pointe de ses ailes et le bord du lac rubis qui s'élargissait sous son corps. Ils voulaient le rendre insensible, ils voulaient repousser les limites de sa psyché au maximum jusqu'à ce qu'il craque...Ou au contraire, qu'il triomphe et soit au-delà de la douleur.

J'ai décidé d'être une présence bienveillante pour Lorena, je n'attends rien d'elle et me contente d'être à ses côtés lorsqu'elle joue ou qu'elle tient ces étranges tea parties où elle semble converser avec des amis imaginaires.

- J'étais la seule à entendre les âmes en peine. Ler et Eileen n'ont perçu que la lumière des feux follets.
- Qu'est-ce qu'elles ont exigé en contrepartie ? me répondit Tim posément.
- Comment sais-tu qu'elles m'ont demandé quelque chose en échange ?
- Tu as convoqué l'Ancienne Magie pour effacer le temps, perturber le cycle normal. Cela n'a pas dû être gratuit.
- Elles m'ont demandé de les rejoindre, lâchai-je à regret.

On pense souvent, à tort, que le Moyen Age fut la grande époque de la persécution des sorcières : il n'en offrit que les prémices en façonnant, sur onze siècles, l'objet de détestation populaire qu'incarnera cette figure.

Durant les années passées auprès de la Gerbaude, il m'était arrivé d'imaginer la vie du châtelain, de guetter, fascinée, l'instant où de la lumière faisait apparaître en haut de la colline le dessin de cette demeure immense. A présent, j'étais de l'autre côté de cette image familière qui m'avait tant fait rêver.

"Sevan était mon filleul, j'ai échoué dans la mission que j'avais vis-à-vis de lui. J'ai trop honte pour le revoir. Je suis juste heureuse qu'il ait écouté le dernier conseil que je lui ai donné et que ton frère et toi l'ayez suivi. Vous ferez du beau travail, ensemble. J'en suis sûre !"

Celui qui trifouillait à l'intérieur du cadavre leva un visage éclaboussé de sang, la lumière se reflétant dans le blanc de ses yeux, les rendant vitreux et lui conférant une allure hallucinée de zombie hébété.

"Jake avait déjà parcouru la moitié du chemin quand il entendit des craquements provenant d’un bosquet à moins de cent mètres de lui. Pensant tout d’abord à quelques chouettes en chasse, il n’y prêta pas attention. Il continua donc sa route quand il se rendit compte que les bruissements avançaient avec lui. Brusquement, ces murmures se transformèrent en une cacophonie inquiétante revêtant l’étrange forme d’un dialecte inconnu. Et si la chose à l’origine de tous ses malheurs l’avait suivi jusqu’ici ? Impossible se dit-il ! Il se résonna et accéléra l’allure. « Tu es seul ici. SEUL » se répétait-il comme pour s’en convaincre. À cette idée, de nouvelles larmes firent leur apparition. Seul désormais, il l’était bel et bien dans cet immense parc aux allures de cimetières. Seul, dans la vie aussi il le serait s’il ne réussissait pas à prévenir à temps la police pour sauver son père d’un danger qui, pour lui, demeurait encore incompréhensible..."

- Parfait, il faut nous dépêcher ! La pauvre ne doit pas sceller le pacte !
- Pfff... Cela se voit que vous ne la connaissez pas ! C'est sans doute elle qui a enseigné au diable ses tours les plus retors, marmonna Lottie.
- Carlotta ! Tu devrais avoir honte ! Bien sûr que nous allons la sauver !
Même si Chastity était une jeune fille infecte, Vivian se sentait indignée de la répartie peu charitable de sa soeur.

Je fixe la source de son trouble, moi-même traversée d'un sentiment identique. Toutes les tombes sont vides, les croix renversées, les sépultures éventrées, une succession de cavités emplies de végétaux.
- Où sont passés les corps ? souffle Juliette.

Extrait de "Tant que nous demeurons ensemble" de Yann de Saint-Rat :

Lénéa recule. Elle ferait mieux de partir ; pourtant, quelque chose la pousse à regarder sous l'autre lit. Elle ne s'est pas trompée : un second enfant s'y cache, pelotonné autour d'une étoffe en piètre état. Les yeux écarquillés, il est terrifié. Elle lui fait peur. Sa peau luisante et cendrée, ses membres palmés ou encore ses grands yeux noirs ne peuvent qu'épouvanter ce petit être humain, qui ne doit pas avoir plus de trois ans.

Le père de Trois, lui, ne disait mot. Son visage fermé ne s'éclaira que lorsqu'il vit l'argent que Trois avait amassé à la sueur de son front. Il reçut le paquet de liasses avec un léger signe de tête, ses yeux s'embuèrent de larmes et il esquissa un sourire...

J'ouvris le précieux fascicule, le coeur battant, entre émerveillement et peur. C'était fascinant d'avoir accès à un document aussi vieux et rare, mais je craignais de l'abimer en tournant ses pages et puis je me demandais quel secret renfermaient ces feuillets...

La porte de ma chambre s'ouvrit puis se referma, je lançai un regard pour découvrir le fantôme d'une femme se tenant près de l'entrée, me fixant. Elle portait une longue robe de mariée qui recouvrait le plancher, il était bien difficile de dire où elle se terminait et où commençait le sol.