L'existence n'est qu'un jeu d'ombres, de lumières et de cœur en émoi. Un jeu de piste infernal et délicieux.

Je te fais la lecture ?
Il est quand même très patient. Je ne me supportais pas moi-même, dans ce genre de situation. Très mauvais malade. Ultra présent et exigeant. Alors que le reste du temps, lorsque je suis en pleine forme, je me révèle être la discrétion personnifiée. Ou presque.
Cela dit, c'est lui qui propose.
Oui, je veux bien.
Très bien, alors allons-y. " John ne savait pas pourquoi, et encore moins comment il s'était retrouvé là. Les mains parsemées de sang et... "
J'ai écrit "parsemées" ?
Outré. Je suis outré !
Oui, effectivement. C''est ce qu'il y a de marqué.
Alors je suis désolé, mais l'adjectif qu'il aurait fallu mettre, c'est entachées. Ou souillées, mais jamais parsemées ! Et dire que mon éditeur l'a relu ! Aussi nul que moi, celui-là !

J'ai envie de leur conseiller d'aller tous se faire foutre. De leur ouvrir les yeux. Le jour où ils comprendront que derrière les noms qu'ils insultent gratuitement se cachent des êtres vivants dotés de cœur et de sensibilités, et qu'attiser la haine de son prochain n'est pas un jeu, alors, peut-être que l'humanité aura sauvé son âme.

Alors que le monde tourne et que l'image de cet homme sur mon palier passe et repasse dans mon esprit, que mon corps a soudainement besoin de ressentir ses bras autour de moi, que je me sens plus seul que jamais, que je réalise que mon deuil n'est pas entériné, je me relève pour traverser la pièce d'un pas chancelant.

Et... je ne sais pas ce qui me passe par la tête à ce moment -là. Peut-être que la conversation que nous venons d'avoir m'a donné de l'assurance. J'aurais pu essayer d'être discrète, pleine de tact... Mais la question qui s'échappe de mes lèvres à la subtilité d'une pelleteuse hydraulique dans un magasin de porcelaine.

— Je ne peux pas savoir ce qu'il se passe entre nous si je n'ose pas. Alors, osons et voyons, termine-t-il.
Je l'observe un moment, presque nu, trempé, et prêt à essayer. Et je me dis que même si demain, je risque de perdre un bout de moi-même si Jax décide de faire machine arrière, mieux vaut des remords que des regrets.

— tu es toujours dépendant de ton père et de ton passé. Tu considère encore, après toutes ces luttes que tu as menées durant toute ta vie, que tu ne te résumes qu'à l'image que ton père te renvoie. Mais c'est faux. Tu n'es pas invisible. Tu n'es pas inexistant. Au contraire, tu te bats pour vivre et ça se voit ! Mais merde Zach, comment peut-on ne pas t'aimer ? C'est ça, la vraie question. Et toi, tu refuses d'ouvrir les yeux. Certainement parce que c'est plus facile de te dire que si personne ne te voit, alors tu ne risques rien. Ni de faire mal, ni d'avoir mal.

Pour le reste, je crois que le refrain seriné avec insistance par mes parents m'a quand même bien marqué. Il ne peut rien résulter de sérieux dans les relations homo. Je sais que ce sont des cons et je suis persuadé qu'ils ont tort, mais inconsciemment, j'agis conformément à leurs prédictions. On ne refoule pas ce qu'on nous a entré de force dans le crâne pendant l'enfance. Encore une preuve que l'importance des enseignements des parents à leurs gosses est incommensurable et lourde de conséquences sur leurs vies d'adultes. D'où mon implications dans ce job d'éducateur que je prend pour quelques semaines tous les étés. Et c'est aussi pour cette raison que j'ai accepté ce rencard.

— Milie, ton vécu, il sera toujours en toi, dans tous les cas. Tu peux essayer d'avancer, en regardant vers l'avenir, comme tu le fais là. Mais n'oublie pas que tout ce que tu fais maintenant est dicté par ce que tu as déjà surmonté. C'est en toi, et ça le sera toujours. Croire qu'il suffit de fermer les yeux pour que l'enfer disparaisse est une erreur. Oui, il a bel et bien existé, ce diable qui a essayé de te voler ta vie, mais tu t'es battue, et ça t'a ouvert de nouvelles perspectives. Si on t'enlève ton passé, tu n'es plus qu'un sac vide, sœurette. Et c'est vrai pour tout le monde.

Je pose ma tête contre son ventre. Ses mains passent et repassent entre mes cheveux, me berçant dans son univers, dans son parfum. Sans un mot, il se laisse glisser jusqu'au sol, pose ses mains sur mes épaules et m'attire dans ses bras. je me love contre lui, les lèvres soudées à son cou. De tout ce que j'avais imaginé, il se place sans problème au-dessus. Rien n'est plus fort que sa peau contre la mienne. Que nos cœurs qui palpitent l'un pour l'autre. que son souffle épuisé à mon oreille. Il surpasse les fantasmes, la réalité, le rêve et les utopies. Jude. Ma pépite. Mon absolu... Celui que j'aurais attendu toute ma vie s'il l'avait fallu.