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Plus il y réfléchissait, plus l’Écosse le stupéfiait. Tout ici était si compliqué… Se rendre en tout insupportable devait être un sport national.

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Il n’en grimaça pas moins en découvrant la tenue que Dougal avait choisie pour lui. C’était ainsi qu’un duc devait s’habiller à Londres : pantalon moulant, habit brodé, cravate serrée à vous étrangler. Telle avait été sa tenue habituelle en Angleterre, son uniforme aussi inconfortable qu’onéreux. Mais, à présent qu’il se trouvait en Écosse, quelque chose en lui semblait s’être rebellé.

Il avait toujours détesté les contraintes de son existence, les restrictions à sa liberté, le carcan de la politesse. Il ne supportait plus les règles qui voulaient qu’un duc se conduise, s’habille et vive en respectant telles et telles conventions. Il n’était même pas autorisé à s’asseoir où il en avait envie à la table d’un dîner !

S’était-il imaginé qu’il recouvrerait sa liberté en rentrant en Écosse ? Au fond, peut-être.

— N’y aurait-il pas quelque chose de moins…

Il ne termina pas sa phrase, se contentant d’un vague geste de la main.

Haussant les sourcils, Dougal demanda :

— De moins quoi ?

Étouffant ?

— Imposant ?

Son cousin eut un grognement sarcastique et répondit :

— Il vous faut paraître imposant devant ces rustres, les impressionner par votre rang et votre prestance.

— Je suis duc. Je n’ai pas besoin d’impressionner qui que ce soit.

— Vous avez dit vous-même qu’ils se montraient agressifs, objecta son cousin.

Certes, Lachlan ne pouvait le nier.

— Ces hommes sont des sauvages, poursuivit Dougal. Une seule chose les intimide : le pouvoir. Vous devez leur en imposer.

Sur ce, Dougal lissa l’habit du plat de la main avant de le déposer sur le lit. Le pantalon et la cravate suivirent.

Lachlan détourna le regard et réprima un soupir.

— Très bien, grommela-t-il en se promettant d’enfiler une tenue plus confortable dès que ce rendez-vous serait terminé.

Il s’efforça de se tenir tranquille tandis que Dougal le rasait, le coiffait, l’habillait, mais il ne put s’empêcher de penser, comme cela lui était déjà arrivé bien souvent, qu’il n’était pas assez patient pour de telles fantaisies. Comme il aurait préféré, au saut du lit, enfiler une culotte, une chemise et vivre sa vie… Mais cela ne lui était pas permis. Il était duc. On avait des attentes à son égard, qu’on lui avait enfoncées dans le crâne depuis qu’il était petit.

Quand tout fut terminé, il prit la pose devant le miroir.

— Comment me trouvez-vous ? demanda-t-il, même s’il connaissait déjà la réponse.

— Parfait.

Dougal prit la précaution de brosser du plat de la main sur ses épaules des pellicules qui pourtant n’y étaient pas.

— Cela me semble tout de même un peu beaucoup pour le fin fond de l’Écosse, fit remarquer Lachlan.

Dougal se renfrogna.

— Il est important que vous fassiez forte impression sur Olrig. Il a de l’influence sur les barons de l’ouest, et vous avez besoin de leur coopération.

Il n’y avait rien à répliquer à cela. Lachlan ne pourrait tolérer qu’un autre de ses vassaux lui tourne le dos sans un mot. Il avait besoin de remplir ses coffres afin de restaurer ce damné château. Ainsi, son père reposerait en paix – et lui de même.

— Vous savez à quoi vous en tenir sur ces Écossais, Votre Grâce. Ils peuvent se montrer rétifs. Campbell a eu toutes les peines du monde à ranger ses barons à ses vues, même si j’ai du mal à comprendre pourquoi. Il est parfaitement logique d’utiliser ses terres pour l’élevage des moutons, c’est beaucoup plus profitable.

Lachlan haussa les épaules.

— Les Écossais n’aiment pas le changement.

— Aye. Mais vous êtes duc de Caithness, souligna Dougal en rectifiant un dernier pli. S’ils ne veulent pas coopérer, vous n’avez qu’à leur ordonner d’obéir.

Il n’avait pas tort. Pourtant, Lachlan aurait détesté en arriver là. Il préférait grandement obtenir la coopération de ses barons sans avoir à brandir ordres et menaces. Mais si certains s’obstinaient à s’opposer à ses vues, il devrait s’y résoudre.

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Un bruit désormais familier, semblable à un effrayant borborygme de l’antique bâtisse, tira Lachlan Sinclair du sommeil. Le cœur battant, les yeux clos, il se raidit dans son lit, sachant qu’il ne servirait à rien de se cacher sous ses draps pour échapper à ce qui l’attendait.

— Lachlaaaaaaan, gémit une voix à faire se dresser les cheveux sur sa tête qu’accompagnait un bruit de chaînes. Lachlaaaaaaan…

Le souffle coupé, Lachlan tendit l’oreille et lutta pour se libérer des derniers vestiges du rêve qu’il venait de faire. Faisant appel à toute sa volonté, il ouvrit un œil. La vue qui s’offrit à lui, si elle n’avait rien d’inédit, le cueillit de plein fouet, lui tordant les tripes.

Un homme à la peau cendreuse et aux yeux vides se penchait au-dessus de son lit, effrayant et menaçant. Grand, doté de larges épaules et de longues jambes, il portait court ses cheveux noirs et bouclés. Habillé de haillons, il était enchaîné et, bien qu’il parût réel, son image semblait onduler à la lumière de la veilleuse.

Lachlan reconnaissait ces traits blafards, dans ce visage ridé. Rien d’étonnant à cela, puisqu’ils ressemblaient à ceux qu’il voyait chaque matin dans son miroir. C’était son père, William Sinclair, qui se dressait à son chevet. En tout cas ce qu’il restait de lui…

— Lachlan… Tu dois me sauver.

Lachlan s’efforça de ne pas frémir. Se sentir responsable du repos de l’âme de ses ancêtres était une responsabilité lourde à porter pour un homme, mais il ne pouvait y échapper. Cela le minait de savoir que son père brûlait en enfer, et le père de son père avant lui. Et il était le seul à pouvoir rendre à leurs esprits le repos qu’ils méritaient.

Mais il devait pour cela accomplir un prodige.

— Par pitié…

Le spectre de son père tendit la main vers lui, faisant cliqueter ses chaînes. Puis, soudain, il jeta un coup d’œil par-dessus son épaule. Une expression de pure terreur se peignit sur ses traits, et il disparut dans une ultime plainte.

Lorsque le calme et le silence furent revenus dans la pièce, Lachlan poussa un soupir de soulagement. Des tremblements incoercibles l’agitaient. Chaque apparition le laissait dans un état de panique tel qu’il pouvait à peine bouger. Il ignorait pourquoi. Après tout, ce n’était qu’un fantôme…

Sauf que ce n’était pas que cela. C’était aussi un cuisant rappel du passage des ans. Plus son trentième anniversaire se rapprochait, plus les visites du revenant se faisaient insistantes et nombreuses, comme pour lui rappeler que son temps était compté – bien trop compté pour qu’il se permette le luxe de dormir.

Lachlan repoussa les couvertures, qui s’enroulèrent autour de ses jambes. Il donna de violents coups de pied pour s’en débarrasser, et cet effort suffit à lui faire tourner la tête. Marquant une pause, il attendit que le monde cesse de tourner. Il en allait toujours ainsi lorsqu’il se réveillait : une brume épaisse obscurcissait son esprit.

Cela s’était aggravé depuis qu’il était rentré chez lui, en Écosse, se rapprochant du sort qui pesait sur lui. La peur était plus intense, la panique plus profonde. Bien que ce fût encore le milieu de la nuit, il savait qu’il ne pourrait se rendormir.

Sur sa table de chevet était posé un flacon de laudanum que lui avait prescrit un médecin de Londres afin de calmer ses nerfs. Quelle plaisanterie ! Ironie du sort, cette drogue le rendait plus sensible encore aux tourments qui le guettaient et le laissait sans défense face aux terreurs qui assaillaient ses nuits.

Il ne pouvait s’empêcher de penser que de cette fiole pouvait également venir le salut d’un homme suffisamment courageux pour l’accueillir. Il aurait suffi d’une grande inspiration, d’une main ferme, de quelques gorgées vite avalées, et il se serait endormi pour ne plus se réveiller. Les fantômes auraient été réduits au silence à jamais. Une perspective tentante, assurément. Quel dommage qu’il n’ait pas ce courage.

De toute façon, il avait encore trop de choses à faire avant de quitter cette terre. Il était le dernier de sa lignée et devait à ses ancêtres de laisser autant que possible en ordre derrière lui l’héritage qu’ils lui avaient légué. Il savait que la mort ne tarderait pas, mais elle ne viendrait pas de sa propre main, il se le promettait.

Ses jambes tremblaient encore, mais il se leva et marcha jusqu’à sa garde-robe. Il n’enfila qu’un pantalon et une chemise, ce qui ne nécessitait l’aide de personne. Les domestiques – ou ce qu’il en restait – devaient encore dormir à cette heure. Même Dougal, aussi présent et digne de confiance qu’il soit, n’aurait pas apprécié d’être réveillé.

Après avoir allumé une lampe, Lachlan traversa le grand hall empli d’échos de Caithness Castle, évitant les endroits où les murs s’étaient écroulés sur le sol dallé. Il pressa le pas le long des corridors glacés dans lesquels le vent s’infiltrait par les lézardes de l’antique forteresse. But habituel de son périple, il atteignit la galerie où étaient exposés les portraits de ses ancêtres.

Sur ces murs s’alignaient nombre de Sinclair depuis longtemps retombés en poussière, saisis pour l’éternité dans leur prime jeunesse. Aucun d’eux n’arborait le moindre cheveu gris car, de manière systématique, tous les Sinclair devenus lairds ne dépassaient pas la trentaine. Lachlan fit une halte devant le portrait de son père, le plus récent de tous, et étudia ses traits familiers. Tel était le visage qui venait le hanter chaque nuit. Ne pouvant supporter de le contempler plus longtemps, il alla se camper devant un autre tableau. Celui-ci était accroché dans une niche, comme si l’on avait mis à l’écart le scélérat qu’il représentait.

Contrairement aux autres occupants de la galerie, cet homme était âgé, comme l’indiquaient ses rides et quelques bandeaux gris dans ses cheveux. À la différence de tous ceux qui lui avaient succédé, le baron de Rosslyn avait vécu jusqu’à l’âge avancé de soixante-cinq ans. Habillé d’un costume à la mode du tout début du XIVe siècle, il se tenait droit et fier – beaucoup trop fier –, observant le monde avec une moue légèrement ironique. Peut-être était-ce de ses descendants qu’il se moquait ainsi… Dans ses mains, le baron tenait la croix de MacAlpin, une relique ancienne en or incrustée de diamants, sur laquelle figurait le cerf rouge, emblème du clan Sinclair.

Certains prétendaient que la croix avait été rapportée de Terre sainte à l’occasion de quelque croisade oubliée ; d’autres soutenaient qu’elle était la création d’une sorcière aux pouvoirs druidiques. Tout le monde s’accordait en revanche à dire qu’elle symbolisait le cœur de l’Écosse, confié par sécurité à la garde du clan Sinclair.

Et les Sinclair avaient failli à leur devoir.

Rosslyn avait été le dernier de la lignée à la détenir. Par cupidité, le traître avait livré la relique à leur pire ennemi, le brutal roi anglais Edward Ier, en échange d’un immense trésor et du titre de duc de Caithness.

Rosslyn avait-il compris qu’en agissant ainsi, il attirait sur sa lignée un sort mortel ? Rien n’était moins sûr, car il n’en avait pas souffert lui-même. Comme le montrait son portrait, il avait eu une existence longue et prospère. C’était sur son fils que la malédiction s’était abattue, et sur tous les premiers-nés de son sang après lui. Telle était la malédiction : tous les héritiers du titre de Caithness devaient mourir de manière prématurée, jusqu’à ce que la croix revienne aux mains des Sinclair.

Mais la croix n’était jamais revenue à Caithness Castle. Edward, le monarque qui ne souhaitait rien d’autre que briser le cœur et la vaillance des membres de tous les clans du nord du royaume, l’avait brisée en trois morceaux et jetée dans la mer.

À l’époque, nul n’avait prêté attention aux divagations d’une vieille sorcière qui vivait dans les bois, celle-là même qui s’était autoproclamée « gardienne de la croix » et qui se lamentait de la perte de la relique. On n’avait pas fait grand cas non plus du sort qu’elle avait jeté au responsable de ce désastre, pas même quand avait mystérieusement disparu le trésor reçu par Rosslyn en récompense de sa trahison.

Mais lorsque le deuxième duc de Caithness, fils de Rosslyn, était mort la veille de son trentième anniversaire et que les troisième et quatrième ducs avaient connu un sort identique… on avait commencé à reconsidérer la question. Les ducs suivants et leurs partisans avaient fait l’impossible pour mettre la main sur les fragments de la croix, mais personne n’en avait jamais retrouvé la moindre trace.

Pendant longtemps, en homme gouverné par la raison, Lachlan n’avait accordé aucun crédit à cette prétendue malédiction. De fait, il avait passé la plus grande partie de sa vie à se moquer de la légende familiale. Vivre à Londres, loin des lieux et des gens susceptibles de la lui rappeler, à s’adonner aux mille plaisirs de la jeunesse, l’avait aidé à ne plus y penser.

Puis les visites nocturnes avaient commencé. Une voix venue du tombeau aurait donné la chair de poule à n’importe qui.

Désormais, son trentième anniversaire était proche. À chaque jour qui passait, Lachlan sentait les murs se refermer un peu plus sur lui. Et, à chaque heure qui s’écoulait, le tic-tac de l’horloge lui rappelait qu’il lui restait tant à faire, et si peu de temps… Le dénouement approchait, implacable, et son avenir se réduisait, au même rythme que ses capacités respiratoires, semblait-il. Lorsqu’il pensait au sort qui l’attendait, il avait du mal à respirer, comme si le poids de son âme et de celles de tous ses ancêtres pesait sur sa poitrine.

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