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Son visage était d’une incroyable beauté – et le mot « violent » bourdonnait dans ses oreilles. Des pommettes saillantes, des sourcils noirs effilés, des lèvres pincées férocement qui lui donnaient un air brutal. Ses cheveux ondulés, aussi noirs que ses vêtements, retombaient librement sur ses épaules.
Son cœur battait comme un avertissement instinctif. Repliée sur elle-même, elle trouva le courage de parler.
Afficher en entierDes ombres, des formes et des murmures. Ils tournoyaient dans sa tête, grossissant et s’évanouissant par cycles confus.
Même lorsqu’elle rouvrit les yeux, ils étaient encore là. Ils tournaient. Quoi ? Qu’est-ce que c’est ? Ces questions l’obsédaient.
Elle avait froid, elle était mouillée et elle souffrait de multiples contusions. Un accident. Oui, un accident, mais…
Afficher en entierDevant la cheminée, il était tombé dans le demi-sommeil auquel il avait droit et devant le feu de cheminée, il avait rêvé de la jeune femme brune venant vers lui. Étrangement, elle avait un regard effrayé et ses joues étaient blanches comme la neige.
Il avait dormi pendant l’orage, ignorant les souvenirs qui le hantaient souvent jusque dans ses pensées oniriques. Mais quand elle était venue dans ses rêves, quand elle avait tourné ses yeux vers lui, il avait réagi. Il avait prononcé son nom.
Afficher en entierÉvidemment, il n’y avait personne. Son doigt gelé appuya sur le bouton pour refermer la vitre. Juste mon imagination, la fatigue qui me joue des tours. Il n’y avait pas d’homme dans la forêt sous l’orage. Encore moins d’homme qui connaissait son nom.
C’était exactement le genre d’absurdité qui aurait pu naître de l’imagination de sa mère. La femme perdue dans la forêt enchantée, dans la tempête déchaînée et le bel homme, probablement un prince guidé par un envoûtement, qui volait à son secours.
Afficher en entierElle le rangea et inspira profondément. Pour se calmer, elle ferma les yeux, rejeta la tête en arrière et s’accorda deux minutes de repos.
La pluie fouettait les vitres et le vent continuait de pousser son hurlement sauvage. À intervalles réguliers, l’épaisseur de la nuit était transpercée par une nouvelle lance bleu électrique. Mais Kayleen restait pondérée, ses cheveux noirs attachés soigneusement par un élastique, ses mains croisées sur ses genoux.
Sa bouche pincée, aux lèvres pleines et charnues, se détendit peu à peu. Quand elle rouvrit les yeux, aussi bleus que les éclairs qui déchiraient le ciel, ils étaient de nouveau calmes.
Afficher en entierN’avait-elle pas réservé une chambre dans des bed and breakfast certifiés pour chaque nuit de son voyage ? Confirmé les réservations pour parer à tout désagrément à la fin de chacune de ses journées ?
N’avait-elle pas précisément dessiné son parcours et souligné chaque centre d’intérêt, en inscrivant la durée qu’elle comptait consacrer à chaque étape ?
Cependant, elle n’avait pas prévu de se perdre. Personne ne pouvait le prévoir. La météo avait annoncé de la pluie, mais elle était en Irlande, après tout. Aucune chaîne n’avait annoncé l’orage déchaîné, ni les rafales de vent qui secouaient sa petite voiture comme un dé dans un gobelet, plongeant cette lumineuse soirée d’été dans une obscurité étouffante.
Afficher en entierUne adulte n’avait pas peur d’un bois et de quelques éclairs, ni du brouillard qui s’épaississait puis s’amenuisait comme s’il respirait. Une femme adulte ne paniquait pas parce qu’elle avait pris le mauvais virage, quand la route était trop étroite, comme celle-ci, pour faire demi-tour sans risques. Elle continuerait simplement à avancer jusqu’à ce qu’elle retrouve son chemin.
Et une personne raisonnable ne se mettait pas à imaginer qu’elle entendait des choses dans la tempête.
Afficher en entierElle était supposée être en vacances. Elle aurait dû s’amuser, se détendre, découvrir des choses.
Ça n’aurait pas dû être terrifiant.
Terrifiant, c’était exagéré. Un tout petit peu.
Un terrible orage d’été, une étrange route qui serpentait dans une forêt sombre où les arbres étaient pareils à des géants parés d’une armure de brume. Rien de tout cela n’effrayait véritablement Kayleen Brennan de Boston. Elle avait la peau dure. Elle s’appliquait à se le rappeler, toutes les dix secondes environ, alors qu’elle luttait pour maintenir la voiture de location dans la tranchée boueuse qui était au départ une route.
Afficher en entierAu bout d’un demi-millénaire, il succomba aux rêves. Non, c’était plus fort que ça. Il les étreignait, survivait grâce à eux. Il s’échappait dans le monde onirique quand son âme se languissait du simple contact d’un autre être.
Elle venait à lui dans ces rêves, la jeune femme brune aux yeux semblables à des diamants bleus. Dans ce monde onirique, elle courait dans sa forêt, s’asseyait devant son feu, se couchait dans son lit de son plein gré. Il connaissait le son de sa voix, sa chaleur. Il connaissait sa silhouette, son grand corps mince comme un homme connaît une femme. Il savait que sa fossette s’animait au coin de sa bouche quand elle riait. Et il savait situer précisément la tache de naissance en forme de croissant de lune sur sa cuisse.
Afficher en entierIl n’avait que ses rêves. Sans eux, il était seul, continuellement et pour toujours. Durant les cent premières années de solitude, il avait vécu dans l’arrogance et la colère. Il en avait quantité à revendre.
Durant le second siècle, il s’était réfugié dans l’amertume. Quand l’un de ses secrets le torturait, il bouillonnait et tournait en lui. Au lieu de trouver la voie de la guérison, elle agissait comme un carburant qui le poussait vers le jour suivant, de décennie en décennie.
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