Extraits

Il ne supporterait pas de la voir une seconde de plus. Il reparlerait de tout ça avec elle au lycée, demain, ou mardi, ou mercredi, ou à un autre moment, mais pas maintenant. Elle devait partir.

- Pernille... je suis homo.

C'est l'instant que choisit sa mère pour entrer.

Il eut l'impression qu'il la connaissait depuis toujours et qu'elle lui avait beaucoup manqué, sans qu'il le sache. Plonger ses yeux dans ceux de cette jeune fille, c'était comme rentrer à la maison.

Il prit son appareil photo et zooma sur l'endroit où la falaise s'était affaissée, au ras de l'eau. C'était un super bon objectif. Sans parler de la grosse carte mémoire qui permettait à Lukas de photographier tous azimuts. Il mit l'appareil sur autoshoot et s'en donna à cœur joie.

Prenant trois clichés par seconde,le Nikon faisait un bruit de rafale. Clic clic clic. Lukas régla la netteté pour photographier l'éboulement. Nouvelle bordée de tirs. C'était un sentiment merveilleux d'être là tout seul, en paparazzi de la nature. Il perçut un léger mouvement dans son champ de vision et eut la certitude qu'il s'agissait d'un faucon pèlerin, qui chassait de petits oiseaux près du rivage. Surexcité, il régla l'appareil sur autofocus et appuya sur le déclencheur en continu, en essayant de capter l'oiseau en vol. Soudain, celui-ci plongea en piqué dans la mer. L'accélération de l'oiseau était si foudroyante que Lukas battait à tout rompre,tandis qu'il guettait l'endroit où le rapace ressortirait de la mer. Il était sûr d'avoir réussi de bons clichés. Tout à coup, quelqu'un apparut à l'arrière-plan dans l'objectif. C'était un élève de l'autre classe. Énervé, Lukas voulut régler l'objectif pour faire la mise au point sur la mer, mais il se trompa dans sa manipulation, et finalement ce fut sur une jeune fille inconnue qui apparut dans son objectif. Son cœur s'arrêta soudain de battre et son index s'immobilisa sur le déclencheur, qui continua à mitrailler.

Quand il baissa l'appareil photo, il fut surpris de constater à quelle distance la jeune fille se trouvait en réalité. Il mourait d'envie de se servir de l'objectif comme d'une paire de jumelles, mais ne put s'y résoudre. C'était une chose de tomber sur elle par hasard, c'en était une autre de l'observer en cachette. Lukas trouvait cela incorrect, même s'il savait que Niels, lui, ne se serait pas gêné pour le faire. Il préféra regarder les clichés qu'il avait pris, où elle apparaissait rayonnante, avec un sourire éclatant jusque dans ses yeux sombres qui regardaient en dehors du cadre. Elle avait la peau mate, elle ne devait pas être d'origine danoise. Ses cheveux bruns et lisses tombant sur ses épaules contrastaient joliment avec son imper rouge et la falaise derrière elle. Il zooma sur la photo, jusqu'à deviner sa langue qui jouait avec un chewing-gum dans sa bouche... ses lèvres rose pâle... Elle était... parfaite.

Il ne supporterait pas de la voir une seconde de plus. Il reparlerait de tout ça avec elle au lycée, demain, ou mardi, ou mercredi, ou à un autre moment, mais pas maintenant. Elle devait partir.

- Pernille... je suis homo.

C'est l'instant que choisit sa mère pour entrer.

Il eut l'impression qu'il la connaissait depuis toujours et qu'elle lui avait beaucoup manqué, sans qu'il le sache. Plonger ses yeux dans ceux de cette jeune fille, c'était comme rentrer à la maison.