Extraits

On peut vivre avec certaines choses, mais pas avec toutes.

Qui se soucie du goût, s'il est toujours identique ? C'est dans la variété que l'on trouve tous les arômes de la vie.

Toutes les révélations du jour se mettent en place, les unes après les autres, comme les pièces d'un puzzle. J'ai presque un sentiment de déjà vu. Sauf qu'au lieu d'avoir vécu le moment, je me sens poussée vers lui.

Ce sont les mains du Destin qu s'impriment dans mon dos.

Je me sens si seule depuis que j'ai reçu mon souvenir futur... Je l'ai sans doute toujours été. Et je ne m'en rends compte que maintenant.

Une bouffée d'air nocturne nous accueille tandis que nous émergeons du conduit. Nous sommes sur le toit du gratte-ciel. Je pourrais tomber à genoux et embrasser le sol sous mes pieds !

Des millions d'étoiles scintillent au-dessus de nos têtes et le vent charrie des odeurs d'arbres et d'humus. La lune est blanche et ronde, ses cratères forment un visage qui nous regarde avec bienveillance. On y voit aussi bien que par une journée nuageuse.

J'ai la gorge noué par l'émotion. La liberté m'est presque insupportable.

"Je me sens en paix avec toi, Callie. Depuis toujours. Voilà pourquoi je n'ai pas réussi à te parler des sacs à dos. J'avais peur que ton regard change."

J'essaye de voir les feuilles.

— Pourquoi ?

Je passe ma langue sur mes lèvres : c'est une question difficile.

— Tu vois, quand elles tombent, elles peuvent atterrir partout. Elles sont libres et pas enfermées comme nous. J'essaye de voir où elles vont.

Et puis je la voie, posée sur mon écran personnel. Une feuille rouge vif. Je la saisis avant d'observer la classe. [...]

Je risque un coup d’œil de l'autre côté de la salle, vers ce qui était ma place ce matin encore. Vers ce garçon qui était assis à côté de moi mais qui ne m'avait jamais parlé jusqu'à aujourd'hui.

Il ne me regarde pas. Penché sur son bureau en verre, il fait courir ses doigts sur un clavier.

Je relâche mon souffle et je m'affale sur ma chaise. Quelle idiote de penser que que la feuille pouvait venir de lui ! Ce n'est même pas un cadeau. Un élève l'aura juste fait tomber là, sans faire exprès. Je devrai la déposer dans le vide-compost, afin qu'elle soit recyclée.

Mais je ne le fais pas. Je la pose sur mes genoux avant de suivre ses nervures du bout des doigts.

Mon écran vibre, un nouveau message vient de s'afficher.

" Une feuille pour une fleur. Pour te rappeler le soleil."

Il n'y a pas de signature, mais cette fois, lorsque je relève la tête, Logan m'observe. Et il m'adresse un sourire tellement radieux que, sur le moment, je le crois capable d'éclipser le soleil.

Je ne peux plus parler. J’ai l’impression que mon coeur, beaucoup trop grand pour ma cage thoracique, va bientôt exploser, comme s’il y avait en moi des poupées russes assemblées dans le mauvais ordre.

Les souvenirs peuvent s'avérer dévastateurs. S'ils donnent un aperçu, vivant et réaliste, du futur, ils ne fournissent ni contexte, ni moyen de les interpréter. De simples faits, voilà avec quoi on se retrouve, sans savoir comment se défendre ou se justifier.