~Chapitre trois ~
— Bordel de merde, Demyan, souffla Drake en se précipitant vers le corps immobile de son ami.
Il s’accroupit à ses côtés, et se pencha vers l’homme allongé sur le sol pour voir s’il était toujours en vie. Un soupir s’échappa lorsqu’il se rendit compte que Demyan respirait.
Alors qu’il s’apprêtait à lui administrer une claque sur la joue dans l’espoir qu’il réagisse, Demyan ouvrit un œil.
— Qu’est-ce que tu fous là ? grogna-t-il.
Drake poussa un petit cri et, surpris, recula aussitôt son visage de celui de son ami.
— Mais t’es con ou quoi ? s’écria-t-il. Tu m’as fichu la frousse. Pendant un instant, j’ai cru que tu étais mort.
— Et je suis certain que tu t’apprêtais déjà à danser sur ma tombe. Désolé de te décevoir, mais je vais bien, rétorqua Demyan, apparemment contrarié par la présence de son associé.
Décidément, pas moyen d’être tranquille dans sa propre maison. C’était tout de même un comble.
— Oui, c’est ça, railla Drake. Tu verrais ta tête. Tu es tout blanc. Enfin encore plus que d’habitude s’entend. Et puis d’abord qu’est-ce que tu fous allongé par terre ?
— Je me repose.
Comme pour justifier ses paroles, et démonter à Drake qu’il se sentait en pleine forme, il tenta de se relever avant de s’écrouler lourdement sur le sol dans une grimace agacée. Qu’il détestait lorsque son corps le trahissait.
Il n’en fallut pas davantage à Drake pour comprendre la raison de l’état de son ami. Oubliant toute remarque sarcastique, il demanda.
— Depuis combien de temps ne t’es-tu pas nourri ?
— J’ai avalé un hamburger il y a quelques heures à peine.
Drake secoua la tête. Ce qu’il pouvait l’énerver à tourner autour du pot au lieu de répondre franchement à ses questions. Mais il n’était pas d’humeur à rentrer dans son jeu.
— Non, je parle de sang. Ça fait combien de temps, Demyan ? demanda-t-il d’un ton sévère.
— Je n’en sais rien.
Voilà qui n’était pas bon signe. Il n’arrivait pas à concevoir que son acolyte puisse appréhender ce problème avec autant de légèreté. Son égo démesuré et son trop-plein de confiance en lui finiraient vraiment par le tuer. Certes, Demyan était un homme puissant, le plus fort et le plus redoutable qu’il n’ait jamais connu, mais lui également avait besoin de reprendre des forces de temps en temps. Même si sa soif de sang n’était pas aussi importante que la sienne, et qu’il pouvait passer plusieurs jours sans se nourrir, il devait tout de même faire le plein, histoire de ne pas se retrouver, disons, dans l’état où il se trouvait actuellement.
Alors, sans tergiverser plus longuement, Drake retroussa la manche de sa chemise anthracite et offrit son poignet à Demyan.
— Bois, ordonna-t-il.
— Non merci, répondit Demyan en esquissant une grimace avant de repousser faiblement le bras de Drake.
— Arrête de faire le con, gronda ce dernier. Tu en as besoin. Je n’ai pas envie de te retrouver tout desséché et rabougri dans quelques heures.
Bien sûr, il préféra taire le fait qu’il désirait sentir les dents de Demyan percer sa peau autant que Demyan avait besoin de se nourrir. Rien de tel pour effrayer son ami.
— Bon, très bien. Mais tu ne veux pas me ramener une humaine ? Le sang de mes congénères ne me plait pas des masses.
Drake ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. C’est que monsieur avait en plus ses exigences. Malheureusement, il n’avait pas de jeune fille sous la main, et de toute manière, cela n’aurait pas été suffisant. Bien que le sang humain ait meilleur goût et soit donc préféré au sang de vampire, ce dernier était plus puissant, et le nourrirait davantage que deux voire trois humains.
— Vraiment ? rétorqua Drake en arquant les sourcils. Pourtant, je suis persuadé que tu ne faisais pas autant de caprices lorsqu’il s’agissait de Nina.
Il avait prononcé cette phrase d’un air détaché, et avait tenté de faire taire la pointe de jalousie qui l’avait envahi.
— Pas faux. Mais elle me laissait la prendre en même temps, ce qui rendait le tout bien plus sympathique. Alors sauf si tu veux bien que je te baise pendant que je me nourris, je n’ai pas très envie de m’abreuver de ton sang.
— Arrête ! gronda-t-il.
Mais loin de se laisser démonter, Demyan attrapa Drake par la nuque et le tira vers lui jusqu’à ce que sa bouche ne soit plus qu’à quelques centimètres de la sienne.
— Allez, souffla-t-il, un petit effort. Je te promets que tu vas adorer ça.
Drake sentit son cœur s’emballer. Il n’avait qu’une seule envie, combler les quelques centimètres qui séparaient les lèvres de Demyan des siennes pour l’embrasser furieusement. Ce qu’il détestait quand son ami le provoquait de la sorte. Même s’il ne pouvait deviner à quel point sa proximité le rendait fébrile, il avait peur qu’en continuant ainsi, il ne finisse par le découvrir. Et alors il ne donnerait pas cher de sa peau.
Il tenta du mieux qu’il put de faire taire son désir, et c’est à cet instant que Demyan relâcha son étreinte et éclata de rire.
— Merde, tu verrais ta tête ! Ça va, je plaisantais ! Tu es vraiment trop coincé !
Drake laissa échapper un grognement. Il aurait voulu ne pas l’être. Combien de fois s’était-il imaginé à la place de tous les hommes que Demyan avait amenés dans son lit. Combien de fois avait-il essayé de refouler ses sentiments envers son ami ? De se dire que s’il tenait tellement à lui, c’était juste à cause de tout ce que Demyan avait fait pour lui toutes ces années. Parce que même s’il méprisait Demyan pour ce qu’il était, fort était d’admettre que sans lui, on l’aurait retrouvé dans le caniveau avec un pieu dans le cœur depuis bien longtemps. Car Demyan ne s’était pas contenté de le sauver ce soir-là. Non. Cela aurait été bien trop simple. Il l’avait aidé. Il lui avait offert un toit, et surtout, une nouvelle vie. Il lui avait appris à se battre, à apprivoiser sa condition de vampire – bien qu’il ait encore du mal avec cet aspect de sa personne. Il lui avait donné accès à un autre monde. Et il lui en serait éternellement reconnaissant, même si cela lui coûtait terriblement de l’admettre.
Mais dans l’immédiat, Drake était bien trop agacé par son comportement pour envisager faire le moindre effort.
— Puisque c’est comme ça, débrouille-toi tout seul.
Il se releva, énervé, et s’apprêta à quitter la pièce lorsque la voix de son acolyte retentit.
— Allez, reviens ! Ce que tu peux être susceptible !
Lentement il pivota sur lui-même et dévisagea Demyan d’un air irrité.
— Tu admets donc que tu as besoin de moi ? demanda-t-il en croisant les bras.
Demyan voulu rétorquer par une réplique bien sentie, mais il comprit qu’il avait poussé Drake dans ses retranchements, et qu’il suffirait d’une seule remarque de plus pour qu’il l’abandonne ici, sans lui porter secours. Bien sûr, il ne ferait aucun doute qu’il parvienne à se débrouiller sans son aide, mais cela prendrait bien plus longtemps, et il n’était pas du genre patient.
— Parfait, concéda-t-il. Je l’admets. Et ôte tout de suite ce sourire satisfait de ton visage. C’est déjà assez dur pour moi d’avouer une chose pareille.
Drake laissa échapper un ricanement, mais fit demi-tour pour venir s’agenouiller de nouveau auprès de son compagnon.
— Même pas un petit coup vite fait ? osa tout de même Demyan.
— Ferme-la et bois, ordonna Drake, mais sans toutefois se départir de son sourire.
Alors Demyan ne se fit pas prier. Il sortit ses crocs pour les enfoncer dans le poignet de Drake. Ce dernier ferma les yeux tandis qu’une vague de plaisir le submergeait. Il tenta tant bien que mal de contrôler son érection, en vain. Et les gémissements de plaisir de son ami n’aidaient en rien. Bien au contraire. Tous deux étaient maintenant en transe. Demyan serra plus fermement le poignet de Drake entre ses doigts, comme s’il ne voulait plus se séparer de lui. Paradoxalement, aucun des deux hommes ne semblait gêné par la situation. Ils connaissaient parfaitement les effets des morsures sur l’un comme sur l’autre et cela faisait bien longtemps qu’ils ne s’en formalisaient plus.
Demyan finit tout de même par se détacher. Il lécha rapidement la plaie pour la refermer, avant de murmurer un merci quasi inaudible.
Puis il se releva prestement, à présent tout à fait en forme. Alors qu’il était sur le point de quitter la pièce, il se tourna vers Drake.
— Alors, tu me les montres ses plans ?
Ce dernier acquiesça et suivit son acolyte d’un pas trainant.
***
Cela faisait plus d’une heure qu’ils étaient penchés sur les plans de la nouvelle boite de nuit imaginée par Drake. Et si Demyan avait préféré se faire empaler par un des foutus membres du Cercle que de l’admettre, il était bluffé.
Son ami avait pensé l’endroit dans les moindres détails, et il devait avouer que rien ne lui avait échappé.
Il avait décidé d’ouvrir l’entrepôt pour y faire construire un dôme vitré. Il avait divisé la salle en deux parties, séparées par une rivière en lacet sur laquelle des petits ponts de verre permettaient de passer d’un côté à l’autre. La partie gauche du cours d’eau était destiné à la piste de danse, ainsi qu’à un bar transparent doté de spots en son pied qui donneraient un aspect bleuté à l’ensemble, et qui s’étendait sur toute la longueur de l’entrepôt.
L’autre côté serait réservé aux tables, de verre elles aussi, et à des sièges de velours bleus.
Il souhaitait également transformer l’actuel escalier de fer en escalier de verre et de convertir la mezzanine en espace VIP. Cet espace serait séparé en différentes alcôves, promettant un semblant d’intimité en restant ouvert sur la salle en contrebas.
Non, vraiment, Demyan en demeurait bouche bée. Et c’était sans compter toutes les petites touches qu’il avait l’intention disséminer ici et là pour rehausser cet aspect onirique et épuré qui définissait parfaitement ce futur lieu.
— Alors qu’est-ce que tu en penses ? demanda Drake, une cigarette au coin des lèvres.
Il était si stressé qu’il avait enchainé clope sur clope pour se donner une contenance. Après tout, cette boite appartiendrait autant à Demyan qu’à lui, et il avait bossé tellement dur dessus pour que tout soit parfait avant de lui montrer les plans qu’un refus briserait le peu de confiance qu’il avait en lui.
— C’est pas mal, répondit Demyan d’un air las.
Malgré son ton blasé, Drake se sentit empli de fierté. Un « pas mal » de la part de Demyan équivalait à un putain de compliment de la part de n’importe qui d’autre. Alors même s’il avait tout de même espéré un peu plus d’enthousiasme, il savait parfaitement qu’il ne pouvait s’attendre à mieux. Et par ces simples mots, il savait qu’il venait de recevoir l’assentiment de son acolyte.
— Merci, se contenta-t-il de répondre avant d’enrouler les plans pour les ranger précieusement.
— Tu comptes commencer les travaux quand ?
— Je voulais attendre que l’on vende le Styx avant, mais si tu es d’accord, et que tu peux avancer le prix des travaux, on peut démarrer dès la semaine prochaine.
— À croire que je ne suis utile que pour mon fric, soupira Demyan.
— Il faut avouer que c’est ce qui fait tout ton charme.
Demyan balaya cette remarque d’un revers de la main.
— Tu as déjà trouvé un nom ?
— L’
Insomnia.
Demyan se contenta d’acquiescer mollement. Apparemment, il avait épuisé son stock de compliments.
Il délaissa la table de la cuisine pour aller se servir un verre de Belvedere – fraîchement rapportée par David.
Alors qu’il était tranquillement en train de siroter son breuvage, accoudé au rebord de la fenêtre ouverte maintenant que la nuit était tombée, la sonnerie du téléphone de Drake résonna dans l’immense espace.
Ce dernier esquissa un petit sourire lorsqu’il vit le nom de sa correspondante.
— Charlotte ? Ça fait longtemps.
— Je sais mon ange. Mais on a un problème.
À ces mots, Demyan, à qui la conversation n’avait pas échappé grâce à son ouïe fine, se releva et sentit ses muscles se crisper. Il jeta un coup d’œil vers Drake qui se trouvait apparemment aussi tendu que lui.
— Que se passe-t-il ? souffla-t-il alors.
— Ils ont eu Alexei.
Un juron sortit de la bouche des deux hommes en même temps.
— Ne bouge pas. J’arrive.
Il avait à peine raccroché que les deux acolytes se ruèrent dans le garage, s’engouffrèrent dans la première voiture qu’ils trouvèrent – une Porsche Carrera GT – avant de foncer tombeau ouvert dans l’obscurité.
Chapitre 4
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En plus Demyan + Nikita ça sonne bien ! Et mon prénom est d'origine russe donc ça passe comme une lettre à la poste ! Si tu ne fais rien pour m'arranger un coup avec lui, je te préviens je fais sauter la cervelle de Marcus !
C'est une certaine facilité que tu as 
Moi je veux bien un câlin ^^
qu'il ai juste oublier de se nourrir... ça fait bizarre 