En travaux - Chapitre 5

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ketxa

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En travaux - Chapitre 5

Message par ketxa »

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(avertissement : comme tout ce que j'écris, En Travaux contient une belle dose d'érotisme ; mais pas seulement ! :D )

Salut !

Je suis terriblement heureuse de publier cette histoire, parce que je n'avais réussi à écrire que la première moitié il y a presque un an et que je n'ai pas eu le temps d'y toucher jusqu'à ces derniers jours. Mais c'est les vacances, youpi ! J'espère que tu la trouveras sympa à lire ! Je te fais des bisous (merci de me laisser des commentaires, ça m'aide et ça me fait plaisir <3


Image


Description

Oui, je suis ambitieuse. Et un peu perverse. Depuis qu’il m’a brisé le cœur, je mise sur mon cerveau et sur mon corps pour gravir les échelons. Glaciale, moi ? J’essaie. Mais un jour, tout dérape, alors je cherche refuge dans le grand domaine que mon frère fait rénover. Et là, surprise. Je le revois. Lui. Avec ses outils (ceux qui sont sur un établi et ceux qui palpitent dans son boxer). Il paraît qu’il sait très bien s’en servir. Et que je vais devoir cohabiter avec lui.

La collection poin2vu* propose des romances à la première personne en deux tomes, chaque tome montrant le point de vue de l’un des deux personnages. Si la trame est identique, les thèmes abordés varient en fonction du vécu du narrateur et de ses pensées. Parce que la vie est ainsi faite : pour une même histoire, nous pouvons avoir une multitude de versions différentes… « En travaux » est la première publication, avec Maëlle en ouverture du bal. J’ai terminé le premier jet de cette histoire, ce qui signifie que tu es sûr de pouvoir connaître la fin ;-) Je posterai mes chapitres au fur et à mesure de mes relectures, et puisque je commence un mercredi soir, hé bien je te donne rendez-vous tous les mercredis soirs ! Bonne lecture, et n’oublie pas de me laisser des commentaires, ça m’aide énormément et ça m’encourage à continuer, merci !
*dont c'est le premier livre, hi hi hi ! Mais j'ai pris tellement de plaisir à écrire cette histoire qu'il y en aura d'autres, j'ai déjà mes petites idées ;)




POUR INFO : je publie aussi cette histoire sur Wattpad, parce que certains aiment venir sur ce forum mais préfèrent les modalités de lecture et de commentaire sur ce site-là. Sur Wattpad, j'ai un chapitre d'avance, donc si tu es pressé... 8-) https://www.wattpad.com/story/119009437 ... a%C3%ABlle


Et pour ceux que ça intéresse, j'ai déjà publié une histoire terminée ici, sur Booknode, elle s'appelle
Louise et c'est mon histoire chouchou que j'adore <3 Clique sur le titre si tu veux la lire ![/mid][/color]

PROLOGUE
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
ÉPILOGUE



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Dernière modification par ketxa le mer. 04 oct., 2017 3:44 pm, modifié 5 fois.
ketxa

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En travaux *Maëlle* - Prologue

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PROLOGUE




— Tu es arrivée en retard, aujourd’hui…
C’est comme ça que ça avait commencé.
— Il va falloir te rattraper…
Enfin ! Depuis le temps que je rêvais de devoir rattraper mon retard sur son bureau ! Oui, sur son bureau, pas dans ou sous ! Les fesses collées sur son sous-main plutôt que sur ce maudit fauteuil en velours noir, les cuisses largement écartées devant son nez plutôt que sagement croisées sous mon siège… Ce type peut me coller tous les dossiers qu’il veut sur le dos, s’enorgueillir de mes succès et me tancer à la moindre déconvenue, je reste sourde à mon instinct qui me dit de fuir. Je suis une biche et il est un loup équipé de phares. Je suis éblouie. Depuis mon premier jour de stage dans les bureaux d’un de ses acolytes, jusqu’à aujourd’hui où nous sommes désormais presque collègues. Presque. Un jour, je m’associerai à leur cabinet d’expertise financière. En attendant, il reste mon supérieur hiérarchique et le mec le plus bandant du bâtiment. Le plus convoité, aussi. Toutes les filles connaissent son goût pour les retardataires. Nous nous appliquons à trouver le dosage idéal entre « être exquisément en retard » et « être virée pour dépassement horaire chronique ». Cette fois-ci, j’en suis sûre, c’est mon tour, et je compte bien ne plus jamais laisser ma place.
— Ferme la porte derrière toi.
Je m’appuie contre le chambranle et tiens la porte entrouverte quelques secondes, le temps qu’il s’aperçoive que je n’obéis pas aussi rapidement qu’il s’y attend. Il oublie en permanence que je ne suis plus stagiaire, ni non plus son assistante. En homme habitué à ce que son autorité soit respectée, il fronce les sourcils, agacé. Le plus lentement qu’il m’est possible de le faire, le visage neutre, sans le quitter des yeux, je m’avance et ferme la porte derrière moi, avant d’en tourner ostensiblement le loquet. Il penche sa tête et plisse les yeux. Je connais sa façon de faire, les jeunes filles ne sont pas très discrètes quand elles racontent leurs ébats avec BIG Ted. BIG pour « Beau Intelligent Grossier ». Et BIG pour la taille de son membre. Il aime leur faire la leçon sur leur retard, les impressionner de sa verve. Puis il fait mine de les raccompagner, et paf, d’un coup, les plaque contre le mur, verrouille la porte et les prend comme ça, debout ou à quatre pattes sur le grand tapis régulièrement remplacé. Mais il est hors de question que je participe à l’histoire collective. Le changement de situation semble lui plaire, en tout cas il ne me sort pas sa diatribe sur le respect des horaires et reste silencieux. A pas lents, je contourne son immense bureau, l’oblige à reculer son fauteuil en m’immisçant entre lui et le plateau de verre. J’ai passé des années à surveiller mon alimentation et mon activité physique, à vernir mes ongles et à polir mon corps, pour ce jour où je vais l’autoriser à me posséder. Du bout des lèvres, je lui lance :
— C’est ton jour de chance, gros veinard…
Je soulève lentement ma jupe devant ses yeux exorbités. Pas de petit coup vite fait ce matin, il va devoir prendre son temps. Il passe sa langue sur ses lèvres et lève des yeux émeraude vers moi, comme pour demander mon assentiment.
— Oui. Tu peux.
Je l’entends ricaner, mais il se jette tout de même sur ma culotte en dentelle pour l’enlever précipitamment. Un tiroir s’ouvre, mon sous-vêtement rejoint ses consœurs dans un froufrou presque inaudible. Ce sera la dernière, le clou de sa collection, j’en fais le serment. Je me hausse sur la pointe des orteils et appuie mes fesses sur le rebord du bureau. Puis, concentrée pour ne pas perdre l’équilibre, je monte lentement mes jambes et pose délicatement mes pieds sur ses accoudoirs. Je me suis entraînée un milliard de fois pour réussir cette prouesse digne des plus grands cabarets, et je suis fière de ne pas trembler. Mon unique spectateur dénoue sa cravate sans me quitter des yeux, la dépose délicatement sur un coin du bureau et, prenant soin de ne pas bouger d’un centimètre son fauteuil, se penche vers mon sexe offert. Sa langue est glacée et avide, comme je me l’imaginais. Il me dévore, impatient, insatiable. Il y met autant d’application que lorsqu’il traite les dossiers les plus complexes, ce qui m’excite au point de devoir m’isoler après chacune de nos réunions de crise. Ce type est une machine, un robot destructeur, il éradiquerait le système financier de Dark Vador lui-même. Soudain, n’y tenant plus, il s’empare de mes jambes et me force à basculer en arrière. Je ne peux pas retenir un couinement. Raté pour mon personnage de reine des glaces, qui part bouder dans son château. En toute hâte, il déboutonne sa braguette, attrape un préservatif dans sa réserve personnelle et l’enfile d’une seule main. L’autre est occupée à me masturber vigoureusement. La tête me tourne, quelque chose ne va pas.
— Attends… Enlève ta chemise.
Il s’arrête, surpris.
— Pour quoi faire ?
— Je… Je veux te voir.
Ses yeux me fixent longuement sans que je sache traduire leur éclat. Il tord légèrement la bouche, mais porte les mains à sa chemise et entreprend de la déboutonner, sans baisser le regard. Je ne peux pas éviter de ressentir une gêne légère et m’efforce de chasser cette faiblesse. Quand il ôte le tissu de ses épaules et le laisse glisser au sol, je ne peux m’empêcher d’écarquiller les yeux. Son corps est tout simplement parfait. Une machine sculptée par des machines.
— Tu voulais me voir. Ca te plaît ?
Je rattrape la reine des glaces qui est en train de fondre dans son vestibule et je me ressaisis :
— Pas trop mal pour un gratte-papier.
Il esquisse son sourire des réunions « personne ne sortira d’ici vivant », celui qui me donne toujours tellement chaud. D’ailleurs, quelqu’un a allumé le radiateur, non ? En plein mois de juillet, quelle drôle d’idée !
Avec une douceur surprenante, il se penche à nouveau sur mon cas désespéré, ou plus exactement sur mon point central, pour le lécher tout en se masturbant un peu. Je pense que je vais mourir, puis que je ne me suis jamais sentie aussi vivante, puis à nouveau que je vais décéder dans la minute. Il se dresse à nouveau devant moi, la bouche rose et humide, les cheveux tout décoiffés. Le BIG, rien que pour moi. Je ne respire plus, attendant qu’il me pénètre enfin.
— Qu’est-ce que tu fais ?
Il jubile, taquin.
— Je profite du spectacle…
— Je te signale que c’est une prestation avec participation du public.
Une lueur pâle colore ses tempes. Soudain, il m’empale sur lui et m’arrache un cri. J’attrape le rebord du bureau derrière ma tête pour ne pas glisser. Des hanches, je réponds à ses coups de butoir. Il glisse en moi comme dans du beurre tellement je suis excitée. Son charisme me fascine, il est présent dans toute la pièce et dans tout mon être. J’aspire toutes ses molécules dans mon sexe, je les range dans des petites boîtes et je ne les rendrai jamais. Il continue d’accélérer alors que ça me semblait impossible, et soudain, place sa main sur mes yeux et s’enfonce encore plus profondément en moi. Le plaisir m’envahit comme une vague tiède quand j’entends son râle victorieux. Il écroule ses muscles sur moi, humide et bouillant, reprenant son souffle dans mon oreille. J’aime le contraste entre le froid du verre dépoli dans mon dos et son corps brûlant sur mon ventre. Avant de se retirer, il écarte sa main de mon visage et, comme s’il hésitait, embrasse mes lèvres.
L’avantage d’être situé tout en haut d’une hiérarchie, c’est qu’on a droit à tout un tas de privilèges. Par exemple, on possède le plus grand bureau au dernier étage. On a accès à une salle de bain et à un vestiaire privés. On peut se taper toutes les stagiaires, et décider un jour de ne se consacrer qu’à une seule femme sans que les autres n’aient leur mot à dire. Et je suis totalement en accord avec ça, surtout quand c’est moi, la femme dont il s’agit. Nous emménageons rapidement ensemble dans un grand appartement en plein centre de Paris. Je craignais de perdre ma liberté, mais finalement, nous nous croisons plus souvent au bureau que chez nous. Je préfère emporter mes notes à l’appartement alors qu’il préfère rester travailler sur place. Je passe des heures sur chaque dossier, quelle que soit son importance, m’acharnant pour atteindre un jour son niveau à lui. Je veux qu’il m’admire autant que je l’admire. Je suis prête à tout pour atteindre cet objectif, et je sais que j’en suis capable. Qui aurait cru qu’il saurait être l’homme d’une seule femme ? Voilà déjà une étape d’accomplie. Souvent, je repense à ce matin où je suis arrivée en retard.
C’est comme ça que ça a commencé, et c’est comme ça que je construis ma vie désormais, en gravissant les marches vers cet homme inaccessible.


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Dernière modification par ketxa le jeu. 10 août, 2017 12:30 am, modifié 1 fois.
ketxa

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En travaux *Maëlle* - Chap.2

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Chapitre 1



J’enroule le fil autour de mon doigt et tire d’un coup sec, sans penser aux jointures de mes mains sèches et rougies par la fraicheur inhabituelle de cette journée de fin de printemps. Le bilan est catastrophique. Les coutures de ma robe partent en vrille, et il y a trop longtemps que je n’ai pas pris soin de moi. Tout ça va changer. J’ai juste besoin de prendre le large quelques jours.
J’entrouvre ma fenêtre pour respirer l’odeur de la campagne environnante. C’est indéniable, nous avons quitté la ville, ça pue la bouse. Le taxi ralentit et s’engage sur un petit chemin bordé d’arbres aux feuilles jeunes et fraiches. Je me sens ratatinée. Je n’avais vu la maison que sur les photos envoyées par Edouard, et même si je les ai plus que survolées, je remarque que la façade a été entièrement nettoyée et que la toiture est rénovée. Les abords sont propres sans être trop domestiqués. D’ailleurs, je vois un jardinier qui semble observer avec satisfaction une sorte de grillage de branchages. Au moment où nous passons à son niveau, il relève la tête pour regarder dans notre direction, et j’étouffe un cri dans ma main en m’éloignant vivement de la vitre.
C’est pas vrai. Il ne m’a pas fait ce coup-là !
Le chauffeur n’a pas le temps de couper le moteur que j’ouvre ma portière et attrape dans le coffre du taxi ma valise.
— Edouard !
Je vais lui dire ma façon de penser ! Mon frère apparaît sur le perron, et son grand sourire s’efface quand il voit à quel point je suis furieuse.
— Certaines marches sont branlantes. Attends, je descends, je vais te montrer sur lesquelles tu peux marcher. Il faut payer le taxi ?Tu veux me passer ta valise ?
— Non c’est bon je peux la porter moi-même. Et je l’ai payé au départ. C’est quoi ce bordel ? Qu’est-ce qu’il fait là ?
— Ton taxi ? Hé bien, il t’a amené, il me semble.
Il me regarde de côté. Je connais ce regard. Il fait ça quand il est gêné.
— Ne détourne pas le sujet. Tu sais très bien de qui je parle. Thomas. Je l’ai vu dans le jardin.
Il arrive à mon niveau et me serre furtivement dans ses bras.
— Moi aussi, je suis content de te voir. Viens, on va discuter à l’intérieur.
Je le suis en renâclant. Nous pénétrons dans un hall lugubre et nous engageons dans un couloir très sombre.
— Tu n’as pas payé tes dernières factures d’électricité ou quoi ?
— Très drôle. On a dû refaire tout le réseau électrique, et cette partie-là est la dernière.
— Quand tu dis « on », tu veux dire « Thomas », n’est-ce pas ? Pourquoi t’as ce type chez toi ? Sarah s’ennuyait ? A moins que… C’est peut-être toi qui avais besoin de ses services très… particuliers ?
Je ricane et je m’en veux immédiatement. Ce que mon frère et ma belle-sœur font de leur cul ne me regarde absolument pas. Je suis mal placée pour leur donner des leçons de bon comportement sexuel.
— Tu es ridicule.
Il ouvre une porte et j’entre à sa suite dans une grande pièce qui devait être une véranda et qui est aménagée comme un bureau.
— Je sais. Mais ça m’a perturbée de le revoir, voilà. J’imagine que tu ne savais pas qu’il faisait partie de l’équipe qui allait rénover ta maison.
— Tu veux boire quelque chose ?
— Plus tard, merci.
Edouard se sert un verre d’eau gazeuse et s’assoit dans un fauteuil profond.
— Il ne fait pas partie de l’équipe. Il est l’équipe.
Alors là, je suis clouée sur place.
— Tu veux dire que c’est lui qui a entièrement rénové le domaine ? A lui tout seul ?
— Pour être exact, j’ai signé un contrat avec une entreprise qui l’emploie parfois en tant que sous-traitant. Comme toi, j’ai été surpris de le revoir. Ca a fait remonter tellement de choses…
— Tu veux parler de l’enfer que tes potes et toi lui avez fait subir quand vous étiez des crétins d’ados, ou des options « gigolo included » qu’il vend avec ses services de bricolage chez les bourges de la région ?
— T’es vraiment qu’une gamine.
— Ah ouais ? C’est pas parce que t’as une petite vie rangée que t’es plus mûr que moi.
Il se redresse pour poser son verre sur une table basse encombrée de paperasses et soupire en ma direction :
— J’ai pas envie de me disputer avec toi.
— Ca tombe bien, moi non plus. Mais tu me cherches un peu, là…
— J’ai beaucoup discuté avec lui.
— Il est pas rancunier…
— Exactement. Et il n’est plus… gigolo. C’est marqué dans son contrat.
Je m’esclaffe.
— C’est marqué dans son contrat qu’il n’est plus gigolo ?
— Andouille, bien sûr que non. Mais l’absence de femme sur le chantier fait partie de ses exigences.
— Il est gonflé quand même…
— Il peut se le permettre. Il sait tout faire.
Il me regarde en coin, avant d’ajouter :
— Je parle de bricolage, bien sûr. Non seulement il sait tout faire, mais en plus, techniquement, il est super calé. Son carnet de rendez-vous est blindé. Tout le monde le sait, on peut lui faire confiance pour tous les travaux, même les plus compliqués. Seulement, dans le coin, des gens se souviennent de son passé, alors il veut que les choses soient bien claires. T’es sûre que tu veux pas boire quelque chose ?
Je refuse d’un geste et attend qu’il se resserve. J’ai la gorge tellement serrée que je ne pourrais rien avaler. Je me souviens bien de Thomas. Trop bien… Nous avons grandi dans le même quartier, sommes allés dans la même école, puis le même collège. Nos chemins ont bifurqué quand il est parti en apprentissage, sans doute pour éviter de se retrouver à subir encore le harcèlement de la bande de crétins menée par mon frère.
— Tout le monde le savait, qu’il se tapait les femmes de ses clients… Comment tu l’appelais ? La petite pute, il me semble.
— Arrête Maëlle, c’est bon, je sais, j’étais un gros connard à l’époque. Je n’aurai jamais remboursé ma dette envers lui. Moi et tous les autres. Des gros connards et surtout des gros jaloux. En vérité, on aurait tous voulu être à sa place. Sauf que c’était pas si rose que ça, son truc.
— Il t’a amadoué en te faisant culpabiliser puis en te faisant pleurer ?
— Pourquoi amadoué ? L’entreprise que j’avais embauchée au départ était tellement bidon que Thomas devait passer après les ouvriers et tout refaire. Au final, on a convenu qu’il valait mieux qu’il gère tout directement, ça me coûtait moins cher et c’était presque plus rapide.
— Et Sarah ? T’as pas peur que…
Ma belle-sœur est un ange qui a épousé un démon. Mais je suis bien placée pour savoir qu’il ne faut pas se fier aux apparences.
— Non, j’ai pas peur, parce que j’ai confiance en elle, et aussi, j’ai confiance en lui. Il ne veut plus de tout ça. Le pire c’est que ça n’a duré que quatre ans, finalement, et au début il n’était même majeur…
— Tu vas pas me faire gober qu’il était abusé par les vilaines séductrices blindées d’oseille ?
— Pourquoi pas ? Mais il m’a assuré que non.
— Vous avez parlé de ça ?
— Oui.
Je regarde par la fenêtre. Le ciel s’est assombri et menace de pleuvoir. Un frisson parcourt mes épaules. Je me rends compte que j’ai oublié mon châle dans le taxi, et j’ai froid.
— Bon, vous avez discuté, il t’a pardonné de lui avoir pourri la vie, tu l’embauches de façon exclusive et vous devenez de super potes. Et comment tu gères son exigence de ne pas avoir de femme sur le chantier ?
— Tu connais Sarah…
Je souris à mon frère. Mon premier sourire depuis des jours.
— D’ailleurs, elle est où ? Elle est obligé de se cacher à cause de Thomas ou quoi ?
J’ai très envie de la voir tout à coup. L’ambiance est trop chargée de testostérone. Moi qui ai toujours détesté les filles, je me sens en manque de leur compagnie. Je suis tellement en overdose des mecs que je ne peux plus les supporter bien longtemps. Même mon frère.
— Justement, il faut que je te dise quelque chose. Ne t’inquiète pas, elle va bien, très bien même. Elle n’a jamais été aussi bien, crois-moi. Je n’ai pas voulu t’en parler au téléphone, et puis j’avais peur que tu ne changes d’idée et que tu restes à Paris malgré… Malgré tes problèmes. Bref, je sais que tu vas mal le prendre, mais je vais devoir m’absenter quelques jours.
— C’est une plaisanterie !
Il prend sa voix la plus douce pour me réconforter, mais ça ne marche pas du tout. J’enrage !
— Je m’en fiche de tes remords, et de tout le reste ! Je ne resterai pas seule dans la maison avec ce type !
Je ne comprends pas moi-même ce qui me prend, mais je sens bien que l’hystérie monte le long de ma colonne vertébrale et s’empare de mon cerveau déboussolé. A partir de ce moment-là, je ne me rends plus compte de ce qu’Edouard me dit et de ce que je lui réponds. Je passe en mode automatique. En parallèle de notre conversation, je revois les dernières quarante-huit heures que je viens de vivre. Ou plus exactement, de subir. La violente dispute avec Ted, le couteau sous ma gorge, le plaisir qu’il prend à me pénétrer violemment, agenouillés par terre, sa main libre appuyant ma tête contre le sol, la lame qui s’enfonce légèrement dans ma nuque quand il jouit, la brûlure puissante qui m’empêche d’oublier sa rage. Je n’aurais plus jamais confiance en quiconque, en particulier s’il possède une verge à la place du cœur.
Edouard hausse le ton et me ramène à la réalité :
— Arrête un peu, tu veux ? Je rejoins Sarah au Mexique, l’orphelinat a préparé tous les papiers, mais l’administration ralentit beaucoup les démarches, alors je reviens dans quoi, une semaine, peut-être deux ? C’est un type bien, tu devrais réussir à survivre en sa compagnie. Tu as bien réussi à survivre à l’autre, là…
Je me comporte comme une imbécile, j’en ai conscience. Pourquoi le bonheur d’une vie paisible ne peut-il pas m’être accordé ? Je reconnais que je l’ai bien cherché, avec mon BIG… Tu parles ! Un BIG traquenard, oui ! Comme tous ces types. Tous des menteurs. Des traîtres. Des violeurs en puissance. Thomas comme tous les autres. Pourquoi aurais-je confiance en lui ? Qui peut me certifier qu’il n’abusera pas de moi, pour se venger de mon frère, finalement ? La vengeance est un plat qui se mange froid… Pas de femme sur les chantiers, ben voyons ! Le meilleur bricoleur de l’univers ? Du baratin, oui ! J’essaie de ne pas vaciller, empoigne ma valise et, avant de claquer la porte, j’assène le coup final :
— J’aurais préféré que tu me dises directement que ma présence risquait de déranger ton employé ! Excuse-moi de t’avoir demandé de l’aide, hein !
Je me sens tellement mesquine que les larmes me montent aux yeux. J’ai envie de me laver. Pour la dixième fois depuis que Ted m’a souillée. Je ne serai plus jamais propre. Est-ce une raison pour être aussi désagréable avec mon frère qui se prépare à vivre le plus beau jour de sa vie, ou pour dénigrer Thomas ?
Derrière un brouillard de larmes, je vois ce dernier qui s’avance dans le couloir obscur. Je me sens minuscule à côté de lui, pas seulement parce que ses épaules larges occupent presque tout l’espace, mais aussi parce que je n’ai pas tenu ma langue de vipère alors qu’il s’est toujours montré courtois avec moi, même lorsque mon frère lui faisait vivre les pires horreurs. J’ai honte. Quand je passe près de lui, je souffle un « Bonjour » qui s’évanouit à peine a-t-il passé mes lèvres. Il entre dans le salon et ferme la porte. Je l’entends discuter avec mon frère mais je m’éloigne rapidement, abandonne ma valise dans l’entrée et part à la recherche d’un lavabo.
Je prends le temps de laver mes mains, à défaut de m’étriller sous la douche. Par une fenêtre, je vois un fourgon qui s’éloigne du domaine. Est-ce que Thomas est parti à cause de moi ? Je suis sûre que mon frère aura su lui parler. Et je sais qu’à son retour, tout aura changé. Sa présence imprègne déjà les lieux. Le robinet que j’utilise, la penderie dans laquelle je suspendrai mes vêtements, la lumière qui me permettra de travailler le soir… C’est lui qui a tout installé ici ! J’ai le pressentiment que j’aurai peur de le croiser en permanence, peur et peut-être aussi, envie.




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Dernière modification par ketxa le mer. 23 août, 2017 11:27 am, modifié 1 fois.
zunic

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Re: En travaux *Maëlle* - Prologue et chap.1 [Romance érotique]

Message par zunic »

Alors j'aime bien c'est bien écrit :) après pour la cohérence je trouve le prologue un peu caricatural on n'entre pas pleinement dans la personnalité de Maëlle j'ai du mal à me la représenter;
sinon son comportement n'est pas très cohérent avec le viol qu'elle a subi je trouve, et son frère qui se barre alors qu'elle vient se réfugier ici c'est inadmissible! :o bref je pense qu'il faut que tu retravailles ses réactions en se mettant dans sa peau :)
ketxa

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Re: En travaux *Maëlle* - Prologue et chap.1 [Romance érotique]

Message par ketxa »

zunic a écrit :Alors j'aime bien c'est bien écrit :) après pour la cohérence je trouve le prologue un peu caricatural on n'entre pas pleinement dans la personnalité de Maëlle j'ai du mal à me la représenter;
sinon son comportement n'est pas très cohérent avec le viol qu'elle a subi je trouve, et son frère qui se barre alors qu'elle vient se réfugier ici c'est inadmissible! :o bref je pense qu'il faut que tu retravailles ses réactions en se mettant dans sa peau :)
Salut !

Merci pour ton commentaire! C'est très important pour moi d'être lue, mais encore plus de lire, même en quelques mots, les impressions des personnes qui ont lu...

Je prends note de tes remarques, si ça ne t'embête pas je peux te poser une question? Au sujet du prologue, est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu entends par "caricatural"? Il ressemble à d'autres choses que tu as déjà lu, c'est ça? Ou j'ai mal compris? :?

Dans le chapitre 1, Maëlle a certes subi une violence très intense et très grave de la part de son partenaire, mais j'essayais de lui faire dire que cette violence est l'aboutissement de plusieurs mois pendant lesquels leurs ébats ont été progressivement de plus en plus violents. La scène du prologue est volontairement un peu rude, le fonctionnement de Maëlle en terme de sexualité est basé sur le jeu de pouvoir, elle expliquera pourquoi dans le chapitre 2 (ce qui vient sans doute trop tardivement, donc je comprends que tu te poses des questions, donc : je prends note). Elle a un tempérament qui fait qu'elle ne s'effondre pas, parce qu'elle sait qu'elle a laissé s'installer cette violence, elle l'a même un peu provoquée. Cependant elle a conscience que c'est Ted qui est allé trop loin, et elle ne se sent pas coupable, ni triste, ni effondrée. Je ne voulais justement pas faire d'elle une caricature, au contraire montrer un exemple de femme qui parvient à surmonter immédiatement ce genre d'acte ignoble. Parce que ça existe aussi.

C'est pour ça, aussi, qu'elle n'a pas prévenu son frère. Edouard sait que Ted est un gros con, mais il ne sait pas qu'il est violent avec sa soeur. Elle lui a juste demandé de venir quelques jours chez lui. Et lui, il doit partir pour ses projets personnels : aller chercher un enfant dans un orphelinat, ce qui n'est pas une broutille ou une lubie.

Je n'ai sans doute pas été suffisamment explicite, donc je réfléchis à rectifier le tir.

Mercredi, je poserai le chapitre 2, à moins que tu n'aies envie de le lire sur Wattpad?

Encore merci pour ton comm' ;)

<3
zunic

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Re: En travaux *Maëlle* - Prologue et chap.1 [Romance érotique]

Message par zunic »

Merci pour les précisions je n'avais pas compris que son frère n'était pas au courant peut-être que tes remarques tu pourrais mieux les expliciter dans ton chapitre, oui pour le prologue je trouve que ça fait très bad boy sans réel profondeur après j'aime pas trop ce genre de personnage mais comme ce n'est pas un ami dans le roman ça ne gêne pas trop, je trouve que ton personnage principale est cool, ce n'est pas une vision de la sexualité qu'on trouve partout :) après pour le viol je veux bien qu'elle ait la tête sur les épaules et qu'elle ne veuille pas le dire facilement mais tu pourrais insister dessus, que ce soit bien claire dans ses pensées tu sais beaucoup de personnes font semblant devant leur entourage d'aller bien mais s'effondre en privé du coup ce serait bien que dans ses pensées on sente que ça l'afffecte tout de même histoire qu'elle ne fasse pas froide :) après pas besoin de crise de larmes quand quelqu'un a le dos tourné bien sûr :lol:
ketxa

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Re: En travaux *Maëlle* - Prologue et chap.1 [Romance érotique]

Message par ketxa »

zunic a écrit :Merci pour les précisions je n'avais pas compris que son frère n'était pas au courant peut-être que tes remarques tu pourrais mieux les expliciter dans ton chapitre, oui pour le prologue je trouve que ça fait très bad boy sans réel profondeur après j'aime pas trop ce genre de personnage mais comme ce n'est pas un ami dans le roman ça ne gêne pas trop, je trouve que ton personnage principale est cool, ce n'est pas une vision de la sexualité qu'on trouve partout :) après pour le viol je veux bien qu'elle ait la tête sur les épaules et qu'elle ne veuille pas le dire facilement mais tu pourrais insister dessus, que ce soit bien claire dans ses pensées tu sais beaucoup de personnes font semblant devant leur entourage d'aller bien mais s'effondre en privé du coup ce serait bien que dans ses pensées on sente que ça l'afffecte tout de même histoire qu'elle ne fasse pas froide :) après pas besoin de crise de larmes quand quelqu'un a le dos tourné bien sûr :lol:
Carrément, je prends note de tes remarques :geek:
On m'a fait remarquer aussi que je n'avais pas décrit la maison, c'est vrai qu'au début je ne me la représentais pas moi-même alors je me suis dit que j'écrirais cette partie plus tard, sauf que j'ai oublié :oops: !
Allez je poste le chapitre suivant. Merci pour tes commentaires !
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En travaux *Maëlle* - Chapitre 2

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Chapitre 2





J’attrape la savonnette et me frotte vigoureusement tout le corps pour la deuxième fois. Je me sens sale, autant de l’extérieur que de l’intérieur. Je n’arrive pas à m’empêcher d’en vouloir à la terre entière, ou plus exactement à cette moitié d’humanité qui n’a de cesse que d’en vouloir aux fesses de l’autre moitié. Je les déteste tous. Depuis mon père qui nous a laissé tomber jusqu’à Ted qui m’a mise plus bas que terre, en passant par Edouard et ses pertes de contrôle, je suis vernie. Et que dire de Thomas… Je le déteste. Je le déteste. Je le déteste. Je lui en veux tellement ! J’ai été déçue par les hommes très tôt, dès que j’ai compris que mon père était un sale con et qu’Edouard est devenu son valet. Mais le pire, ce fut la trahison de Thomas. A six ans, j’avais déjà fait une croix sur l’idée même de pouvoir nouer une relation de confiance avec un garçon. Je n’ai jamais envisagé de former un couple sain et aimant avec Ted, mais j’ignorais que je pouvais être davantage détruite.
J’attrape une grande serviette et m’y enveloppe. Elle est douce et sent la fleur d’oranger. Dans le grand miroir aux moulures peintes en rouge carmin, le reflet d’une femme triste me dévisage. Je me donnerais des gifles, mais ce serait abdiquer que de me punir moi-même après avoir lutté toute mon enfance contre les châtiments hargneux de mon père envers Edouard. Il trouvait toujours un prétexte pour retirer sa ceinture et donner de grands coups sur son dos, ses jambes, sa tête parfois. C’était devenu tellement habituel qu’il la dégrafait, la faisait coulisser et la levait au dessus de sa tête en moins d’une seconde. Je ne me souviens pas qu’il se soit passé une seule journée sans qu’Edouard ne commette un acte si grave qu’il faille le punir. Il refusait de manger, ou en mettait un peu à côté. Il laissait traîner un jouet, ou le cassait sans faire exprès. Il parlait trop fort, ou répondait trop doucement. Il courait dans le salon, ou n’allait pas assez vite vers sa chambre. Notre père donnait les règles du jeu à posteriori, et Edouard recevait des coups pour n’avoir pas su deviner ce qu’il était censé faire. Il n’avait que deux ans de plus que moi, mais quand il a vu que la colère paternelle commençait à se tourner également vers moi, il s’est mis à amplifier ses bêtises pour ramasser à ma place, comme il disait. Si je tachais ma robe, il se roulait dans l’herbe et revenait dépenaillé à la maison. Si je faisais trop de bruit en jouant, il se mettait soudain à chanter à tue-tête. Aussi loin que je me souvienne, j’ai contrôlé mes gestes et mes paroles pour qu’Edouard n’ait pas à se mettre davantage en péril.
A l’école, il laissait exploser ses pulsions violentes. Toute la colère qu’il ressentait envers notre père rejaillissait en flot continu dans la cour de récréation. Sa fourberie le rendait invisible aux yeux des enseignants, et lui valaient l’admiration des garçons de son âge, qui se rangeaient dans son camps plutôt que d’avoir à subir ses exactions. Tous, sauf Thomas. Lui, il n’avait pas d’amis, et semblait s’en ficher complètement. Il jouait dans son coin, toujours tout seul. Il m’intriguait. Parfois, quand je levais la tête, je le voyais qui me regardait. Il détournait les yeux, rouge comme une tomate. J’aurais voulu lui proposer de jouer avec moi, mais il m’intimidait. Alors j’ai demandé à Edouard s’il ne voulait pas prendre ce garçon dans son équipe, pour qu’il ne soit plus tout seul, et pour me rapprocher de lui. Ca lui a mis la puce à l’oreille, il m’a posé des questions. Pour la première fois, mon frère a levé la main sur moi. Il m’a tiré les cheveux jusqu’à ce que j’avoue quelque chose dont je n’avais même pas conscience : j’étais amoureuse. Le lendemain, le calvaire de Thomas a commencé, et s’est poursuivi pendant des années. Au début, je m’en voulais tellement que j’affrontais la colère d’Edouard. J’allais voir Thomas, je lui donnais une partie de mon goûter, et de plus en plus, je le laissais me regarder. Personne ne m’avait jamais regardée comme lui. J’avais l’impression d’être une fleur précieuse, rare et fragile. Je rendais mon frère furieux, et je n’ai compris que plus tard qu’il avait simplement peur de perdre la seule personne qui l’aimait vraiment. Je craignais qu’il ne me protège plus de mon père, mais il a continué de « ramasser » à ma place. Par contre, quand je n’étais pas dans le coin, il se chargeait de faire payer à Thomas l’outrecuidance de lui voler l’affection de sa sœur. Si bien qu’un jour, au lieu de se révolter contre Edouard, Thomas m’a rejetée.
Ce jour-là, j’ai ressenti une déchirure dans mon cœur. J’en ai conclu que je ne méritais pas qu’on se batte pour moi, que j’avais rêvé les regards de Thomas, que j’avais mal interprété ce que je considérais comme de l’adoration. J’étais une statue de verre tombée de son piédestal. Tant bien que mal, j’ai ramassé mes morceaux et entrepris de les recoller, un par un, patiemment. Puis j’ai passé un coup de balai sur les éclats restant, j’ai soulevé un coin de tapis et j’ai tout glissé dessous. De l’extérieur, on ne voit pas le rafistolage. Du moins, je le croyais. Ted a dû s’en apercevoir, lui. Je l’ai trop laissé s’approcher. J’ai fini par m’ouvrir à lui, et il m’a saccagée. Pièce par pièce, sans que je m’en rende compte, il m’a déchirée, par petits bouts. Jusqu’à cette journée où il ne restait plus grand-chose à avilir, et où il a pourtant réussi à me détruire entièrement.
Je ferme les yeux sur la vision de mon corps recroquevillé sur le sol de la chambre, à mes chevilles et mes poignets menottés à une atroce barre d’écartement, et Ted qui m’insulte, me frappe, et me baise jusqu’à n’en plus pouvoir. J’acceptais de moins en moins ses jeux pervers, je sentais que je perdais le contrôle, mais je n’arrivais pas à y mettre un terme. D’ailleurs, si je me suis aujourd’hui réfugiée chez mon frère, c’est bien parce que je n’avais plus d’autre solution que de m’enfuir. Il aurait fini par me tuer. J’ai eu peur qu’il le fasse, d’ailleurs, l’autre jour.
Je dois absolument reprendre mes esprits. J’ai survécu à Thomas, à la honte et au chagrin causé par son rejet. J’ai survécu à mon père, qui n’a pas attendu bien longtemps après le départ d’Edouard à Paris pour trouver un nouvel exutoire à ses colères. J’ai survécu à tous ceux qui, après eux, ont tenté de me rendre dépendante, accablée, coupable. Je survivrai à Ted.
Assise sur un magnifique siège en cuir et bois, je brosse mes cheveux jusqu’à calmer le tremblement de mes mains. Il est tard, et je n’ai rien mangé de la journée. J’enfile une tenue dans laquelle je me sens à l’aise et je pars à la recherche de la cuisine. Mon frère m’a installée dans une des nombreuses chambres de l’étage, admirablement restaurée et meublée avec goût. Je reconnais bien là le talent de Sarah. Ma belle-sœur est un ange, et une décoratrice d’intérieur hors pair. Elle a su adoucir le cœur d’Edouard et, en lui permettant de se reconstruire, elle l’a conduit sur un chemin de paix et de bienveillance. Il est aujourd’hui à l’opposé de ce qu’il était autrefois, quand il était sévèrement corrigé tous les jours par un père abusivement violent. J’ai eu du mal à accepter que ce soit si facile pour lui, après tout le mal qu’il avait fait. Mais il essaie de se racheter, de toutes ses forces, jusqu’à l’épuisement. La fondation qu’il a créée vient en aide aux enfants qui sont dans la même situation que nous lorsque nous étions trop petits pour nous rendre compte que nous étions en danger. Le domaine accueillera des séminaires d’entreprises et des cérémonies de particuliers richissimes qui rempliront généreusement les caisses de la fondation, comme c’est déjà le cas de la stupéfiante salle de spectacle du théâtre abandonné en plein cœur de Paris, et du jardin secret perdu au milieu des vignobles du bordelais, où l’élite se réunit loin de leurs misérables semblables et s’offrent le luxe de déculpabiliser en ayant l’impression qu’ils agissent pour une bonne cause.
Les murs sont enduits d’un tadelakt rouille, et parsemés de courtes citations philosophiques positives et motivantes. Rien n’indique cependant la cuisine, et je dois ouvrir une multitude de portes avant de la trouver enfin. Je n’ai rien apporté avec moi, je pensais qu’Edouard m’emmènerait dîner à l’extérieur. Je suis inquiète de croiser à nouveau Thomas, et pire encore, de devoir compter sur lui pour m’offrir de quoi me nourrir. Une boule grossit dans ma gorge quand je pense à lui. Je commence à ouvrir tous les placards, trouve un bout de pain dur dans une huche, puis enfin un sachet de pâtes qu’il me semble acceptable d’emprunter, et farfouille encore pour dégoter une casserole. Satanée cuisine, à quoi ça sert d’avoir une pièce aussi immense ! Je déteste préparer à manger, j’ai l’impression de régresser, quand j’étais la bonniche de mon père… Finalement, j’ouvre le bon placard, il déborde de faitouts, poêles et casseroles, et de couvercles de toutes les tailles. J’attrape ce dont j’ai besoin et l’exhibe, victorieuse :
— Aha, je t’ai débusqué, vil ustensile !
Soudain, je reste pétrifiée. Je ne l’ai pas entendu entrer. Thomas se tient là, devant moi, de l’autre côté de l’ilot central, l’air aussi surpris que moi de le trouver là. J’ai la désagréable impression de devenir écarlate, et surtout, je me sens complètement imbécile avec ma casserole en l’air, alors je me tourne vers l’évier pour remplir d’eau le récipient, puis je le pose sur la plaque à induction et je me rends compte, soudain, que je ne sais pas me servir de ce truc.
— Tu veux que je te montre comment on fait ?
Il m’énerve. Je le déteste. Je ne dois pas me laisser abuser par sa fausse gentillesse. S’il se laissait faire par mon frère, c’était par lâcheté, pas par gentillesse. La preuve, il n’a pas hésité à être méchant avec moi.
— Non ça ira merci, je vais me débrouiller.
Je n’en reviens pas d’être aussi puérile. Voilà que je viens de le traiter de méchant. Dans ma tête, heureusement. Il ne manquerait plus que je le lui dise ! « T’es pas gentil, t’es qu’un méchant ! » Je souris en m’imaginant, avec mes couettes blondes, lui lancer une pelletée de sable dans les yeux, puis je m’ébroue mentalement. Où sont les boutons qui allument cet instrument du démon ? Sous la surface lisse, je devine des carrés qui ne portent aucune indication claire. J’appuie sur l’un, sur l’autre, la plaque émet quelques bips, semble s’allumer, puis s’éteint. Ca m’énerve. Et lui qui reste planté là à me regarder ! Avec toute la fierté dont je suis capable, je coupe mon bout de pain dur et le tartine d’un peu de beurre, avant de partir déguster mon chef d’œuvre dans une autre pièce. Ca commence très mal.





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zunic

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par zunic »

Coucou j'ai bien aimé la description de la maison, tu laisses place à l imagination, et on sent bien l atmosphère qui s'en dégage :)
Par contre ce serait bien de décrire tes personnages et aussi evites les: "ça" ou les points d exclamation j'ai trouvé qu'à la fin cela rendait le personnage principale un peu enfantine, même si je me doute que c'était un peu le but il faut que tu fasses gaffe à ne pas trop l exagerer pour ne pas discréditer ton texte :) une dernière remarque : quand elle dit qu'elle a l impression d'être la bonniche de son père le terme est un peu familier et ce serait crédible si elle faisait a manger à quelqu'un :)
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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par ketxa »

zunic a écrit :Coucou j'ai bien aimé la description de la maison, tu laisses place à l imagination, et on sent bien l atmosphère qui s'en dégage :)
Par contre ce serait bien de décrire tes personnages et aussi evites les: "ça" ou les points d exclamation j'ai trouvé qu'à la fin cela rendait le personnage principale un peu enfantine, même si je me doute que c'était un peu le but il faut que tu fasses gaffe à ne pas trop l exagerer pour ne pas discréditer ton texte :) une dernière remarque : quand elle dit qu'elle a l impression d'être la bonniche de son père le terme est un peu familier et ce serait crédible si elle faisait a manger à quelqu'un :)
Salut,
T'es super rapide dis-donc ! :D
Tu as raison, je décris vraiment peu mes personnages :? Je ne comprends pas pourquoi il faut que j'évite les "ça" (je vais regarder, j'utilise sans doute trop ce mot) mais surtout les points d'exclamation... Est-ce que ça ne montre pas qu'elle est nerveuse? Je veux dire par là, l'inverse d'une personne calme, posée, qui réfléchirait tranquillement...
Je comprends pour "bonniche", c'est maladroit de le dire comme ça.
Merci pour ton commentaire ! <3
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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par zunic »

Oui je sais je suis speedy Gonzales :)
Pour les points d'exclamations je suis peut-être un peu subjective :) mais tu pourrais trouver un autre moyen de montrer sa nervosité à moins que le dit personnage soit un adolescent :)
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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par ketxa »

zunic a écrit :Oui je sais je suis speedy Gonzales :)
Pour les points d'exclamations je suis peut-être un peu subjective :) mais tu pourrais trouver un autre moyen de montrer sa nervosité à moins que le dit personnage soit un adolescent :)
Ha ha ha !
Je connais ce genre de subjectivité, moi c'est avec le verbe faire :twisted: !
J'essaierai de surveiller mes points d'exclamation alors ;) car non elle n'est pas adolescente - jamais je n'oserais écrire ce genre d'histoire si mes personnages étaient si jeunes ! :oops:
(tu as vu j'utilise moi-même beaucoup les points d'exclamation, pourtant je ne suis ni nerveuse, ni ado... :mrgreen: )
DanielPagés

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par DanielPagés »

Je lis, je lis...
Bisous depuis un salon du livre désert, en Bretagne !
zunic

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par zunic »

Coucou, avant j'écrivais avec beaucoup de point d'exclamation et j'ai dû corriger tout mon manuscrit pour les supprimer ça vient peut-être de là mon allergie :lol:
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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 2 [Romance érotique]

Message par ketxa »

DanielPagés a écrit :Je lis, je lis...
Bisous depuis un salon du livre désert, en Bretagne !
Merci Daniel ! <3
Décidément je ne sais pas où sont les gens, j'étais ce soir au cinéma, nous étions une dizaine à peine dans la salle, pour un film pourtant grand public (Baby Driver, film avec des gangsters et courses poursuites, mais pas seulement... ;) ) Au moins tu es en Bretagne, les paysages sont magnifiques et les gens adorables !
zunic a écrit :Coucou, avant j'écrivais avec beaucoup de point d'exclamation et j'ai dû corriger tout mon manuscrit pour les supprimer ça vient peut-être de là mon allergie :lol:
Ah peut-être... J'imagine que maintenant tu y réfléchis à deux fois avant d'en placer un :D
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En travaux *Maëlle* - Chapitre 3 [Romance érotique]

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Chapitre 3





Je cours dans une forêt au feuillage dense. A peine si quelques rayons de soleil parviennent à passer la frondaison. On pourrait penser que c’est la nuit, mais non, je sais bien que jamais je n’irais courir en nocturne. Les troncs forment un décor harmonieux, comme s’ils avaient été plantés chacun précisément au bon endroit. Soudain, j’entends un bruit. Comme un claquement. Je reconnais ce bruit, mais je n’arrive pas à me souvenir. Et je ne vois rien autour de moi, juste les arbres qui forment un cercle trop serré. Mon cœur se met à battre tellement vite que je l’entends cogner contre les troncs. Boum, boum, boum… Je dois partir. Quelque chose approche, j’en suis certaine à présent. Je cours à perdre haleine, sans me retourner, sans connaître mon chemin non plus ! Je cours tellement que je ne sais plus si je cours vraiment, j’ai plutôt l’impression de glisser, ou même de tomber dans un trou sombre et froid. Je me recroqueville et je pleure. Quand je me calme, je relève la tête et je tends la main devant moi. Du bout des doigts, je touche le toboggan en plastique vert. Il a gardé sa couleur, contrairement à la surface du dessus qui a délavé au soleil. J’ai l’impression de m’être déjà fait cette remarque, il y longtemps… Je me penche et regarde vers la cour de récréation. J’entends les cris des enfants, et pourtant je ne vois personne. Ils doivent être à côté, pas loin, je voudrais les rejoindre mais je n’arrive plus à bouger. Mes jambes ne répondent plus. Mes bras non plus, qui pendent sur les côtés. Je constate soudain que j’ai oublié de m’habiller ce matin. Je suis nue, et je voudrais me couvrir de mes mains, mais je n’arrive pas à les soulever. Je commence à paniquer. Soudain, quelqu’un se tient debout devant moi se penche et me soulève dans ses bras. Le soleil m’éblouit, je ne vois pas son visage jusqu’à ce qu’il me dépose sur un grand lit blanc. Il est nu lui aussi. Il prend mes mains entre les siennes, les porte à sa bouche et les réveille d’un baiser. Puis il embrasse mes bras, mes épaules, mes seins, mon ventre. Il parcourt mon corps de ses lèvres tièdes, patiemment et rapidement à la fois. J’ai la sensation qu’on passe une plume électrique sur mon épiderme frissonnant. Quand il rejoint mon centre avide, j’ai déjà envie de jouir. Je voudrais m’ouvrir plus entièrement que je ne suis en train de le faire. Je ne sais plus s’il me lèche ou s’il me pénètre, à moins que ce soit les deux à la fois. Je le sens partout en même temps. Il glisse contre moi et en moi au rythme de mon cœur affolé, boum, boum, boum. Le sang afflue dans mes veines, cogne dans mes tympans, bouillonne dans mon sexe gonflé. Je suis sur le point d’exploser et ouvre les yeux. Je gémis, perturbée et frustrée. Le soleil perce à peine au travers des persiennes et je suis seule dans mon grand lit à baldaquin. J’hésite à convoquer l’image du corps sculpté de Thomas au dessus du mien, au rythme de son bassin qui me fait grimper aux rideaux, à la fermeté de son cul dans mes mains, à son regard attentif et émerveillé. Je ferme les yeux, rabats la couverture sur mon visage et glisse la main dans mon pantalon de pyjama. Il ne me faut pas plus de quelques secondes pour parvenir à mes fins. Je jouis en pleurant, parce que je sais bien que ce rêve n’est qu’une chimère à laquelle je n’ai pas le droit de m’abandonner. Il y a bien longtemps que Thomas m’a fait comprendre qu’il était trop douloureux de croire en ses rêves.
Je me lève, ouvre grand les volets et me douche rapidement. Depuis que je suis arrivée, je suis réveillée tous les matins par les coups de marteau et les grincements de perceuse. Le premier jour, je m’en suis plaint auprès de Thomas, qui a grogné qu’il s’efforçait de ne pas faire trop de bruit mais qu’au bout d’un moment, il fallait bien qu’il travaille. J’ai regardé l’heure : il était dix heures. Je me suis drapée dans ma dignité et je suis partie courir. Quand je suis revenue, je suis allée le voir et je lui ai demandé de bien vouloir commencer à faire beaucoup de bruit autour de huit heures, parce que ça m’obligerait à me lever. J’ai du boulot moi aussi. Je ne lui ai pas dit que je préférais travailler la nuit, et je me suis efforcée d’adapter mon horloge biologique. Il me l’a bien rendu. Tous les matins, je trouve un petit-déjeuner prêt dans la cuisine. Pour les autres repas, grâce à Edouard qui me connaît bien, j’ai réussi à me débrouiller toute seule. On ouvre l’opercule, hop dans le micro ondes, deux minutes et c’est prêt. Enfin, ça, c’était les trois premiers jours, parce que depuis avant-hier où j’ai voulu manger plus tôt et où je me suis retrouvée avec Thomas dans la cuisine, j’ai tellement louché vers son plat de lasagnes maison qu’il a eu pitié de moi et que j’ai eu le droit à une belle part savoureuse, prélude à d’autres petits plats dont il a le secret. S’il bricole aussi bien qu’il cuisine, je comprends pourquoi mon frère a fait appel à lui…
Je connecte mon ordinateur au wifi de la maison pour vérifier que le dossier que j’ai partagé hier sur l’espace du bureau a bien été agrégé par mes collègues, je réponds à quelques messages urgents, puis je me déconnecte et descend dans la cuisine. J’ai coupé toute relation avec le travail hormis les trois affaires que je dois boucler pendant mon séjour ici. Les deux premières sont assez simples et ne nécessitent pas ma présence, mais la dernière sera ardue et je devrai la défendre en comité de pilotage. Je redoute le moment de retourner au siège et de revoir Ted.
La maison est silencieuse à présent. La main sur la poignée de la cuisine, j’essaie de repérer Thomas. D’habitude, j’entends le bruit d’une cisaille indiquant qu’il se trouve près des haies, ou le cliquetis d’un outil qu’on pose sur un carrelage s’il est dans une salle de bain. Mais là, rien de particulier, sauf peut-être la bouilloire qui siffle, de l’autre côté de la porte… Je l’ouvre et ne peux m’empêcher de sourire. Il me tourne le dos, les cheveux en bataille remplis de feuilles et de brins d’herbe. Je crois qu’il est en train de tartiner des tranches de pain frais, celui qu’il part chercher tous les matins depuis qu’il a compris que j’aimais ça.
— Salut !
Il se retourne, le couteau à beurre minuscule dans sa grande main. Je m’efforce de ne pas trop sourire et de ne pas le reluquer. C’est dur pour moi, il est tout simplement colossal, et j’ai encore des frissons de ce rêve où il me fait jouir comme jamais. Je secoue mon cerveau et appelle mes souvenirs à l’aide. Celui où il me rejette, celui où j’apprends qu’il se tape les femmes des clients chez qui il travaille, celui où l’information m’est confirmée par la mère d’une de mes amies qui avait la mauvaise habitude de trop parler quand elle picolait. Je ne veux pas qu’il me désire, je veux encore moins qu’il croie que je puisse le désirer, moi. Je ne suis pas comme ces femmes indignes et dégoutantes. Et je lui en veux tellement… Il peut bien sourire et tartiner, je ne baisse la garde que jusqu’à un certain point…
— Salut, bien dormi ?
— J’ai bien dormi, oui, et j’ai encore fait un beau rêve !
Non mais pourquoi je sors ça, moi ?
— Ah… Euh, moi aussi, en fait, et c’était… Tu veux de la confiture aussi ?
J’avise la grande assiette remplie de tartines et écarquille les yeux :
— Je ne crois pas que je vais réussir à manger tout ça, tu sais !
Il s’amuse :
— Je m’en doute. Ce matin, je déjeune avec toi, si ça ne te dérange pas bien sûr.
Et après, tu m’emportes sur mon lit et tu me baises jusqu’au soir, si ça te dérange pas bien sûr.
Je retiens mon souffle et détourne le regard.
— Ca me va, surtout si tu fais mes tartines !
Il se raidit légèrement, le regard dans le vide, puis étale un peu de confiture de prune sur une dernière tranche de pain et la pose avec les autres.
— Ce matin, tu vas goûter à mon bissap.
Devant mon air interloqué, il précise :
— C’est une infusion de fleurs d’hibiscus. J’ajoute des fruits séchés. Fais pas cette tête, je suis sûr que tu vas aimer.
Quand il verse l’eau dans la théière, je reconnais l’odeur fruitée et acidulée que je sens tous les matins. Je profite qu’il soit concentré sur son geste pour observer le dessin des muscles de ses avant-bras. Ce type est un fantasme ambulant. Il pourrait se taper n’importe qui.
D’ailleurs, il ne s’est pas gêné.
Oui, mais il ne veut plus.
Je chasse ange et démon de mon épaule, et je m’installe à table.
— Les placards sont presque vides, j’irais bien à l’épicerie faire le plein.
Il a de ces drôles d’idées, tout de même !
— Pourquoi on ne passe pas commande, comme Edouard ? On vit au vingt-et-unième siècle, t’as oublié ?
— Le siècle des plats préparés, c’est vrai, désolé, ma mémoire flanche… Bon, hé bien je te laisse choisir tes plats, et moi je vais au village me chercher de la vraie nourriture.
Je manque m’étouffer et tousse sans pouvoir m’arrêter.
— C’est bon, tu as gagné, va pour le village… Mais je réserve un taxi.
— Je suis sûre que les taxis parisiens vont se faire un plaisir de venir jusqu’ici pour que madame puisse faire ses petites courses…
— Il n’y a pas de taxi dans le coin ? Mais qu’est-ce que c’est que ce coin paumé, sérieux ! Comment on va faire ?
— Soit on loue un âne au voisin, soit on prend mon fourgon.
Je m’étrangle à nouveau.
— Va pour l’âne.
Il se marre :
— Chiche !
— Non, bien sûr que non ! Mais ton… fourgon ? Il est propre au moins ? Je vais pouvoir m’asseoir sans devoir jeter mes fringues après ?
Il me répond d’un sourire, et l’espace d’un instant, je redeviens une petite fille à couettes et lui le gentil garçon qui me regarde comme s’il avait trouvé la huitième merveille du monde. Nous dévorons les tartines et savourons le bissap, puis il repart planter des clous ou scier des planches, que sais-je, pendant que je débarrasse la cuisine avant de m’enfermer quelques heures dans le bureau pour travailler. Je sens un tiraillement sourd dans mon ventre qui m’empêche de me concentrer, et je manque plusieurs fois de devoir recommencer ce que je suis en train de faire.




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Dernière modification par ketxa le mer. 30 août, 2017 11:18 pm, modifié 1 fois.
zunic

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 3 [Romance érotique]

Message par zunic »

Desolee je suis un peu en retard XD j'ai noté une forte tendance aux verbes comme voir ou entendre, ça alourdit un peu le texte :) Après regarde ton dialogue certaines phrases sont confuses on ne sait pas s'ils parlent ou si ce sont des pensées. Sinon le rêve est bien mais les paragraphes ne sont pas assez aérés :)
C'est tout ce que j'ai noté il me semble :)
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En travaux *Maëlle* - Chapitre 4 [Romance érotique]

Message par ketxa »

zunic a écrit :Desolee je suis un peu en retard XD j'ai noté une forte tendance aux verbes comme voir ou entendre, ça alourdit un peu le texte :) Après regarde ton dialogue certaines phrases sont confuses on ne sait pas s'ils parlent ou si ce sont des pensées. Sinon le rêve est bien mais les paragraphes ne sont pas assez aérés :)
C'est tout ce que j'ai noté il me semble :)
Salut Zunic,
Merci pour tes commentaires pertinents ! Je vais regarder cette histoire de voir et entendre, décidément je commets des erreurs grossières... :? Et les dialogues, c'est vraiment un problème pour moi, j'ai du mal avec les incises (dit-il, tout ça)...
C'est pas confortable pour lire, les paragraphes, c'est ce que tu veux dire? C'est aussi pour ça que je propose de lire sur Wattpad, c'est plus confortable (quitte à revenir ici pour me donner ton avis si tu le souhaites...)
Merci encore, en tout cas, pour ta lecture à bientôt (je vais continuer à te lire, oh la la la rentrée arrive et je manque tellement de temps, j'ai plein de choses à préparer !)
Bonne lecture !






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Chapitre 4





— Si tu laisses ton doigt appuyé là, ça augmente la température.
— Et ici ?
— C’est pour tout verrouiller, je ne m’en sers jamais.
C’est mon premier cours de cuisine. Ce soir, c’est pâtes carbonara, et je ne m’en sors pas trop mal. Bon d’accord on ne fait que commencer, mais je suis sûre que ça va être fabuleux. Surtout, je reste absolument maitresse de mes pulsions. Il peut bien frôler mon corps à chaque mouvement, je reste de marbre. Même la chaleur qui émane de son torse ne me procure aucun effet. C’est comme la courbe parfaite de sa mâchoire, légèrement tendue quand il est concentré : n’importe quelle autre femme aurait craqué, pas moi ! Depuis notre virée d’approvisionnement, sans en avoir discuté, nous avons établi une sorte de frontière amicale. Je vois bien qu’il garde ses distances avec moi, et je prends soin de ne lui envoyer aucun signal sexuel. Pas de crinière soyeuse, pas de maquillage, pas de décolleté ravageur. De toute façon, on ne fait que se croiser, il passe sa vie avec ses plans et ses outils et moi avec mes dossiers et mon ordi. Mais il faut bien avouer que les soirées ont un peu tendance à se prolonger depuis trois jours…
— Mets plus d’eau, il faut que tes pâtes aient de la place.
Je m’applique. C’est mon côté perfectionniste. Ou bien j’ai envie de l’épater. Je vois bien dans le reflet de la casserole qu’il sourit de me voir si concentrée pour préparer un repas qui lui semble très simple. Parfois, un regard lui échappe. Je fais alors un bond vingt ans en arrière. J’ai des couettes, une jolie robe que j’ai choisie spécialement pour lui, pour qu’il m’admire pendant la récréation. Ce sont des instants fugaces, qui m’illuminent quelques secondes, juste le temps que je prenne conscience de qui je suis, de où je me trouve, des histoires qui nous ont menées là. La chute est rude. Depuis toutes ces années, je lui en veux terriblement. J’ai construit une grande tour sur laquelle je me suis perchée pour voir les hommes. Leurs manœuvres de séduction, leurs tentatives de possession, leur rejet quand ils n’obtiennent pas ce qu’ils veulent, ou quand ils se lassent, comme Thomas.
— En attendant, râpe le parmesan. Fais gaffe à tes doigts !
Je m’active, ruminant dans ma tête qu’il pourrait les utiliser, lui, ses doigts. Pour m’aider, bien sûr ! Je me tourne pour qu’il ne voie pas la rougeur sur mes joues. Je râpe, je touille, j’essore, je verse, je laisse au chaud pendant que je nettoie rapidement le plan de travail et les ustensiles, et nous dégustons des carbos dignes des plus grands restaurants parisiens. Pour digérer, nous allons voir les travaux du jour. Les marches de l’entrée sont comme neuves, solidement ancrées dans le sol. Le jardin, foisonnant de vie en journée, est si calme ce soir que nous nous taisons nous aussi. Je me sens tellement bien que les larmes finissent par monter. Je ne veux pas qu’il me voie :
— Je vais rentrer, j’ai du travail.
Ce n’est qu’arrivée dans ma chambre que je laisse échapper un sanglot, la tête enfouie dans un gros oreiller. Me voilà bien, à pleurnicher comme une fillette ! J’essuie mes yeux du revers de la main et attrape mon ordinateur : il me reste un document à envoyer impérativement ce soir pour que mon assistante puisse le transmettre à Monsieur Connard demain matin. Je rédige le compte-rendu quand tout à coup, pfuit, l’écran s’éteint. Je regarde l’heure sur mon téléphone : il est bientôt minuit ! Bien sûr, ça ne change rien, Natacha ne verra Ted que demain. A moins que… Comme toutes les autres, elle fantasme grave sur lui… Elle est peut-être dans son lit ? Dans mon lit. A ma place. Grand bien lui fasse, la pauvre ! Je suis au bord de l’épuisement. J’avise la prise, à l’autre bout de la chambre. Il faudrait que je sorte de sous les couvertures… Tant pis. Depuis mon téléphone, je récupère le document sur mon espace de stockage en ligne, je l’envoie sur notre réseau interne, et le temps de dire « je devrais éteindre ce portable », je m’endors d’un sommeil lourd et agité.
Je ne m’étonne plus quand je recommence le même rêve toutes les nuits: la forêt, le toboggan, Thomas qui me porte dans ses bras jusqu’au lit blanc et qui me caresse très lentement. Ce matin encore, il me lèche les pointes des seins, excite ma peau fiévreuse, embrasse mon cou, mon ventre, mes cuisses. Il ondule entre mes jambes, léger comme une plume, brûlant comme un tison. J’agrippe les draps froissés par nos ébats nocturnes et je m’agite sous lui pour mieux le sentir partout. La nuit, mes défenses tombent, j’accepte tout ce qu’il me donne. Je voudrais qu’il me regarde et que ses yeux ne quittent plus les miens. D’une main, je relève son menton. Le lien de nos regards est si fort que je vacille dans ma tête. Sur sa pupille, des lumières dansent. J’ouvre grand toutes mes portes pour laisser entrer le flot, pour m’en nourrir, pour y puiser des forces. Il accélère le rythme, là, en bas, et je suis sur le point de m’embraser. Son visage ancré au mien, il attrape mes mains et les remonte au-dessus de nos têtes. Soudain, son iris s’agrandit. Ses yeux deviennent sombres. La brûlure entre mes jambes devient glaciale, je suis comme figée. J’entends un ricanement que je reconnais trop bien. Ted se redresse, lâche mes mains, et pourtant je ne peux toujours pas bouger. Il me soulève comme si j’étais un bloc de pierre et me place contre un mur. Puis il se baisse pour attraper quelque chose, et ce n’est que quand il approche ses mains des miennes que je me rends compte qu’il tient des clous et un marteau, et qu’il a l’intention de m’accrocher là, sur son mur.
— Tu es MON trophée, rugit-il. Comment as-tu pu croire que tu pourrais m’échapper ?
Je pousse un hurlement d’horreur qui me réveille enfin, trempée et terrifiée. Bon sang qu’est-ce que c’est que ce cauchemar ? Je déteste ça. Non seulement je vais me sentir obligée de l’analyser pour en découvrir les messages occultes, mais en plus il me prive de ma séance de masturbation quotidienne ! Face au miroir qui révèle mes traits fatiguée, je grince entre mes dents :
— Ca t’apprendra à fantasmer sur le gigolo !
Bien sûr, je regrette immédiatement mes paroles. A quoi me sert-il d’accabler Thomas ? Je repense à notre promenade la veille, à ces soirées douces que nous avons passées, lui et moi, sans sous-entendus, sans jeux malsains. Ce cauchemar est-il un avertissement ? Est-ce que je ne me laisse pas trop aller, avec lui ? Je ne sais plus si je dois rester vigilante ou au contraire lui faire confiance.
Je suis sortie de ma torpeur par le bip annonçant un message. Zut, j’ai oublié de déconnecter mon téléphone, je prends pourtant bien soin de l’utiliser le moins possible, de passer par mon ordi. Je n’ai aucune confiance en la technologie, je sais aussi bien utiliser ces machins que cuisiner, c’est dire. C’est un message de Natacha, qui me confirme qu’elle a bien reçu mon envoi, qu’elle l’a ajouté au reste et qu’elle le portera à Monsieur B-G. dès qu’il sera arrivé à l’agence. Je regarde l’heure : il est huit heures passé. « Vous êtes en retard, il va falloir vous rattraper… » Je frissonne et subis une attaque nauséeuse. Quel connard.
Malgré l’énorme dîner d’hier, mon ventre gargouille. J’hésite entre me doucher maintenant pour chasser les restes de ma mauvaise nuit et descendre déjeuner avec Thomas. Pile ou face ? Mieux ou pire ? Blanc ou noir ? La vie est faite de choix. C’est l’estomac qui l’emporte. J’enfile n’importe quoi, attache mes cheveux, passe de l’eau et du savon sur mon visage, et je dévale les escaliers en pierre brute. Cette maison est magnifique, pourtant je ne parviens pas à m’y sentir bien. Je suis sûre que le retour de Sarah et de mon frère, sans doute avec l’enfant qu’ils sont partis chercher, réchauffera les murs et mon cœur.
Au moment de pousser la porte, je prends conscience que les seuls moments où je suis apaisée, ici, sont ceux passés avec Thomas. J’apprécie sa simplicité, son humeur gaie en permanence, son intelligence pour me remettre en douceur à ma place quand j’exagère. J’entre dans la cuisine avec un grand sourire, qui s’efface dès que je le vois manger son petit déjeuner, la mine sombre, le dos voûté.
— Euh, bonjour ?
Il grommelle un mot qui doit signifier la même chose, mais avec un regard fuyant qui dit le contraire. Il y a quelque chose qui cloche. Pas d’odeur de pain frais. Pas de petite fleur du jardin dans le vase. Il a dû mal dormir. Oh, non, il a mal digéré mes pâtes ! Je m’installe en face de lui :
— Franchement, t’exagères, elles étaient pas si mauvaises que ça ! Moi, en tout cas, je les ai adorées… Tu es jaloux de mon talent, c’est tout !
Il me regarde d’un drôle d’air, avant de plonger le nez dans sa tasse. Il ne me demande même pas de quoi je parle. Ne souris pas. Ne se moque même pas de moi ! Son changement d’attitude, son absence de réaction… Merde, il me refait le coup du rejet ou quoi ? D’accord, j’ai compris. C’est un psychopathe. J’hésite entre lui crier dessus et fondre en larmes, alors je reste là, la main sur le couteau à beurre, frappée de stupéfaction. Je dois me ressaisir. Ces derniers jours, j’ai été trop proche de lui. Non mais il me prend pour une idiote ? Je me redresse, tartine quelques biscottes, snobe son putain de bissap, et lance un « au revoir » sec avant de remonter dans ma chambre avec mes victuailles auxquelles je ne parviendrai pas à toucher.
Les heures passent. Par la fenêtre, je le vois aller et venir dans le jardin, rouspétant contre tout ce qui est à sa portée. Les oiseaux pépient trop fort, les branches ne sont pas à leur place, la terre ne se tasse pas assez vite dans les pots. En vrai, je n’entends pas ce qu’il grommelle dans sa courte barbe, je ne peux qu’imaginer ses combats dérisoires. Au moment où je sens que je m’attendris, il s’appuie sur le rebord d’un puits de pierre et passe ses mains sur son visage. Même si je suis loin, je distingue ses traits, tirés, désemparés. Il baisse la tête, les poings serrés sur ses cuisses, le visage crispé, comme s’il allait se mettre à pleurer. Puis soudain, il respire un grand coup et tourne la tête vers ma fenêtre. Son regard est sombre, ses sourcils sans doute froncés, sa mâchoire résolue. Je recule, choquée, même si je sais que les vitres ont subi un traitement qui accentue leur reflet le jour et qu’il ne peut certainement pas me voir. Je m’assieds sur mon lit, et immédiatement, mon ventre gronde. La faim me tenaille depuis le matin, et pourtant je ne parviens toujours pas à envisager de manger quoi que ce soit tant la nausée prend le dessus. L’estomac gronde plus fort. Et ne s’arrête pas. Je tends l’oreille : non, c’est le bruit d’un moteur ! Une portière claque. Quelqu’un interpelle Thomas, et mon sang se glace. Je me rue hors de ma chambre, encore à moitié en pyjama, m’engouffre dans les escaliers au pas de charge et arrive, essoufflée et attifée comme l’as de pique, sur le perron où patiente Ted devant sa Jaguar. Je ne peux m’empêcher de constater avec la plus grande joie que ses bas de caisse sont maculés d’une boue verte et épaisse. Thomas a gardé sa mine patibulaire et à cet instant j’en suis ravie. Mais ma joie est de courte durée quand je le vois, le visage encore plus fermé – comment est-ce possible ? – faire demi-tour et retourner dans ses buissons, me laissant seule avec le monstre. Ce dernier a imprimé sur son visage son fameux sourire ultra-brite, celui des grands jours, celui de la victoire.
— Hé bien, ma chérie, quel accueil ! Ton troll est très bien dressé, dis-moi !
— Qu’est-ce que tu fais là ?
Il prend un air sérieux et prononce d’une voix excessivement douce, lourde de menaces :
— Je viens te chercher.
Pourvu qu’il ne remarque pas à quel point je tremble…
— Il n’est, de toute évidence, pas dans mon intention de bouger d’ici.
Il s’approche à pas lents.
— Mais, ma dulcinée, nous avons des affaires à régler.
— Des affaires, hein !
Merde, ma voix est plus aigüe que d’habitude, il plisse les yeux.
— Oui, des affaires, Maëlle, comme celles que tu vas aller chercher dans cette masure et que tu vas gentiment déposer dans ma voiture avec tes petites fesses adorables.
— Non !
Je ne voulais pas crier. Abrutie ! J’inspire à fond et recule d’un pas.
— Non quoi ? Non, ce n’est pas une masure ? C’est vrai que ça a l’air pas mal. Ton frère a bien choisi sa compagne, mieux que moi semble-t-il. Elle a bon goût. Tu me fais visiter ?
Il est trop près de moi. J’ai reculé jusqu’à la porte. S’il entre, je peux dire adieu à mes maigres espoirs de lui échapper. Je me sens plus en sécurité dehors que dans la maison. Les murs sont épais. Je n’aurai aucune échappatoire. Et la vision de mon cauchemar de ce matin me hante. D’un autre côté, il est en excellente condition physique, et même si je cours vite, il m’aura vite rattrapée. Je dois le prendre de court.






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Chapitre 5 sur Booknode (à venir, mercredi prochain !)

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Mimori

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 4 [Romance érotique]

Message par Mimori »

Je suis passée lire tes écrits suite au message laissé sur mon profil, mais malheureusement je me suis arrêtée au chapitre 1 car ce n'est pas le genre de lecture qui me plaît. :oops: Je te rassure, toutefois, ta plume n'y est pour rien, car il est très facile de te lire et tu as un style très agréable. C'est vraiment juste le sujet... je ne suis pas très à l'aise avec pardon :lol:
zunic

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 4 [Romance érotique]

Message par zunic »

Coucou desolee pour le retard j'ai été prise par l université ainsi qu'une saleté de rhyno pharyngite doublée d'une bronchite aiguë et d'une otite. Je suis actuellement sur cortisone :lol:
Alors je n'ai pas grand chose à dire sauf qu'il se passe trop de chose dans un même chapitre. Il faut que tu développes plus, tu peux faire au moins trois chapitres fournis avec ça :)
ketxa

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 4 [Romance érotique]

Message par ketxa »

Salut !
Mimori, je t'ai répondu sur ton mur ;)
Zunic, merci pour ton conseil, il est forcément excellent parce que c'est ce que mes profs m'ont toujours rabaché : trop court, développez ! :roll: Je suis toujours très concise ! Je te dis pas en philo comment je m'arrachais les cheveux, j'avais l'impression qu'on me demandait d'être bavarde...

J'ai continué à publier En travaux sur Wattpad et je ne l'ai pas fait ici, je vais faire un rattrapage express, sans faire tous les liens, de toute façon il n'y a pas autant de commentaires que pour Louise ou pour *9* dont le sommaire ne sert pas à grand chose :lol:

Bonne lecture !
ketxa

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Re: En travaux *Maëlle* - Chapitre 4 [Romance érotique]

Message par ketxa »

Chapitre 5

— D’accord.
Il me dévisage, surpris. J’en profite pour m’esquiver et, en descendant les marches, je lance :
— Je te montre le jardin, c’est trop le chantier dedans.
J’ai gagné quelques minutes, pas plus. Bordel comment je vais m’en débarrasser ? J’ai laissé mon téléphone en haut, impossible d’appeler la police. Thomas n’a l’air d’aucun secours… Avec un peu de chance, il aura laissé traîner une hache ou un de ses lourds marteaux avec lesquels il rythme mes journées…N’importe quoi. Je suis vraiment une pauvre fille désespérée, doublé d’une idiote.
Nous nous dirigeons vers le puits, où je pense le trouver et, à défaut de lui piquer une arme par procuration, l’obliger à m’aider, mais évidemment il n’y est pas. Pendant que nous poursuivons, je raconte n’importe quoi à Ted en surveillant le moindre de ses gestes. Nous passons près de la treille aux framboisiers, des carrés potagers surélevés, du saule pleureur dont les branches touchent presque le sol. Je sais qu’il ne regarde pas grand chose de ce que je lui montre, qu’il ne me quitte pas des yeux, qu’il me guette. Il marche, mais en réalité il est tapi, prêt à bondir.
Nous contournons la maison. Sur l’un des côtés, des arbres fruitiers bourgeonnent tranquillement. Une balançoire est accrochée à la branche d’un énorme prunier. Je ne m’arrête pas de parler alors que je sais pertinemment qu’il s’en fout. Dans le grand jardin à l’arrière de la maison, un kiosque à musique en bois et en verre trône au milieu d’une pelouse impeccable. Ted ne peux pas s’empêcher de siffler entre ses dents :
— Alors ça, c’est pas mal…
Comme nous nous approchons, je remarque qu’on a installé une petite table avec une nappe blanche et dressé le couvert. Trois couverts, pour être exacte. C’est quoi ce bazar? Thomas. Mais qu’est-ce qui lui passe par la tête ? Je bredouille :
— Tu restes manger avec nous, bien sûr…
Ted éclate de rire :
— Nous ?, dit-il en approchant son visage hilare. Il n’y a qu’un seul « nous » ici, mon poussin. Et c’est toi et moi.
Je blêmis en sentant son haleine mentholée. Une rage mêlée de peur monte en moi. Je suis sur le point d’exploser quand Thomas sort par la porte-fenêtre de la maison, un saladier et un grand plat dans les mains, une panière de pain coincée sous le bras. Il arrive d’un pas pressé, qui pourrait sembler naturel si je ne connaissais son rythme habituel, tranquille, serein. Sur son visage, je ne lis rien. Se désintéressant totalement de moi, il esquisse un demi-sourire et s’adresse à Ted :
— Je n’ai pas beaucoup de temps, et pas grand-chose à partager ; mais si vous souhaitez déjeuner ici avant de reprendre la route…
Ted prend son air de grand patron, arrogant et sûr de lui, et flatte l’épaule de Thomas :
— Mais avec grand plaisir, mon ami !
Et, sans lui lâcher l’épaule ni l’aider à porter les plats, il se dirige vers le kiosque, s’installe dans un fauteuil en osier bleu et tapote la place à côté de lui, m’invitant à m’asseoir. Thomas reste stoïque, commence à servir la salade composée, propose de la charcuterie à Ted, et lève les yeux vers moi. J’ai terriblement froid, tout à coup, malgré le soleil qui tape à travers la verrière. Son impassibilité agresse mes nerfs. Je me demande s’il est un soutien ou un adversaire. Ou s’il a décidé de n’être aucun des deux…
— Tu en veux ?
J’ébranle mon corps laborieusement et m’installe à table en déplaçant subtilement ma chaise pour l’éloigner un peu de Ted.
— Oui, merci.
Je me sens tellement mal ! J’ai un gros doute, tout à coup, sur la pertinence du choix de venir me réfugier ici, et d’y rester en compagnie de celui qui a provoqué ma première déception amoureuse alors que mon frèren son ex-bourreau, en partait. Thomas garde son air morose, alors que Ted jubile. Il se lance dans une déclaration enflammée sur la beauté des lieux, me prenant à témoin :
— Vraiment, quel endroit charmant ! J’imagine déjà les séminaires que nous pourrons organiser avec nos clients dans ce cadre idyllique.
D’un geste ample, il saisit son portable, le déverrouille et le tripote quelques secondes :
— Regardez comme on capte bien ! C’est rare dans la campagne, vous savez ? J’actualise ma messagerie en un éclair ! Si je prends une photo – il place son téléphone devant mon visage - ça indique même l’endroit où on est !
Il se tourne vers Thomas :
— C’est dingue, cette géolocalisation, vous ne trouvez pas ? N’importe quel bidouilleur informatique sait désormais où je suis en ce moment précis ! Heureusement, personne n’est à ma recherche, puisque la seule personne qui aurait pu avoir le désir de me trouver est assise près de moi, n’est-ce pas princesse ?
Voilà donc comment il m’a retrouvée. Il faut vraiment que quelqu’un me montre comment on désactive ce truc, je suis sûre que c’est très simple en plus ! Je me retiens de m’autoflageller, ça lui ferait trop plaisir. Il est tordu. Complètement fou. Mais un fou qui a pris le pouvoir sur ce qui est en train de se passer. Il n’y a que lui qui parle. Thomas reste fuyant, il soupire, un tic agite de temps en temps sa joue, je vois bien qu’il ne rêve que de retourner à son bricolage. Ted continue de jaser :
— Pour un endroit comme celui-ci, le fait de capter si bien les ondes numériques peut être un bien – cela nous offre la possibilité de travailler – ou un mal – on perd l’occasion de se déconnecter, de créer une bulle pour sortir de ses repères et apprendre de nouvelles méthodes. Qu’en pensez-vous ?
Thomas grogne quelque chose comme « J’en ai rien à foutre », ou c’est mon imagination qui parle car j’aurais voulu répondre ça si je n’étais pas incapable d’articuler le moindre son. Ted le fixe plusieurs secondes, sa technique de déstabilisation préférée, puis le taquine :
— Non, bien sûr, vous ne savez pas, mais c’est normal, ce n’est pas vraiment votre domaine, voilà tout. Vous, vous êtes un spécialiste des buissons, un pro des boutures, un as des petits pois.
Il éclate de rire puis, brusquement, il tourne la tête vers moi avant d’ajouter :
— Vous n’avez pas besoin de connexion internet pour savoir comment maîtriser les mauvaises herbes ou tout simplement… les supprimer.
Je déglutis. Je sais ce que signifient ses mots. Il me menace. Il est devenu fou. Non, il était déjà fou avant, mais en passant d’une femme à une autre, il n’avait pas la possibilité d’aller au bout de sa perversité. En lui imposant une relation sur un long terme, je lui ai donné l’occasion de découvrir les joies de l’avilissement. Serait-il capable de dépasser la zone rouge ? Pourrait-il aller encore plus loin, au point de franchir la limite ultime? Un murmure s’échappe de mes lèvres pour tenter une diversion :
— Thomas n’est pas que jardinier, c’est lui qui retape toute la maison.
— Ah ? Voilà qui ne change pas grand-chose à l’argument, ma douce. Certains sont faits pour utiliser leurs mains, d’autres, leurs cerveaux.
Je tousse pour cacher ma stupeur. Je suis estomaquée. Il vient juste de le traiter d’idiot. Thomas regarde les mains de Ted sans afficher la moindre émotion, pendant que ce dernier se penche vers moi :
— Tu t’es enrouée ? Les nuits doivent être fraîches par ici. Avec le temps que nous avons aujourd’hui, on ne peut pas se rendre compte… C’est vrai que ces jardins sont tellement agréables, je comprends que ta productivité soit en chute libre dans un tel lieu !
Voilà l’électrochoc. Merci, connard. Il peut me rabaisser autant qu’il veut, mais je n’ai jamais supporté qu’il dénigre mon travail.
— Ma productivité n’est pas impactée par mon départ de l’agence. Tu sais très bien pourquoi je suis partie. Bon, ça suffit comme ça.
Je me lève sans avoir touché à mon assiette alors qu’ils ont tous les deux terminé la leur. D’un geste, je lui indique le petit chemin :
— Maintenant, je vais te demander de partir.
A ma stupéfaction, Ted affiche un grand sourire, essuie sa bouche avec sa serviette, puis déclare, les mains levées :
— Mais pas de problème, mon ange. Tu me raccompagnes ?
Je cherche à croiser le regard de Thomas mais il fixe un point situé entre Ted et moi : impossible de savoir à quoi il pense… Allez, je suis une grande fille, il ne va tout de même pas me trucider, là, sur la propriété de mon frère !
— Je débarrasserai plus tard, Thomas, laisse.
Et je me dirige de mon pas le plus décidé vers la Jaguar. Ted se lève nonchalamment et m’apostrophe en palpant les poches de son costume :
— On pourrait reprendre le même chemin ? Je crois que j’ai égaré le Montblanc que tu m’as offert ! Et tu sais à quel point tout ce que tu m’offres est précieux…
Ne pas se laisser déstabiliser. Inspirer. Expirer.
— Pas de problème.
Tout en lui serrant la main pour lui dire au revoir, Ted explique à Thomas :
— On ne risque pas de le rater, il est tellement gros qu’on dirait que j’ai quelque chose à compenser. Je sais qu’elle a fait exprès pour éloigner ses rivales. Voyez comme les femmes sont fourbes ! Merci pour la salade, mon ami.
Je n’en peux plus. Vite, qu’il s’en aille. Thomas s’éloigne rapidement, pressé sans doute de fausser compagnie à un couple aussi malsain. J’ai honte. Je refuse d’endosser la faute, mais c’est plus fort que moi. Un sentiment de dégoût m’étreint. Je l’ai bien cherché ! J’entends qu’on allume une radio dans la maison, le son est tellement fort que je comprends ce que raconte l’animateur. Ce n’est pas dans les habitudes de Thomas, mais il doit vraiment ressentir le besoin de ne pas se mêler de nos affaires. Je suis donc vraiment seule avec Ted. Pourvu qu’il ne change pas d’avis ! Je presse le pas, mais dois l’attendre pendant qu’il fait semblant de chercher son maudit stylo. Il manigance quelque chose, c’est sûr. Nous repassons exactement sur nos pas : la balançoire, le verger, le saule pleureur. C’est là que je comprends, trop tard, que je n’avais aucune chance. D’un bond, il m’attrape contre lui, plaque une main sur ma bouche et de l’autre me serre la gorge. Tout en m’entraînant sous les branches du saule, il murmure des insultes à mon oreille :
— Petite salope, tu croyais t’en tirer à bon compte, hein ? T’es qu’une raclure, une moins que rien. Sale pute. Tu me dois tout. Tout, tu m’entends ?
ketxa

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Re: En travaux - Chapitre 6

Message par ketxa »

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Chapitre 6





— Sans moi, t’es rien. T’es bonne qu’à écarter ton cul pour que j’y fourre ma queue ! Et encore, je trouve que t’y mets moins d’enthousiasme depuis quelques temps…
L’air me manque, je vacille. Il me lâche et profite que je suffoque pour descendre mon bas de jogging jusqu’à mes chevilles, puis m’assène une gifle puissante. Je titube et tombe à quatre pattes sur le sol, à moitié assommée. Il appuie sur mon dos pour le cambrer et écarte mes cuisses tout en faisant coulisser sur ma gorge sa cravate qu’il a dénouée en un éclair. A nouveau, il serre. Je porte mes mains à mon cou mais ne parviens pas à attraper ce bout de tissu qui m’étouffe. Des éclairs pétillent dans mon cerveau, j’y vois trouble, je ne parviens plus à réfléchir, je ne songe qu’à une seule chose : fuir. Mes ongles grattent la terre, je sens que je faiblis, j’ai terriblement mal à la joue, là où il a cogné, et l’espace d’un instant, je ressens la tentation de céder, de me laisser emporter là où il veut me conduire, de l’autre côté de la limite. Je sens qu’il place sa queue contre mon sexe et, sans fioritures, il me pénètre violemment, une fois, deux fois, et j’entends ses insultes et ses ricanements comme s’ils arrivaient de très loin, trois fois, en ironique répétition de la brutalité de mon père, celle que j’ai cru fuir en faisant des études, quatre fois, en devenant indépendante, en envisageant de soumettre le bourreau des cœurs et des culs de l’agence. Soudain, je sens que je ne pèse plus si lourd. Ted n’est plus contre mon dos. Je bascule sur le côté et me recroqueville autant que je peux, comme si je pouvais disparaître sous terre en me faisant la plus petite possible, et je pleure sans pouvoir m’arrêter. Même si la cravate n’entrave plus ma gorge, j’ai du mal à respirer. Mon sang cogne dans mes tempes. J’entends des bruits de lutte, des cris, des coups, des menaces, une voiture qui démarre en trombe, puis plus rien. Lentement, je reprends mes esprit, suffisamment pour remonter mon pantalon, pansement dérisoire à défaut d’être un rempart. Il faudrait que je me relève. Mais je n’arrive pas à bouger sans me remettre à pleurer comme une hystérique. Je ne sais pas combien de temps s’écoule avant que je ne sente des bras puissants me soulever et m’emporter loin du saule. Je cache mon visage derrière mes mains et me colle contre le torse de Thomas. Je voudrais le remercier, mais j’ai peur des sons étranges qui pourraient sortir de ma bouche. Je me sens sale, plus encore que la dernière fois. Je le hais. Je hais Ted, son narcissisme, sa perversion destructrice. Je me hais moi-même pour avoir participé à ses jeux, pour les avoir désirés. Dans ma poitrine, mon cœur bat follement, comme celui de Thomas que j’entends au travers de son t-shirt. Comme si je ne pesais rien, il m’emmène loin du saule, entre dans la maison, monte mon corps ravagé à l’étage, jusque dans ma chambre. Comme dans mon rêve, il me dépose sur mon lit et reste là, debout, attendant que je sorte de ma prostration. Je voudrais le remercier de m’avoir sauvée et je voudrais qu’il reste là, près de moi. Sa présence me rassure. Mais j’ai tellement honte aussi, une envie terrible de me laver me saisit, comme lorsque je suis arrivée ici pour fuir Ted. Thomas semble deviner mes pensées. Il s’assoit sur le rebord du lit, pose sa main sur la mienne, doucement, et annonce calmement :
— Je t’emmène à la gendarmerie.
Je tressaille, affolée. Non. Non, non, non ! Les yeux grands ouverts, je secoue la tête pour marquer ma désaprobation, puis éclate à nouveau en sanglots. Je sais qu’il a raison, que c’est la bonne conduite à tenir. Je dois porter plainte, de suite. C’est au dessus de mes forces ! Je suis incapable de bouger, de parler, j’ai juste envie d’oublier !
— Maëlle, je sais que c’est ta vie, que ça ne me regarde pas. Mais il va recommencer. Avec toi, avec d’autres.
Je suis assaillie de pensées contradictoires pendant quelques minutes, où il attend patiemment que je me calme, sans lâcher ma main. Sa chaleur me réconforte. J’ai envie qu’il me serre à nouveau contre lui, comme tout à l’heure, quand il me portait dans ses bras. Mon corps entier est douloureux, je voudrais prendre un bain pendant trois jours. Qu’on me laisse tranquille. Je croasse :
— D’accord. Laisse-moi me changer.
Il presse légèrement ma main, se lève et se dirige vers la porte. Hésite un instant.
— Pas de douche, hein ?
Non, malheureusement, pas de douche.
Une fois qu’il est sorti, je m’extirpe difficilement de mon lit, percluse de douleurs. Dans le miroir, je constate que ma joue est d’un joli bleu foncé et mon visage égratigné d’avoir frotté par terre. Mes mains sont dans un état pitoyable, sans parler de mes genoux. Mais ce n’est rien comparé à la douleur dans mon entrejambe. Je rêve d’une bassine d’eau fraîche… J’attache mes cheveux, enfile des vêtements propres, fourre mes habits souillés dans un petit sac, et titube vers le couloir. Thomas m’attend dehors, près du fourgon. Je n’ose pas le regarder en face tellement j’ai honte. Il se montre prévenant, sans trop en faire non plus. Je ne sais plus quoi penser de lui, sa conduite ce matin était si étrange ! Et pourquoi donc n’a-t-il pas mis Ted dehors dès qu’il a senti que c’était un connard ? Je ressasse mes pensées pendant tout le trajet et en attendant d’être reçue par un gendarme. Peut-être que si je le lui avais demandé, il aurait fait partir Ted. Il a sans doute agi du mieux qu’il pouvait. Et puis il est venu avant que tout ça ne dégénère encore plus.
— Madame, si vous voulez bien me suivre ?
C’est une femme qui me reçoit. Elle prend le temps de m’écouter, patiente quand j’ai besoin d’étouffer un sanglot, essaie de remettre dans l’ordre mes mots sur son procès verbal, puis elle me le relit. J’écoute, glacée, le récit de mon viol, comme s’il s’agissait de celui d’une autre personne. Thomas avait raison : Ted peut recommencer. Ce pourrait être une autre, à ma place.
J’ai droit ensuite à la visite médicale, avec auscultation, prélèvements, photographies. Je n’en reviens toujours pas d’être là. Ce n’est pas ma place. Je ne suis pas un personnage de faits divers. Pas moi.
Au moment où je sors de la gendarmerie, trois heures plus tard, je me rends compte que je n’ai pas le numéro de téléphone de Thomas. Comment est-ce que je vais le prévenir ? Satanée campagne sans taxi ! Je décide que je suis capable de rentrer à pied quand j’aperçois le fourgon, vitres ouvertes, conducteur profondément endormi. Le soleil fait briller ses cheveux et sa peau dorée. Tout son visage est relâché. Je profite de son sommeil pour le regarder. Les années se sont écoulées, mais il n’a pas changé. Ses pommettes hautes, sa mâchoire carrée, son nez harmonieux, même la forme de ses sourcils me plaît. Je résiste à la tentation de caresser sa joue et toussote pour le réveiller. Il ouvre les yeux et me voit plantée devant sa fenêtre. Son regard ne ment pas, mais ne dure, comme toujours, que le temps d’un battement de paupières. Il détourne les yeux et démarre le fourgon, une légère rougeur sur le front. Je sens bien qu’il ne me juge pas, au contraire, on dirait que ses sentiments pour moi n’ont pas changé depuis mes six ans. Pourtant son comportement devient parfois étrange, comme ce matin. Est-ce moi qui interprète mal les signaux qu’il m’envoie ? Est-ce que j’imagine la lueur dans ses yeux ? Pourquoi m’a-t-il rejetée quand nous étions enfants ? Pourquoi était-il si distant ce matin, et pourtant présent au moment où j’en ai eu besoin ?
Je me doute bien que les réponses se trouvent bien cachées au fond de moi, là où j’ai caché ma sincérité. A force d’empiler les armures pour me protéger des hommes, je n’arrive plus à voir la bonté, la loyauté, la générosité chez eux. J’ai pris toutes ces précautions en pure perte, en plus, me jetant dans la gueule du pire loup imaginable !
Nous arrivons à la maison. C’est le moment de nous séparer, il doit rattraper son retard et moi… J’inspire un grand coup pour me donner le courage de le remercier, me retenant de lui demander de rester pas trop loin de moi. Il diffuse une telle énergie que je crains de m’effondrer dès qu’il aura le dos tourné ! Sur le perron, avant de retourner dans le jardin, il se gratte le bras, gêné :
— Si tu as besoin, appelle-moi.
— Je ne sais pas comment te remercier. Tu as vraiment…
— Laisse tomber, c’est normal. N’importe qui aurait fait pareil.
Nous voilà bien ! Nous sommes tous les deux écarlates, baignant dans un malaise palpable. Non, n’importe qui n’aurait pas fait pareil. N’importe qui m’aurait laissée patauger dans ma crasse. Mais je ne peux pas lui demander de continuer à jouer au chevalier servant. Je n’oublie pas ma décision de ne pas me laisser embarquer dans des sentiments pour lui. Il m’a sauvée aujourd’hui, mais il est capable de me détruire demain. Si je cède à son charme, je serai à nouveau fragile. Mais c’est bon, j’ai donné.
Je pars me nettoyer longuement. C’est la fin de la journée et je n’ai toujours pas mangé. Je contemple, écœurée, les biscottes beurrées de ce matin qui trônent toujours dans leur assiette. J’avale quelques gorgées d’eau et plonge dans mon lit et dans un sommeil aussi profond que mon angoisse. Les cauchemars ne tardent pas à être de la partie. Je m’agite, me réveille en sursaut plusieurs fois, hurlant après Ted qui plante ses clous dans mes mains et dans mon ventre pour que sois bien solidement attachée à son mur, qui enfourne de la terre dans ma bouche pour que je me taise, qui me fonce dessus avec la Jaguar et repasse sur moi jusqu’à ce que je sois en bouillie. J’entends son rire sarcastique résonner dans ma tête. Je suis tellement épuisée que je n’arrive pas à ouvrir les yeux. Il faudrait que j’allume la lumière, mais j’en suis incapable. Alors je m’enfouis, tremblante, sous les couvertures et enchaîne les mauvais rêves. Je suis tirée du troisième cauchemar, celui de la bouillie, par le bruit d’une porte qui s’ouvre à la volée et des mains qui secouent mes épaules.
— Réveille-toi… Tout va bien…
Je me jette en pleurant dans les bras de Thomas. C’est la nuit. La nuit, on peut abaisser les barrières. Je ne réfléchis plus. J’arrête de tout compliquer. J’ai besoin de son réconfort, alors j’accepte tout ce qu’il me donne. Sa chaleur, ses caresses dans mes cheveux, sa respiration calme. On ne m’a jamais tenue comme ça. Jamais je n’ai eu droit à de telles preuves d’affection. Sa tendresse a raison de moi. Je m’écroule, apaisée, jusqu’au petit matin. Quand j’ouvre les yeux, Thomas est là, mal installé dans un fauteuil, frissonnant de froid, mais assoupi. Je me lève en silence. Le jour filtre à travers les persiennes, éclairant des rayures sur son visage. J’aime le regarder dormir, c’est le seul moment où je m’autorise à l’observer sans camoufler ce que je ressens. Il est beau. Il m’a toujours plu. Je l’ai aimé, je l’ai détesté, j’ai grandi, et je ne sais plus où j’en suis. J’attrape de quoi m’habiller et, avant d’aller me doucher, je pose une couverture sur lui. Il remue à peine mais esquisse un sourire qui me coûte un gros effort sur moi-même pour ne pas l’embrasser.
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Chapitre 7 sur Booknode (à venir, mercredi prochain !)

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