A Long Way Down

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Kiran-Singer

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A Long Way Down

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A LONG WAY DOWN



A l'intérieur, la rage brûle dans mes veines, menaçant d'exploser. Mon cœur semble pris dans un étau, qui serre de plus en plus fort. L'amertume serre ma gorge, lie ma langue, coud mes lèvres. Je n'arrive plus à m'exprimer. La douleur est insoutenable.
A l'extérieur, je suis juste une étudiante marchant dans les rues de Manhattan. Ma crinière rousse enveloppe mon visage sans expression. Le ciel d'un bleu limpide me nargue presque. Normale. Je parais normale. Ce n'est qu'un masque pour cacher mes blessures.
Voilà l'image d'une fille trahie. Anéantie. Qui ne demande qu'une seule chose. Se venger.
Je m'appelle Kira, je suis étudiante en droit. Et ma vie paradisiaque s'est transformée en enfer. Et cette journée qui se présentait sous de mauvais augures s'est encore empirée. Et pas seulement pour moi. Aujourd'hui, en ce 11 septembre 2001, je suis définitivement descendue aux enfers.

Comme tous les matins, mes camarades et professeurs me saluèrent poliment: moi l'élève la plus brillante, la plus prometteuse de l'université. J'inspirais à la fois crainte et respect. Pourtant, je savais que ces sourires et bonnes paroles n'étaient que temporaires. Tout allait bientôt changer.

Mon corps reposait sur une chaise dans l'amphithéâtre gigantesque de l'école de droit de Columbia, quand un grondement affreux résonna. Un bruit à réveiller les morts. Assez puissant pour éloigner les sombres pensées de mon esprit. Puis les cris des étudiants se mélangèrent aux raclements des chaises et aux pas précipités se dirigeant vers la sortie. La peur m'envahit soudainement. Une sorte de pressentiment funeste. A mon tour, je sortis dans la rue pour découvrir un spectacle d'horreur... et de terreur. La ville à cet instant était comme une transposition de mon esprit. A feu et à sang. Mon cœur rata un battement. Toutes les têtes étaient tournées vers les « Twin Towers », qui avant, se tenaient fièrement en signe de la puissance économique des États-Unis. L'une d'elle était en train de s'enflammer. L'autre fut alors violemment percutée par un avion de ligne, créant une explosion monstrueuse : la grande puissance s'effondrait comme un château de cartes. Les tours, terrassées, amènent dans leur défaite des milliers de gens... mes parents. Cette dure réalité me saute au visage avec la force d'un coup de poing. Je perds alors toute constitution. Le masque tombe, révélant une fille meurtrie, mais surtout incroyablement triste. Les larmes coulent, brûlantes sur mes joues. Le désespoir m'envahit. S'immisce dans l'esprit de toutes les personnes à mes côtés : celles dont les proches se trouvaient au World Trade Center, celles qui se demandaient ce qui venait d'arriver à leur invincible oncle Sam. Le monde semblait paralysé. De toutes mes forces je souhaitais que cela ne soit qu'un mauvais rêve, une vaste blague : je me pinçai alors. Je n'arrivais pas à croire que j'avais peut-être tout perdu à ce moment là. J'essayais de rassembler mes pensées de manière logique. Mes parents travaillaient aux tours. Ils devaient probablement y être. La conclusion logique de tout cela devrait être : ils ont quitté ce monde. Alors je me mets à hurler, à pleurer, à trembler : je tombe, m'effondre. La vie a décidé que je n'étais pas assez punie : elle a repris sa pelle pour m'enterrer encore plus profond.

« Kira ? ».
Un mot, une voix. Il n'en faut pas plus pour que je la reconnaisse. Daisy. Cette traîtresse. Une diablesse déguisée en ange. Elle est la raison de ma rage. Elle qui m'a poignardée dans le dos. Elle qui m'a volé ma thèse de droit. Mon travail dont j'étais tellement fière. Elle qui menace ma réputation. Elle était ma meilleure amie, mais elle a choisi la gloire à mes dépends. Elle va présenter mon travail, se l'approprier. Et le pire, c'est sûrement que tout le monde va la croire. Qui écoutera la pauvre fille enragée, criant au scandale ? Tout le monde, me déclarera jalouse de ma meilleure amie.
« Elle n'a pas supporté la deuxième place », dira-t-on.
Daisy a bien calculé son coup : éliminer sa principale adversaire, en présentant un sujet qui la couvrira d'éloges.
Je refoule mes larmes, et retiens mon envie de cracher sur ses escarpins rouges vernis. Je me relève pour lui faire face. Je ne peux pas supporter l'air triste qu'elle arbore. Face à ma rage, c'est presque comme un signe de défi.
«Je suis désolé..., commence-t- elle.
Pourquoi donc ? Avant, tu ne semblais pas l'être, réplique-je.
Tes parents... Moi aussi, ils y sont, tu le sais. »
A ce moment, j'aurais défiguré son beau visage. Qu'attendait-elle de ma part ? De la pitié ? De la sympathie ? Non, elle ne méritait même pas un regard. Je lui tournai alors le dos, et me mis à marcher puis à courir.

La fumée noire tranchait avec le bleu du ciel. Les cris de tristesse, de détresse montaient de tous les quartiers, vers le ciel entaché par une étouffante fumée noire. Déjà, les habitants se rassemblaient : tous étaient stupéfiés, comme si un mauvais sort avait été jeté. Mais qui est le responsable de leur consternation ? J'arrêtais alors un taxi afin d'aller sur Madison Avenue, dans l'Upper East Side : afin de rentrer à la maison. Le jeune homme qui conduisait tentait d'engager la conversation, en me parlant de ce qui venait d'arriver. Il me parlait de « fin du monde ». Il était même allé sur Barclay Street, où les gens étaient couverts de cendres et de poussières, voire même ensanglantés. J'entendais ses mots mais, je n'arrivais pas à leur trouver un sens. Quand j'arrivais au foyer familial, je le trouvais vide : cela semblait prévisible, mais le silence émanant de la maison, glaça mon âme. Où sont mes parents ? Avec toute ma force, je tentais d'échapper à la pensée qui tentait de s'immiscer dans mon esprit : ils sont peut-être morts. Tous les deux.

J'allumai le poste de télévision : toutes les chaînes présentaient en boucle les images des tours s'enflammant. Des avions de chasse survolaient la ville endeuillée. Des photos de gens se défenestrant. On parlait d'attentat : un mot si incompréhensible pour nous qui nous croyons intouchables, indestructibles. Derrière la peur, se dressait déjà le sentiment de revanche. Le coupable allait être trouvé, traqué puis achevé.

Quand soudain, la porte s'ouvrit avec fracas : un homme d'une quarantaine d'année, le teint cireux, couvert de poussière se tenait sur le seuil. Je me précipitai vers lui, reconnaissant mon père, et sautai dans ses bras. Notre étreinte silencieuse dura une dizaine de minutes. Toutes nos pensées semblaient s'exprimer sans même qu'un son ne sorte de nos bouches. Un seul mot fit flancher mon père :
« Maman ?
Il me répondit :
Il va falloir être forte... »
Les larmes coulèrent alors à nouveau de mes yeux, ma respiration devint saccadée, un sentiment d'injustice enveloppa mes pensées : pourquoi moi ? Qu'avais-je dont fait à Dieu pour mériter tout ce qui m'arrivait ? La trahison de ma meilleure amie, mon travail volé, mon honneur sur la corde raide, ma mère partie, mon pays à feu et à sang.
Ma voix éraillée réussit à exprimer ces paroles :
« Mais es-tu sûr que... ? Enfin, et toi …. toi aussi tu y travailles ! »
Mon père déclara:
J'étais en formation loin des tours. Mais ta mère y était. J'en suis persuadé. »
Je n'arrive pas à comprendre ce que mon père vient de m'annoncer. Depuis ce matin, je me trouve dans un cauchemar d'où je n'arrive pas à m'échapper. Je n'arrive pas à me réveiller. La probable mort de ma mère est un fait auquel je ne peux pas croire. C'est trop soudain, inattendu pour que je puisse l'imaginer. Le fait que parfois la mort n'annonce pas son arrivée est injuste.

Nos regards se tournent alors vers la télévision, où des centaines de fantômes de chair et de sang sont tétanisés, choqués alors qu'ils contemplent les tours qui commencent à s'effondrer. Des femmes crient le nom de leurs enfants, d'autres restent immobiles telles des statues de cire. Un autre flash info surgit alors : un autre avion s'est crashé sur la façade ouest du pentagone. Je ferme les yeux afin d'échapper à la réalité. D'abord, la puissance économique, puis la défense des États-Unis. Ces salops ont bien calculé leurs attaques.
Mon père ne semble pas davantage comprendre ce qu'il est en train de se passer que moi. Encore hier, un tel cataclysme était une idée extravagante, réservée aux vieux fous séniles. Pourtant aujourd'hui, c'est bien la réalité.

Soudain, la sonnette retentit. Mon père se détacha de moi pour aller ouvrir. Je vis alors s'avancer dans la pièce, une personne que je pensais connaître : Daisy. Je ne parvins même plus à trouver la force d'afficher une expression haineuse. Elle s'arrêta à une distance telle que je ne pouvais pas la frapper. Elle semblait gênée, et dans ses yeux, la lueur féroce à été remplacée par la peur. Elle avait l'air perdu, désemparée.
Je brisai le silence :
« Cet air abattu ne te va pas au teint, ma chère Daisy, dis-je en crachant ces derniers mots avec tout mon venin.
Un sourire furtif vint éclairer ses traits :
La méchanceté ne te va pas non plus.
Que viens-tu faire chez moi ?
Elle amorça un geste vers son sac « Coco Chanel » rouge, et en retira un cédérom.
Je viens te rendre cela.
Je sais exactement ce que contient ce CD-rom : des heures de travail, de recherche, ma fierté... viendrait-elle me rendre ce qu'elle m'a volé ? Malgré tout, une note d'espoir s'insinua en moi. Je le pris et le gardai derrière mon dos : je ne voudrais pas la tenter de me le dérober une seconde fois.
Pourtant, je sais que les actes de Daisy sont toujours motivés par un désir de gloire ; sa gentillesse apparente n'est qu'un poison.
Pourquoi ?, demandai-je, pourquoi venir me le rendre alors que tu aurais pu à la fois recevoir tous les honneurs de ce travail et aussi me discréditer aux yeux de tout le monde ?
Elle réfléchit quelques instants avant de me répondre :
J'imagine que je ne suis pas assez mauvaise pour trahir ma meilleure amie
Je faillis éclater de rire.
Des propos assez intéressants, pour une personne qui se déclarait « capable d'assassiner sa propre famille pour réussir ».
J'imagine qu'on change tous un jour …
Je réalisais alors que son élan de générosité était bien motivé par quelque chose. Elle espérait que je lui pardonne, que je l'aide. Elle a perdu ses parents dans l'attentat. Et maintenant, elle est seule. Contrairement à ce qu'elle avait toujours affirmé, Daisy ne pouvait pas avancer toute seule : pour écraser ses adversaires, elle avait besoin d'encouragements, de personnes qui l'aiment et qui la soutiennent.
Non. Toi, Daisy, tu n'as pas encore changé. Je sais pourquoi tu es venue me rendre ce cédérom. Tu espères ma pitié, récupérer ta bonne poire de meilleure amie que tu étais prête à détruire. Mais tu ne le sais peut-être pas, ça ne marche pas comme cela. Tu ne peux pas revenir comme une fleur après ce que tu m'as fait.
Vas-t-en. S'il te plaît.
Elle ne parut pas bien comprendre ce que je venais de lui dire.
Je te jure que j'ai changé …
Elle même n'était pas convaincu par ses propos.
Laisse nous nous recueillir, s'il te plaît. Je ne le dirais pas une autre fois. »
Elle serra les dents, et se détourna de moi. Elle traversa la pièce telle une furie, et claqua la porte derrière elle assez fort pour faire trembler les fondements de la maison.

Je me sens alors libérée d'un poids énorme. Cela pourra paraître égoïste, car malgré les événements se déroulant, malgré le probable décès de ma mère, le fait de retrouver mon travail me soulage. Tout s'entrechoque dans ma tête : ma tristesse, mon désespoir, ma fureur passée, ma consolation d'avoir retrouvée ma thèse... J'arrive enfin à réaliser que le cauchemar dans lequel je me croyais, est bien la réalité. Et j'accepte alors de me réveiller.



Merci d'avoir lu ma nouvelle, que j'ai écrite avec pour thème "Un étudiant à New York".
J'espère qu'elle vous aura plus, et si vous avez des questions, n'hésitez surtout pas à me les poser. :D


Dernière remontée par Kiran-Singer le lun. 14 août, 2017 12:47 pm.
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